Quand François Bayrou était ministre de l’Éducation

Dessin de Kak, repris le 29 décembre depuis l’article de Matthieu Deprieck, « François Bayrou à Matignon : l’Himalaya, étape 1 », lopinion.fr le 15 (extrait)

Lors de la passation de pouvoirs avec Michel Barnier, François Bayrou a déclaré : « Je n’ignore rien de l’Himalaya qui se dresse devant nous »1Romain David, « Passation de pouvoir : “Je n’ignore rien de l’Himalaya qui se dresse devant nous”, affirme François Bayrou », publicsenat.fr 13 déc. 2024 ; l’avenir étant plus qu’incertain, ce bref billet consistera en quelques descentes en rappel à propos du nouveau premier ministre.

« Nommé par Édouard Balladur Ministre de l’Éducation nationale à l’âge de 42 ans, François Bayrou est resté rue de Grenelle de 1993 à 1997 »2Djéhanne Gani, « Qu’attendre de François Bayrou, professeur de Lettres et ancien ministre de l’Éducation nationale pour l’École ? », cafepedagogique.net 14 déc. 2024 ; v. aussi le billet publié sur le même site le même jour, « Le passif du passé à l’Éducation nationale de François Bayrou » : l’historien Claude Lelièvre précise qu’il « a été “ministre de l’Éducation nationale” du 30 mars 1993 au 11 mai 1995 (François Fillon étant dans le même temps “ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche”) », puis « “ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche” du 18 mai 1995 au 2 juin 1997 ». : c’est beaucoup plus que les trois mois et huit jours de son prédécesseur à Matignon3Le 5 décembre, trois mois après sa nomination, « Michel Barnier [démissionnait et] deux de ses possibles successeurs participaient au même colloque à l’Institut catholique de Paris », consacré à « la place de Marc Sangnier dans leur engagement politique » (Valdemar de Vaux, « François Bayrou Premier ministre : un démocrate-chrétien opposé à la loi sur la fin de vie », aleteia.org 15 déc. 2024 ; Nicolas Berrod, « “Je ne suis pas un futur, mais un ancien Premier ministre” : quand Cazeneuve et Bayrou plaisantent en colloque », leparisien.fr le 5).. Désigné comme lui à 73 ans, son expérience politique apparaît de ce fait davantage significative pour qui s’intéresse au droit des laïcités scolaires4S’agissant de Michel Barnier, v. mon billet du 29 septembre dernier, spécialement mes (appels de) notes 10 à 12, renvoyant à l’unique mention de l’intéressé dans ma thèse (2017)..

Capture d’écran du site shs.cairn.info (l’auteur précise en note emprunter en sous-titre « la formule à l’un des slogans affichés lors de la manifestation laïque du dimanche 16 janvier 1994 entre la place de l’Opéra et la place de la Nation »)

En 2017, le mot-clé « Bayrou » revenait près de trente fois dans ma thèse, à propos de deux lois votées un 15 mars, en 1850 et 2004 : « En 1994, le juge constitutionnel s’oppose à la loi dite de Révision de la loi Falloux ; dix ans plus tard il accompagne celle du principe de laïcité en droit français »5Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 1093 et s., spéc. 1097, dans le cadre de développements intitulés « La décision du 13 janvier 1994, ou quand un silence remarqué (sur la laïcité) peut en cacher un autre (sur le droit à l’éducation) » ; pour la décision du 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution pour l’Europe, n° 2004-505 DC, cons. 16 et 18, v. ma page 439 (concernant le 15ème, v. ma note de bas de page 803, n° 1068)..

La première décision est venue contrecarrer la volonté du ministre d’accroître « l’aide aux investissements des établissements d’enseignement privés par les collectivités territoriales »6Pour citer la fin du titre de la décision précitée n° 93-329 DC, ou de la loi n° 94-51 du 21 janvier (JORF n° 18 du 22)., en essayant de revenir sur les limites prévues à l’article 69 de la loi du 15 mars 18507Sur ce « destin étrange d’une vieille loi » (André Legrand, L’école dans son droit, Michel Houdiard éd., 2006, p. 57), v. ma thèse préc. (2017), pp. 75 à 79, spéc. 77 (et, pour le célèbre discours de Victor Hugo du 15 janvier 1850, la dernière illustration de mon billet du 29 nov. 2020)..

Traduisant ses convictions catholiques, cette tentative précédait de quelques mois sa présentation (ostensible) comme un défenseur de « la » laïcité à propos du foulard (musulman)8Alors qu’il avait pris une première circulaire, le 26 octobre 1993, qui respectait l’esprit de la jurisprudence Kherouaa et autres (arrêts du 2 novembre 1992), François Bayrou en adopta une seconde, le 20 septembre 1994, qui cherchait à la remettre en cause : v. ma thèse préc. (2017), pp. 419 à 426 et 472 à 474 (v. encore pp. 604-605), mon billet du 30 avril 2020 (note 3, premier point, en faisant allusion à François Bayrou) et Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, pp. 10 et 180 à 183 (v. encore pp. 230-231), en concluant alors que « la jurisprudence du Conseil d’État ne remet pas en cause le paradigme des droits de l’élève. En 1995, il juge même que la liberté religieuse justifie qu’une autorisation d’absence pour motifs religieux soit accordée aux élèves » (Koen, n° 157653 : v. mes pp. 1207 à 1209 et TA Cergy-Pontoise Ord., 11 juin 2024, M. A. B., n° 2408298 ; LIJMEN nov. 2024, n° 232, cons. 5, refusant un aménagement à un étudiant contestant un rattrapage organisé « le jour de la fête traditionnelle de la religion juive de Chavouot ». Cette ordonnance constitue une nouvelle illustration de ce que l’autrice écrit page 185, après avoir rappelé les propositions de la Commission Stasi dont celle objet de mon précédent billet relatif aux jours fériés ; les rappeler « permet de mesurer, par effet de contraste, la manière dont le débat relatif à la laïcité n’a cessé, depuis, de se crisper : nombre d’entre elles feraient assurément aujourd’hui figure de provocation multiculturaliste »…)., en anticipant en réalité la « nouvelle laïcité » de la loi du 15 mars 20049Je reprends ici ma note de bas de page 572, n° 3686 ; contestant l’idée selon laquelle « la “nouvelle laïcité” issue de la loi de 2004, restreint le droit à l’éducation », Frédérique De La Morena, « La laïcité, vecteur ou obstacle au droit d’accès à l’éducation ? », in Pascale Bertoni, Olivia Bui-Xuan et Raphaël Matta-Duvignau (dir.), Le droit à l’éducation, mare & martin, 2024, p. 187, spéc. p. 192 (j’espère poursuivre le dialogue avec l’autrice en revenant prochainement sur cet article qui me paraît construit sur deux oppositions discutables : « travaux socio-historiques » vs « analyse juridique » et, pour citer cette fois les pp. 195-196, « un modèle scolaire issu du droit international » dont il faudrait se tenir éloigné pour préserver « le contenu du droit à l’éducation » qui résulterait de la « laïcité à la française » ; en complément des citations qui y sont faites de ma thèse, je renvoie pour l’heure à mes pp. 1211-1212)..

Capture d’écran de la vidéo intitulée « École Aimé Césaire : visite guidée ! », dailymotion.com 24 août 2016 ; v. Nathalie Heraud, « Manuel Valls inaugure l’école Aimé Césaire, à Evry, en banlieue parisienne », la1ere.francetvinfo.fr le 1er sept. (suite à sa nomination comme ministre des Outre-mer, Florian Mattern, « Vu d’Espagne. Manuel Valls au gouvernement de François Bayrou, un “coup de dés impossible” », courrierinternational.com 27 déc. 2024)

Ajouts le 29 décembre 2024, pour signaler une « note de service publiée au Bulletin officiel de l’éducation nationale du 27 juillet [1995] »10Xavier Ternisien, « Quand Bayrou retirait Césaire des programmes de français », lemonde.fr 10 mai 2008 ; Julie Postollec, « Nomination de François Bayrou à Matignon : quels sont les liens du nouveau Premier ministre avec les Outre-mer ? », la1ere.francetvinfo.fr 13 déc. 2024 ; je remercie Amélie Imbert pour m’avoir appris l’existence de cette note, trois jours après la publication du présent billet. ; elle concernait Aimé Césaire11Lequel ne lui en aurait pas tenu rigueur, selon Max Orville (« (…) La vérité sur Aimé Césaire et François Bayrou », modem-martinique.over-blog.com 26 févr. 2011) ; s’agissant des propres explications de l’ancien ministre, lors « de l’émission “Le Franc-Parler” (France Inter-i-Télé-“Le Monde”) » le 12 mai 2008 (soit moins d’un mois après la mort du poète martiniquais, le 17 avril), v. Nadia Yala Kisukidi (entretien avec, par Louise Hermant), « Dix ans après sa mort, que reste-t-il de l’héritage poétique et politique d’Aimé Césaire ? », lesinrocks.com 20 avr. 2018 (mis à jour le 16 mars 2021). et peut fournir un éclairage de ses « premiers pas » de Premier ministre à propos de Mayotte12Ludovic Vigogne, « Bayrou, le défi mahorais », latribune.fr 29 déc. 2024 (extrait) ; LH avec EA et MB, « Le Premier ministre François Bayrou se rendra directement à Mayotte lundi [30] », la1ere.francetvinfo.fr le 28 ; quelques mises en perspective : Marine Lamare, recension de Nicolas Roinsard, Une situation postcoloniale. Mayotte ou le gouvernement des marges (CNRS Éditions, 2022), RIEJ 2024, n° 1, vol. 92 (extrait) ; Serge Massau, « “Mayotte, Département colonie” l’ouvrage de Rémi Carayol qui déconstruit les “mythes” », la1ere.francetvinfo.fr le 18 oct. ; v. ses entretiens avec Florence Morice (« L’opinion a été fabriquée sur ce territoire avec des discours xénophobes », le 9 nov.) et Maëva Amir (« Mayotte, le cyclone Chido et la réalité d’un “département colonie” », revolutionpermanente.fr le 19 déc.) ; Victor Avendaño, « Le cyclone Chido réveille les tensions entre la France et les Comores », lemonde.fr le 20 ; Riwadi Saïdi, « À Mayotte, le cyclone Chido ne reconnaît pas les frontières et n’a pas besoin de visa », survie.org le 20 ; Nassurdine Haidari et Chahidati Soilihi, « Emmanuel Macron, petit maître colon à Mayotte », liberation.fr le 20 (extrait) ; Claire Tervé, « Mayotte : Bruno Retailleau critiqué pour avoir tenu son discours pendant la minute de silence », huffingtonpost.fr le 23 ; v. enfin les tribunes signées Éric Bellais, Romain Criquet, Pierre William Johnson et Agnès Rossetti, « Mayotte est victime non seulement d’un cyclone, mais aussi de décennies de politiques inappropriées » (extrait), et Sophie Blanchy, « Un confetti d’Europe au carrefour des migrations » (extrait), Le Monde les 25-26, p. 26, laquelle termine sur cette phrase : « En balayant les bidonvilles, le cyclone a rappelé que les justices environnementale et sociale vont de pair ». Mardi 17 décembre, comme dans un lapsus sur la fragile appartenance de Mayotte à la France, François Bayrou a déclaré à l’Assemblée nationale : « il n’est pas d’usage que le premier ministre et le président de la République quittent en même temps le territoire national »… (cité par Mariama Darame et Nathalie Segaunes, « François Bayrou déjà sous le feu des critiques », Le Monde le 19, p. 11 ; au passage, quatre pages plus loin, Sylvie Lecherbonnier, « Des élèves sans affectation dans le public scolarisé dans le privé [(professionnel) sous contrat] » : « Une première convention a été signée avec l’enseignement catholique du Val d’Oise à la rentrée 2023 et une seconde a vu le jour dans l’Essonne à la rentrée 2024 » ; le directeur diocésain (, Gérald Omnès) met alors en avant sa « mission de service public », tandis que son homologue dans le Val d’Oise (Marc Naudi-Bonnemaison) salue un texte qui « contribue à la mixité sociale de [leurs] établissements ». « La gratuité est de mise [alors que leur] scolarité, pourtant payante (…), est prise en charge. Par qui ? Le montage est plus flou »)..

Notes

1 Romain David, « Passation de pouvoir : “Je n’ignore rien de l’Himalaya qui se dresse devant nous”, affirme François Bayrou », publicsenat.fr 13 déc. 2024
2 Djéhanne Gani, « Qu’attendre de François Bayrou, professeur de Lettres et ancien ministre de l’Éducation nationale pour l’École ? », cafepedagogique.net 14 déc. 2024 ; v. aussi le billet publié sur le même site le même jour, « Le passif du passé à l’Éducation nationale de François Bayrou » : l’historien Claude Lelièvre précise qu’il « a été “ministre de l’Éducation nationale” du 30 mars 1993 au 11 mai 1995 (François Fillon étant dans le même temps “ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche”) », puis « “ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche” du 18 mai 1995 au 2 juin 1997 ».
3 Le 5 décembre, trois mois après sa nomination, « Michel Barnier [démissionnait et] deux de ses possibles successeurs participaient au même colloque à l’Institut catholique de Paris », consacré à « la place de Marc Sangnier dans leur engagement politique » (Valdemar de Vaux, « François Bayrou Premier ministre : un démocrate-chrétien opposé à la loi sur la fin de vie », aleteia.org 15 déc. 2024 ; Nicolas Berrod, « “Je ne suis pas un futur, mais un ancien Premier ministre” : quand Cazeneuve et Bayrou plaisantent en colloque », leparisien.fr le 5).
4 S’agissant de Michel Barnier, v. mon billet du 29 septembre dernier, spécialement mes (appels de) notes 10 à 12, renvoyant à l’unique mention de l’intéressé dans ma thèse (2017).
5 Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 1093 et s., spéc. 1097, dans le cadre de développements intitulés « La décision du 13 janvier 1994, ou quand un silence remarqué (sur la laïcité) peut en cacher un autre (sur le droit à l’éducation) » ; pour la décision du 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution pour l’Europe, n° 2004-505 DC, cons. 16 et 18, v. ma page 439 (concernant le 15ème, v. ma note de bas de page 803, n° 1068).
6 Pour citer la fin du titre de la décision précitée n° 93-329 DC, ou de la loi n° 94-51 du 21 janvier (JORF n° 18 du 22).
7 Sur ce « destin étrange d’une vieille loi » (André Legrand, L’école dans son droit, Michel Houdiard éd., 2006, p. 57), v. ma thèse préc. (2017), pp. 75 à 79, spéc. 77 (et, pour le célèbre discours de Victor Hugo du 15 janvier 1850, la dernière illustration de mon billet du 29 nov. 2020).
8 Alors qu’il avait pris une première circulaire, le 26 octobre 1993, qui respectait l’esprit de la jurisprudence Kherouaa et autres (arrêts du 2 novembre 1992), François Bayrou en adopta une seconde, le 20 septembre 1994, qui cherchait à la remettre en cause : v. ma thèse préc. (2017), pp. 419 à 426 et 472 à 474 (v. encore pp. 604-605), mon billet du 30 avril 2020 (note 3, premier point, en faisant allusion à François Bayrou) et Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, pp. 10 et 180 à 183 (v. encore pp. 230-231), en concluant alors que « la jurisprudence du Conseil d’État ne remet pas en cause le paradigme des droits de l’élève. En 1995, il juge même que la liberté religieuse justifie qu’une autorisation d’absence pour motifs religieux soit accordée aux élèves » (Koen, n° 157653 : v. mes pp. 1207 à 1209 et TA Cergy-Pontoise Ord., 11 juin 2024, M. A. B., n° 2408298 ; LIJMEN nov. 2024, n° 232, cons. 5, refusant un aménagement à un étudiant contestant un rattrapage organisé « le jour de la fête traditionnelle de la religion juive de Chavouot ». Cette ordonnance constitue une nouvelle illustration de ce que l’autrice écrit page 185, après avoir rappelé les propositions de la Commission Stasi dont celle objet de mon précédent billet relatif aux jours fériés ; les rappeler « permet de mesurer, par effet de contraste, la manière dont le débat relatif à la laïcité n’a cessé, depuis, de se crisper : nombre d’entre elles feraient assurément aujourd’hui figure de provocation multiculturaliste »…).
9 Je reprends ici ma note de bas de page 572, n° 3686 ; contestant l’idée selon laquelle « la “nouvelle laïcité” issue de la loi de 2004, restreint le droit à l’éducation », Frédérique De La Morena, « La laïcité, vecteur ou obstacle au droit d’accès à l’éducation ? », in Pascale Bertoni, Olivia Bui-Xuan et Raphaël Matta-Duvignau (dir.), Le droit à l’éducation, mare & martin, 2024, p. 187, spéc. p. 192 (j’espère poursuivre le dialogue avec l’autrice en revenant prochainement sur cet article qui me paraît construit sur deux oppositions discutables : « travaux socio-historiques » vs « analyse juridique » et, pour citer cette fois les pp. 195-196, « un modèle scolaire issu du droit international » dont il faudrait se tenir éloigné pour préserver « le contenu du droit à l’éducation » qui résulterait de la « laïcité à la française » ; en complément des citations qui y sont faites de ma thèse, je renvoie pour l’heure à mes pp. 1211-1212).
10 Xavier Ternisien, « Quand Bayrou retirait Césaire des programmes de français », lemonde.fr 10 mai 2008 ; Julie Postollec, « Nomination de François Bayrou à Matignon : quels sont les liens du nouveau Premier ministre avec les Outre-mer ? », la1ere.francetvinfo.fr 13 déc. 2024 ; je remercie Amélie Imbert pour m’avoir appris l’existence de cette note, trois jours après la publication du présent billet.
11 Lequel ne lui en aurait pas tenu rigueur, selon Max Orville (« (…) La vérité sur Aimé Césaire et François Bayrou », modem-martinique.over-blog.com 26 févr. 2011) ; s’agissant des propres explications de l’ancien ministre, lors « de l’émission “Le Franc-Parler” (France Inter-i-Télé-“Le Monde”) » le 12 mai 2008 (soit moins d’un mois après la mort du poète martiniquais, le 17 avril), v. Nadia Yala Kisukidi (entretien avec, par Louise Hermant), « Dix ans après sa mort, que reste-t-il de l’héritage poétique et politique d’Aimé Césaire ? », lesinrocks.com 20 avr. 2018 (mis à jour le 16 mars 2021).
12 Ludovic Vigogne, « Bayrou, le défi mahorais », latribune.fr 29 déc. 2024 (extrait) ; LH avec EA et MB, « Le Premier ministre François Bayrou se rendra directement à Mayotte lundi [30] », la1ere.francetvinfo.fr le 28 ; quelques mises en perspective : Marine Lamare, recension de Nicolas Roinsard, Une situation postcoloniale. Mayotte ou le gouvernement des marges (CNRS Éditions, 2022), RIEJ 2024, n° 1, vol. 92 (extrait) ; Serge Massau, « “Mayotte, Département colonie” l’ouvrage de Rémi Carayol qui déconstruit les “mythes” », la1ere.francetvinfo.fr le 18 oct. ; v. ses entretiens avec Florence Morice (« L’opinion a été fabriquée sur ce territoire avec des discours xénophobes », le 9 nov.) et Maëva Amir (« Mayotte, le cyclone Chido et la réalité d’un “département colonie” », revolutionpermanente.fr le 19 déc.) ; Victor Avendaño, « Le cyclone Chido réveille les tensions entre la France et les Comores », lemonde.fr le 20 ; Riwadi Saïdi, « À Mayotte, le cyclone Chido ne reconnaît pas les frontières et n’a pas besoin de visa », survie.org le 20 ; Nassurdine Haidari et Chahidati Soilihi, « Emmanuel Macron, petit maître colon à Mayotte », liberation.fr le 20 (extrait) ; Claire Tervé, « Mayotte : Bruno Retailleau critiqué pour avoir tenu son discours pendant la minute de silence », huffingtonpost.fr le 23 ; v. enfin les tribunes signées Éric Bellais, Romain Criquet, Pierre William Johnson et Agnès Rossetti, « Mayotte est victime non seulement d’un cyclone, mais aussi de décennies de politiques inappropriées » (extrait), et Sophie Blanchy, « Un confetti d’Europe au carrefour des migrations » (extrait), Le Monde les 25-26, p. 26, laquelle termine sur cette phrase : « En balayant les bidonvilles, le cyclone a rappelé que les justices environnementale et sociale vont de pair ». Mardi 17 décembre, comme dans un lapsus sur la fragile appartenance de Mayotte à la France, François Bayrou a déclaré à l’Assemblée nationale : « il n’est pas d’usage que le premier ministre et le président de la République quittent en même temps le territoire national »… (cité par Mariama Darame et Nathalie Segaunes, « François Bayrou déjà sous le feu des critiques », Le Monde le 19, p. 11 ; au passage, quatre pages plus loin, Sylvie Lecherbonnier, « Des élèves sans affectation dans le public scolarisé dans le privé [(professionnel) sous contrat] » : « Une première convention a été signée avec l’enseignement catholique du Val d’Oise à la rentrée 2023 et une seconde a vu le jour dans l’Essonne à la rentrée 2024 » ; le directeur diocésain (, Gérald Omnès) met alors en avant sa « mission de service public », tandis que son homologue dans le Val d’Oise (Marc Naudi-Bonnemaison) salue un texte qui « contribue à la mixité sociale de [leurs] établissements ». « La gratuité est de mise [alors que leur] scolarité, pourtant payante (…), est prise en charge. Par qui ? Le montage est plus flou »).

Jours fériés : l’approche laïque chassée par l’appel à la « solidarité »

Infographie de la direction de l’information légale et administrative (Premier ministre), service-public.fr 9 nov. 2023-4 oct. 2024, complétée avec les dates du 26 décembre et du Vendredi Saint (calendrier.best) ; ces « jours fériés propres à l’Alsace-Moselle » avaient fait l’objet d’une prompte intervention du législateur, pour contrecarrer un arrêt de la Cour de cassation (Soc., 26 janv. 2005, n° 02-47569 et 70 ; v. aussi cet échange, l’année suivante, entre Gérard Larcher et Gilbert Meyer, pour qui elle serait incomplète ; v. encore Florence Dartois, ina.fr 26 déc. 2023 et la note 24 du présent billet)

Vingt ans après l’instauration d’une première « journée de solidarité »1« Mise en place l’année suivant la canicule meurtrière de 2003, qui a fait 15.000 morts, elle permet de financer la prise en charge des personnes dépendantes. Ce jour de travail de 7 heures non rémunéré a été initialement fixé au lundi de Pentecôte. Mais depuis 2008 – quand le lundi de Pentecôte est redevenu férié face à la pression des syndicats et de l’opinion – il est désormais laissé à l’appréciation des employeurs publics et privés » (Flavien Groyer, « Le lundi de Pentecôte est-il férié, chômé, rémunéré ? », francebleu.fr 13-18 mai 2024 ; « Suppression d’un jour férié : comment a été instaurée la journée de solidarité envers les personnes âgées et handicapées ? », ladepeche.fr le 11 nov., rappelant qu’en 2004, il y avait « là en germe les composantes de ce que l’on appelle la cinquième branche de la Sécurité sociale, qui verra le jour 15 ans plus tard » (v. la note suivante)., d’aucuns en envisagent une seconde : évoquée par des parlementaires2Chantal Deseyne, Solanges Nadille et Anne Souyris, Situation des Ehpad, Rapport d’information n° 778 (2023-2024), déposé le 25 septembre 2024, pp. 16, 115, 198, 206 et 208, rappelant qu’elles ne faisaient que relancer l’une des « pistes de financement envisagées par le rapport Vachey sur la préfiguration de la branche autonomie » (intitulé La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement, ce rapport remis le 15 septembre 2020 consacrait son « Annexe IV » à cette éventuelle « deuxième journée de solidarité », pp. 36 et s. ; page 8, il soulignait cependant « des effets incertains sur l’économie » en remarquant que les « partenaires sociaux y sont dans l’ensemble hostiles ») ; « Fin des 35 heures, suppression d’un jour férié… Gérald Darmanin critique les hausses d’impôts voulues par le gouvernement et assure que les Français doivent “travailler plus” », lindependant.fr (avec AFP) le 6 oct., reprenant les propos du député du Nord dans une interview au quotidien Les Échos ; Guillaume Jacquot, « Seconde journée de solidarité : l’impulsion pourrait venir du Sénat », publicsenat.fr le 4 nov., citant notamment deux des trois co-autrices du rapport précité : alors que la sénatrice écologiste Anne Souyris « encourageait plutôt un relèvement de la CSG », Chantal Deseyne (LR) défend l’idée de sept « nouvelles heures travaillées, mais non rémunérées », sans forcément supprimer un jour férié en particulier, par « un amendement au PLFSS dans deux semaines » (à propos de ces sigles, v. lafinancepourtous.com le 4 sept.). Ajouts au 23 novembre de l’article publié ce jour dans Le Monde par Bertrand Bissuel et Thibaud Métais, « Le temps de travail de nouveau en débat », p. 9 (extrait), signalant l’adoption ce mercredi 20 de l’amendement annoncé, contre lequel « les syndicats sont vent debout » et finalement présenté par la mayennaise Élisabeth Doineau (UDI), rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale ; exprimant le 21 « l’avis [défavorable] du gouvernement sur la proposition du Sénat », Laurent Saint-Martin « trouve [cependant] que le débat a bien été posé » ; comparer Thomas Piketty sur francetvinfo.fr le même jour, l’économiste insistant d’emblée sur le « grand gâchis humain » en cours, les besoins en productivité nécessitant d’« investir beaucoup plus dans l’éducation, dans l’Université notamment ». et des ministres3Isabelle Ficek, Leïla de Comarmond et Solenn Poullennec, « Sécurité sociale : le gouvernement ouvert au débat sur la suppression d’un deuxième jour férié », lesechos.fr 29 oct. 2024, citant les ministres du Budget (Laurent Saint-Martin, sur TF1) et de l’Économie et des Finances (Antoine Armand, sur LCI deux jours avant)., elle avait pu sembler écartée par l’entourage de Michel Barnier4Marie Nidiau, « Suppression d’un deuxième jour férié : Matignon ferme la porte à cette mesure », latribune.fr 5 nov. 2024.

Elle a été reprise et même précisée ce lundi par Jean-François Copé5Juliette Brossault, « “Pas besoin d’un jour férié” : Copé favorable à la suppression du 11-Novembre pour “faire des économies” », bfmtv.com 11 nov. 2024 : « “Il faut effectivement travailler plus”, conclut l’ancien ministre du Budget de Jean-Pierre Raffarin sous Jacques Chirac [sur France Inter, après avoir soutenu qu’ils auraient] “courageusement” supprimé le jour de Pentecôte » (v. supra). ; il s’en est suivi une réaction ambigüe du Premier ministre, prenant la défense d’UNE « journée fériée à laquelle nous sommes attachés » : le fait qu’il se soit exprimé ainsi « en déplacement à Meaux (Seine-et-Marne) »6« “Nous sommes attachés au 11-Novembre” : Michel Barnier n’envisage pas de supprimer ce jour férié », leparisien.fr 11 nov. 2024, dont le maire n’est autre que l’ancien ministre du Budget UMP7« Fondé sous le nom d’Union pour la majorité présidentielle en vue des élections législatives de 2002, [c]e parti devient quelques mois plus tard l’Union pour un mouvement populaire, gardant les mêmes initiales » UMP ; au 4 novembre, la page wikipedia.org qui lui est consacrée rappelle qu’il « soutient les gouvernements nommés par Jacques Chirac entre 2002 et 2007, puis par Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2012 », avant que ce dernier ne le fasse renommer, trois ans plus tard, Les Républicains. En 2004, alors que Michel Barnier avait remplacé Dominique de Villepin au ministère des Affaires étrangères le 31 mars, Jean-François Copé restait porte-parole du Gouvernement et ministre délégué lors du remaniement du 29 novembre, mais désormais au Budget (à l’Intérieur auparavant)., fait penser à un jeu de rôles destiné à préparer l’opinion. Quoiqu’il en soit8Dans son éditorial du jour, Philippe Rioux y voit « un coup de communication (…) pour éviter un vrai débat plus au fond » (« Suppression d’un jour férié : écran de fumée », ladepeche.fr 11 nov. 2024)., la perspective actuelle est bien éloignée du solidarisme9V. mon billet du 15 septembre 2018, avec un peu d’histoire des idées (solidaristes). ; l’appel à la « solidarité »10Au passage, Louis Maurin, « Neuf millions de pauvres, un chiffre exagéré », inegalites.fr 24 oct. 2024 : « Au seuil à 50 % du niveau de vie médian – seuil plus restrictif – notre pays compte déjà cinq millions de pauvres. Un niveau suffisant pour justifier tous les appels à la solidarité ». dissimule très mal une politique d’austérité qui ne dit plus son nom11Benoît Bréville, « Une idée dangereuse », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 1, cet éditorial renvoyant à Mark Blyth, Austerity. The History of a Dangerous Idea (Oxford University Press, 2013)..

Alors que « le principe de laïcité (…) se fait métonymie de la République et est, de ce fait, appelé à la rescousse sur une infinité de terrains »12Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, p. 11 : suit une énumération reproduite par Alain Policar dans sa Préface à FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p. (pp. 4 et s., spéc. page 10)., il est intéressant de le voir chassé des discours politiques relatifs aux jours fériés13V. toutefois Jean-Marc Proust, « Supprimer un jour férié ? Oui, mais pour en faire une journée sans religions », marianne.net 7 nov. 2024 (extrait).. Pour cause, une approche laïque digne de ce nom peut difficilement se satisfaire du statu quo (qu’il ne s’agit ici de remettre en cause qu’en en réduisant le nombre14Dans un éditorial, Laurence Ferrari postule qu’il s’agira en définitive de supprimer « un jour de fête catholique » (cnews.fr 30-31 oct. 2024 ; dans le même sens, v. celui d’Arnaud Alibert, « Jours fériés, jours heureux, jours sérieux », la-croix.com le 31).).

FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p.

Cela m’est apparu évident durant ma recherche doctorale et c’est pourquoi ma thèse comprend trois pages15Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 344 à 347 ; je tiens un extrait de ces trois pages à la disposition de toute personne qui le souhaiterait grâce au formulaire de contact – je l’avais opéré pour le partager à mes étudiant·es de la faculté de droit de Grenoble, le 29 mars 2018, avec notamment cet article de presse intitulé « L’histoire des jours fériés religieux » (et ceux « chrétiens dans l’Union européenne » : v. Nicolas Senèze, la-croix.com 1er juin 2012). reprenant notamment des citations de Jean Rivero (début 1990) et de deux membres de la « Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République » (fin 2003).

Un entretien récent me permet d’amender légèrement le propos : en 2017, j’écrivais page 346 que Jean Baubérot avait soutenu, « dès le départ », sa proposition inclusive des personnes des confessions juive et musulmane (à travers l’introduction dans le calendrier scolaire16« Dans le monde de l’entreprise », le Rapport proposait d’instaurer la « pratique du crédit du jour férié [qui] est déjà courante dans certains pays ou organisations internationales » : v. la citation reprise à la fin de ce document de l’Académie de Versailles, « Faut-il remettre en question le calendrier des jours fériés à l’école au nom de la laïcité ? », 7 p . ; à la page 6 se trouve reproduit un extrait du Vademecum « La laïcité à l’école » (déc. 2021, fiche 16). Concernant ce texte et outre ma note sous CAA Lyon, 23 juill. 2019, n° 17LY04351 (« Interdiction des mères voilées dans les locaux scolaires : quand la laïcité repose sur une croyance », Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai), v. récemment FNLP, Vade-mecum laïcité : une intrusion dans l’école au nom des obscures valeurs de la Macronie, mai 2024 – floréal CCXXXII, n° 28 de la collection Arguments de la Libre Pensée, 62 p., avec une préface de l’historienne Valentine Zuber et une recension par Christian Eyschen, pp. 47 et s., du livre dirigé par Françoise Lantheaume et Sébastien Urbanski, Laïcité, discriminations, racisme. Les professionnels de l’éducation à l’épreuve (PUL, 2023). Dans la première partie (pp. 7 et s.), Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger taclent aux pages 11 et 16 ce « Conseil [des “sages”] qui n’a jamais répondu aux demandes de la Libre Pensée pour agir sur des cas concrets en défense de la Laïcité, mais qui consacre tous ses efforts à la chasse aux musulmans » ; « les recensions des atteintes “graves” à la Laïcité se résument au port de signes et vêtements religieux (devinez lesquels), mais jamais à la loi Debré, les autres lois antilaïques ou la Hanoucca à l’Élysée ». V. à ce sujet Romain David, « Hanouka à l’Elysée : « “Faute morale”, “idée stupide”, “sujet explosif”… Les sénateurs fustigent l’attitude d’Emmanuel Macron », publicsenat.fr 8 déc. 2023 ; Nicolas Cadène, « La présence du président de la République à une manifestation religieuse n’est pas le problème », vidéo lemonde.fr ; Guillaume Baticle et Jean-Paul Markus (relus par Clément Benelbaz), lessurligneurs.eu les 11 et 22 ; CE, 30 oct. 2024, Association des libres penseurs de France (ADLPF) et a., n° 490587, 491096, 492651, 492656 et 492663, cons. 2, estimant qu’« il ne ressort pas des pièces du dossier que le Président de la République aurait pris une décision autorisant la tenue d’une cérémonie religieuse » (rendant compte de la décision, lemonde.fr (avec AFP) cite Laurent Domingo : « Lors de l’audience, le 26 septembre, le rapporteur public avait souligné que la requête “n’a pas l’objet que les requérants aimeraient lui donner » car « il n’existe pas de décision administrative d’allumer la bougie” ») ; comparer l’extrait placé au début de la vidéo précitée : le 7 décembre, le grand rabbin de France Haïm Korsia avait pourtant bien pris soin de solliciter une telle autorisation… d’un ou – le plus souvent – deux jours fériés pour les fêtes de Kippour et de l’Aïd-el-Kebir17« Michèle Teboul, directrice du Conseil Représentatif des institutions juives de France (Crif) et l’islamologue Ghaleb Bencheikh, décrivent ces deux événements » (qu’il n’est pas possible de dater selon les calendriers grégorien – dont dépend le jour de l’An – ou révolutionnaire, auquel se réfère la Libre Pensée dans ses publications précitées ; v. le convertisseur du site herodote.net) : « Yom Kippour est célébré huit jours après le nouvel An, Roch Hachana. La date est déterminée par le calendrier juif – qui compte 11 mois – donc chaque année, c’est décalé. Et tous les 33 ans, Kippour et l’Aïd-el-Kebir sont fêtés le même jour » ; « Une fois que la petite fête est fixée (l’Aïd-el-Fitr, NDLR), celle-ci en découle automatiquement puisque c’est 70 jours après la fin du ramadan. L’Aïd-el-Kebir n’est pas assujetti à l’observation de la lune, la date est donc unanime » (entretien avec Audrey Avesque, « L’Aïd et Kippour célébrés en même temps, une première depuis 33 ans », laprovence.com 3 oct. 2014).) ; rappelant qu’elle « a été, de loin, la plus discutée », l’historien explique avoir quant à lui18De l’autre membre de la commission Stasi sus-évoqué, Patrick Weil (entretien avec, par Samuel Lacroix), « Il faut garantir à chacun un jour férié au choix », philomag.com 26 mai 2023 « proposé, quelques années auparavant (Le Monde 21 décembre 1999) un projet un peu différent : que les lundis de Pâques19« Mais pourquoi le lundi de Pâques est-il férié alors qu’il ne correspond à rien ? », tf1info.fr 21 avr. 2019 ; v. aussi Charles Conte, « Les banquets du “vendredi-dit-saint” contre les interdits religieux », blogs.mediapart.fr le 18 : « La date de Pâques, fête mobile, est traditionnellement fixée au dimanche après la pleine lune qui suit le 21 mars (équinoxe de printemps). Le carême (du latin quadragesima qui signifie quarantième ou quarantaine) désigne la période de quarante jours (dimanches non compris) qui précède Pâques. Peu suivi de nos jours, le carême était comparable, par la rigueur de ses interdits, au ramadan musulman. C’était une période de jeûne, plus ou moins rigoureux, en particulier pour la viande, et d’abstinence sexuelle obligatoire pour tous ». et de Pentecôte20« Le dimanche de Pâques (…) détermine à la fois les dates de l’Ascension [un jeudi, à ne confondre avec l’Assomption, le 15 août] et de la Pentecôte » (Maxime Ferrer, générateur lemonde.fr 1er janv. 2022- 30 oct. 2024) ; elle se célèbre « à une date mobile calculée par le Comput. Elle tombe toujours un dimanche entre le 10 mai et le 13 juin. Elle se poursuit le lendemain dans certains pays par un lundi férié ou chômé payé, dit “lundi de Pentecôte” » (wikipedia.org au 31 oct. 2024). ne soient plus considérés comme des jours fériés ; en revanche, tel le 1er mai et le 14 juillet, le 9 décembre deviendrait férié et chômé, comme “fête de la laïcité21Comparer Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger, « Errare humanum est, sed vademecum diabolicum », in FNLP, Arguments n° 28 préc., p. 16 : « Rappelons la position de la Libre Pensée [v. aussi la note suivante] : (…) [l]a Laïcité n’a pas besoin de journée officielle, mais de mesures visant à la défendre concrètement. Le reste est du cinéma médiatique, et ce n’est pas une journée par an qu’il faut la défendre, mais tous les jours ». Je ne me souviens pas d’avoir déjà traité de cette question sur ce site ; le 20 novembre 2018, à l’occasion de la « Journée des droits de l’enfant », j’en abordais une connexe en écrivant à propos des jours fériés religieux que, dans un État laïque de droits, leur remplacement par des journées internationales comme celle de ceux de tous les enfants pourrait être envisagé. Le risque serait toutefois d’alimenter les critiques des détracteurs d’une prétendue religion de ces droits (en renvoyant à la conclusion générale de ma thèse préc., pp. 1227-1228)., et un autre jour, en alternance, serait attribué à une religion minoritaire. On a taxé ces propositions de “communautaristes”, mais je vois mal en quoi les jours fériés catholiques actuels seraient “laïques” et une diversification des jours fériés “communautariste”22Comparer Christian Eyschen, recensant le livre de Jean-Marc Schiappa, La France n’a pas de racines chrétiennes, fnlp.fr 26 mars 2017 ; Jacqueline Lalouette (entretien avec, par Samuel Dufay), « Les jours fériés, une tradition française : “Le sens de certaines fêtes s’est transformé” », lexpress.fr 29 mai 2023 (extrait) : « Depuis longtemps, les libres penseurs réclament la suppression des fêtes religieuses, ou, à défaut, leur changement de signification. Ainsi, dès les années 1890, la Fédération française de la Libre Pensée laïcisa la fête de Noël en célébrant des fêtes de l’enfance dites “Noëls humaines”». Recensant son livre Jours de fête. Jours fériés et fêtes légales dans la France contemporaine, Tallandier, 2010, v. Robert Solé, lemonde.fr le 22 sept. ; soulignant les « analyses neuves sur la laïcisation de l’espace et du temps » qui figuraient déjà dans sa « thèse de doctorat d’État », publiée sous le titre La libre pensée en France (1848-1940), Albin Michel, 1997 (préface de Maurice Agulhon), v. la recension de Jean-Marie Mayeur, Annales 1999, n°54-6, pp. 1403 à 1405 (spéc. p. 1404).. (…) D’autres mesures proposées devaient permettre de “reconnaître la Libre-Pensée et les Humanistes rationalistes comme une option spirituelle à part entière”. La question du voile n’est arrivée qu’en fin de course, et (…) on a fait l’impasse sur tout examen de la loi Debré, sur la situation en Alsace-Moselle23Après les développements susmentionnés de ma thèse (2017), j’aborde à partir de la page 348 le mécanisme de dispense de l’enseignement religieux en Alsace-Moselle, évoqué par ailleurs dans mes billets du 9 juillet 2018 et celui publié à l’attention première de mes L3 en Sciences de l’éducation – le 30 avril 2020 (dans le II. B. ; v. plus largement celui autour de l’appel de note 11 dans ma dissertation du 26 mars de la même année, rédigée pour mes M1 en contentieux constitutionnel). Ajout au 23 novembre, concernant les références de Jean Baubérot à la « question du voile » et « la loi Debré », d’un renvoi à d’autres billets, d’une part des 26 janvier et août 2018, d’autre part aux (appels de) notes 15 à 19 pour le dernier publié (fin septembre 2024). (…) »24Jean Baubérot (entretien avec, par Charles Mercier), in FNLP, Arguments n° 29 préc., sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p., pp. 107 et s., spéc. 108-109 (souligné dans le texte). Alors secrétaire général de la Libre Pensée, son désormais vice-président écrit page 21 : « À la fin du Rapport, l’Alsace-Moselle est mentionnée, mais c’est pour soutenir le maintien du Statut clérical d’exception auquel “les habitants sont particulièrement attachés” (v. ma thèse, pp. 359-360) en mélangeant sciemment les avantages sociaux et les privilèges religieux qui n’ont rien à voir avec » (le lien entre les deux ne peut cependant pas systématiquement être balayé d’un revers de main : v. Isabelle Nassoy, lalsace.fr 1-2 avr. 2021 ; Éric Sander, « Non à la suppression des jours fériés et chômés spécifiques à l’Alsace et à la Moselle », pétition change.org 2 juin 2023) ; avec Joachim Salmero, alors président de la Fédération (entre 1996 et 2007 selon la notice rédigée par Hugues Lenoir, complétée par Guillaume Davranche et Rolf Dupuy, maitron.fr), Christian Eyschen avait été auditionné par la Commission le 3 octobre 2003 : le texte de leur intervention est reproduit pp. 40 et s., avec dix pages plus loin au titre des propositions de la Libre pensée « la fin [de ce Statut], que nous ne saurions confondre avec les lois sociales progressistes acquises dans cette région ». Une tribune récente fait allusion à ces territoires, « où deux millions de salariés bénéficient, pour des raisons historiques, d’un régime de santé spécial. Sa généralisation dépend seulement de la volonté politique du gouvernement et des parlementaires de supprimer la rente des assurances-maladie privées dites “complémentaires”, moins égalitaires, moins solidaires et surtout moins efficientes que la Sécurité sociale » (François Bourdillon et alii, « Pour une assurance complémentaire gérée par la Sécurité sociale », Le Monde 27-28 oct. 2024, p. 27, quelques lignes après cet extrait – la Une du quotidien étant titrée « Santé : vers une hausse du ticket modérateur », avec un renvoi à la page 8 (v. déjà la légende de ma première illustration le 31 décembre 2023) ; v. aussi Alban Beaudouin, Jean-Loup de Saint-Phalle et Richard Monvoisin, « Pour une Sécurité sociale de la mort. Les obsèques ne sont pas une marchandise », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 21 (extrait) : après avoir renvoyé à leur encadré intitulé « Des édits de Louis XIV à la loi Sueur [du 8 janvier 1993] » (extrait, mentionnant les « libres-penseurs ») et au livre de Laura Petersell et Kévin Certenais, Régime Général. Pour une Sécurité sociale de l’alimentation (Riot, 2022), les auteurs en défendent une qui, « suivant l’esprit qui présida à sa création en 1945, [couvrirait] le risque décès, par l’universalisation et l’automatisation des aides existantes et une assistance administrative gratuite aux familles » ; outre celle de la CPAM sont évoquées dans l’article les aides de la Carsat et la CAF, en précisant qu’un « milliard d’euros par an ne seraient jamais réclamés, selon le site Tranquillite.fr » (où l’on trouve notamment ce texte de son fondateur Teddy Bredelet, 1er janv. 2024)..

Photo D.R., reprise depuis A.B. et T.C., « Nécrologie : Jean Debraine, figure de l’engagement militant », ledauphine.com 21-22 oct. 2024 (extrait ; pour des citations de la version publiée – postée sur Facebook par la Fédération Ardèche-Drôme de la Libre Pensée –, v. les notes 25 et 28 du présent billet)

Je n’aurais sans doute pas eu connaissance de ce texte si je n’avais pas rencontré Jean Debraine (v. ci-contre) ; c’était il y a un peu plus de six mois, à l’occasion d’un… jour férié25J’espère avoir l’occasion, dans les mois à venir, de révéler ce qui m’avait conduit à le reconnaître et l’aborder, avenue Félix Faure à Valence, lors de la « fête du Travail Journée internationale de lutte pour les droits des travailleuses et travailleurs ; je m’en tiens ici à confier qu’après quelques minutes d’échanges, Jean m’avait donné un bulletin de la Fédération Ardéchoise et Drômoise de Libre Pensée (FADLP, ou LP 07-26, dont il était secrétaire), afin d’utiliser l’adresse mail figurant en dernière page ; j’allais lui écrire au terme de ce mercredi 1er mai et il me répondra le lendemain, en m’adressant une abondante documentation qui viendra alimenter un texte projeté depuis quelques temps. Si j’avais pu avoir un aperçu de son activité militante (v. par ex. Frédérique Fays, « Les Libres Penseurs, ardents défenseurs de la laïcité », ledauphine.com 20 août 2016, à propos du Congrès national au lycée agricole du Valentin ; Thibaut Carage, « Loi Immigration : plus de 500 personnes ont manifesté contre une loi “raciste” », 14 janv. 2024) et l’écouter dans l’émission de Radio Diois enregistrée à Die le 9 mars (rdwa.fr le 15), j’ignorais son « goût pour l’architecture » et son passé de postier en Ardèche – où il été candidat aux législatives en 1986 –, tout comme le fait qu’il a « été correspondant local du Dauphiné libéré, de 2015 à 2019 », où travaille sa fille Agathe (A.B. et T.C., « Nécrologie : Jean Debraine, figure de l’engagement militant », édition du 21 oct. 2024, p. 23 ; texte posté sur Facebook par la FADLP, à laquelle il a adhéré en 1995). Le lendemain de la publication de ce Carnet, le quotidien consacrait sa Une à Charles Aznavour (1924-1918) ; page 3, une colonne était intitulée « Ces lieux marqués à jamais » : si la « liste est non exhaustive », elle commence par « le square qui porte son nom » à Valence, depuis son inauguration en sa présence en mai 2011, et qui se trouve devant le Centre du Patrimoine Arménien (CPA). Elle se termine surtout par le buste offert par la ville de Talin à sa jumelle Bourg-lès-Valence (en face de la rue du port, où j’ai habité pendant près de quinze ans). Il est alors sommairement indiqué : « Samedi 21 septembre 2024, l’hymne arménien, La Marseillaise et les célèbres chansons de l’artiste ont retenti au square Michel-Terisse (…) ». La ville bourcaine publiait alors une vidéo, sur sa page Facebook, sans même faire l’effort de couper « la bénédiction de la statue par deux prêtres d’églises arméniennes » (Lisa Guinic, francebleu.fr le 22). Il est probable que cela n’ait pas échappé au secrétaire de la FADLP…, en mai26Suivant le décret n° 2006-388 du 31 mars, et outre les 1er et 8 mai visés par l’article L3133-1 du Code du travail, le mois de mai est aussi celui de la Journée nationale des mémoires de la traite et de l’esclavage et de leurs abolitions, le 10 (wikipedia.org au 13 mars 2024) ; cette dernière est commémorée par des jours fériés spécifiques à l’outre-mer : le 22 en Martinique, le 27 en Guadeloupe et le 28 à Saint-Martin – depuis 2019, ainsi que le rappelait cette année Estelle Gasnet (soualigapost.com le 27), en précisant toutefois qu’« une erreur “matérielle” s’est glissée [en 2018 à l’article L3422-2] et n’a jamais été corrigée ». Ce texte législatif mentionne également le 10 juin en Guyane, le 27 avril à Mayotte et le 20 décembre à La Réunion (v. aussi Johanne Chung To Sang, Harry Amourani et Florent Marot, « Supprimer un jour férié de plus dans l’année ? À La Réunion, peu apprécient l’idée », le 30 oct.). Concernant la Polynésie, v. Delphine Barrais, « Ces îles françaises ont trois jours fériés supplémentaires et l’un d’eux va changer, voici pourquoi », ouest-france.fr le 12 juin : « le 5 mars (arrivée de l’Évangile), le 29 mars (Vendredi saint, férié comme en Alsace et en Moselle) et, à partir de 2025, le 20 novembre » (Matari’i i nia, qui « correspond au lever des Pléiades [constellations] » et viendra remplacer « la fête de l’Autonomie instaurée en 1985 par Gaston Flosse », dont la date rappelait « l’annexion de la Polynésie par la France le 29 juin 1890 »).. En ce 11 novembre27« 11 Novembre : pourquoi ce jour est-il férié, pourrait-il ne plus l’être ? », lavoixdunord.fr 5 nov. 2024 : « Ce jour-là [en 1918], à 5 h 45, dans le wagon-salon du Maréchal Foch, le ministre d’État allemand Erzberger signait l’armistice, marquant la fin des combats de la Première Guerre mondiale ». Outre le rassemblement ardéchois de Joyeuse, depuis vingt-et-un ans, la FADLP avait initié le 11 novembre 2023 son pendant drômois de Peyrins (avec la Fédération Nationale Laïque des Associations des Amis des monuments Pacifistes) ; à cette occasion, Jean Debraine avait prononcé un discours (reproduit dans Le Mécréant ardécho-drômois n° 175 – Bulletin de la FADLP – 4e trimestre 2023, pp. 10 à 12), dans lequel il affirmait : « Oui, ce qu’a fait le Hamas s’apparente à un crime de guerre du type d’Oradour-sur-Glane [le 10 juin 1944]. Mais ce que fait Tsahal aujourd’hui, cela s’apparente à un génocide du Peuple palestinien » (p. 11). Actualisé du fait de « l’invasion du Liban », le message de cette fin d’année 2024 reprend celui de Jean-Sébastien Pierre à Sartilly (Manche), le dimanche 17 mars (« Devant la stèle des caporaux de Souain, le président de la Libre pensée a appelé aux cessez-le-feu [à Gaza et en Ukraine] », ouest-france.fr le 18). Rappelant que la LP « est anticléricale, antimilitariste et internationaliste [et ne peut donc] rien avoir de commun avec les courants hégémoniques aujourd’hui au sein de la mouvance sioniste, qui prônent la synthèse entre le nationalisme, le militarisme et le cléricalisme et entendent embrigader tous les juifs du monde (estampillés « diaspora ») sous sa bannière », v. le dossier réalisé par Pierre-Yves Modicom, Claude Singer, Quentin Dauphiné, José Arias et Jean-Marc Schiappa pour la Commission Administrative Nationale de la FNLP, « Contre l’antisémitisme, dissiper les mirages du sionisme », La Raison juill.-août 2024, n° 693, pp. 16-21, spéc. p. 19 ; je renvoie aussi à la fin de mon billet du 15 janvier, et au début de celui du 9 avril, en ajoutant le lien conduisant aux ordonnances des 24 mai, 28 mars et 26 janvier ; dans la première, intitulée Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), v. le § 49, pp. 16-17 (avec la déclaration de Philippe Lazzarini du 13 se terminant sur le « sort des enfants de Gaza », dont des « centaines de milliers n’ont plus accès à l’éducation ») ; v. aussi l’analyse de Rafaëlle Maison, « À la Cour internationale de justice, un revers pour Israël », orientxxi.info le 30, ce reportage de CNN, publié sur X par le compte Caisses de grève le 20 avr. et ces liens ultérieurs : à propos de l’avis consultatif du 19 juillet, Jean-Pierre Filiu, « Quand la CIJ parle d’un seul et même “territoire palestinien occupé” », lemonde.fr le 18 août, Catherine Maia et Ghislain Poissonnier, « Avis de la CIJ de 2024 relatif à l’occupation du Territoire palestinien : une analyse au prisme du droit international des droits humains », La Revue des Droits de l’Homme ADL, le 7 oct., ainsi que Farah Safi et Patrick Zahnd (Juristes pour le respect du droit international), « Ventes d’armes à Israël : “La position de la France demeure timide et en retrait de ses engagements internationaux” », lemonde.fr le 5 nov. ; d’un point de vue éducatif et sanitaire, « Éducide en Palestine – Défendons le droit universel à l’éducation ! », solidarite-laique.org le 4 juin (renvoyant pour ce terme à Neve Gordon, professeur de droit à Londres et Lewis Turner, maître de conférences en politique internationale à Newcastle ; v. aussi le 27 oct.) ; « Bande de Gaza : le médecin humanitaire Raphaël Pitti fait part de “sa colère très profonde” face à l’absence “de pression politique” de la part “des Occidentaux” », francetvinfo.fr le 16 août ; Céline Martelet, « Les enfants de Gaza privés d’école », politis.fr le 27 (extrait) ; « UNRWA bannie d’Israël : crime et écœurement », regards.fr le 29 oct. (confirmant ce telex intitulé « L’UNRWA, un témoin indésirable ? », monde-diplomatique.fr le 2 févr.), « Proche-Orient : les enfants pris au piège d’une guerre sans fin », unicef.fr le 6 nov. (ajouts « mandats d’arrêt émis mercredi 21 novembre par la Cour pénale internationale (CPI) contre le premier ministre israélien (…) et son ex-ministre de la défense, Yoav Gallant », à partir de Stéphanie Maupas, « Le mandat d’arrêt de la CPI contre Benyamin Nétanyahou, un tournant pour la justice internationale », lemonde.fr extrait ; dans un entretien avec Axel Nodinot, Béligh Nabli note qu’il est venu « toutefois s’entrechoquer avec un autre événement – politique, celui-là – de la veille : le rejet [au Conseil de sécurité de l’ONU] de la résolution appelant à un cessez-le-feu à Gaza et au Liban, après que les États-Unis ont usé de leur droit de veto » ; il n’en demeure pas moins que cette décision « vient ouvrir une brèche, une perspective qui n’existe pas aujourd’hui sur le plan politique et diplomatique, dans la mesure où Israël continue de bénéficier d’un soutien de ses principaux alliés » : v. humanite.fr le 21 ; Bastien Loeuillot, « “Immunité” de Nétanyahou : une pluie de condamnations à gauche, de vives critiques de juristes et d’ONG », liberation.fr (avec AFP) le 27 : « “La France a cédé aux exigences israéliennes, on n’aurait pas fait ça avec Poutine”, regrette l’eurodéputée insoumise Rima Hassan ».)., dix jours après « un dernier hommage lors d’une cérémonie publique et laïque »28Je reprends ici les formules d’un message de la Commission administrative de la FADLP le 18 octobre dernier, précisant que cette cérémonie se déroulerait à Mercurol le vendredi 1er novembre (Justine Audollent, « Toussaint 2024 : pourquoi le 1er novembre est-il un jour férié ? », rtl.fr 1er nov. 2024). Ce jour-là, je fêtais mes quarante ans, à quelques encablures des « chemins de terre de Gilhac-et-Bruzac » – évoqués dans la nécrologie précitée ; il y est ensuite noté que, sa « fibre humaniste, internationaliste aussi, Jean Debraine la ressent dès ses 14 ans et un voyage en Algérie ». Les Fils de la Toussaint, tel est le titre du premier volume sur La guerre d’Algérie d’Yves Courrière (Fayard, 1968) ; ainsi que le rappelait Denis Sieffert il y a une dizaine d’années, « ces indépendantistes algériens qui, le 1er novembre 1954, ont déclenché l’insurrection », étaient neuf (« Aït Ahmed, l’homme qui a gagné la guerre et perdu la paix », politis.fr 27 déc. 2015 ; v. aussi Camille Renard, radiofrance.fr 12 janv. 2021 : « En 1989, à l’occasion d’un documentaire de Patrice Gélinet diffusé sur France Culture, Hocine Aït Ahmed témoignait des sources de son engagement en Algérie (…), à partir de l’événement fondateur du massacre de Sétif » ; sur cet « autre 8 mai 1945 », écouter Anaïs Kien, podcast Le Journal de l’histoire 11 mai 2021). Au passage, « Football : Rachid Mekhloufi, attaquant légendaire [de l’ASSE] et symbole de l’indépendance algérienne, est décédé », rfi.fr 8 nov. 2024 (v. aussi ce texte « pour les jeunes », signé Adel Bentaha pour sofoot.com le 9 ; ajout le 23 du « bel hommage de l’AS Saint-Étienne », au coup d’envoi du match contre Montpellier, et de cette vidéo sur Mekloufi « vu par Éric Cantona – Les rebelles du foot », Portraits du Monde 26 mai, spéc. l’échange avec Bernard Pivot à partir de la 10ème minute, « les morts de 45 à Sétif » étant aussi évoqués vers la 3ème par Michel Nait-Challal, auteur de Dribbleurs de l’indépendance. L’incroyable histoire de l’équipe de football du FLN algérien, éd. Prolongations, 2008)., je tiens à saluer sa mémoire29Le 19 mai, je lui avais adressé l’extrait de thèse précité(e), à la veille du lundi de Pentecôte (v. le début du présent billet). Nous avions alors plusieurs fois remis notre rencontre à plus tard, en pensant pouvoir nous voir à l’occasion des AmFIs à Châteauneuf-sur-Isère (la Fédération Ardèche-Drôme de la Libre Pensée tenait un stand au village associatif) ; y passant le samedi 24 août, je n’avais pas voulu interrompre la conversation dans laquelle il était engagé – alors que j’étais moi-même pressé. On croit toujours qu’on pourra recroiser une personne à l’avenir….

Notes

1 « Mise en place l’année suivant la canicule meurtrière de 2003, qui a fait 15.000 morts, elle permet de financer la prise en charge des personnes dépendantes. Ce jour de travail de 7 heures non rémunéré a été initialement fixé au lundi de Pentecôte. Mais depuis 2008 – quand le lundi de Pentecôte est redevenu férié face à la pression des syndicats et de l’opinion – il est désormais laissé à l’appréciation des employeurs publics et privés » (Flavien Groyer, « Le lundi de Pentecôte est-il férié, chômé, rémunéré ? », francebleu.fr 13-18 mai 2024 ; « Suppression d’un jour férié : comment a été instaurée la journée de solidarité envers les personnes âgées et handicapées ? », ladepeche.fr le 11 nov., rappelant qu’en 2004, il y avait « là en germe les composantes de ce que l’on appelle la cinquième branche de la Sécurité sociale, qui verra le jour 15 ans plus tard » (v. la note suivante).
2 Chantal Deseyne, Solanges Nadille et Anne Souyris, Situation des Ehpad, Rapport d’information n° 778 (2023-2024), déposé le 25 septembre 2024, pp. 16, 115, 198, 206 et 208, rappelant qu’elles ne faisaient que relancer l’une des « pistes de financement envisagées par le rapport Vachey sur la préfiguration de la branche autonomie » (intitulé La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement, ce rapport remis le 15 septembre 2020 consacrait son « Annexe IV » à cette éventuelle « deuxième journée de solidarité », pp. 36 et s. ; page 8, il soulignait cependant « des effets incertains sur l’économie » en remarquant que les « partenaires sociaux y sont dans l’ensemble hostiles ») ; « Fin des 35 heures, suppression d’un jour férié… Gérald Darmanin critique les hausses d’impôts voulues par le gouvernement et assure que les Français doivent “travailler plus” », lindependant.fr (avec AFP) le 6 oct., reprenant les propos du député du Nord dans une interview au quotidien Les Échos ; Guillaume Jacquot, « Seconde journée de solidarité : l’impulsion pourrait venir du Sénat », publicsenat.fr le 4 nov., citant notamment deux des trois co-autrices du rapport précité : alors que la sénatrice écologiste Anne Souyris « encourageait plutôt un relèvement de la CSG », Chantal Deseyne (LR) défend l’idée de sept « nouvelles heures travaillées, mais non rémunérées », sans forcément supprimer un jour férié en particulier, par « un amendement au PLFSS dans deux semaines » (à propos de ces sigles, v. lafinancepourtous.com le 4 sept.). Ajouts au 23 novembre de l’article publié ce jour dans Le Monde par Bertrand Bissuel et Thibaud Métais, « Le temps de travail de nouveau en débat », p. 9 (extrait), signalant l’adoption ce mercredi 20 de l’amendement annoncé, contre lequel « les syndicats sont vent debout » et finalement présenté par la mayennaise Élisabeth Doineau (UDI), rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale ; exprimant le 21 « l’avis [défavorable] du gouvernement sur la proposition du Sénat », Laurent Saint-Martin « trouve [cependant] que le débat a bien été posé » ; comparer Thomas Piketty sur francetvinfo.fr le même jour, l’économiste insistant d’emblée sur le « grand gâchis humain » en cours, les besoins en productivité nécessitant d’« investir beaucoup plus dans l’éducation, dans l’Université notamment ».
3 Isabelle Ficek, Leïla de Comarmond et Solenn Poullennec, « Sécurité sociale : le gouvernement ouvert au débat sur la suppression d’un deuxième jour férié », lesechos.fr 29 oct. 2024, citant les ministres du Budget (Laurent Saint-Martin, sur TF1) et de l’Économie et des Finances (Antoine Armand, sur LCI deux jours avant).
4 Marie Nidiau, « Suppression d’un deuxième jour férié : Matignon ferme la porte à cette mesure », latribune.fr 5 nov. 2024
5 Juliette Brossault, « “Pas besoin d’un jour férié” : Copé favorable à la suppression du 11-Novembre pour “faire des économies” », bfmtv.com 11 nov. 2024 : « “Il faut effectivement travailler plus”, conclut l’ancien ministre du Budget de Jean-Pierre Raffarin sous Jacques Chirac [sur France Inter, après avoir soutenu qu’ils auraient] “courageusement” supprimé le jour de Pentecôte » (v. supra).
6 « “Nous sommes attachés au 11-Novembre” : Michel Barnier n’envisage pas de supprimer ce jour férié », leparisien.fr 11 nov. 2024
7 « Fondé sous le nom d’Union pour la majorité présidentielle en vue des élections législatives de 2002, [c]e parti devient quelques mois plus tard l’Union pour un mouvement populaire, gardant les mêmes initiales » UMP ; au 4 novembre, la page wikipedia.org qui lui est consacrée rappelle qu’il « soutient les gouvernements nommés par Jacques Chirac entre 2002 et 2007, puis par Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2012 », avant que ce dernier ne le fasse renommer, trois ans plus tard, Les Républicains. En 2004, alors que Michel Barnier avait remplacé Dominique de Villepin au ministère des Affaires étrangères le 31 mars, Jean-François Copé restait porte-parole du Gouvernement et ministre délégué lors du remaniement du 29 novembre, mais désormais au Budget (à l’Intérieur auparavant).
8 Dans son éditorial du jour, Philippe Rioux y voit « un coup de communication (…) pour éviter un vrai débat plus au fond » (« Suppression d’un jour férié : écran de fumée », ladepeche.fr 11 nov. 2024).
9 V. mon billet du 15 septembre 2018, avec un peu d’histoire des idées (solidaristes).
10 Au passage, Louis Maurin, « Neuf millions de pauvres, un chiffre exagéré », inegalites.fr 24 oct. 2024 : « Au seuil à 50 % du niveau de vie médian – seuil plus restrictif – notre pays compte déjà cinq millions de pauvres. Un niveau suffisant pour justifier tous les appels à la solidarité ».
11 Benoît Bréville, « Une idée dangereuse », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 1, cet éditorial renvoyant à Mark Blyth, Austerity. The History of a Dangerous Idea (Oxford University Press, 2013).
12 Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, p. 11 : suit une énumération reproduite par Alain Policar dans sa Préface à FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p. (pp. 4 et s., spéc. page 10).
13 V. toutefois Jean-Marc Proust, « Supprimer un jour férié ? Oui, mais pour en faire une journée sans religions », marianne.net 7 nov. 2024 (extrait).
14 Dans un éditorial, Laurence Ferrari postule qu’il s’agira en définitive de supprimer « un jour de fête catholique » (cnews.fr 30-31 oct. 2024 ; dans le même sens, v. celui d’Arnaud Alibert, « Jours fériés, jours heureux, jours sérieux », la-croix.com le 31).
15 Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 344 à 347 ; je tiens un extrait de ces trois pages à la disposition de toute personne qui le souhaiterait grâce au formulaire de contact – je l’avais opéré pour le partager à mes étudiant·es de la faculté de droit de Grenoble, le 29 mars 2018, avec notamment cet article de presse intitulé « L’histoire des jours fériés religieux » (et ceux « chrétiens dans l’Union européenne » : v. Nicolas Senèze, la-croix.com 1er juin 2012).
16 « Dans le monde de l’entreprise », le Rapport proposait d’instaurer la « pratique du crédit du jour férié [qui] est déjà courante dans certains pays ou organisations internationales » : v. la citation reprise à la fin de ce document de l’Académie de Versailles, « Faut-il remettre en question le calendrier des jours fériés à l’école au nom de la laïcité ? », 7 p . ; à la page 6 se trouve reproduit un extrait du Vademecum « La laïcité à l’école » (déc. 2021, fiche 16). Concernant ce texte et outre ma note sous CAA Lyon, 23 juill. 2019, n° 17LY04351 (« Interdiction des mères voilées dans les locaux scolaires : quand la laïcité repose sur une croyance », Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai), v. récemment FNLP, Vade-mecum laïcité : une intrusion dans l’école au nom des obscures valeurs de la Macronie, mai 2024 – floréal CCXXXII, n° 28 de la collection Arguments de la Libre Pensée, 62 p., avec une préface de l’historienne Valentine Zuber et une recension par Christian Eyschen, pp. 47 et s., du livre dirigé par Françoise Lantheaume et Sébastien Urbanski, Laïcité, discriminations, racisme. Les professionnels de l’éducation à l’épreuve (PUL, 2023). Dans la première partie (pp. 7 et s.), Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger taclent aux pages 11 et 16 ce « Conseil [des “sages”] qui n’a jamais répondu aux demandes de la Libre Pensée pour agir sur des cas concrets en défense de la Laïcité, mais qui consacre tous ses efforts à la chasse aux musulmans » ; « les recensions des atteintes “graves” à la Laïcité se résument au port de signes et vêtements religieux (devinez lesquels), mais jamais à la loi Debré, les autres lois antilaïques ou la Hanoucca à l’Élysée ». V. à ce sujet Romain David, « Hanouka à l’Elysée : « “Faute morale”, “idée stupide”, “sujet explosif”… Les sénateurs fustigent l’attitude d’Emmanuel Macron », publicsenat.fr 8 déc. 2023 ; Nicolas Cadène, « La présence du président de la République à une manifestation religieuse n’est pas le problème », vidéo lemonde.fr ; Guillaume Baticle et Jean-Paul Markus (relus par Clément Benelbaz), lessurligneurs.eu les 11 et 22 ; CE, 30 oct. 2024, Association des libres penseurs de France (ADLPF) et a., n° 490587, 491096, 492651, 492656 et 492663, cons. 2, estimant qu’« il ne ressort pas des pièces du dossier que le Président de la République aurait pris une décision autorisant la tenue d’une cérémonie religieuse » (rendant compte de la décision, lemonde.fr (avec AFP) cite Laurent Domingo : « Lors de l’audience, le 26 septembre, le rapporteur public avait souligné que la requête “n’a pas l’objet que les requérants aimeraient lui donner » car « il n’existe pas de décision administrative d’allumer la bougie” ») ; comparer l’extrait placé au début de la vidéo précitée : le 7 décembre, le grand rabbin de France Haïm Korsia avait pourtant bien pris soin de solliciter une telle autorisation…
17 « Michèle Teboul, directrice du Conseil Représentatif des institutions juives de France (Crif) et l’islamologue Ghaleb Bencheikh, décrivent ces deux événements » (qu’il n’est pas possible de dater selon les calendriers grégorien – dont dépend le jour de l’An – ou révolutionnaire, auquel se réfère la Libre Pensée dans ses publications précitées ; v. le convertisseur du site herodote.net) : « Yom Kippour est célébré huit jours après le nouvel An, Roch Hachana. La date est déterminée par le calendrier juif – qui compte 11 mois – donc chaque année, c’est décalé. Et tous les 33 ans, Kippour et l’Aïd-el-Kebir sont fêtés le même jour » ; « Une fois que la petite fête est fixée (l’Aïd-el-Fitr, NDLR), celle-ci en découle automatiquement puisque c’est 70 jours après la fin du ramadan. L’Aïd-el-Kebir n’est pas assujetti à l’observation de la lune, la date est donc unanime » (entretien avec Audrey Avesque, « L’Aïd et Kippour célébrés en même temps, une première depuis 33 ans », laprovence.com 3 oct. 2014).
18 De l’autre membre de la commission Stasi sus-évoqué, Patrick Weil (entretien avec, par Samuel Lacroix), « Il faut garantir à chacun un jour férié au choix », philomag.com 26 mai 2023
19 « Mais pourquoi le lundi de Pâques est-il férié alors qu’il ne correspond à rien ? », tf1info.fr 21 avr. 2019 ; v. aussi Charles Conte, « Les banquets du “vendredi-dit-saint” contre les interdits religieux », blogs.mediapart.fr le 18 : « La date de Pâques, fête mobile, est traditionnellement fixée au dimanche après la pleine lune qui suit le 21 mars (équinoxe de printemps). Le carême (du latin quadragesima qui signifie quarantième ou quarantaine) désigne la période de quarante jours (dimanches non compris) qui précède Pâques. Peu suivi de nos jours, le carême était comparable, par la rigueur de ses interdits, au ramadan musulman. C’était une période de jeûne, plus ou moins rigoureux, en particulier pour la viande, et d’abstinence sexuelle obligatoire pour tous ».
20 « Le dimanche de Pâques (…) détermine à la fois les dates de l’Ascension [un jeudi, à ne confondre avec l’Assomption, le 15 août] et de la Pentecôte » (Maxime Ferrer, générateur lemonde.fr 1er janv. 2022- 30 oct. 2024) ; elle se célèbre « à une date mobile calculée par le Comput. Elle tombe toujours un dimanche entre le 10 mai et le 13 juin. Elle se poursuit le lendemain dans certains pays par un lundi férié ou chômé payé, dit “lundi de Pentecôte” » (wikipedia.org au 31 oct. 2024).
21 Comparer Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger, « Errare humanum est, sed vademecum diabolicum », in FNLP, Arguments n° 28 préc., p. 16 : « Rappelons la position de la Libre Pensée [v. aussi la note suivante] : (…) [l]a Laïcité n’a pas besoin de journée officielle, mais de mesures visant à la défendre concrètement. Le reste est du cinéma médiatique, et ce n’est pas une journée par an qu’il faut la défendre, mais tous les jours ». Je ne me souviens pas d’avoir déjà traité de cette question sur ce site ; le 20 novembre 2018, à l’occasion de la « Journée des droits de l’enfant », j’en abordais une connexe en écrivant à propos des jours fériés religieux que, dans un État laïque de droits, leur remplacement par des journées internationales comme celle de ceux de tous les enfants pourrait être envisagé. Le risque serait toutefois d’alimenter les critiques des détracteurs d’une prétendue religion de ces droits (en renvoyant à la conclusion générale de ma thèse préc., pp. 1227-1228).
22 Comparer Christian Eyschen, recensant le livre de Jean-Marc Schiappa, La France n’a pas de racines chrétiennes, fnlp.fr 26 mars 2017 ; Jacqueline Lalouette (entretien avec, par Samuel Dufay), « Les jours fériés, une tradition française : “Le sens de certaines fêtes s’est transformé” », lexpress.fr 29 mai 2023 (extrait) : « Depuis longtemps, les libres penseurs réclament la suppression des fêtes religieuses, ou, à défaut, leur changement de signification. Ainsi, dès les années 1890, la Fédération française de la Libre Pensée laïcisa la fête de Noël en célébrant des fêtes de l’enfance dites “Noëls humaines”». Recensant son livre Jours de fête. Jours fériés et fêtes légales dans la France contemporaine, Tallandier, 2010, v. Robert Solé, lemonde.fr le 22 sept. ; soulignant les « analyses neuves sur la laïcisation de l’espace et du temps » qui figuraient déjà dans sa « thèse de doctorat d’État », publiée sous le titre La libre pensée en France (1848-1940), Albin Michel, 1997 (préface de Maurice Agulhon), v. la recension de Jean-Marie Mayeur, Annales 1999, n°54-6, pp. 1403 à 1405 (spéc. p. 1404).
23 Après les développements susmentionnés de ma thèse (2017), j’aborde à partir de la page 348 le mécanisme de dispense de l’enseignement religieux en Alsace-Moselle, évoqué par ailleurs dans mes billets du 9 juillet 2018 et celui publié à l’attention première de mes L3 en Sciences de l’éducation – le 30 avril 2020 (dans le II. B. ; v. plus largement celui autour de l’appel de note 11 dans ma dissertation du 26 mars de la même année, rédigée pour mes M1 en contentieux constitutionnel). Ajout au 23 novembre, concernant les références de Jean Baubérot à la « question du voile » et « la loi Debré », d’un renvoi à d’autres billets, d’une part des 26 janvier et août 2018, d’autre part aux (appels de) notes 15 à 19 pour le dernier publié (fin septembre 2024).
24 Jean Baubérot (entretien avec, par Charles Mercier), in FNLP, Arguments n° 29 préc., sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p., pp. 107 et s., spéc. 108-109 (souligné dans le texte). Alors secrétaire général de la Libre Pensée, son désormais vice-président écrit page 21 : « À la fin du Rapport, l’Alsace-Moselle est mentionnée, mais c’est pour soutenir le maintien du Statut clérical d’exception auquel “les habitants sont particulièrement attachés” (v. ma thèse, pp. 359-360) en mélangeant sciemment les avantages sociaux et les privilèges religieux qui n’ont rien à voir avec » (le lien entre les deux ne peut cependant pas systématiquement être balayé d’un revers de main : v. Isabelle Nassoy, lalsace.fr 1-2 avr. 2021 ; Éric Sander, « Non à la suppression des jours fériés et chômés spécifiques à l’Alsace et à la Moselle », pétition change.org 2 juin 2023) ; avec Joachim Salmero, alors président de la Fédération (entre 1996 et 2007 selon la notice rédigée par Hugues Lenoir, complétée par Guillaume Davranche et Rolf Dupuy, maitron.fr), Christian Eyschen avait été auditionné par la Commission le 3 octobre 2003 : le texte de leur intervention est reproduit pp. 40 et s., avec dix pages plus loin au titre des propositions de la Libre pensée « la fin [de ce Statut], que nous ne saurions confondre avec les lois sociales progressistes acquises dans cette région ». Une tribune récente fait allusion à ces territoires, « où deux millions de salariés bénéficient, pour des raisons historiques, d’un régime de santé spécial. Sa généralisation dépend seulement de la volonté politique du gouvernement et des parlementaires de supprimer la rente des assurances-maladie privées dites “complémentaires”, moins égalitaires, moins solidaires et surtout moins efficientes que la Sécurité sociale » (François Bourdillon et alii, « Pour une assurance complémentaire gérée par la Sécurité sociale », Le Monde 27-28 oct. 2024, p. 27, quelques lignes après cet extrait – la Une du quotidien étant titrée « Santé : vers une hausse du ticket modérateur », avec un renvoi à la page 8 (v. déjà la légende de ma première illustration le 31 décembre 2023) ; v. aussi Alban Beaudouin, Jean-Loup de Saint-Phalle et Richard Monvoisin, « Pour une Sécurité sociale de la mort. Les obsèques ne sont pas une marchandise », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 21 (extrait) : après avoir renvoyé à leur encadré intitulé « Des édits de Louis XIV à la loi Sueur [du 8 janvier 1993] » (extrait, mentionnant les « libres-penseurs ») et au livre de Laura Petersell et Kévin Certenais, Régime Général. Pour une Sécurité sociale de l’alimentation (Riot, 2022), les auteurs en défendent une qui, « suivant l’esprit qui présida à sa création en 1945, [couvrirait] le risque décès, par l’universalisation et l’automatisation des aides existantes et une assistance administrative gratuite aux familles » ; outre celle de la CPAM sont évoquées dans l’article les aides de la Carsat et la CAF, en précisant qu’un « milliard d’euros par an ne seraient jamais réclamés, selon le site Tranquillite.fr » (où l’on trouve notamment ce texte de son fondateur Teddy Bredelet, 1er janv. 2024).
25 J’espère avoir l’occasion, dans les mois à venir, de révéler ce qui m’avait conduit à le reconnaître et l’aborder, avenue Félix Faure à Valence, lors de la « fête du Travail Journée internationale de lutte pour les droits des travailleuses et travailleurs ; je m’en tiens ici à confier qu’après quelques minutes d’échanges, Jean m’avait donné un bulletin de la Fédération Ardéchoise et Drômoise de Libre Pensée (FADLP, ou LP 07-26, dont il était secrétaire), afin d’utiliser l’adresse mail figurant en dernière page ; j’allais lui écrire au terme de ce mercredi 1er mai et il me répondra le lendemain, en m’adressant une abondante documentation qui viendra alimenter un texte projeté depuis quelques temps. Si j’avais pu avoir un aperçu de son activité militante (v. par ex. Frédérique Fays, « Les Libres Penseurs, ardents défenseurs de la laïcité », ledauphine.com 20 août 2016, à propos du Congrès national au lycée agricole du Valentin ; Thibaut Carage, « Loi Immigration : plus de 500 personnes ont manifesté contre une loi “raciste” », 14 janv. 2024) et l’écouter dans l’émission de Radio Diois enregistrée à Die le 9 mars (rdwa.fr le 15), j’ignorais son « goût pour l’architecture » et son passé de postier en Ardèche – où il été candidat aux législatives en 1986 –, tout comme le fait qu’il a « été correspondant local du Dauphiné libéré, de 2015 à 2019 », où travaille sa fille Agathe (A.B. et T.C., « Nécrologie : Jean Debraine, figure de l’engagement militant », édition du 21 oct. 2024, p. 23 ; texte posté sur Facebook par la FADLP, à laquelle il a adhéré en 1995). Le lendemain de la publication de ce Carnet, le quotidien consacrait sa Une à Charles Aznavour (1924-1918) ; page 3, une colonne était intitulée « Ces lieux marqués à jamais » : si la « liste est non exhaustive », elle commence par « le square qui porte son nom » à Valence, depuis son inauguration en sa présence en mai 2011, et qui se trouve devant le Centre du Patrimoine Arménien (CPA). Elle se termine surtout par le buste offert par la ville de Talin à sa jumelle Bourg-lès-Valence (en face de la rue du port, où j’ai habité pendant près de quinze ans). Il est alors sommairement indiqué : « Samedi 21 septembre 2024, l’hymne arménien, La Marseillaise et les célèbres chansons de l’artiste ont retenti au square Michel-Terisse (…) ». La ville bourcaine publiait alors une vidéo, sur sa page Facebook, sans même faire l’effort de couper « la bénédiction de la statue par deux prêtres d’églises arméniennes » (Lisa Guinic, francebleu.fr le 22). Il est probable que cela n’ait pas échappé au secrétaire de la FADLP…
26 Suivant le décret n° 2006-388 du 31 mars, et outre les 1er et 8 mai visés par l’article L3133-1 du Code du travail, le mois de mai est aussi celui de la Journée nationale des mémoires de la traite et de l’esclavage et de leurs abolitions, le 10 (wikipedia.org au 13 mars 2024) ; cette dernière est commémorée par des jours fériés spécifiques à l’outre-mer : le 22 en Martinique, le 27 en Guadeloupe et le 28 à Saint-Martin – depuis 2019, ainsi que le rappelait cette année Estelle Gasnet (soualigapost.com le 27), en précisant toutefois qu’« une erreur “matérielle” s’est glissée [en 2018 à l’article L3422-2] et n’a jamais été corrigée ». Ce texte législatif mentionne également le 10 juin en Guyane, le 27 avril à Mayotte et le 20 décembre à La Réunion (v. aussi Johanne Chung To Sang, Harry Amourani et Florent Marot, « Supprimer un jour férié de plus dans l’année ? À La Réunion, peu apprécient l’idée », le 30 oct.). Concernant la Polynésie, v. Delphine Barrais, « Ces îles françaises ont trois jours fériés supplémentaires et l’un d’eux va changer, voici pourquoi », ouest-france.fr le 12 juin : « le 5 mars (arrivée de l’Évangile), le 29 mars (Vendredi saint, férié comme en Alsace et en Moselle) et, à partir de 2025, le 20 novembre » (Matari’i i nia, qui « correspond au lever des Pléiades [constellations] » et viendra remplacer « la fête de l’Autonomie instaurée en 1985 par Gaston Flosse », dont la date rappelait « l’annexion de la Polynésie par la France le 29 juin 1890 »).
27 « 11 Novembre : pourquoi ce jour est-il férié, pourrait-il ne plus l’être ? », lavoixdunord.fr 5 nov. 2024 : « Ce jour-là [en 1918], à 5 h 45, dans le wagon-salon du Maréchal Foch, le ministre d’État allemand Erzberger signait l’armistice, marquant la fin des combats de la Première Guerre mondiale ». Outre le rassemblement ardéchois de Joyeuse, depuis vingt-et-un ans, la FADLP avait initié le 11 novembre 2023 son pendant drômois de Peyrins (avec la Fédération Nationale Laïque des Associations des Amis des monuments Pacifistes) ; à cette occasion, Jean Debraine avait prononcé un discours (reproduit dans Le Mécréant ardécho-drômois n° 175 – Bulletin de la FADLP – 4e trimestre 2023, pp. 10 à 12), dans lequel il affirmait : « Oui, ce qu’a fait le Hamas s’apparente à un crime de guerre du type d’Oradour-sur-Glane [le 10 juin 1944]. Mais ce que fait Tsahal aujourd’hui, cela s’apparente à un génocide du Peuple palestinien » (p. 11). Actualisé du fait de « l’invasion du Liban », le message de cette fin d’année 2024 reprend celui de Jean-Sébastien Pierre à Sartilly (Manche), le dimanche 17 mars (« Devant la stèle des caporaux de Souain, le président de la Libre pensée a appelé aux cessez-le-feu [à Gaza et en Ukraine] », ouest-france.fr le 18). Rappelant que la LP « est anticléricale, antimilitariste et internationaliste [et ne peut donc] rien avoir de commun avec les courants hégémoniques aujourd’hui au sein de la mouvance sioniste, qui prônent la synthèse entre le nationalisme, le militarisme et le cléricalisme et entendent embrigader tous les juifs du monde (estampillés « diaspora ») sous sa bannière », v. le dossier réalisé par Pierre-Yves Modicom, Claude Singer, Quentin Dauphiné, José Arias et Jean-Marc Schiappa pour la Commission Administrative Nationale de la FNLP, « Contre l’antisémitisme, dissiper les mirages du sionisme », La Raison juill.-août 2024, n° 693, pp. 16-21, spéc. p. 19 ; je renvoie aussi à la fin de mon billet du 15 janvier, et au début de celui du 9 avril, en ajoutant le lien conduisant aux ordonnances des 24 mai, 28 mars et 26 janvier ; dans la première, intitulée Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), v. le § 49, pp. 16-17 (avec la déclaration de Philippe Lazzarini du 13 se terminant sur le « sort des enfants de Gaza », dont des « centaines de milliers n’ont plus accès à l’éducation ») ; v. aussi l’analyse de Rafaëlle Maison, « À la Cour internationale de justice, un revers pour Israël », orientxxi.info le 30, ce reportage de CNN, publié sur X par le compte Caisses de grève le 20 avr. et ces liens ultérieurs : à propos de l’avis consultatif du 19 juillet, Jean-Pierre Filiu, « Quand la CIJ parle d’un seul et même “territoire palestinien occupé” », lemonde.fr le 18 août, Catherine Maia et Ghislain Poissonnier, « Avis de la CIJ de 2024 relatif à l’occupation du Territoire palestinien : une analyse au prisme du droit international des droits humains », La Revue des Droits de l’Homme ADL, le 7 oct., ainsi que Farah Safi et Patrick Zahnd (Juristes pour le respect du droit international), « Ventes d’armes à Israël : “La position de la France demeure timide et en retrait de ses engagements internationaux” », lemonde.fr le 5 nov. ; d’un point de vue éducatif et sanitaire, « Éducide en Palestine – Défendons le droit universel à l’éducation ! », solidarite-laique.org le 4 juin (renvoyant pour ce terme à Neve Gordon, professeur de droit à Londres et Lewis Turner, maître de conférences en politique internationale à Newcastle ; v. aussi le 27 oct.) ; « Bande de Gaza : le médecin humanitaire Raphaël Pitti fait part de “sa colère très profonde” face à l’absence “de pression politique” de la part “des Occidentaux” », francetvinfo.fr le 16 août ; Céline Martelet, « Les enfants de Gaza privés d’école », politis.fr le 27 (extrait) ; « UNRWA bannie d’Israël : crime et écœurement », regards.fr le 29 oct. (confirmant ce telex intitulé « L’UNRWA, un témoin indésirable ? », monde-diplomatique.fr le 2 févr.), « Proche-Orient : les enfants pris au piège d’une guerre sans fin », unicef.fr le 6 nov. (ajouts « mandats d’arrêt émis mercredi 21 novembre par la Cour pénale internationale (CPI) contre le premier ministre israélien (…) et son ex-ministre de la défense, Yoav Gallant », à partir de Stéphanie Maupas, « Le mandat d’arrêt de la CPI contre Benyamin Nétanyahou, un tournant pour la justice internationale », lemonde.fr extrait ; dans un entretien avec Axel Nodinot, Béligh Nabli note qu’il est venu « toutefois s’entrechoquer avec un autre événement – politique, celui-là – de la veille : le rejet [au Conseil de sécurité de l’ONU] de la résolution appelant à un cessez-le-feu à Gaza et au Liban, après que les États-Unis ont usé de leur droit de veto » ; il n’en demeure pas moins que cette décision « vient ouvrir une brèche, une perspective qui n’existe pas aujourd’hui sur le plan politique et diplomatique, dans la mesure où Israël continue de bénéficier d’un soutien de ses principaux alliés » : v. humanite.fr le 21 ; Bastien Loeuillot, « “Immunité” de Nétanyahou : une pluie de condamnations à gauche, de vives critiques de juristes et d’ONG », liberation.fr (avec AFP) le 27 : « “La France a cédé aux exigences israéliennes, on n’aurait pas fait ça avec Poutine”, regrette l’eurodéputée insoumise Rima Hassan ».).
28 Je reprends ici les formules d’un message de la Commission administrative de la FADLP le 18 octobre dernier, précisant que cette cérémonie se déroulerait à Mercurol le vendredi 1er novembre (Justine Audollent, « Toussaint 2024 : pourquoi le 1er novembre est-il un jour férié ? », rtl.fr 1er nov. 2024). Ce jour-là, je fêtais mes quarante ans, à quelques encablures des « chemins de terre de Gilhac-et-Bruzac » – évoqués dans la nécrologie précitée ; il y est ensuite noté que, sa « fibre humaniste, internationaliste aussi, Jean Debraine la ressent dès ses 14 ans et un voyage en Algérie ». Les Fils de la Toussaint, tel est le titre du premier volume sur La guerre d’Algérie d’Yves Courrière (Fayard, 1968) ; ainsi que le rappelait Denis Sieffert il y a une dizaine d’années, « ces indépendantistes algériens qui, le 1er novembre 1954, ont déclenché l’insurrection », étaient neuf (« Aït Ahmed, l’homme qui a gagné la guerre et perdu la paix », politis.fr 27 déc. 2015 ; v. aussi Camille Renard, radiofrance.fr 12 janv. 2021 : « En 1989, à l’occasion d’un documentaire de Patrice Gélinet diffusé sur France Culture, Hocine Aït Ahmed témoignait des sources de son engagement en Algérie (…), à partir de l’événement fondateur du massacre de Sétif » ; sur cet « autre 8 mai 1945 », écouter Anaïs Kien, podcast Le Journal de l’histoire 11 mai 2021). Au passage, « Football : Rachid Mekhloufi, attaquant légendaire [de l’ASSE] et symbole de l’indépendance algérienne, est décédé », rfi.fr 8 nov. 2024 (v. aussi ce texte « pour les jeunes », signé Adel Bentaha pour sofoot.com le 9 ; ajout le 23 du « bel hommage de l’AS Saint-Étienne », au coup d’envoi du match contre Montpellier, et de cette vidéo sur Mekloufi « vu par Éric Cantona – Les rebelles du foot », Portraits du Monde 26 mai, spéc. l’échange avec Bernard Pivot à partir de la 10ème minute, « les morts de 45 à Sétif » étant aussi évoqués vers la 3ème par Michel Nait-Challal, auteur de Dribbleurs de l’indépendance. L’incroyable histoire de l’équipe de football du FLN algérien, éd. Prolongations, 2008).
29 Le 19 mai, je lui avais adressé l’extrait de thèse précité(e), à la veille du lundi de Pentecôte (v. le début du présent billet). Nous avions alors plusieurs fois remis notre rencontre à plus tard, en pensant pouvoir nous voir à l’occasion des AmFIs à Châteauneuf-sur-Isère (la Fédération Ardèche-Drôme de la Libre Pensée tenait un stand au village associatif) ; y passant le samedi 24 août, je n’avais pas voulu interrompre la conversation dans laquelle il était engagé – alors que j’étais moi-même pressé. On croit toujours qu’on pourra recroiser une personne à l’avenir…

Handicap et laïcité : deux postes d’observation du gouvernement Barnier

Photo des dernières secondes de la finale des JO 2024, reprise depuis l’article de Prince J. Grimes, « Gabby Williams’ buzzer-beater against Team USA drew so many Kevin Durant toe comparisons in the gold medal game », usatoday.com 11 août 2024 (v. aussi Pierre-Andréa Fraile, « WNBA – En feu aux US, Gabby Williams fait involontairement le buzz avec… Kevin Durant ! », parlons-basket.com 6 sept. 2024 ; « Éliminée des play-offs [avec le Seattle Storm], Gabby Williams rejoint officiellement le Fenerbahçe », lequipe.fr le 29)

Après plusieurs articles intéressants à analyser1V. en particulier celui mis en ligne le 30 juillet : « Dans un intertitre, le journal [Le Monde] souligne que “Lucie Castets s’accroche (…). L’Élysée s’agace de la posture jugée vindicative de la trentenaire qui entend appliquer le programme du [Nouveau Front Populaire], comprenant le rétablissement de l’impôt sur la fortune ou l’abrogation de la réforme des retraites [v. mes précédents billets]”. (…) Pourquoi ne pas titrer : “Macron fera tout pour bloquer le programme du NFP” ? » (Daniel Schneidermann, « Matignon : l’aimable série d’été du Monde », 26 août 2024)., des journalistes écrivaient au début du mois : « Le chef de l’État est rentré dans le money time, comme on dit au basket-ball, ce moment où tout se joue »2Sandrine Cassini et Nathalie Segaunes, « Cazeneuve reçu par Macron, sans certitudes », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7 ; le même jour, Charlotte Belaïch et Jean-Baptiste Daoulas, « Casting pour Matignon. Au suivant ! », Libération, p. 8 : « Puisque Macron ne voit aucun profil politique capable d’éviter une censure immédiate à l’Assemblée, place donc à l’option de la société civile avec Thierry Beaudet » (elle sera de courte durée)..

Le 8 août, je terminais mon précédent billet sur l’hypothèse d’une nomination à Matignon ; c’était sous-estimer la situation dans laquelle Emmanuel Macron allait se placer3Au passage, « Emmanuel Macron a-t-il déclaré que “le Président ne devrait pas pouvoir rester s’il avait un désaveu en termes de majorité” ? », liberation.fr 30 août 2024, rappelant le contexte de cette affirmation, « dans la nuit du 18 au 19 mars 2019 », après que la parole a été « donnée à Olivier Beaud, professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon-Assas »., en cherchant à se prémunir d’une (trop rapide) motion de censure du Rassemblement National : ce dernier obtiendra donc que Xavier Bertrand ne soit même pas ministre de Michel Barnier4John Timsit, « Gouvernement : Marine Le Pen fait planer la menace d’une censure si Éric Dupond-Moretti ou Xavier Bertrand étaient nommés », lefigaro.fr 18 sept. 2024. Après ce scalp, tout porte à croire que « Marine Le Pen sauvera le gouvernement tant qu’elle le jugera utile pour légitimer son programme et alimenter le récit de son influence croissante » ; déjà, lors de « l’adoption de la dernière loi immigration5V. le long article de Romain Imbach, Maxime Vaudano et Stéphanie Pierre, « La loi “immigration”, dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945 », lemonde.fr 25-26 févr. 2024, en décembre 2023 », elle avait pu « revendiqu[er] une “victoire idéologique” »6Clément Guillou et Corentin Lesueur, « La stratégie du RN pour mettre le gouvernement au service de ses idées », Le Monde 24 sept. 2024, p. 8, après la chronique de Solenn de Royer, « Le grand retournement » (avant de ne pouvoir s’empêcher d’écrire que « les chances de la coalition de gauche de se voir proposer Matignon » aurait été « torpillé[es] » par… Jean-Luc Mélenchon le 7 juillet à 20h, ce qui constitue là aussi un joli retournement) ; v. aussi l’éditorial intitulé « Gouvernement : une alliance [de perdants] à rebours du Front républicain », p. 29 (en ligne). et elle ne peut donc que se satisfaire que Bruno Retailleau soit à l’Intérieur7« “Quand on mélange serviettes et torchons, au bout du compte cela (…) sclérose la France et la conduit dans le mur”, scandait-il encore durant l’été face aux appels à une coalition. “Celui qui pourra me faire retourner ma veste n’est pas encore né” » (« Figure d’une droite conservatrice, irritant de la macronie… Qui est Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l’Intérieur ? », lamontagne.fr (avec AFP) 21 sept. 2024 ; pour d’autres déclarations, aussi tonitruantes qu’elles auront été rapidement remisées, v. Célestine Gentilhomme, « Le rétropédalage express du député RN Jean-Philippe Tanguy après avoir qualifié Michel Barnier de “stupide” », lefigaro.fr le 8). : la veille de la nomination du premier ministre (le 5 septembre), il revenait sur RMC sur les articles censurés en janvier8CC, 25 janv. 2024, Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, n° 2023-863 DC : sur un total de 35, « 32 des déclarations de non-conformité à la Constitution l’ont été au motif que ces articles constituaient des “cavaliers législatifs”. Autrement dit, ils ont été considérés comme ayant été intégrés par des amendements n’ayant pas de lien, même indirect, avec le projet de loi initial, et le Conseil constitutionnel n’a cessé de le préciser, ces censures ne présagent rien de leur conformité ou non à la Constitution sur le fond » (Nicolas Klausser, Véronique Champeil-Desplats et Marie-Laure Basilien-Gainche, « Petit à petit, l’illibéralisme fait son nid : quand la loi immigration annonce d’autres atteintes à l’État de droit. », La Revue des Droits de l’Homme 2024, n° 25, mis en ligne le 6 févr., soulignant que ces censures remarquées ne doivent pas faire oublier que « ce ne sont pas moins de 52 dispositions de restrictions ou de fragilisation des droits des étrangers qui sont entrées en vigueur dans notre ordre juridique vendredi 26 janvier 2024 ») ; il en va ainsi des articles censurés aux cons. 47 à 55 (à comparer avec l’appel de note 12 de mon billet du 31 décembre)., en invitant à les « reprendre » dans un nouveau texte9Cité par Jacques Paugam, « Gouvernement Barnier : à l’Intérieur, Bruno Retailleau prêt à relancer l’offensive sur l’immigration », lesechos.fr 21-22 sept. 2024 ; v. aussi ce tweet de Daniel Schneidermann, relayant l’édito de Patrick Cohen le 20 – juste avant sa nomination – et les réactions recensées par Robin Serradeil (« Une “régression vers les origines ethniques” : le dérapage de Bruno Retailleau, sénateur LR, au sujet des émeutes en France », ladepeche.fr 5 juill. 2023). Ajout des propos tenus par l’ancien premier ministre sur France Inter (« Nouvelle loi immigration : “pas une priorité” pour Gabriel Attal, Jordan Bardella “attend” le texte “avec impatience” », liberation.fr (avec AFP) 14 oct. 2024), avec la réaction du ministre de l’Intérieur le lendemain sur France 2 : « Moi, je ne propose rien de plus que ce qui a déjà été voté par la majorité de Gabriel Attal il y a, encore une fois, quelques mois » (« Vers une nouvelle loi immigration en 2025 : à quoi faut-il s’attendre ? », sudouest.fr (avec AFP) le 15)….

Plus généralement, « [c]ette figure des Républicains n’a pas hésité à marcher dans les pas du RN depuis des années, en adoptant par exemple l’expression “Français de papiers” » ; Michel Barnier avait quant à lui fait de même en s’affirmant, fin 2021, « favorable à l’interdiction du voile au sein des universités mais aussi “dans l’espace public” »10Nejma Brahim et Marie Turcan, « Immigration, racisme, islamophobie : le “grand danger” du nouveau gouvernement Barnier », Mediapart 23 sept. 2024, renvoyant sur ce dernier point au « premier débat entre les candidats au Congrès des Républicains » (LCI et lefigaro.fr 8 nov. 2021). Cet article s’ouvre sur ce tweet du 20 avril 2013, dans lequel Othman Nasrou déclarait « que le racisme et l’homophobie [seraient] l’apanage d’une infime minorité » ; il est désormais secrétaire d’État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations… Il est rappelé plus loin que « le nouveau ministre de l’enseignement supérieur, Patrick Hetzel, [s’est signalé par la co-signature avec Michèle Tabarot, en avril 2024, d’]une proposition de résolution en faveur de la création de ce qu’ils appellent une “commission d’enquête relative à l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes dans l’enseignement supérieur” » ; « L’interdiction de l’abaya à l’école, mesure phare portée par Gabriel Attal à son arrivée à l’Éducation nationale, a [enfin] rencontré un fort succès, à l’époque, chez (…) Astrid Panosyan-Bouvet, nouvelle ministre du Travail » (v. CE, 27 sept. 2024, Syndicat Sud Éducation et associations La voix lycéenne, Le poing levé et Action droits des musulmans, n° 487944, dans le prolongement des ordonnances des 7 et 25 septembre 2023, citées dans mon billet du 15 janv. et l’article de Stéphanie Hennette-Vauchez, « École publique, école privée : la laïcité à hue et à dia ? », Revue du droit des religions 2024, n° 17, mis en ligne le 17 mai, §§ 6-7)..

En 1999, il avait « cofondé (…) le club Dialogue et Initiative, créé pour préfigurer l’union des droites »11Pierre Jova, « Michel Barnier, “l’ancien monde” à Matignon », lavie.fr 11 sept. 2024 : « Pour comprendre le Premier ministre, il faut partir des faubourgs de Grenoble, où il est né en 1951, et arpenter sa chère Savoie – la vallée de la Tarentaise, précisément – dont il a l’accent » ; « Outre Jean-Pierre Raffarin, l’autre figure de Dialogue et Initiative était Jacques Barrot, héraut de la démocratie-chrétienne en France ». ; c’est à la demande de ce groupe de réflexion, ayant porté l’un de ses membres à Matignon (déjà), que François Baroin avait rédigé – quatre ans plus tard – l’important rapport intitulé Pour une nouvelle laïcité12Je renvoie sur ce point à la note de bas de page 435 (n° 2767) de ma thèse, à laquelle il est possible d’accéder directement en tapant le mot-clé « Barnier » ; j’enchaîne page suivante en citant la Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République (à propos de laquelle v. FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024, 119 p. Surpris par la dénonciation de la loi Jospin – v. spéc. pp. 34-35, 54 et 75 –, je renvoie à mes pp. 497 et s.).. Ce texte constitue un jalon essentiel de l’appropriation de « la laïcité » à droite, qui est allée cette fois-ci jusqu’à envisager un ministère dédié13V. la réaction de Pablo Pillaud-Vivien, « Un ministère de la Laïcité ? “C’est une provocation à l’égard de la gauche (…), ça va devenir un ministère de l’islamophobie” » (RTL 19 sept. 2024)..

« Anne Genetet (Renaissance) : “Les LR n’ont jamais voulu travailler avec nous, ce n’est pas faute de leur avoir tendu la main, ils nous ont tapé dessus” », bfmtv.com 20 sept. 2024 : proposée ce matin-là, comme cela apparaît au bas de cette capture d’écran, la députée macroniste du Nord Violette Spillebout dénoncera des « coups bas » (v. John Timsit, lefigaro.fr le 23) ; auparavant, « c’était plutôt la députée LR du Doubs et vice-présidente de l’Assemblée nationale Annie Genevard qui tenait la corde » (Marc Belpois, « Qui est Anne Genetet, nouvelle ministre de l’Éducation du gouvernement Barnier ? », telerama.fr 21 sept. 2024 , v. aussi les références citées à la note 17 du présent billet)

Nonobstant sa « disparition »14Pour une autre (moins heureuse), v. la chronique de Stéphane Foucart, « Pour saisir la disparition de l’écologie à droite, il suffit de comparer le Michel Barnier de 1990 et celui de 2024 », lemonde.fr 22 sept. 2024 (extrait) ; « questionner les “conflits de besoins” qui émergent, notamment autour de la question écologique », tel est l’un des thèmes du rapport annuel du collectif Nos services publics (NSP) selon Frantz Durupt (liberation.fr le 24, introduisant un entretien avec Marie Pla, sa co-coordinatrice)., il convient de faire observer que l’objectif n’était pas, là encore15V. ma thèse préc., Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 21 et 556-557, de viser les établissements catholiques sous contrat16V. la tribune ironique de Jean Baubérot-Vincent, « Enfin une bonne nouvelle : la création d’un ministère de la Laïcité ! », nouvelobs.com 20 sept. 2024 : l’idée selon laquelle le Secrétariat général de l’Enseignement catholique s’apparenterait à un « ministère bis » de l’Éducation nationale revient à Bernard Toulemonde, l’un des acteurs du dialogue avec cette « administration » (v. ma thèse préc., 2017, pp. 562-563 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, pp. 46-47) : il s’exprimait dans le cadre d’un dossier dirigé par André Legrand : décédé le 2 juillet 2024, ce dernier a reçu un hommage du ministère, France Universités saluant aussi sa « mémoire » ; en 2017, je le citais vingt-huit fois, notamment pp. 51, 106-107, 163, 627, 1002 – pour s’en tenir à des mises en perspectives juridiques générales (il fait lui aussi partie des « Témoins et acteurs des politiques de l’éducation depuis la Libération », INRP 2008, tome 5, pp. 100-102 ; à propos de cette « grande enquête (…) lancée au début des années 1990 », v. Bénédicte Girault, « Dans les archives orales de l’Éducation nationale, les énarques à la conquête de l’État », theconversation.com 12 sept. 2024).. Tout au contraire, se trouve nommé, sous l’autorité d’Anne Genetet17Marion Mourgue (avec Olivier Beaumont et Pauline Theveniaud), « Nouveau gouvernement : la surprise Anne Genetet à l’Éducation nationale », leparisien.fr 20 sept. 2024, pour qui sa nomination serait « directement lié à l’intervention de Gabriel Attal » (v. la réaction assassine de Sophie Vénétitay, x.com) ; v. Sylvie Lecherbonnier et Éléa Pommiers, « Avec Anne Genetet, l’éducation nationale aux mains d’une macroniste novice sur le sujet », lemonde.fr les 21-23 (extrait), rappelant que son intérêt manifeste pour les questions d’éducation se limite à « un rapport sur la proposition de loi visant à faire évoluer la gouvernance de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ». Sa page Wikipédia – au 23 septembre – atteste en effet de l’importance accordée aux questions scolaires lors de la composition gouvernementale : outre les réactions syndicales recensées le même jour par Maeva-Simone Tjang (« “Une erreur de casting” (…) ? », diplomeo.com), v. les articles de Djéhanne Gani (cafepedagogique.net) et de Marie-Estelle Pech (marianne.net) : « En fait d’éducation, elle n’aura guère connu que le lycée français de Singapour, fréquenté par ses quatre enfants. Ticket d’entrée annuel : 5 000 à 10 000 dollars »… Linh-Lan Dao rappelle qu’elle y aura passé plus de temps à délivrer des « conseils essentialisants et dénigrants, relevant parfois du mépris de classe », à l’égard des employées de maison (francetvinfo.fr le 27)., un « professeur de philosophie – qui selon son profil LinkedIn, a effectué sa scolarité dans un lycée catholique privé de Villefranche-sur-Saône, puis à l’Institut catholique de Paris »18« Alexandre Portier nommé à la réussite scolaire, un ministre délégué défenseur de l’enseignement privé », liberation.fr 21 sept. 2024 – se revendiquant il y a moins de quatre mois au nombre de ceux qui se sont « toujours érigés en défenseurs de l’enseignement privé indépendant ou sous contrat19Quelques références : CC, « Revue doctrinale », avr. 2024, n° 12 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, art. préc., mis en ligne le 17 mai ; Solenne de Royer, « L’inventaire amer de Jean-Michel Blanquer », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7, recensant son livre La Citadelle (Albin Michel), avec notamment cette citation : « Quelle sera l’anthropologie du macronisme ? De sémillants trentenaires, technocrates ou intrigants, les yeux rivés sur les sondages et les écrans pour piloter à vue sans culture, sans vision et sans valeurs »… (extrait, reprenant notamment la version selon laquelle la « saisine du Conseil constitutionnel » ayant conduit à la décision du 21 mai 2021 serait de son initiative [le texte imprimé par le quotidien ne reprend pas ce paragraphe] : dans l’article avec AFP en rendant compte, il est rappelé qu’a été validée « la création d’un forfait scolaire pour les écoles privées dispensant une scolarisation en langues régionales, une mesure potentiellement coûteuse pour certaines communes » ; ce dernier point m’amène à renvoyer à mon article intitulé « Focus sur… l’extension des obligations des communes en matière scolaire. Loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance », AJCT 2020, p. 28, avec un court extrait à la deuxième illustration de ce billet) ; pour une décision admettant, en sens contraire, que « la prime de fidélisation territoriale instituée par le décret du 24 octobre 2020 » en Seine-Saint-Denis ne bénéficie pas aux « maîtres contractuels exerçant leurs fonctions dans les établissements d’enseignement privés sous contrat du second degré » (CE, 13 oct. 2023, Syndicat professionnel de l’enseignement libre catholique (SPELC) Créteil et a., n° 464416, cons. 11 et 5 ; LIJMEN janv. 2024, n° 228) ; Julien Grenet (entretien avec, par Mathilde Goanec), « L’école privée sera majoritaire à Paris dans dix ans », Mediapart 7 févr. 2024 : pour l’économiste, cette tendance s’explique par « la baisse démographique très forte, amorcée depuis 2010, que connaît la capitale », et qui « se répercute quasi intégralement sur l’enseignement public » ; « la part du privé en élémentaire, c’est 27 %, au collège, 37 % et dans les lycées, 40 %. On est très loin de la répartition d’usage [20/80] » ; au niveau national aussi, rapporte une autre étude, « les effectifs des établissements d’enseignement supérieur privés sont en hausse : ils ont augmenté de 60 % depuis 2011 (contre une hausse de 16 % dans le secteur public) » (Juliana Lima et Delphine Dorsi, « Le droit à l’enseignement supérieur à l’épreuve des inégalités socio-économiques et de la privatisation du secteur : une étude sur la France », L’éducation en débats : analyse comparée 2023, vol. 13, n° 2, p. 141, spéc. p. 152, en conclusion ; v. aussi Stéphane Le Bouler, « Dans l’enseignement supérieur, le poids croissant du privé pose de redoutables problèmes de régulation », lemonde.fr 29 janv. 2024) ; v. enfin Brice Le Borgne, « Rentrée scolaire : des données internes à l’Éducation nationale révèlent les inégalités d’enseignement entre public et privé », francetvinfo.fr 3 sept., avec en écho l’appel international du RÉseau de Recherche Francophone sur la Privatisation de l’Éducation (refpe.org) : « Pour l’accès à des données de qualité », relayé par l’organisation Right to Education Initiative (RTE) dans son e-Bulletin du mois. comme de l’instruction en famille »20Max Brisson, Alexandre Portier et François-Xavier Bellamy, « Peut-on reprocher à l’enseignement privé de ne pas avoir abandonné tout ce qui a fait les beaux jours du public ? », lefigaro.fr 29 mai 2024, mis à jour le 3 juin (cette tribune commence par une citation de Victor Hugo, à propos de laquelle v. la dernière illustration de mon billet intitulé « En attendant l’avis du Conseil d’État : recourir à l’IEF ou l’empêcher, de quel droit ? », 29 nov. 2020 ; v. aussi le début de celui du 28 juin dernier, en particulier les références des notes 2 et 3)..

Cela affleure du Rapport d’information sur l’instruction des enfants en situation de handicap qu’il a co-présenté en novembre avec Servane Hugues21« Scolarisation des enfants handicapés : la députée de l’Isère Servane Hugues veut “repenser l’école inclusive” », francebleu.fr 16 nov. 2023 : après qu’il a été noté que « le dispositif d’instruction en famille (IEF) se révèle le choix par défaut pour nombre de parents dont les enfants ne peuvent être scolarisés, notamment les enfants atteints d’autisme ou de troubles du comportement », un encadré est consacré à la loi n° 2021-1109 du 24 août « confortant le respect des principes de la République » ; page suivante, il est écrit qu’elle « complique la tâche des familles »22Délégation [x] droit[s] des enfants, Rapport d’information sur l’instruction des enfants en situation de handicap, n° 1856, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 nov. 2023 (66 p.), spéc. pp. 30 à 32.

D’une manière plus générale, ce Rapport pointe à juste titre « l’absence de statistiques relatives au nombre d’heures de scolarisation effectivement suivies par les enfants23V. aussi « Handicap : “Sur les questions de scolarisation, d’insertion professionnelle, d’accessibilité, on est en retard”, regrette la Défenseure des droits », francetvinfo.fr 30 août 2024 : « Claire Hédon réclame donc “des statistiques précises” notamment sur le nombre d’heures durant lesquelles les “440 000 jeunes en situation de handicap sont scolarisés” ». Ajout au 15 octobre d’un article de Camille Allain, « Budget 2025 : L’Éducation nationale va recruter 2.000 AESH pour les élèves en situation de handicap », 20minutes.fr (avec AFP) le 11, à relier avec la note suivante et la fin de ce billet ; à la fin se trouve évoqué un rapport de la Cour des comptes qui m’avait échappé, L’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, 16 sept. 2024, 159 p. (v. spéc. la page 110 et, plus généralement, le résumé de Djéhanne Gani, cafepedagogique.net le 17).. Le Collectif handicaps a ainsi relevé que certains jeunes n’étaient scolarisés que 30 minutes par semaine. De même, l’Association nationale des parents d’enfants aveugles a indiqué que de nombreux enfants étaient considérés comme scolarisés dès qu’ils étaient acceptés en classe quelques heures par semaine »24Rapport préc., 2023, p. 13 ; « Préciser les conditions et la qualité de la scolarisation (volume horaire en particulier) dans les statistiques officielles recensant le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en classe ordinaire », telle est la première des trente-cinq recommandations listées page 55, en attirant aussi l’attention sur la septième : « Prendre en compte le temps périscolaire dans les notifications des [commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH)] et les projets personnalisés de scolarisation (PPS) » ; après un encadré page 19 sur les accompagnants d’enfants en situation de handicap (AESH) et au terme de deux pages sur ce « pilier fragile de la scolarisation inclusive » (pp. 27 à 29 ; v. ma note 11 le 29 déc. 2019), l’évocation d’un arrêt précède cette recommandation 7 (CE, 20 nov. 2020, Ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, n° 422248, décelant une « erreur de droit » dans CAA Nantes, 15 mai 2018, n° 16NT02951 ; v. mon billet du 30 sept., il y a six ans)..

Photo reprise depuis l’article d’Emmanuel Commissaire, « Jeux paralympiques 2024 : Frédéric Villeroux, le “Zidane du cécifoot”, accueilli en héros dans son club de Gironde », sudouest.fr 20 sept. 2024 (pour revoir son tir au but contre l’Argentine, lavoixdunord.fr le 7 ; « En images : revivez les meilleurs moments des Jeux paralympiques », france24.com le 9)

Si Michel Barnier aurait été « intéressé par l’engagement de l’élu du Beaujolais sur l’inclusion des élèves handicapés à l’école »25Alexandre Pedro, « Alexandre Portier, un proche de Laurent Wauquiez nommé ministre délégué à l’éducation », lemonde.fr 23 sept. 2024 (extrait)., il n’avait cependant pas été jugé utile d’avoir un portefeuille ministériel dédié à la question du handicap, cela alors même que les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP)26V. la tribune de Stéphane Decubber et alii, relayée par lemediasocial.fr 28 août 2024, et celle de Vanessa Bernard, « Les para-athlètes sont célébrés, mais nos enfants handicapés sont délaissés », Libération le 3 sept., p. 20 (extrait, renvoyant à « une récente décision du Conseil de l’Europe, dont le comité des droits sociaux a jugé à l’unanimité que la France violait certaines de ses obligations en la matière » : v. la note 6 de mon billet du 31 décembre 2023) ; membre du collectif Vacances Handicap Familles et « mère d’Elorian, un enfant handicapé de 20 ans », l’autrice prend « pour exemple le domaine de la Porte neuve, à Riec-sur-Belon (Finistère) » et « l’arrêt de la subvention du ministère de l’Éducation nationale pour les séjours adaptés organisés par la MGEN à partir du 31 juillet 2025 ». prenaient fin en pleine rentrée scolaire27« Rentrée scolaire : des “milliers d’enfants” handicapés sans solution, alerte l’Unapei », lemonde.fr (avec AFP) 26 août 2024 ; au passage, plus largement et en commençant par une ordonnance anecdotique rendue six jours plus tôt, par laquelle la « juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu les deux décisions du Directeur académique des services départementaux de l’Éducation nationale (DASEN) des Hauts-de-Seine qui avaient affecté « par erreur » deux collégiens au Plessis-Robinson plutôt qu’à Colombes » (actu.fr 22 sept. 2024) ; Sylvie Lecherbonnier, « Un prof devant chaque classe, une mission[/promesse] devenue impossible », Le Monde le 3, p. 8 ; Marion Rousset, « Claire Hédon, Défenseure des droits : “Imaginez la violence subie par ces jeunes sans affectation au lycée” », telerama.fr le 18, résumant sa décision 2023-153 du 6 juillet « relative à la situation des élèves sans affectation au lycée lors de la rentrée scolaire 2022 » (accompagnée d’un communiqué intitulé « Des élèves sans affectation au lycée à la rentrée scolaire : une atteinte au droit à l’éducation qui appelle des réponses fortes » ; il y est renvoyé à la page 29 de son Rapport annuel d’activité 2023, 26 mars 2024, 96 p.)..

Après avoir laissé Paul Christophe28« À l’Assemblée nationale, les députés Paul Christophe et Paul Christophle s’amusent de leur quasi-homonymie », huffingtonpost.fr 18 juill. 2024 ; avec l’écologiste Marie Pochon (v. la note 24 de mon précédent billet), le député de la première circonscription de la Drôme Paul Christophle votera la motion de censure (« Pourquoi nous censurerons le gouvernement de Michel Barnier », medium.com 16 sept. 2024). Portant un intérêt aux questions de genre (v. par ex. « Pour un internet féministe 1/2 », medium.com 31 mars 2020 ; « L’inacceptable dédain de Macron pour les droits des personnes trans », 21 août 2024), ce premier secrétaire fédéral du PS s’était engagé pour la sécurité des « valentinois » (22 mars et 22 mai 2023) ; manifestant l’ambition d’être « le député de gauche de la sécurité » (entretien avec, par Amandine Brioude, ledauphine.com 15 sept. 2024), il a réagi par un communiqué à la nomination de Nicolas Daragon (le 23). Lors des dernières élections, ce dernier est resté « le maire qui n’aura pas pris position » (Jimmy Levacher – LFI –, cité le 1er juillet), les élus LR locaux ayant refusé d’appeler à voter « contre le candidat d’un parti xénophobe, raciste, homophobe et ultraconservateur » (Pierre-Jean Veyret – Réinventons Valence –, cité les 4-8 ; ils étaient en cela à l’unisson de leurs dirigeants : v. Romain Brunet, « “Inouï et inespéré” : comment Les Républicains ont réussi à revenir au pouvoir avec Michel Barnier », france24.com le 23 sept.) ; retenue comme titre d’un article de Thibaut Chevillard (20minutes.fr le 25), la question est posée : « Mais à quoi va servir Nicolas Daragon, le ministre [délégué] “chargé de la sécurité du quotidien” ? ». répondre à la colère des associations29« J’ai toujours eu à cœur de défendre les droits fondamentaux des personnes handicapées et une société plus inclusive [et j]e m’y engage comme désormais ministre », déclarait-il sur X le 21 septembre (cité par J. C., « Colère et déception dans les secteurs de l’Éducation et du handicap », estrepublicain.fr le 22)., le premier ministre s’est résolu à lui adjoindre une ministre déléguée30Ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes, il avait déjà sous tutelle, pour cette dernière mission, Salima Saa : en 2012, elle trouvait « ridicule » un tel ministère (v. Marlène Thomas, « Gouvernement Barnier : les droits des femmes mis à mal et les réacs en majesté », liberation.fr 23 sept. 2024) ; « “Il est temps” que l’éducation à la vie sexuelle soit “effective”, affirme la nouvelle secrétaire d’État chargée de l’Égalité femmes-hommes [lors d’une conférence de presse du Planning familial à Paris] » (francetvinfo.fr (avec AFP) le 26). chargée des Personnes en situation de handicap31« Deux ministres délégués complètent le gouvernement Barnier : Charlotte Parmentier-Lecocq au Handicap et Jean-Louis Thiériot aux Armées et aux Anciens Combattants », francetvinfo.fr 27 sept. 2024. Si cette cause peut sembler plus consensuelle que la problématique laïque, elle implique des dépenses publiques dans un contexte où l’orientation politique est, encore plus qu’hier, de les restreindre ; il est à cet égard révélateur qu’il ait été tenté, lors de l’annonce de ce gouvernement, d’en masquer la dérive droitière à travers la nomination d’une personnalité qui reste avant tout un éminent partisan de l’austérité budgétaire32Solina Prak note ainsi que le nouveau ministère de la Justice « est connu pour sa rigueur budgétaire, comme le souligne le journal Le Monde [24 sept. 2024, p. 13] » (capital.fr le 23, à partir de la version en ligne) ; le quotidien s’abstenant de développer, il convient de rappeler pour terminer que Didier Migaud « troqua (…) sa carte du PS contre un premier rôle politique [d’envergure nationale en 2010, à l’initiative de Nicolas Sarkozy]. Il anticipait le social-libéralisme » du président Hollande (François Delapierre, « Didier Migaud, super-héros de l’oligarchie », reporterre.net 21 févr. 2013 ; v. aussi Maxence Kagni, « La Cour des comptes demande plus d’austérité », politis.fr le 27 juin) ; consultée les 22 et 29 septembre 2024, sa page Wikipédia revient sur ses mandats locaux antérieurs (depuis 1995), en précisant qu’en « 2006 et sous sa présidence, [Grenoble-Alpes Métropole] procède, comme l’avait fait Seyssins, à la souscription d’emprunts structurés (…) qui se révéleront très défavorables pour les collectivités concernées » (en renvoyant à l’article de Michel Albouy, « Emprunts toxiques : les élus savaient très bien ce qu’ils faisaient », contrepoints.org 20 avr. 2016) ; sont aussi reproduits des extraits selon lesquels l’action du magistrat financier a provoqué une « forte chute de l’investissement public local et des conséquences désastreuses pour des secteurs comme le bâtiment et les équipements publics », en faisant « reposer sur les plus pauvres et les classes moyennes les efforts budgétaires demandés à la population » (Franck Dedieu, Jack Dion, Emmanuel Lévy et Mathias Thépot, « Pascal Lamy, Pierre Moscovici, Jacques Attali… Les cerveaux du naufrage », marianne.net 17 avr. 2020).

Notes

1 V. en particulier celui mis en ligne le 30 juillet : « Dans un intertitre, le journal [Le Monde] souligne que “Lucie Castets s’accroche (…). L’Élysée s’agace de la posture jugée vindicative de la trentenaire qui entend appliquer le programme du [Nouveau Front Populaire], comprenant le rétablissement de l’impôt sur la fortune ou l’abrogation de la réforme des retraites [v. mes précédents billets]”. (…) Pourquoi ne pas titrer : “Macron fera tout pour bloquer le programme du NFP” ? » (Daniel Schneidermann, « Matignon : l’aimable série d’été du Monde », 26 août 2024).
2 Sandrine Cassini et Nathalie Segaunes, « Cazeneuve reçu par Macron, sans certitudes », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7 ; le même jour, Charlotte Belaïch et Jean-Baptiste Daoulas, « Casting pour Matignon. Au suivant ! », Libération, p. 8 : « Puisque Macron ne voit aucun profil politique capable d’éviter une censure immédiate à l’Assemblée, place donc à l’option de la société civile avec Thierry Beaudet » (elle sera de courte durée).
3 Au passage, « Emmanuel Macron a-t-il déclaré que “le Président ne devrait pas pouvoir rester s’il avait un désaveu en termes de majorité” ? », liberation.fr 30 août 2024, rappelant le contexte de cette affirmation, « dans la nuit du 18 au 19 mars 2019 », après que la parole a été « donnée à Olivier Beaud, professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon-Assas ».
4 John Timsit, « Gouvernement : Marine Le Pen fait planer la menace d’une censure si Éric Dupond-Moretti ou Xavier Bertrand étaient nommés », lefigaro.fr 18 sept. 2024
5 V. le long article de Romain Imbach, Maxime Vaudano et Stéphanie Pierre, « La loi “immigration”, dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945 », lemonde.fr 25-26 févr. 2024
6 Clément Guillou et Corentin Lesueur, « La stratégie du RN pour mettre le gouvernement au service de ses idées », Le Monde 24 sept. 2024, p. 8, après la chronique de Solenn de Royer, « Le grand retournement » (avant de ne pouvoir s’empêcher d’écrire que « les chances de la coalition de gauche de se voir proposer Matignon » aurait été « torpillé[es] » par… Jean-Luc Mélenchon le 7 juillet à 20h, ce qui constitue là aussi un joli retournement) ; v. aussi l’éditorial intitulé « Gouvernement : une alliance [de perdants] à rebours du Front républicain », p. 29 (en ligne).
7 « “Quand on mélange serviettes et torchons, au bout du compte cela (…) sclérose la France et la conduit dans le mur”, scandait-il encore durant l’été face aux appels à une coalition. “Celui qui pourra me faire retourner ma veste n’est pas encore né” » (« Figure d’une droite conservatrice, irritant de la macronie… Qui est Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l’Intérieur ? », lamontagne.fr (avec AFP) 21 sept. 2024 ; pour d’autres déclarations, aussi tonitruantes qu’elles auront été rapidement remisées, v. Célestine Gentilhomme, « Le rétropédalage express du député RN Jean-Philippe Tanguy après avoir qualifié Michel Barnier de “stupide” », lefigaro.fr le 8).
8 CC, 25 janv. 2024, Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, n° 2023-863 DC : sur un total de 35, « 32 des déclarations de non-conformité à la Constitution l’ont été au motif que ces articles constituaient des “cavaliers législatifs”. Autrement dit, ils ont été considérés comme ayant été intégrés par des amendements n’ayant pas de lien, même indirect, avec le projet de loi initial, et le Conseil constitutionnel n’a cessé de le préciser, ces censures ne présagent rien de leur conformité ou non à la Constitution sur le fond » (Nicolas Klausser, Véronique Champeil-Desplats et Marie-Laure Basilien-Gainche, « Petit à petit, l’illibéralisme fait son nid : quand la loi immigration annonce d’autres atteintes à l’État de droit. », La Revue des Droits de l’Homme 2024, n° 25, mis en ligne le 6 févr., soulignant que ces censures remarquées ne doivent pas faire oublier que « ce ne sont pas moins de 52 dispositions de restrictions ou de fragilisation des droits des étrangers qui sont entrées en vigueur dans notre ordre juridique vendredi 26 janvier 2024 ») ; il en va ainsi des articles censurés aux cons. 47 à 55 (à comparer avec l’appel de note 12 de mon billet du 31 décembre).
9 Cité par Jacques Paugam, « Gouvernement Barnier : à l’Intérieur, Bruno Retailleau prêt à relancer l’offensive sur l’immigration », lesechos.fr 21-22 sept. 2024 ; v. aussi ce tweet de Daniel Schneidermann, relayant l’édito de Patrick Cohen le 20 – juste avant sa nomination – et les réactions recensées par Robin Serradeil (« Une “régression vers les origines ethniques” : le dérapage de Bruno Retailleau, sénateur LR, au sujet des émeutes en France », ladepeche.fr 5 juill. 2023). Ajout des propos tenus par l’ancien premier ministre sur France Inter (« Nouvelle loi immigration : “pas une priorité” pour Gabriel Attal, Jordan Bardella “attend” le texte “avec impatience” », liberation.fr (avec AFP) 14 oct. 2024), avec la réaction du ministre de l’Intérieur le lendemain sur France 2 : « Moi, je ne propose rien de plus que ce qui a déjà été voté par la majorité de Gabriel Attal il y a, encore une fois, quelques mois » (« Vers une nouvelle loi immigration en 2025 : à quoi faut-il s’attendre ? », sudouest.fr (avec AFP) le 15)…
10 Nejma Brahim et Marie Turcan, « Immigration, racisme, islamophobie : le “grand danger” du nouveau gouvernement Barnier », Mediapart 23 sept. 2024, renvoyant sur ce dernier point au « premier débat entre les candidats au Congrès des Républicains » (LCI et lefigaro.fr 8 nov. 2021). Cet article s’ouvre sur ce tweet du 20 avril 2013, dans lequel Othman Nasrou déclarait « que le racisme et l’homophobie [seraient] l’apanage d’une infime minorité » ; il est désormais secrétaire d’État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations… Il est rappelé plus loin que « le nouveau ministre de l’enseignement supérieur, Patrick Hetzel, [s’est signalé par la co-signature avec Michèle Tabarot, en avril 2024, d’]une proposition de résolution en faveur de la création de ce qu’ils appellent une “commission d’enquête relative à l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes dans l’enseignement supérieur” » ; « L’interdiction de l’abaya à l’école, mesure phare portée par Gabriel Attal à son arrivée à l’Éducation nationale, a [enfin] rencontré un fort succès, à l’époque, chez (…) Astrid Panosyan-Bouvet, nouvelle ministre du Travail » (v. CE, 27 sept. 2024, Syndicat Sud Éducation et associations La voix lycéenne, Le poing levé et Action droits des musulmans, n° 487944, dans le prolongement des ordonnances des 7 et 25 septembre 2023, citées dans mon billet du 15 janv. et l’article de Stéphanie Hennette-Vauchez, « École publique, école privée : la laïcité à hue et à dia ? », Revue du droit des religions 2024, n° 17, mis en ligne le 17 mai, §§ 6-7).
11 Pierre Jova, « Michel Barnier, “l’ancien monde” à Matignon », lavie.fr 11 sept. 2024 : « Pour comprendre le Premier ministre, il faut partir des faubourgs de Grenoble, où il est né en 1951, et arpenter sa chère Savoie – la vallée de la Tarentaise, précisément – dont il a l’accent » ; « Outre Jean-Pierre Raffarin, l’autre figure de Dialogue et Initiative était Jacques Barrot, héraut de la démocratie-chrétienne en France ».
12 Je renvoie sur ce point à la note de bas de page 435 (n° 2767) de ma thèse, à laquelle il est possible d’accéder directement en tapant le mot-clé « Barnier » ; j’enchaîne page suivante en citant la Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République (à propos de laquelle v. FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024, 119 p. Surpris par la dénonciation de la loi Jospin – v. spéc. pp. 34-35, 54 et 75 –, je renvoie à mes pp. 497 et s.).
13 V. la réaction de Pablo Pillaud-Vivien, « Un ministère de la Laïcité ? “C’est une provocation à l’égard de la gauche (…), ça va devenir un ministère de l’islamophobie” » (RTL 19 sept. 2024).
14 Pour une autre (moins heureuse), v. la chronique de Stéphane Foucart, « Pour saisir la disparition de l’écologie à droite, il suffit de comparer le Michel Barnier de 1990 et celui de 2024 », lemonde.fr 22 sept. 2024 (extrait) ; « questionner les “conflits de besoins” qui émergent, notamment autour de la question écologique », tel est l’un des thèmes du rapport annuel du collectif Nos services publics (NSP) selon Frantz Durupt (liberation.fr le 24, introduisant un entretien avec Marie Pla, sa co-coordinatrice).
15 V. ma thèse préc., Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 21 et 556-557
16 V. la tribune ironique de Jean Baubérot-Vincent, « Enfin une bonne nouvelle : la création d’un ministère de la Laïcité ! », nouvelobs.com 20 sept. 2024 : l’idée selon laquelle le Secrétariat général de l’Enseignement catholique s’apparenterait à un « ministère bis » de l’Éducation nationale revient à Bernard Toulemonde, l’un des acteurs du dialogue avec cette « administration » (v. ma thèse préc., 2017, pp. 562-563 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, pp. 46-47) : il s’exprimait dans le cadre d’un dossier dirigé par André Legrand : décédé le 2 juillet 2024, ce dernier a reçu un hommage du ministère, France Universités saluant aussi sa « mémoire » ; en 2017, je le citais vingt-huit fois, notamment pp. 51, 106-107, 163, 627, 1002 – pour s’en tenir à des mises en perspectives juridiques générales (il fait lui aussi partie des « Témoins et acteurs des politiques de l’éducation depuis la Libération », INRP 2008, tome 5, pp. 100-102 ; à propos de cette « grande enquête (…) lancée au début des années 1990 », v. Bénédicte Girault, « Dans les archives orales de l’Éducation nationale, les énarques à la conquête de l’État », theconversation.com 12 sept. 2024).
17 Marion Mourgue (avec Olivier Beaumont et Pauline Theveniaud), « Nouveau gouvernement : la surprise Anne Genetet à l’Éducation nationale », leparisien.fr 20 sept. 2024, pour qui sa nomination serait « directement lié à l’intervention de Gabriel Attal » (v. la réaction assassine de Sophie Vénétitay, x.com) ; v. Sylvie Lecherbonnier et Éléa Pommiers, « Avec Anne Genetet, l’éducation nationale aux mains d’une macroniste novice sur le sujet », lemonde.fr les 21-23 (extrait), rappelant que son intérêt manifeste pour les questions d’éducation se limite à « un rapport sur la proposition de loi visant à faire évoluer la gouvernance de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ». Sa page Wikipédia – au 23 septembre – atteste en effet de l’importance accordée aux questions scolaires lors de la composition gouvernementale : outre les réactions syndicales recensées le même jour par Maeva-Simone Tjang (« “Une erreur de casting” (…) ? », diplomeo.com), v. les articles de Djéhanne Gani (cafepedagogique.net) et de Marie-Estelle Pech (marianne.net) : « En fait d’éducation, elle n’aura guère connu que le lycée français de Singapour, fréquenté par ses quatre enfants. Ticket d’entrée annuel : 5 000 à 10 000 dollars »… Linh-Lan Dao rappelle qu’elle y aura passé plus de temps à délivrer des « conseils essentialisants et dénigrants, relevant parfois du mépris de classe », à l’égard des employées de maison (francetvinfo.fr le 27).
18 « Alexandre Portier nommé à la réussite scolaire, un ministre délégué défenseur de l’enseignement privé », liberation.fr 21 sept. 2024
19 Quelques références : CC, « Revue doctrinale », avr. 2024, n° 12 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, art. préc., mis en ligne le 17 mai ; Solenne de Royer, « L’inventaire amer de Jean-Michel Blanquer », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7, recensant son livre La Citadelle (Albin Michel), avec notamment cette citation : « Quelle sera l’anthropologie du macronisme ? De sémillants trentenaires, technocrates ou intrigants, les yeux rivés sur les sondages et les écrans pour piloter à vue sans culture, sans vision et sans valeurs »… (extrait, reprenant notamment la version selon laquelle la « saisine du Conseil constitutionnel » ayant conduit à la décision du 21 mai 2021 serait de son initiative [le texte imprimé par le quotidien ne reprend pas ce paragraphe] : dans l’article avec AFP en rendant compte, il est rappelé qu’a été validée « la création d’un forfait scolaire pour les écoles privées dispensant une scolarisation en langues régionales, une mesure potentiellement coûteuse pour certaines communes » ; ce dernier point m’amène à renvoyer à mon article intitulé « Focus sur… l’extension des obligations des communes en matière scolaire. Loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance », AJCT 2020, p. 28, avec un court extrait à la deuxième illustration de ce billet) ; pour une décision admettant, en sens contraire, que « la prime de fidélisation territoriale instituée par le décret du 24 octobre 2020 » en Seine-Saint-Denis ne bénéficie pas aux « maîtres contractuels exerçant leurs fonctions dans les établissements d’enseignement privés sous contrat du second degré » (CE, 13 oct. 2023, Syndicat professionnel de l’enseignement libre catholique (SPELC) Créteil et a., n° 464416, cons. 11 et 5 ; LIJMEN janv. 2024, n° 228) ; Julien Grenet (entretien avec, par Mathilde Goanec), « L’école privée sera majoritaire à Paris dans dix ans », Mediapart 7 févr. 2024 : pour l’économiste, cette tendance s’explique par « la baisse démographique très forte, amorcée depuis 2010, que connaît la capitale », et qui « se répercute quasi intégralement sur l’enseignement public » ; « la part du privé en élémentaire, c’est 27 %, au collège, 37 % et dans les lycées, 40 %. On est très loin de la répartition d’usage [20/80] » ; au niveau national aussi, rapporte une autre étude, « les effectifs des établissements d’enseignement supérieur privés sont en hausse : ils ont augmenté de 60 % depuis 2011 (contre une hausse de 16 % dans le secteur public) » (Juliana Lima et Delphine Dorsi, « Le droit à l’enseignement supérieur à l’épreuve des inégalités socio-économiques et de la privatisation du secteur : une étude sur la France », L’éducation en débats : analyse comparée 2023, vol. 13, n° 2, p. 141, spéc. p. 152, en conclusion ; v. aussi Stéphane Le Bouler, « Dans l’enseignement supérieur, le poids croissant du privé pose de redoutables problèmes de régulation », lemonde.fr 29 janv. 2024) ; v. enfin Brice Le Borgne, « Rentrée scolaire : des données internes à l’Éducation nationale révèlent les inégalités d’enseignement entre public et privé », francetvinfo.fr 3 sept., avec en écho l’appel international du RÉseau de Recherche Francophone sur la Privatisation de l’Éducation (refpe.org) : « Pour l’accès à des données de qualité », relayé par l’organisation Right to Education Initiative (RTE) dans son e-Bulletin du mois.
20 Max Brisson, Alexandre Portier et François-Xavier Bellamy, « Peut-on reprocher à l’enseignement privé de ne pas avoir abandonné tout ce qui a fait les beaux jours du public ? », lefigaro.fr 29 mai 2024, mis à jour le 3 juin (cette tribune commence par une citation de Victor Hugo, à propos de laquelle v. la dernière illustration de mon billet intitulé « En attendant l’avis du Conseil d’État : recourir à l’IEF ou l’empêcher, de quel droit ? », 29 nov. 2020 ; v. aussi le début de celui du 28 juin dernier, en particulier les références des notes 2 et 3).
21 « Scolarisation des enfants handicapés : la députée de l’Isère Servane Hugues veut “repenser l’école inclusive” », francebleu.fr 16 nov. 2023
22 Délégation [x] droit[s] des enfants, Rapport d’information sur l’instruction des enfants en situation de handicap, n° 1856, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 nov. 2023 (66 p.), spéc. pp. 30 à 32
23 V. aussi « Handicap : “Sur les questions de scolarisation, d’insertion professionnelle, d’accessibilité, on est en retard”, regrette la Défenseure des droits », francetvinfo.fr 30 août 2024 : « Claire Hédon réclame donc “des statistiques précises” notamment sur le nombre d’heures durant lesquelles les “440 000 jeunes en situation de handicap sont scolarisés” ». Ajout au 15 octobre d’un article de Camille Allain, « Budget 2025 : L’Éducation nationale va recruter 2.000 AESH pour les élèves en situation de handicap », 20minutes.fr (avec AFP) le 11, à relier avec la note suivante et la fin de ce billet ; à la fin se trouve évoqué un rapport de la Cour des comptes qui m’avait échappé, L’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, 16 sept. 2024, 159 p. (v. spéc. la page 110 et, plus généralement, le résumé de Djéhanne Gani, cafepedagogique.net le 17).
24 Rapport préc., 2023, p. 13 ; « Préciser les conditions et la qualité de la scolarisation (volume horaire en particulier) dans les statistiques officielles recensant le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en classe ordinaire », telle est la première des trente-cinq recommandations listées page 55, en attirant aussi l’attention sur la septième : « Prendre en compte le temps périscolaire dans les notifications des [commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH)] et les projets personnalisés de scolarisation (PPS) » ; après un encadré page 19 sur les accompagnants d’enfants en situation de handicap (AESH) et au terme de deux pages sur ce « pilier fragile de la scolarisation inclusive » (pp. 27 à 29 ; v. ma note 11 le 29 déc. 2019), l’évocation d’un arrêt précède cette recommandation 7 (CE, 20 nov. 2020, Ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, n° 422248, décelant une « erreur de droit » dans CAA Nantes, 15 mai 2018, n° 16NT02951 ; v. mon billet du 30 sept., il y a six ans).
25 Alexandre Pedro, « Alexandre Portier, un proche de Laurent Wauquiez nommé ministre délégué à l’éducation », lemonde.fr 23 sept. 2024 (extrait).
26 V. la tribune de Stéphane Decubber et alii, relayée par lemediasocial.fr 28 août 2024, et celle de Vanessa Bernard, « Les para-athlètes sont célébrés, mais nos enfants handicapés sont délaissés », Libération le 3 sept., p. 20 (extrait, renvoyant à « une récente décision du Conseil de l’Europe, dont le comité des droits sociaux a jugé à l’unanimité que la France violait certaines de ses obligations en la matière » : v. la note 6 de mon billet du 31 décembre 2023) ; membre du collectif Vacances Handicap Familles et « mère d’Elorian, un enfant handicapé de 20 ans », l’autrice prend « pour exemple le domaine de la Porte neuve, à Riec-sur-Belon (Finistère) » et « l’arrêt de la subvention du ministère de l’Éducation nationale pour les séjours adaptés organisés par la MGEN à partir du 31 juillet 2025 ».
27 « Rentrée scolaire : des “milliers d’enfants” handicapés sans solution, alerte l’Unapei », lemonde.fr (avec AFP) 26 août 2024 ; au passage, plus largement et en commençant par une ordonnance anecdotique rendue six jours plus tôt, par laquelle la « juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu les deux décisions du Directeur académique des services départementaux de l’Éducation nationale (DASEN) des Hauts-de-Seine qui avaient affecté « par erreur » deux collégiens au Plessis-Robinson plutôt qu’à Colombes » (actu.fr 22 sept. 2024) ; Sylvie Lecherbonnier, « Un prof devant chaque classe, une mission[/promesse] devenue impossible », Le Monde le 3, p. 8 ; Marion Rousset, « Claire Hédon, Défenseure des droits : “Imaginez la violence subie par ces jeunes sans affectation au lycée” », telerama.fr le 18, résumant sa décision 2023-153 du 6 juillet « relative à la situation des élèves sans affectation au lycée lors de la rentrée scolaire 2022 » (accompagnée d’un communiqué intitulé « Des élèves sans affectation au lycée à la rentrée scolaire : une atteinte au droit à l’éducation qui appelle des réponses fortes » ; il y est renvoyé à la page 29 de son Rapport annuel d’activité 2023, 26 mars 2024, 96 p.).
28 « À l’Assemblée nationale, les députés Paul Christophe et Paul Christophle s’amusent de leur quasi-homonymie », huffingtonpost.fr 18 juill. 2024 ; avec l’écologiste Marie Pochon (v. la note 24 de mon précédent billet), le député de la première circonscription de la Drôme Paul Christophle votera la motion de censure (« Pourquoi nous censurerons le gouvernement de Michel Barnier », medium.com 16 sept. 2024). Portant un intérêt aux questions de genre (v. par ex. « Pour un internet féministe 1/2 », medium.com 31 mars 2020 ; « L’inacceptable dédain de Macron pour les droits des personnes trans », 21 août 2024), ce premier secrétaire fédéral du PS s’était engagé pour la sécurité des « valentinois » (22 mars et 22 mai 2023) ; manifestant l’ambition d’être « le député de gauche de la sécurité » (entretien avec, par Amandine Brioude, ledauphine.com 15 sept. 2024), il a réagi par un communiqué à la nomination de Nicolas Daragon (le 23). Lors des dernières élections, ce dernier est resté « le maire qui n’aura pas pris position » (Jimmy Levacher – LFI –, cité le 1er juillet), les élus LR locaux ayant refusé d’appeler à voter « contre le candidat d’un parti xénophobe, raciste, homophobe et ultraconservateur » (Pierre-Jean Veyret – Réinventons Valence –, cité les 4-8 ; ils étaient en cela à l’unisson de leurs dirigeants : v. Romain Brunet, « “Inouï et inespéré” : comment Les Républicains ont réussi à revenir au pouvoir avec Michel Barnier », france24.com le 23 sept.) ; retenue comme titre d’un article de Thibaut Chevillard (20minutes.fr le 25), la question est posée : « Mais à quoi va servir Nicolas Daragon, le ministre [délégué] “chargé de la sécurité du quotidien” ? ».
29 « J’ai toujours eu à cœur de défendre les droits fondamentaux des personnes handicapées et une société plus inclusive [et j]e m’y engage comme désormais ministre », déclarait-il sur X le 21 septembre (cité par J. C., « Colère et déception dans les secteurs de l’Éducation et du handicap », estrepublicain.fr le 22).
30 Ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes, il avait déjà sous tutelle, pour cette dernière mission, Salima Saa : en 2012, elle trouvait « ridicule » un tel ministère (v. Marlène Thomas, « Gouvernement Barnier : les droits des femmes mis à mal et les réacs en majesté », liberation.fr 23 sept. 2024) ; « “Il est temps” que l’éducation à la vie sexuelle soit “effective”, affirme la nouvelle secrétaire d’État chargée de l’Égalité femmes-hommes [lors d’une conférence de presse du Planning familial à Paris] » (francetvinfo.fr (avec AFP) le 26).
31 « Deux ministres délégués complètent le gouvernement Barnier : Charlotte Parmentier-Lecocq au Handicap et Jean-Louis Thiériot aux Armées et aux Anciens Combattants », francetvinfo.fr 27 sept. 2024
32 Solina Prak note ainsi que le nouveau ministère de la Justice « est connu pour sa rigueur budgétaire, comme le souligne le journal Le Monde [24 sept. 2024, p. 13] » (capital.fr le 23, à partir de la version en ligne) ; le quotidien s’abstenant de développer, il convient de rappeler pour terminer que Didier Migaud « troqua (…) sa carte du PS contre un premier rôle politique [d’envergure nationale en 2010, à l’initiative de Nicolas Sarkozy]. Il anticipait le social-libéralisme » du président Hollande (François Delapierre, « Didier Migaud, super-héros de l’oligarchie », reporterre.net 21 févr. 2013 ; v. aussi Maxence Kagni, « La Cour des comptes demande plus d’austérité », politis.fr le 27 juin) ; consultée les 22 et 29 septembre 2024, sa page Wikipédia revient sur ses mandats locaux antérieurs (depuis 1995), en précisant qu’en « 2006 et sous sa présidence, [Grenoble-Alpes Métropole] procède, comme l’avait fait Seyssins, à la souscription d’emprunts structurés (…) qui se révéleront très défavorables pour les collectivités concernées » (en renvoyant à l’article de Michel Albouy, « Emprunts toxiques : les élus savaient très bien ce qu’ils faisaient », contrepoints.org 20 avr. 2016) ; sont aussi reproduits des extraits selon lesquels l’action du magistrat financier a provoqué une « forte chute de l’investissement public local et des conséquences désastreuses pour des secteurs comme le bâtiment et les équipements publics », en faisant « reposer sur les plus pauvres et les classes moyennes les efforts budgétaires demandés à la population » (Franck Dedieu, Jack Dion, Emmanuel Lévy et Mathias Thépot, « Pascal Lamy, Pierre Moscovici, Jacques Attali… Les cerveaux du naufrage », marianne.net 17 avr. 2020).

Lucie Castets (Nos SP), « regista » du NFP

Camille (Sophie Breyer), la fille de l’inspecteur Peeters (Yoann Blanc) – le personnage principal de la série belge La Trêve (2016 ; netflix-news.com), dans laquelle apparaît aussi Philippe Résimont ; « Vu de l’étranger. Avec sa “trêve olympique”, Macron “viole tous les usages démocratiques” », courrierinternational.com 31 juill. 2024

Au terme de seize jours de négociations, les partis constitutifs du Nouveau Front Populaire (NFP) se sont accordés, le mardi 23 juillet, sur un nom pour Matignon. Antérieurement, alors que l’opposition du groupe LFI à la mise en avant de Laurence Tubiana a été motivée par sa signature d’une tribune collective, quelques jours plus tôt1Collectif, « Le Nouveau Front populaire doit sans tarder tendre la main aux autres acteurs du front républicain pour discuter d’un programme d’urgence républicaine », lemonde.fr 11-12 juill. 2024 ; J.J., « Laurence Tubiana à Matignon ? Pourquoi son nom divise autant le Nouveau Front populaire », laprovence.com avec AFP le 16, l’on ne sait toujours pas pourquoi le PS a refusé la première vraie proposition publique – et communiste, celle d’Huguette Bello2Ce qui est clair, c’est comment les socialistes l’ont fait, à savoir au motif que l’approbation écologiste n’était pas acquise : v. Daniel Schneidermann, « Qui a tué la candidature Huguette Bello ? », arretsurimages.net 17 juill. 2024 ; elle avait même semblé recueillir le soutien de Carole Delga, avant qu’elle ne se fende d’une « mise au point » (v. Gabriel Kenedi, actu.fr/occitanie le 13). Dans la même période, v. CEDH, 9 juill. 2024, Delga c. France, n° 38998/20 (arrêt non définitif de la cinquième section, rendu à l’unanimité ; Abel Mestre, « Victoire juridique de Carole Delga contre un maire RN du Gard », Le Monde 12 juill. 2024, p. 12).. La troisième sera la bonne avec la désignation par consensus de Lucie Castets, « dont le nom a surgi moins d’une heure avant » l’intervention d’Emmanuel Macron sur France 23« Pas de gouvernement avant la mi-août, rejet de Lucie Castets… les six moments forts de l’interview d’Emmanuel Macron », liberation.fr avec AFP 23 juill. 2024 ; décryptant cette intervention, Théophile Kouamouo, Le Média le 24 ; y voyant « une interprétation erronée de la Constitution », Julien Jeanneney, lemonde.fr le 25 (auparavant et dans le même sens, Pierre Avril, blog.juspoliticum.com le 15 ; contra Dominique Rousseau – cité par Émilie Jehanno, 20minutes.fr le 12)..

Comme lui, elle est issue de l’ENA4L’École nationale d’administration (ENA) a été remplacée par l’Institut national du service public (INSP) le 31 décembre 2021 ; cette réforme avait été présentée en avril par Emmanuel Macron (issu de la promotion 2002-2004, dite Léopold-Sédar-Senghor). et d’aucuns se souviennent de l’avoir vue « ferrailler une nuit durant, dans un chalet des Vosges, pour choisir le nom de [sa promotion (2012-2013)]. À Simone de Beauvoir, l’auteure du Deuxième Sexe que défend Castets, convictions féministes en bandoulière, la majorité préfère Jean Zay5V. mon billet (portrait) du 28 juillet 2018, ministre du Front populaire6V. mon billet du 28 juin 2024, en signalant la modification de ma note 21, et mon nouveau record sur 5km – 21 minutes 43, ce matin même –, en passant par la nouvelle passerelle de Bourg-lès-Valence, que j’ai plaisir à emprunter depuis le 12 avril (avec des coéquipiers de foot puis mon adjoint et mes joueurs du vieux bourg, nous utilisions l’ancienne pour nous rendre à l’entraînement, dans les années 2000) ; c’était donc une « une course avec un tempo relativement lent » (Olivier GH, « Athlétisme JO 2024 : Beatrice Chebet crée la sensation sur le 5000 m femmes », dicodusport.fr le 5 août), à sept minutes du record de France féminin (lequipe.fr ; deux français sont qualifiés pour la finale hommes ce samedi, pour cette épreuve sur piste introduite aux JO de 1912 – selon Wikipédia –, soit entre les premières éditions françaises, en 1900 et 1924). assassiné en 1944 par la Milice. “Elle aime convaincre, par l’argumentation, la force de conviction, la pédagogie”, note un ancien camarade, parti dans le privé »7Lucie Alexandre, Victor Boiteau et Eve Szeftel, « Lucie Castets, une “guerrière” à la croisée des réseaux », Libération 26 juill. 2024, pp. 16-17 ; au passage, recensant le livre de l’historienne américaine Judith Coffin (Sexe, amour et féminisme. Quand on écrivait à « Madame de Beauvoir », Plon, 2023, préfacé par la philosophe Manon Garcia), v. Christian Ruby, nonfiction.fr 8 juin 2024 (ajout le 19 août, à partir de telerama.fr le 10 : Simone de Beauvoir (1908-1986) a été l’une des dix femmes célébrées cet été à Paris, « dont les statues devraient survivre aux JO » ; elle « n’était pas apparue à l’écran lors de la retransmission de la cérémonie [d’ouverture] »)..

Dans la foulée de son affectation au ministère de l’économie et des finances8« Arrêté du 7 janvier 2014 portant affectation aux carrières des élèves (…) de l’École nationale d’administration ayant terminé leur scolarité au 31 décembre 2013 (élèves issus des concours externe, interne et troisième concours) », JORF n° 0007 du 9 janv. 2014, elle était nommée commissaire du Gouvernement auprès du Bureau central de tarification9Arrêté du 14 janvier 2014, JORF n° 0020 du 24 janv.. En 2018, elle a été employée au service du « traitement du renseignement et [d’]action contre les circuits financiers clandestins »10« Tracfin, la cellule de renseignement financier de Bercy » (« Qui est Lucie Castets, proposée par le Nouveau Front populaire pour le poste de Première ministre ? », francetvinfo.fr 24 juill. 2024). avant de rejoindre, deux ans plus tard, la mairie de Paris.

Dans les premiers portraits qui lui ont été consacrés, certains la présentaient aussi comme « footballeuse »11Florent Le Du et Lisa Guillemin, « Lucie Castets, propulsée par la gauche pour Matignon », L’Humanité 24 juill. 2024, p. 6 ; Service politique, « Haute fonctionnaire, engagée pour la défense des services publics… Qui est Lucie Castets, proposée par le NFP pour Matignon ? », nouvelobs.com 23-24 juill. 2024 : « D’après ses amis, c’est aussi dans la vie privée une sportive, joueuse de foot, féministe et mère d’un enfant »., sans toutefois préciser son poste ni citer directement l’intéressée12« À l’école, je participais à tous les cross. J’ai fait du tennis pendant une dizaine d’années, du handball, du taekwondo. J’aime l’effort physique », confie-t-elle – sans confirmer, donc – dans l’entretien publié sous le titre « Je veux dire qui je suis », Paris Match 8-13 août 2024, p. 18 – réalisé par Florent Buisson, qui ajoute : « Fan de surf, elle a aussi parcouru le monde au gré de ses études. Un parcours qui contraste avec l’image de l’énarque toujours le nez dans ses dossiers ». Ajouts de deux textes : son entretien publié dans Libération le 21, pp. 3-4 (annoncé à la Une sous le titre « Nous saurons trouver des accords »), qu’elle terminait en s’affirmant « étonnée [que l]es commentaires n’ont retenu que [l’évocation de sa famille], alors qu’il y avait plein de choses sur [elle, sa vie, sa provenance de Caen et sa pratique] du sport » ; « Avant, elle aimait jouer au foot le soir, quelles que soient les intempéries », est-il écrit dans une tribune publiée en ligne le 30, au terme de l’extrait accessible sans abonnement (v. aussi Clément Machetto, « Judith Godrèche s’attaque à Emmanuel Macron, “le même qui célébrait Gérard Depardieu” », closermag.fr le 31).. En faisant un détour par La Fièvre13Écouter l’entretien avec le réalisateur Ziad Doueiri dans le podcast Affaires culturelles, radiofrance.fr 12 mars 2024, ainsi qu’Ana Girardot et Nina Meurisse revenant « sur leurs rôles » (Canal + le 5 avr.). Pour une critique sans concession, François Bégaudeau, « Une fièvre d’ordre », Le Monde diplomatique juill. 2024, p. 13 (extrait ; v. aussi infra) ; comparer Rémi Lefebvre, « La Fièvre : le thermomètre est-il juste ? », in Raphaël LLorca et Jérémie Peltier (dir.), Sur La Fièvre. Enseignements politiques d’une série, (Fondation) jean-jaures.org 9 avr. 2024, p. 65, spéc. p. 68 : « Si la série ne verse pas dans la caricature de l’antiwokisme (le terme est très peu utilisé), elle tend à rabattre de nouvelles thématiques et revendications (néoféminisme, lutte contre les discriminations…) sur des questions d’identité alors que l’on peut soutenir qu’elle engage aussi des questions d’égalité et qu’elles reformulent les enjeux de l’émancipation (malgré des excès ou des pathologies militantes, fortement mises en avant par la série) ». Oubliant le passage marquant où l’entraîneur Pascal Terret revient sur le licenciement de son père, le politiste écrit que la « question sociale n’affleure dans la série que sous l’angle du statut de coopérative qu’acquiert le Racing. Le club de foot se rallie à « la démocratie corinthiane », modèle d’autogestion démocratique en pleine dictature militaire au Brésil » (v. mon billet du 5 nov. 2018)., une des séries que j’ai appréciées cette année (pour celle en cours, v. l’illustration ci-dessus) et qui a, peut-être, participé à la décision d’Emmanuel Macron de recourir à la dissolution14En ce sens, Solenn de Royer, « “La Fièvre”, nouvelle série de l’auteur de “Baron noir” : Entre la fiction et la politique, un troublant jeu de miroirs », lemonde.fr 2 janv. (extrait) ; Louis Hausalter, « La Fièvre, cette série qui a intoxiqué Emmanuel Macron et ses conseillers », lefigaro.fr 22 juin 2024 (extrait) ; Baptiste Roger-Lacan, « La fièvre de Macron : la dissolution par les séries », legrandcontinent.eu le 23, je dirais que Lucie Castets s’est trouvée placée en box to box15Tel est le titre du premier épisode de la série, explicité à la demi-heure de jeu par une séquence où l’entraîneur précité (Pascal Vannson) décrit, avec passion, ce qu’il attend de Fodé Thiam (Alassane Diong) sur le terrain ; à l’objection de Sam(uelle) Berger (Nina Meurisse), selon laquelle ce choix tactique se fait au détriment de ses statistiques de buteur, il le concède mais répond : « Le football c’est collectif : j’entraîne pas des joueurs moi, j’entraîne une équipe » (à propos de cette phrase, en en améliorant la syntaxe, v. l’entretien avec Grégory Marin du scénariste Éric Benzekri, « Je suis du camp de ceux qui pensent qu’on ne s’en sortira qu’ensemble », humanite.fr 15-18 mars)… Deux épisodes plus loin est imaginé, à partir d’un ouvrage d’un sociologue (blanc), la publication dans Libération d’un article intitulé « Le “Box to box” ou l’animalisation des corps noirs ». Dans sa recension précitée, François Bégaudeau n’en retient que la réaction de Samuelle (« Tissu de mensonges ») et en conclut qu’il serait, selon la série, « exagéré de dire que le racisme existe en France ». C’est oublier un peu vite le contrôle routier dont fait l’objet le sportif (noir, avant d’être relâché une fois sa position sociale connue) ; la scène est en soi assez éloquente pour susciter la réflexion, bien avant sa qualification comme manifestation du « racisme endémique de la police » par la militante décoloniale Kenza Chelbi (Lou-Adriana Bouziouane, par ailleurs au théâtre dans Quartiers de femmes, de Mohamed Bourouissa ; v. sceneweb.fr 17 oct. 2023). ou, plutôt, en regista16Jérôme Latta et Les Dé-Managers, « Lexique tactique / 1 : postes et rôles », cahiersdufootball.com 3-4 sept. 2014 ; Sam Meunier, « Pourquoi et comment faut-il redéfinir le terme de “box-to-box” », cafecremesport.com 9 juill. 2021 du NFP.

Capture d’écran de la vidéo intitulée « UA23 “Le service public a-t-il un avenir ?” – Lucie Castets », LDH France 29 nov. 2023 ; v. aussi son texte « Services publics : dépasser la crise », Droits & Libertés janv. 2024, n° 204, pp. 48 à 50

Avant d’être désignée, elle avait fait montre de ses qualités défensives : fin 2022, elle venait successivement contrer les arguments (et inconséquences) de Stanislas Guerini17« Les cabinets de conseil ont-ils remplacé les fonctionnaires ? », C Ce soir 29-30 nov. 2022 et de Martin Hirsch18« A-t-on laissé le service public dépérir ? », radiofrance.fr 9 déc. 2022 ; le 11 juin dernier, elle faisait partie des personnes invitées par Mediapart en réaction à la victoire du RN aux élections européennes19« Émission spéciale. Contre l’extrême droite, l’indispensable sursaut », Mediapart 11 juin 2024 (l’émission est séquencée, ce qui permet d’aller directement à 1h09 pour l’écouter) ; v. aussi le numéro spécial de La Déferlante, « Extrêmes droites. Résister en féministes » (à paraître fin août 2024, n° 15)..

Entretemps, sa vision du jeu avait été travaillée au sein du collectif Nos services publics (SP)20Dans l’une de ses trois chroniques pour Alter éco, elle invitait plus largement à « observer que les constats dressés par le collectif Nos services publics et le changement de méthode proposé (repartir des besoins) [dans son premier rapport] coïncident avec ceux de la dernière étude annuelle du Conseil d’État, intitulée « L’usager, du premier au dernier kilomètre : un enjeu d’efficacité de l’action publique et une exigence démocratique », également publiée en septembre 2023 » (Lucie Castets, « Services publics : qu’attend-on pour agir ? », alternatives-economiques.fr 20 sept. 2023). Ayant participé à sa rédaction en tant que rapporteure générale adjointe de la section du rapport et des études, Mélanie Villiers était invitée à la présenter après le Grand Reportage d’Ouafia Kheniche, « Services publics, la grande fracture des territoires », radiofrance.fr 2 août 2024 (première diffusion le vendredi 8 mars) ; à propos de la dématérialisation, v. mon billet du 31 déc. 2023, à la note 11 (en la complétant par cet entretien avec Lucie Castets, francetvinfo.fr 17 avr.), et l’article du haut-fonctionnaire Simon Arambourou, « Les déshumanisateurs. De quoi la “dématérialisation” des services publics est-elle le nom ? », Le Monde diplomatique avr. 2024, p. 3 (extrait). et en échangeant des passes au-delà21Elle était en effet co-animatrice (offensive, pour reprendre l’une qualités attendus d’une regista), avec Said Benmouffok et Béligh Nabli – respectivement professeurs de philosophie et de droit public – du podcast « On n’a pas tout essayé », proposé par Le Nouvel Obs (douze épisodes du 3 mars au 30 juill. 2024 ; en complément du premier avec l’économiste Anne-Laure Delatte, v. la formation avec Michaël Zemmour : « Impôts, cotisations sociales : de quoi parle-t-on ? », OnContinue le 25).. Lors de ses premières matinales, elle la confirmait en rappelant que, « pendant la campagne », des personnes ayant voté pour ce parti confiaient « ne pas vouloir avoir à faire des kilomètres de voiture pour pouvoir accoucher, dans une maternité près de chez [elles] » ; ou encore leur (dés)espoir d’avoir un·e « professeur·e dans la classe de leur enfant à la rentrée de septembre »22« Matignon, retraites, nucléaire… L’interview de Lucie Castets, candidate du NFP pour Matignon », BFMTV 25 juil. 2024.

Le premier exemple23Le second m’amène à signaler mon billet du 20 mai 2018, renvoyant aux pages pertinentes de ma thèse à propos du contentieux relatif aux absences d’enseignant·es non remplacé·es ; v. récemment TA Cergy-Pontoise, 3 avril 2024, n° 2211429 et 2301199 (décisions mises en ligne sur le site du tribunal, qui en signale douze dans un communiqué du 10 avr. – dont les n° 2217195 et 2301195 selon Fleur Jourdan le 25 ; le 19, Jérémy Bousquet citait des jugements non mobilisés dans mes travaux : TA Cergy-Pontoise, 21 juill. 2017, M. et Mme Bollérot, n° 1508790 ; TA Lille, 26 juin 2019, n° 1702109 ; TA Nantes, 10 oct. 2019, n° 1608500 ; TA Montreuil, 13 oct. 2020, n° 2003767 ; TA Besançon, 23 fév. 2021, n° 2000557) et, contra, Gérald Camier, « Toulouse : le tribunal administratif déboute les familles qui réclamaient à l’académie réparation après les heures perdues par leur enfant à l’école », ladepeche.fr 1er août 2024 (trois jugements rendus « fin juillet »). Dans une configuration inédite, v. aussi TA Montreuil Ord., 26 avr. 2024, Préfet de la Seine-Saint-Denis, n° 2404825, 2404826, 2404827, 2404828, 2404829, 2404830, 2404831, 2404832, 2404833, 2404834, 2404964 et 2405058 (douze ordonnances en déféré-suspension, contre des arrêtés municipaux « mettant en demeure l’Etat, dans le cadre d’un plan d’urgence, de créer des postes d’enseignants et de personnels éducatifs ») ; près d’un an plus tôt, 25 mai 2023, n° 2305815, sachant que des contentieux indemnitaires portés par Anina Ciuciu ont abouti en mars 2024 (v. Faïza Zerouala, « Refus de scolarisation : un collectif de mères précaires a gagné face à l’État », Mediapart 29 juin 2024, faisant le lien avec l’affaire de Ris-Orangis, à propos de laquelle v. mon billet du 6 juin 2018). est l’occasion pour moi de revenir sur un arrêt rendu, il y a plus de deux ans, par la Cour administrative d’appel de Lyon, bien qu’il concerne un territoire – le diois – qui constitue, d’un point de vue électoral24« Législatives 2024 : la gauche résiste à la vague RN dans deux circonscriptions de la Drôme », francebleu.fr 30 juin 2024 ; arrivée en tête « dans 181 des 239 communes » de la troisième, Marie Pochon « a été réélue avec 56,59 % des voix contre le candidat RN-LR avec Ciotti, Adhémar Autrand. Une victoire claire, qui place l’une des plus grandes circonscriptions de France résolument à gauche » ; alors que ce dernier « s’impose dans les communes du Sédéronnais et du Tricastin et les piedmonts ouest du Royans-Vercors », elle « fait ses meilleurs scores dans (…) le Crestois, le Nyonsais, le pays de Dieulefit » et, « sans surprise, le Diois [qui] a largement plébiscité la candidate écologiste (70 %) comme en 2022. À Die, elle obtient quasiment 76 % des voix, 66,59 % à Châtillon-en-Diois, 67,32 % à Luc-en-Diois ou encore 78,82 % à Saillans. Elle [y] fait un quasi grand chelem, à l’exception de trois communes, Rochefourchat [une voix contre quatre…], Gumiane [et] Volvent. (…) Deux communes se distinguent sur le Diois, Les Prés où aucun électeur n’a voté pour le Rassemblement national ni au premier ni au second tour, et la commune de Beaumont-en-Diois qui a voté [également, le 7 juillet,] à 100 % pour la députée sortante [recueillant respectivement 14 et 70 voix] » (E.P. et SLC, Journal du Diois et de la Drôme 12 juill., p. 2). « Rare députée écologiste d’une circonscription rurale », souligne sa page Wikipédia (au 26)., plutôt un contre-exemple du lien entre la dégradation des services publics et la montée de l’extrême droite25En tout état de cause, ce lien ne saurait en résumer les déterminants : v. l’émission avec la journaliste Camille Bordenet et le sociologue Benoit Coquard (radiofrance.fr 19 juin 2024), ainsi que la recension du livre de Félicien Faury, Des électeurs ordinaires. Enquête sur la normalisation de l’extrême droite (Seuil), par François Rulier, politis.fr 10 juill. ; v. encore Jean-Marie Pottier, « Pourquoi ont-ils voté Rassemblement national ? Ethnographie d’une lame de fond », Sciences Humaines juill.-août 2024, n° 370, pp. 27 à 35, avec d’autres références page 31, et la recension pp. 28-29 de l’essai à paraître du philosophe belge Michel Feher, Producteurs et parasites. L’imaginaire si désirable du Rassemblement national (La Découverte)..

Contrairement au tribunal administratif de Grenoble, qui avait donné raison au Collectif de défense de l’Hôpital de Die26V. mon billet du 29 juillet 2020, renvoyant à mes publications antérieures sur cette question des fermetures de maternité, abordée d’un point de vue contentieux à partir du cas de Die ; en complément au reportage d’Élodie Potente publié dans le Cahier spécial Auvergne-Rhône-Alpes de la revue Sans transition ! janv. 2021, n° 27, p. 15 – déjà cité au détour de mes travaux de recherche –, v. le texte de Géraldine Magnan pour Profession Sage-Femme nov. 2020, n° 266, pp. 7-8, citant in fine l’avocate Lucile Stahl – à partir du site de l’association requérante, « Journée des droits des femmes : à quand une réouverture de la maternité de Die ? », collectifhopitaldie.org 8 mars 2021, la Cour est venue conforter « la décision par laquelle le directeur du centre hospitalier a renoncé à solliciter pour le compte [de l’établissement] le renouvellement des autorisations accordées par l’agence régionale de santé des activités de soins de chirurgie et de gynécologie-obstétrique en hospitalisation complète, arrivées à échéance le 31 décembre 2017 »27CAA Lyon, 3 mai 2022, Centre hospitalier de Die, n° 20LY02168, cons. 10, en précisant le 19 août 2024 que cet arrêt a été rendu sur les conclusions contraires de la rapporteure publique.. L’arrêt repose essentiellement sur l’argument – pourtant facilement réversible – des « problèmes » ou « impératifs de sécurité »28Cons. 12 ; « organiser une prise en charge des parturientes de manière sécurisée », pour reprendre une formule du considérant précédent, s’est donc fait – ici comme ailleurs – en les éloignant des maternités ; dans son étude annuelle précitée, le Conseil d’État ne l’ignore pas : notant que « la priorité légitime donnée aux enjeux de sécurité dans le fonctionnement du service » est un « motif qui a pu justifier, par exemple, les fermetures de maternité depuis plus de quarante ans », il se réfère aux données de la DREES « entre 2000 et 2017 » (2021, 6 p.) pour conclure que « les “anecdotes” de bébés naissant dans le VSL des pompiers se multiplient depuis… » (2023, pp. 111-112). V. encore les travaux de la « Mission d’information sur l’avenir de la santé périnatale et son organisation territoriale », créé par le Sénat et menées au « premier semestre 2024 ». ; pour balayer les droits invoqués par le collectif, la Cour s’est bornée à affirmer que « compte tenu de la situation des services concernés, les moyens tirés de ce que la décision litigieuse méconnaîtrait les stipulations de l’article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels29Droit aux « services médicaux »., celles des articles 12 et 14 de la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes30Idem et obligation des États parties de tenir « compte des problèmes particuliers qui se posent aux femmes rurales ». et les dispositions de l’article 11 de la charte sociale européenne31« Droit à la protection de la santé ». ne sont, en tout état de cause, pas établis »32Cons. 14 ; comparer Nikitas Aliprantis, « Fonder le caractère juridictionnel des organes supranationaux statuant sur des droits sociaux », La Revue des Droits de l’Homme 2024, n° 24, mis en ligne le 3 nov. 2023, § 30, concluant sur « l’obligation des juges [nationaux] d’intégrer ces normes (…) à la seule condition que l’instrument supranational concerné soit ratifié et mis en vigueur »..

À la fin de cette même année 2022, plusieurs associations avaient plus largement sollicité « la condamnation de l’État à réparer les préjudices causés aux intérêts qu’elles représentent et qu’il lui soit enjoint de prendre différentes mesures de nature à mettre un terme à ses carences en matière hospitalière »33TA Paris, 6 juin 2024, Assoc. « Collectif inter hôpitaux » et a., n° 2222852/6-3 ; mutatis mutandis, Christel Cournil et Marine Fleury, « De « l’Affaire du siècle » au « casse du siècle » ? Quand le climat pénètre avec fracas le droit de la responsabilité administrative », La Revue des Droits de l’Homme ADL 7 févr. 2021, avec des recours récents contre l’orpaillage illégal en Guyane (la1ere.francetvinfo.fr 16 oct. 2023) ou l’éolien offshore (seashepherd.fr 11 mars 2024) ; « La Libre Pensée demande au Tribunal administratif de Paris d’engager la responsabilité de l’État pour inaction en matière de laïcité », fnlp.fr 21 juill. 2024 ; au motif qu’il ne saurait « se substituer aux pouvoirs publics pour déterminer une politique publique », le tribunal administratif de Paris a rejeté cette requête, le 6 juin dernier34Ibid., cons. 4 et s. ; à propos des tensions liées à l’accès aux études de santé, CE, 29 mars 2024, Sorbonne Université, n° 487772 ; LIJMEN juill. 2024, n° 231 ; Soazig Le Nevé, lemonde.fr le 15 (v. aussi, même s’il faudrait l’actualiser, mon billet du 5 sept. 2018 relatif au numerus clausus)..

Photo reprise depuis C.T., martinique.franceantilles.fr 20 juill. 2011

Le président de la République refusant pour l’instant que la coalition arrivée en tête aux élections législatives ne le fasse, l’un des noms suggérés à la place de la regista du NFP a permis à cette dernière d’exprimer son talent offensif : « “Comment nommer un premier ministre qui n’a pas de majorité et qui ne représenterait que lui-même ?, lance Lucie Castets dans une interview mardi 6 août au quotidien Sud Ouest. (…) Xavier Bertrand, c’est l’affaiblissement des financements de l’hôpital, une suppression massive de lits, l’explosion des constructions d’Ehpad privés, une réforme injuste des retraites”, assène-t-elle, en référence à ses responsabilités ministérielles passées »35« La nomination de Xavier Bertrand à Matignon serait une “aberration”, fustige Lucie Castets », lefigaro.fr avec AFP 7 août 2024 ; v. plus largement Rob Grams, « Xavier Bertrand : modéré en apparence, le pire du macronisme dans les faits », frustrationmagazine.fr le 5, en ajoutant le 19 août l’article publié sur le même site par Adrien Pourageaud, « [Bernard] Cazeneuve de retour à Matignon ? Comment dire… », le 13, ainsi que la réaction de Lucie Castets sur bfmtv (en 2020, à l’occasion de mes activités pédagogiques, je m’étais amusé d’un texte pour le moins osé de l’avocat d’affaires, intitulé « Bernard Stirn, la Normandie et Alexis de Tocqueville », in La scène juridique : harmonies en mouvement. Mélanges en l’honneur de Bernard Stirn, Dalloz, 2019, p. 131, spéc. pp. 133-134, où il discernait un « lien (…) qui les conduisit l’un et l’autre à penser le droit et à l’interpréter de telle sorte qu’il puisse, par la disposition des choses, contenir le pouvoir pour préserver les libertés » ; c’est donc en ces termes que l’ancien président de la section du contentieux du Conseil d’État voyait son action qualifiée par celui qui était ministre de l’Intérieur durant l’état d’urgence… Comparer ceux de cinq rapporteurs spéciaux des Nations Unies – le 19 janvier 2016 – et de la professeure de droit Danièle Lochak, « Le juge administratif joue-t-il vraiment un rôle politique ? », in Thomas Perroud (dir.), Les grands arrêts politiques de la jurisprudence administrative, LGDJ/Lextenso, 2019,p. 25, spéc. p. 27 : « l’impact [du contrôle du juge] dépend de ce qu’on met sur chacun des plateaux de la balance : en pratique, le triple test dit de nécessité, d’adaptation et de proportionnalité a débouché dans la très grande majorité des cas sur la validation de mesures gravement attentatoires aux libertés »)..

Tout comme il est trop tôt pour savoir si l’équipe de France masculine36L’équipe féminine s’est inclinée en quart de finale contre le Brésil, qui a ensuite « fait chuter l’Espagne et défiera les États-Unis [samedi 10 août 2024 à 17h] » (TB, sofoot.com le 6). de football a su, quarante ans après les Jeux Olympiques d’été de Los Angeles37Benjamin Quarez et Harold Marchetti, « JO Paris 2024, football : les héros de Los Angeles 84 invités au Parc des Princes pour la finale des Bleus [vendredi 9 août, à 18h] », leparisien.fr le 6 ; il est prévu que les jeux de 2028 aient à nouveau lieu dans la ville américaine, et ceux de 2032 à Brisbane (pour la troisième édition australienne)., remporter ceux de Paris38Au cours d’un échange publié dans Le Parisien le mercredi 20 mars, le sélectionneur des Espoirs rappelait que « ça fait longtemps qu’on n’a pas remporté les JO (1984) » ; Thierry Henry confiait aussi avoir « pleuré quand, en qualif en novembre 1999, on s’est fait éliminer par l’Italie de Gattuso et Pirlo » (phrase reprise de façon condensée en titre, n° 24748, pp. 18 et s., spéc. 19 ; extraits initialement placés en note 5 de mon billet du 23 mars 2024, rapatriés ici pour citer la page Wikipédia de ce dernier, au 23 juillet : « Meneur de jeu très bas, pouvant jouer court, long ou individuel, il est l’exemple même du regista ».)., l’on ne sait pas encore sur quoi va déboucher l’actuelle configuration politique. Lorsque j’ai rédigé mon dernier billet, et plus encore au soir du second tour de ces élections législatives, il me semblait – comme à beaucoup – qu’on ne pouvait espérer qu’éviter une majorité absolue du RN ; le pire n’est jamais sûr39Ou pas certain, pour reprendre le titre d’un livre de Catherine et Raphaël Larrère (premierparallele.fr 2020 – la couverture me permettant de consigner ici la date de ma première expérience en parapente, le 21 juillet dernier).

Notes

1 Collectif, « Le Nouveau Front populaire doit sans tarder tendre la main aux autres acteurs du front républicain pour discuter d’un programme d’urgence républicaine », lemonde.fr 11-12 juill. 2024 ; J.J., « Laurence Tubiana à Matignon ? Pourquoi son nom divise autant le Nouveau Front populaire », laprovence.com avec AFP le 16
2 Ce qui est clair, c’est comment les socialistes l’ont fait, à savoir au motif que l’approbation écologiste n’était pas acquise : v. Daniel Schneidermann, « Qui a tué la candidature Huguette Bello ? », arretsurimages.net 17 juill. 2024 ; elle avait même semblé recueillir le soutien de Carole Delga, avant qu’elle ne se fende d’une « mise au point » (v. Gabriel Kenedi, actu.fr/occitanie le 13). Dans la même période, v. CEDH, 9 juill. 2024, Delga c. France, n° 38998/20 (arrêt non définitif de la cinquième section, rendu à l’unanimité ; Abel Mestre, « Victoire juridique de Carole Delga contre un maire RN du Gard », Le Monde 12 juill. 2024, p. 12).
3 « Pas de gouvernement avant la mi-août, rejet de Lucie Castets… les six moments forts de l’interview d’Emmanuel Macron », liberation.fr avec AFP 23 juill. 2024 ; décryptant cette intervention, Théophile Kouamouo, Le Média le 24 ; y voyant « une interprétation erronée de la Constitution », Julien Jeanneney, lemonde.fr le 25 (auparavant et dans le même sens, Pierre Avril, blog.juspoliticum.com le 15 ; contra Dominique Rousseau – cité par Émilie Jehanno, 20minutes.fr le 12).
4 L’École nationale d’administration (ENA) a été remplacée par l’Institut national du service public (INSP) le 31 décembre 2021 ; cette réforme avait été présentée en avril par Emmanuel Macron (issu de la promotion 2002-2004, dite Léopold-Sédar-Senghor).
5 V. mon billet (portrait) du 28 juillet 2018
6 V. mon billet du 28 juin 2024, en signalant la modification de ma note 21, et mon nouveau record sur 5km – 21 minutes 43, ce matin même –, en passant par la nouvelle passerelle de Bourg-lès-Valence, que j’ai plaisir à emprunter depuis le 12 avril (avec des coéquipiers de foot puis mon adjoint et mes joueurs du vieux bourg, nous utilisions l’ancienne pour nous rendre à l’entraînement, dans les années 2000) ; c’était donc une « une course avec un tempo relativement lent » (Olivier GH, « Athlétisme JO 2024 : Beatrice Chebet crée la sensation sur le 5000 m femmes », dicodusport.fr le 5 août), à sept minutes du record de France féminin (lequipe.fr ; deux français sont qualifiés pour la finale hommes ce samedi, pour cette épreuve sur piste introduite aux JO de 1912 – selon Wikipédia –, soit entre les premières éditions françaises, en 1900 et 1924).
7 Lucie Alexandre, Victor Boiteau et Eve Szeftel, « Lucie Castets, une “guerrière” à la croisée des réseaux », Libération 26 juill. 2024, pp. 16-17 ; au passage, recensant le livre de l’historienne américaine Judith Coffin (Sexe, amour et féminisme. Quand on écrivait à « Madame de Beauvoir », Plon, 2023, préfacé par la philosophe Manon Garcia), v. Christian Ruby, nonfiction.fr 8 juin 2024 (ajout le 19 août, à partir de telerama.fr le 10 : Simone de Beauvoir (1908-1986) a été l’une des dix femmes célébrées cet été à Paris, « dont les statues devraient survivre aux JO » ; elle « n’était pas apparue à l’écran lors de la retransmission de la cérémonie [d’ouverture] »).
8 « Arrêté du 7 janvier 2014 portant affectation aux carrières des élèves (…) de l’École nationale d’administration ayant terminé leur scolarité au 31 décembre 2013 (élèves issus des concours externe, interne et troisième concours) », JORF n° 0007 du 9 janv. 2014
9 Arrêté du 14 janvier 2014, JORF n° 0020 du 24 janv.
10 « Tracfin, la cellule de renseignement financier de Bercy » (« Qui est Lucie Castets, proposée par le Nouveau Front populaire pour le poste de Première ministre ? », francetvinfo.fr 24 juill. 2024).
11 Florent Le Du et Lisa Guillemin, « Lucie Castets, propulsée par la gauche pour Matignon », L’Humanité 24 juill. 2024, p. 6 ; Service politique, « Haute fonctionnaire, engagée pour la défense des services publics… Qui est Lucie Castets, proposée par le NFP pour Matignon ? », nouvelobs.com 23-24 juill. 2024 : « D’après ses amis, c’est aussi dans la vie privée une sportive, joueuse de foot, féministe et mère d’un enfant ».
12 « À l’école, je participais à tous les cross. J’ai fait du tennis pendant une dizaine d’années, du handball, du taekwondo. J’aime l’effort physique », confie-t-elle – sans confirmer, donc – dans l’entretien publié sous le titre « Je veux dire qui je suis », Paris Match 8-13 août 2024, p. 18 – réalisé par Florent Buisson, qui ajoute : « Fan de surf, elle a aussi parcouru le monde au gré de ses études. Un parcours qui contraste avec l’image de l’énarque toujours le nez dans ses dossiers ». Ajouts de deux textes : son entretien publié dans Libération le 21, pp. 3-4 (annoncé à la Une sous le titre « Nous saurons trouver des accords »), qu’elle terminait en s’affirmant « étonnée [que l]es commentaires n’ont retenu que [l’évocation de sa famille], alors qu’il y avait plein de choses sur [elle, sa vie, sa provenance de Caen et sa pratique] du sport » ; « Avant, elle aimait jouer au foot le soir, quelles que soient les intempéries », est-il écrit dans une tribune publiée en ligne le 30, au terme de l’extrait accessible sans abonnement (v. aussi Clément Machetto, « Judith Godrèche s’attaque à Emmanuel Macron, “le même qui célébrait Gérard Depardieu” », closermag.fr le 31).
13 Écouter l’entretien avec le réalisateur Ziad Doueiri dans le podcast Affaires culturelles, radiofrance.fr 12 mars 2024, ainsi qu’Ana Girardot et Nina Meurisse revenant « sur leurs rôles » (Canal + le 5 avr.). Pour une critique sans concession, François Bégaudeau, « Une fièvre d’ordre », Le Monde diplomatique juill. 2024, p. 13 (extrait ; v. aussi infra) ; comparer Rémi Lefebvre, « La Fièvre : le thermomètre est-il juste ? », in Raphaël LLorca et Jérémie Peltier (dir.), Sur La Fièvre. Enseignements politiques d’une série, (Fondation) jean-jaures.org 9 avr. 2024, p. 65, spéc. p. 68 : « Si la série ne verse pas dans la caricature de l’antiwokisme (le terme est très peu utilisé), elle tend à rabattre de nouvelles thématiques et revendications (néoféminisme, lutte contre les discriminations…) sur des questions d’identité alors que l’on peut soutenir qu’elle engage aussi des questions d’égalité et qu’elles reformulent les enjeux de l’émancipation (malgré des excès ou des pathologies militantes, fortement mises en avant par la série) ». Oubliant le passage marquant où l’entraîneur Pascal Terret revient sur le licenciement de son père, le politiste écrit que la « question sociale n’affleure dans la série que sous l’angle du statut de coopérative qu’acquiert le Racing. Le club de foot se rallie à « la démocratie corinthiane », modèle d’autogestion démocratique en pleine dictature militaire au Brésil » (v. mon billet du 5 nov. 2018).
14 En ce sens, Solenn de Royer, « “La Fièvre”, nouvelle série de l’auteur de “Baron noir” : Entre la fiction et la politique, un troublant jeu de miroirs », lemonde.fr 2 janv. (extrait) ; Louis Hausalter, « La Fièvre, cette série qui a intoxiqué Emmanuel Macron et ses conseillers », lefigaro.fr 22 juin 2024 (extrait) ; Baptiste Roger-Lacan, « La fièvre de Macron : la dissolution par les séries », legrandcontinent.eu le 23
15 Tel est le titre du premier épisode de la série, explicité à la demi-heure de jeu par une séquence où l’entraîneur précité (Pascal Vannson) décrit, avec passion, ce qu’il attend de Fodé Thiam (Alassane Diong) sur le terrain ; à l’objection de Sam(uelle) Berger (Nina Meurisse), selon laquelle ce choix tactique se fait au détriment de ses statistiques de buteur, il le concède mais répond : « Le football c’est collectif : j’entraîne pas des joueurs moi, j’entraîne une équipe » (à propos de cette phrase, en en améliorant la syntaxe, v. l’entretien avec Grégory Marin du scénariste Éric Benzekri, « Je suis du camp de ceux qui pensent qu’on ne s’en sortira qu’ensemble », humanite.fr 15-18 mars)… Deux épisodes plus loin est imaginé, à partir d’un ouvrage d’un sociologue (blanc), la publication dans Libération d’un article intitulé « Le “Box to box” ou l’animalisation des corps noirs ». Dans sa recension précitée, François Bégaudeau n’en retient que la réaction de Samuelle (« Tissu de mensonges ») et en conclut qu’il serait, selon la série, « exagéré de dire que le racisme existe en France ». C’est oublier un peu vite le contrôle routier dont fait l’objet le sportif (noir, avant d’être relâché une fois sa position sociale connue) ; la scène est en soi assez éloquente pour susciter la réflexion, bien avant sa qualification comme manifestation du « racisme endémique de la police » par la militante décoloniale Kenza Chelbi (Lou-Adriana Bouziouane, par ailleurs au théâtre dans Quartiers de femmes, de Mohamed Bourouissa ; v. sceneweb.fr 17 oct. 2023).
16 Jérôme Latta et Les Dé-Managers, « Lexique tactique / 1 : postes et rôles », cahiersdufootball.com 3-4 sept. 2014 ; Sam Meunier, « Pourquoi et comment faut-il redéfinir le terme de “box-to-box” », cafecremesport.com 9 juill. 2021
17 « Les cabinets de conseil ont-ils remplacé les fonctionnaires ? », C Ce soir 29-30 nov. 2022
18 « A-t-on laissé le service public dépérir ? », radiofrance.fr 9 déc. 2022
19 « Émission spéciale. Contre l’extrême droite, l’indispensable sursaut », Mediapart 11 juin 2024 (l’émission est séquencée, ce qui permet d’aller directement à 1h09 pour l’écouter) ; v. aussi le numéro spécial de La Déferlante, « Extrêmes droites. Résister en féministes » (à paraître fin août 2024, n° 15).
20 Dans l’une de ses trois chroniques pour Alter éco, elle invitait plus largement à « observer que les constats dressés par le collectif Nos services publics et le changement de méthode proposé (repartir des besoins) [dans son premier rapport] coïncident avec ceux de la dernière étude annuelle du Conseil d’État, intitulée « L’usager, du premier au dernier kilomètre : un enjeu d’efficacité de l’action publique et une exigence démocratique », également publiée en septembre 2023 » (Lucie Castets, « Services publics : qu’attend-on pour agir ? », alternatives-economiques.fr 20 sept. 2023). Ayant participé à sa rédaction en tant que rapporteure générale adjointe de la section du rapport et des études, Mélanie Villiers était invitée à la présenter après le Grand Reportage d’Ouafia Kheniche, « Services publics, la grande fracture des territoires », radiofrance.fr 2 août 2024 (première diffusion le vendredi 8 mars) ; à propos de la dématérialisation, v. mon billet du 31 déc. 2023, à la note 11 (en la complétant par cet entretien avec Lucie Castets, francetvinfo.fr 17 avr.), et l’article du haut-fonctionnaire Simon Arambourou, « Les déshumanisateurs. De quoi la “dématérialisation” des services publics est-elle le nom ? », Le Monde diplomatique avr. 2024, p. 3 (extrait).
21 Elle était en effet co-animatrice (offensive, pour reprendre l’une qualités attendus d’une regista), avec Said Benmouffok et Béligh Nabli – respectivement professeurs de philosophie et de droit public – du podcast « On n’a pas tout essayé », proposé par Le Nouvel Obs (douze épisodes du 3 mars au 30 juill. 2024 ; en complément du premier avec l’économiste Anne-Laure Delatte, v. la formation avec Michaël Zemmour : « Impôts, cotisations sociales : de quoi parle-t-on ? », OnContinue le 25).
22 « Matignon, retraites, nucléaire… L’interview de Lucie Castets, candidate du NFP pour Matignon », BFMTV 25 juil. 2024
23 Le second m’amène à signaler mon billet du 20 mai 2018, renvoyant aux pages pertinentes de ma thèse à propos du contentieux relatif aux absences d’enseignant·es non remplacé·es ; v. récemment TA Cergy-Pontoise, 3 avril 2024, n° 2211429 et 2301199 (décisions mises en ligne sur le site du tribunal, qui en signale douze dans un communiqué du 10 avr. – dont les n° 2217195 et 2301195 selon Fleur Jourdan le 25 ; le 19, Jérémy Bousquet citait des jugements non mobilisés dans mes travaux : TA Cergy-Pontoise, 21 juill. 2017, M. et Mme Bollérot, n° 1508790 ; TA Lille, 26 juin 2019, n° 1702109 ; TA Nantes, 10 oct. 2019, n° 1608500 ; TA Montreuil, 13 oct. 2020, n° 2003767 ; TA Besançon, 23 fév. 2021, n° 2000557) et, contra, Gérald Camier, « Toulouse : le tribunal administratif déboute les familles qui réclamaient à l’académie réparation après les heures perdues par leur enfant à l’école », ladepeche.fr 1er août 2024 (trois jugements rendus « fin juillet »). Dans une configuration inédite, v. aussi TA Montreuil Ord., 26 avr. 2024, Préfet de la Seine-Saint-Denis, n° 2404825, 2404826, 2404827, 2404828, 2404829, 2404830, 2404831, 2404832, 2404833, 2404834, 2404964 et 2405058 (douze ordonnances en déféré-suspension, contre des arrêtés municipaux « mettant en demeure l’Etat, dans le cadre d’un plan d’urgence, de créer des postes d’enseignants et de personnels éducatifs ») ; près d’un an plus tôt, 25 mai 2023, n° 2305815, sachant que des contentieux indemnitaires portés par Anina Ciuciu ont abouti en mars 2024 (v. Faïza Zerouala, « Refus de scolarisation : un collectif de mères précaires a gagné face à l’État », Mediapart 29 juin 2024, faisant le lien avec l’affaire de Ris-Orangis, à propos de laquelle v. mon billet du 6 juin 2018).
24 « Législatives 2024 : la gauche résiste à la vague RN dans deux circonscriptions de la Drôme », francebleu.fr 30 juin 2024 ; arrivée en tête « dans 181 des 239 communes » de la troisième, Marie Pochon « a été réélue avec 56,59 % des voix contre le candidat RN-LR avec Ciotti, Adhémar Autrand. Une victoire claire, qui place l’une des plus grandes circonscriptions de France résolument à gauche » ; alors que ce dernier « s’impose dans les communes du Sédéronnais et du Tricastin et les piedmonts ouest du Royans-Vercors », elle « fait ses meilleurs scores dans (…) le Crestois, le Nyonsais, le pays de Dieulefit » et, « sans surprise, le Diois [qui] a largement plébiscité la candidate écologiste (70 %) comme en 2022. À Die, elle obtient quasiment 76 % des voix, 66,59 % à Châtillon-en-Diois, 67,32 % à Luc-en-Diois ou encore 78,82 % à Saillans. Elle [y] fait un quasi grand chelem, à l’exception de trois communes, Rochefourchat [une voix contre quatre…], Gumiane [et] Volvent. (…) Deux communes se distinguent sur le Diois, Les Prés où aucun électeur n’a voté pour le Rassemblement national ni au premier ni au second tour, et la commune de Beaumont-en-Diois qui a voté [également, le 7 juillet,] à 100 % pour la députée sortante [recueillant respectivement 14 et 70 voix] » (E.P. et SLC, Journal du Diois et de la Drôme 12 juill., p. 2). « Rare députée écologiste d’une circonscription rurale », souligne sa page Wikipédia (au 26).
25 En tout état de cause, ce lien ne saurait en résumer les déterminants : v. l’émission avec la journaliste Camille Bordenet et le sociologue Benoit Coquard (radiofrance.fr 19 juin 2024), ainsi que la recension du livre de Félicien Faury, Des électeurs ordinaires. Enquête sur la normalisation de l’extrême droite (Seuil), par François Rulier, politis.fr 10 juill. ; v. encore Jean-Marie Pottier, « Pourquoi ont-ils voté Rassemblement national ? Ethnographie d’une lame de fond », Sciences Humaines juill.-août 2024, n° 370, pp. 27 à 35, avec d’autres références page 31, et la recension pp. 28-29 de l’essai à paraître du philosophe belge Michel Feher, Producteurs et parasites. L’imaginaire si désirable du Rassemblement national (La Découverte).
26 V. mon billet du 29 juillet 2020, renvoyant à mes publications antérieures sur cette question des fermetures de maternité, abordée d’un point de vue contentieux à partir du cas de Die ; en complément au reportage d’Élodie Potente publié dans le Cahier spécial Auvergne-Rhône-Alpes de la revue Sans transition ! janv. 2021, n° 27, p. 15 – déjà cité au détour de mes travaux de recherche –, v. le texte de Géraldine Magnan pour Profession Sage-Femme nov. 2020, n° 266, pp. 7-8, citant in fine l’avocate Lucile Stahl – à partir du site de l’association requérante, « Journée des droits des femmes : à quand une réouverture de la maternité de Die ? », collectifhopitaldie.org 8 mars 2021
27 CAA Lyon, 3 mai 2022, Centre hospitalier de Die, n° 20LY02168, cons. 10, en précisant le 19 août 2024 que cet arrêt a été rendu sur les conclusions contraires de la rapporteure publique.
28 Cons. 12 ; « organiser une prise en charge des parturientes de manière sécurisée », pour reprendre une formule du considérant précédent, s’est donc fait – ici comme ailleurs – en les éloignant des maternités ; dans son étude annuelle précitée, le Conseil d’État ne l’ignore pas : notant que « la priorité légitime donnée aux enjeux de sécurité dans le fonctionnement du service » est un « motif qui a pu justifier, par exemple, les fermetures de maternité depuis plus de quarante ans », il se réfère aux données de la DREES « entre 2000 et 2017 » (2021, 6 p.) pour conclure que « les “anecdotes” de bébés naissant dans le VSL des pompiers se multiplient depuis… » (2023, pp. 111-112). V. encore les travaux de la « Mission d’information sur l’avenir de la santé périnatale et son organisation territoriale », créé par le Sénat et menées au « premier semestre 2024 ».
29 Droit aux « services médicaux ».
30 Idem et obligation des États parties de tenir « compte des problèmes particuliers qui se posent aux femmes rurales ».
31 « Droit à la protection de la santé ».
32 Cons. 14 ; comparer Nikitas Aliprantis, « Fonder le caractère juridictionnel des organes supranationaux statuant sur des droits sociaux », La Revue des Droits de l’Homme 2024, n° 24, mis en ligne le 3 nov. 2023, § 30, concluant sur « l’obligation des juges [nationaux] d’intégrer ces normes (…) à la seule condition que l’instrument supranational concerné soit ratifié et mis en vigueur ».
33 TA Paris, 6 juin 2024, Assoc. « Collectif inter hôpitaux » et a., n° 2222852/6-3 ; mutatis mutandis, Christel Cournil et Marine Fleury, « De « l’Affaire du siècle » au « casse du siècle » ? Quand le climat pénètre avec fracas le droit de la responsabilité administrative », La Revue des Droits de l’Homme ADL 7 févr. 2021, avec des recours récents contre l’orpaillage illégal en Guyane (la1ere.francetvinfo.fr 16 oct. 2023) ou l’éolien offshore (seashepherd.fr 11 mars 2024) ; « La Libre Pensée demande au Tribunal administratif de Paris d’engager la responsabilité de l’État pour inaction en matière de laïcité », fnlp.fr 21 juill. 2024
34 Ibid., cons. 4 et s. ; à propos des tensions liées à l’accès aux études de santé, CE, 29 mars 2024, Sorbonne Université, n° 487772 ; LIJMEN juill. 2024, n° 231 ; Soazig Le Nevé, lemonde.fr le 15 (v. aussi, même s’il faudrait l’actualiser, mon billet du 5 sept. 2018 relatif au numerus clausus).
35 « La nomination de Xavier Bertrand à Matignon serait une “aberration”, fustige Lucie Castets », lefigaro.fr avec AFP 7 août 2024 ; v. plus largement Rob Grams, « Xavier Bertrand : modéré en apparence, le pire du macronisme dans les faits », frustrationmagazine.fr le 5, en ajoutant le 19 août l’article publié sur le même site par Adrien Pourageaud, « [Bernard] Cazeneuve de retour à Matignon ? Comment dire… », le 13, ainsi que la réaction de Lucie Castets sur bfmtv (en 2020, à l’occasion de mes activités pédagogiques, je m’étais amusé d’un texte pour le moins osé de l’avocat d’affaires, intitulé « Bernard Stirn, la Normandie et Alexis de Tocqueville », in La scène juridique : harmonies en mouvement. Mélanges en l’honneur de Bernard Stirn, Dalloz, 2019, p. 131, spéc. pp. 133-134, où il discernait un « lien (…) qui les conduisit l’un et l’autre à penser le droit et à l’interpréter de telle sorte qu’il puisse, par la disposition des choses, contenir le pouvoir pour préserver les libertés » ; c’est donc en ces termes que l’ancien président de la section du contentieux du Conseil d’État voyait son action qualifiée par celui qui était ministre de l’Intérieur durant l’état d’urgence… Comparer ceux de cinq rapporteurs spéciaux des Nations Unies – le 19 janvier 2016 – et de la professeure de droit Danièle Lochak, « Le juge administratif joue-t-il vraiment un rôle politique ? », in Thomas Perroud (dir.), Les grands arrêts politiques de la jurisprudence administrative, LGDJ/Lextenso, 2019,p. 25, spéc. p. 27 : « l’impact [du contrôle du juge] dépend de ce qu’on met sur chacun des plateaux de la balance : en pratique, le triple test dit de nécessité, d’adaptation et de proportionnalité a débouché dans la très grande majorité des cas sur la validation de mesures gravement attentatoires aux libertés »).
36 L’équipe féminine s’est inclinée en quart de finale contre le Brésil, qui a ensuite « fait chuter l’Espagne et défiera les États-Unis [samedi 10 août 2024 à 17h] » (TB, sofoot.com le 6).
37 Benjamin Quarez et Harold Marchetti, « JO Paris 2024, football : les héros de Los Angeles 84 invités au Parc des Princes pour la finale des Bleus [vendredi 9 août, à 18h] », leparisien.fr le 6 ; il est prévu que les jeux de 2028 aient à nouveau lieu dans la ville américaine, et ceux de 2032 à Brisbane (pour la troisième édition australienne).
38 Au cours d’un échange publié dans Le Parisien le mercredi 20 mars, le sélectionneur des Espoirs rappelait que « ça fait longtemps qu’on n’a pas remporté les JO (1984) » ; Thierry Henry confiait aussi avoir « pleuré quand, en qualif en novembre 1999, on s’est fait éliminer par l’Italie de Gattuso et Pirlo » (phrase reprise de façon condensée en titre, n° 24748, pp. 18 et s., spéc. 19 ; extraits initialement placés en note 5 de mon billet du 23 mars 2024, rapatriés ici pour citer la page Wikipédia de ce dernier, au 23 juillet : « Meneur de jeu très bas, pouvant jouer court, long ou individuel, il est l’exemple même du regista ».).
39 Ou pas certain, pour reprendre le titre d’un livre de Catherine et Raphaël Larrère (premierparallele.fr 2020 – la couverture me permettant de consigner ici la date de ma première expérience en parapente, le 21 juillet dernier).

Front populaire et Blum : quelques références

Capture d’écran du Contrat de législature du NFP, juin 2024

Après les élections européennes1Il y a un peu plus de cinq ans, le 13 mai 2019, j’avais publié un billet à l’approche du scrutin, à propos des revendications de la liberté de circulation – qui se font parfois au détriment du droit à l’éducation. et l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale, la référence au « Front populaire » est rapidement redevenue sur le devant de la scène : dès cette soirée du dimanche 9 juin, l’expression avait été employée par François Ruffin qui, trois jours plus tard, proposait comme « première mesure (…) l’école vraiment gratuite »2« Législatives : François Ruffin souhaite “la véritable gratuité de l’école” », bfmtv.com 12 juin 2024 ; ajout le 9 juillet de cet extrait de Marine Tondelier, au soir du second tour, x.com le 7 ; « Faire les premiers pas pour la gratuité intégrale à l’école : cantine scolaire, fournitures, transports, activités périscolaires », telle est l’une des formules du Contrat de législature du Nouveau Front Populaire (NFP)3NFP, Contrat de législature préc., juin 2024, p. 5 ; v. Olivier Chartrain, « Nouveau Front Populaire : fin du “choc des savoirs” et l’ambition de rebâtir l’école publique », humanite.fr le 14, Philippe Watrelot, « La gauche et l’école : un programme prometteur à développer », alternatives-economiques.fr le 26 et, mis en ligne entretemps, comparateur.nosservicespublics.fr/education.

Depuis trois semaines, de nombreux éclairages ont été publiés sur les limites et l’intérêt4V. par ex. Frédéric Monier (entretien avec, par Olivier Doubre), « La référence au Front populaire permet de lier conscience du danger et victoire possible », politis.fr le 18 de cette « réactivation politique d’une référence mémorielle »5Fabien Escalona, « Front populaire : les gauches réveillent le mythe de 1936 », Mediapart le 11 ; v. aussi les textes rassemblés sur le blog du journal, sous le titre « Léon Blum, Front populaire et référence mémorielle ». ; elle me donne l’occasion de renvoyer à quelques textes6V. tout d’abord mes billets des 31 janvier 2020 (au cinquième paragraphe) et 29 février 2020 (en note 9), ainsi que ma note de jurisprudence liée (Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai, au point 2)., en particulier à mon billet (portrait) consacré à Jean Zay (1904-1944)7Texte publié le 28 juillet 2018.

Le 4 juin 1936, il avait été nommé ministre de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts par Léon Blum (1872-1950). Sauf erreur, alors que je mentionnais plusieurs fois ce dernier en 20178V. ma thèse, aux (notes de bas de) pages (202, 247,) 550, (717,) 718, 760 (et 1006)., je ne l’ai fait sur ce site qu’une seule fois9Le 23 septembre 2018, lors de l’actualisation de mon billet intitulé « De Marie Curie à Paul Langevin », 4 févr. 2018 ; il l’a été beaucoup plus ces dernières semaines, jusqu’au sommet de l’État10Pour reprendre une jolie formule, Blum est quant à lui « parvenu au sommet en empruntant le chemin des crêtes » (Jacques Julliard, Les gauches françaises. 1762-2012 : Histoire, politique et imaginaire, Flammarion, 2012, p. 556). : les 10 et 12 juin, un député du Rassemblement National, une essayiste et le président de la République tenaient, dans des termes très proches, à lui adresser « une pensée »11« Duhamel (BFM) recadre sèchement Odoul (RN) sur Léon Blum », entrevue.fr 11 juin 2024 : si l’heure mentionnée est la bonne, la formule a été employée deux minutes avant le tweet de l’essayiste plagiaire Rachel Khan (reproduit par Ronan Tésorière, « Législatives : Bernard Cazeneuve et Julien Dray tirent à boulets rouges sur « le Front Populaire », leparisien.fr le 11) ; Mathilde Serra, « “Il doit se retourner dans sa tombe” : Emmanuel Macron adresse une pensée à Léon Blum après la formation d’un “Front populaire” », lefigaro.fr les 12-13.

La stratégie d’Emmanuel Macron reposant notamment sur la division des forces de gauche, il n’a nullement répugné à diffamer l’une d’entre elles en l’accusant d’antisémitisme12V. la tribune intitulée « Réponse collective à une infamie : Sur l’accusation d’antisémitisme portée contre la France insoumise », auposte.fr 17 juin 2024, ainsi que celle co-signée, notamment, par Danièle Lochak, « Nous, citoyens juifs, notre devoir est de refuser l’instrumentalisation de l’antisémitisme et de faire barrage au RN », Libération le 20, blogs.mediapart.fr le 26, déplorant notamment l’enrôlement de Blum dans des « accusations diffamantes » (v. encore Denis Sieffert, « À propos d’un antisémitisme à gauche réel ou supposé », politis.fr le 25). Sur ce site, v. mes billets des 25 mars 2019 – en note 30 – et 30 mai 2020 – à partir de la troisième illustration, où je revenais sur les mises en cause d’Edgar Morin et d’Achille Mbembe ; j’ajoute ici quelques mots à propos de celles liées au terme « rescapé », repris avec insistance par Rachel Khan dans son tweet du 10 juin dernier (v. la note 11 supra), suite à celui qu’elle avait adressé à Mathilde Panot à l’encontre du rappeur Médine : la réaction de l’intéressé avait provoqué les initiatives de 47 députés Renaissance « demand[ant] à EELV et LFI de ne pas l’inviter », leberry.fr 11 août 2023, François Cormier-Bouligeon allant jusqu’à saisir « la justice en adressant un courrier à la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, au titre de l’article 40 du Code pénal » (selon Thomas Lorentz, midilibre.fr le 24), des défections aux universités d’été des écologistes (ibid.), un article dans la presse locale drômoise à l’approche de celles du parti LFI (ledauphine.com le 22) et des propos très clairs de Médine à Châteauneuf-sur-Isère (bfmtv.com le 28 ; revenant quant à lui sur « cette polémique sous l’angle du droit pénal », Thomas Besse, « Controverse sur le tweet de Médine visant Rachel Khan : quid juris ? », le leclubdesjuristes.com le 8 sept.). Durant l’une des manifestations contre l’extrême droite, après sa victoire aux élections européennes, j’ai pu constater à Valence (v. la dernière photo illustrant l’article d’Alexandra Marie Ertiani, francetvinfo.fr 15 juin 2024) que certains slogans visaient explicitement l’antisémitisme et contrastaient, donc, avec le « silence » qui demeure encore souvent au sein des « organisations de la gauche radicale et de l’antiracisme français » (v. Camilla Brenni, Memphis Krickeberg, Léa Nicolas-Teboul & Zacharias Zoubir, « Le non-sujet de l’antisémitisme à gauche », Vacarme févr. 2019, n° 86).. Au début de son premier mandat, il appelait à ne « pas occulter la figure de (Charles) Maurras » (1868-1952)13« Macron (plutôt) contre une réédition des pamphlets antisémites de Céline », nouvelobs.com (avec AFP) 8 mars 2018 ; c’était après l’indignation qu’avait suscité le fait qu’on ait pu envisager, « dans une commémoration officielle, oublier l’antisémitisme de l’insulteur quotidien du “Juif Blum” »14Daniel Schneidermann, « Maurras, une amnésie d’État ? », liberation.fr 4 févr. 2018. Plus tard, il s’y référait encore15V. son entretien publié dans L’Express du 22 décembre 2020, provoquant notamment ce communiqué des Juives et juifs révolutionnaires, « Macron, Maurras, Pétain et l’antisémitisme », dijoncter.info 27 déc. 2020-1er févr. 2022 et cette tribune du directeur du Musée d’art et d’histoire du judaïsme Paul Salmona, « A quoi sert la mise au ban de Maurras par la justice si l’amnésie vient la recouvrir ? », lemonde.fr 7 janv. 2021 ; v. encore Rémi Noyon, « “Un tout organique”  : Macron entre Durkheim et Maurras », nouvelobs.com 18 juill. 2022 ; Sébastien Fontenelle, « Les trous de mémoire de M. Macron », politis.fr le 20, comme s’il lui importait peu que le directeur du journal L’Action française ait écrit : « C’est en tant que juif qu’il faut voir, concevoir, entendre et abattre le Blum »16Nicolas Truong, « Front populaire », Le Monde 27 juin 2024, p. 31, en datant cette phrase du fondateur de l’action française au 15 mai 1936, après avoir cité les historiens Antoine Prost et Jean Vigreux, auteurs respectivement d’Autour du Front populaire. Aspects du mouvement social au XXème siècle (Seuil, 2006) et d’Histoire du Front populaire. 1936, l’échappée belle ([Tallandier, 2016,] Texto, 2022). ; « “Voilà un homme à fusiller, mais dans le dos”, qu’il ait inscrit Blum en bonne place sur la liste des personnages à tuer [égorger] “avec un couteau de cuisine” »17Jean Lacouture, Léon Blum, Seuil, 1977 (édition abrégée), p. 205 [249]. V. par ailleurs page 95, pour revenir aux questions pédagogiques : « L’enfant unique de Lise et Léon Blum est né en 1902, Robert, à l’éducation duquel son père voue une attention passionnée » ; ces lignes sont extraites du chapitre intitulé « Le sillage de Jaurès », pp. 72 à 120 : le biographe rappelle que l’affaire Dreyfus « a noué à jamais [leurs] deux vies » et termine sur l’assassinat de Jaurès, le 31 juillet 1914 (pour une nouvelle récente dans laquelle ce dernier ne meurt pas, v. Camille Leboulanger, « La Générale », in Dévorer le futur, Goater, 2023, p. 23 ; s’agissant de sa contribution à l’affirmation du droit à l’éducation, v. mon portrait). Ajout au 9 juillet de plusieurs lignes en réaction à un échange entre Raphaël Kempf et Aleksandar Nikolic ; L’Équipe du dimanche 7 juillet a consacré ultérieurement à ce dernier un portrait, titré « L’inconnu national », permettant de présenter brièvement celui qui s’est trouvé, quatre ans après avoir adhéré au Front National, « bombardé “conseiller sport” » de la patronne » en 2017 : « Mère portugaise, père serbe (décédé), binational, enfant métisse et parcours idéologique entamé, à 15 ans, dans la foulée de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) avant une brève adhésion au PC », il justifie aujourd’hui son évolution politique par des formules antisémite et pro-palestinienne entendues lors d’une projection du film La vie est belle dans son lycée des Yvelines (Alban Traquet avec A.D., page 15) ; député européen élu en 2024, il était 19ème sur la liste du RN, qui a obtenu 30 sièges (sur les 81 français et 720 européens) le 9 juin – soit la majorité des plus ou moins quatre-vingt « “Patriotes pour l’Europe”, imaginé[s] par le Premier ministre hongrois Viktor Orban » (Romain Herreros, « Le groupe présidé par Jordan Bardella au Parlement européen torpille la “normalisation” du RN », huffingtonpost.fr 8 juill. ; v. aussi cet article avec AFP, le situant « derrière la droite pro-européenne (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D), surpassant les libéraux de Renew (76 sièges), groupe auquel appartient le parti du président français Emmanuel Macron, et le groupe de droite radicale ECR associé à la Première ministre italienne Giorgia Meloni (78 sièges). »). Le 1er juillet, l’avocat revenait sur la genèse de sa candidature NFP dans la 1ère circonscription de Paris en évoquant son livre « sur Léon Blum » (Ennemis d’État. Les lois scélérates, des anarchistes aux terroristes, La Fabrique, 2019, spéc. pp. 32 et s. à partir de son article à La Revue blanche 1er juill. 1898, reproduit pp. 125 et s., signé « Un [jeune] juriste » et repris dans « une brochure de 62 pages » en 1899 ; je la citais dans ma thèse en note de bas de page 247, n° 1484, tout comme l’un des deux autres auteurs – Francis de Pressensé, pour son parcours ultérieur, spéc. pp. 314, 547 et s.). L’eurodéputé RN de rétorquer avec aplomb que celui-ci « était pour la préférence nationale » ; le Front populaire l’aurait « mis[e] en vigueur » et le nier relèverait d’une « inculture historique » (LCP, à partir de 35 min. 30). Gérard Noiriel vient justement de publier, en mars dans la collection « Tracts » (n° 55), Préférence nationale. Leçon d’histoire à l’usage des contemporains, Gallimard, 2024, 58 p., avec page suivante ces notes 10 et 9 : « La plupart de mes références sur les années 1930 sont extraites de l’étude de Jean-Charles Bonnet, Les Pouvoirs publics et l’immigration dans l’entre-deux-guerres, Centre d’histoire économique et sociale de la région lyonnaise, 1976 [v. la recension de de cette thèse de 3ème cycle par Martine Charlot, Migrants Formation 1980, n° 40, pp. 2-3] ; Imre Ferenczi, « La statistique des étrangers notamment au point de vue français », Journal de la société statistique de Paris 1937, n° 78, pp. 288-310 : en s’appuyant sur cet article, l’historien écrit : « En 1930, d’après les chiffres du Bureau international du Travail, la proportion d’étrangers immigrés en France était de 8,6 %, soit un chiffre supérieur à celui d’aujourd’hui (7,8 %) » ; elle baissait dès l’année suivante, lorsque « l’effondrement de la bourse de Wall Street (octobre 1929) avait déjà produit ses effets. (…) Alors que l’immigration avait été invisible (…) – parce qu’il fallait combler les déficits du marché du travail – elle redevint un “problème” dès le début des années 1930 » (pp. 16-17). Après un « quasi-consensus sur la “préférence nationale” [qui] aboutit au vote de la loi du 10 août 1932, adoptée à l’unanimité malgré 128 abstentions de gauche et d’extrême-gauche », les « décrets-lois adoptés entre mai et novembre 1938 poussèrent au paroxysme la stratégie, née au cours des années 1880, visant à intégrer le discours de l’extrême-droite [la] concernant ». Entretemps, la « victoire du Front populaire marqua un coup d’arrêt dans cette fuite en avant (…). Certes, la proposition du PCF en faveur d’un statut juridique des immigrés ne fut pas adoptée et la politique antérieure du contingentement des flux migratoires fut prolongée. Néanmoins, les nouveaux gouvernants firent preuve d’une attitude plus souple et plus humaine, surtout pour les réfugiés. Les décrets-lois imposés par [Édouard Daladier, successeur de Léon Blum] plongèrent donc la gauche dans une consternation bien illustrée par ces propos du communiste Georges Lévy : « qui aurait pu croire que deux ans après la victoire du Front populaire, les immigrés, au lieu du statut juridique escompté, se verraient octroyer un ensemble de mesures policières propres à faire passer la France pour une marâtre » (pp. 18, 24 et 26-27, avant d’ouvrir ses « Réflexions sur la loi Asile et immigration du 19 décembre 2023 » par ce titre : « Emmanuel Macron, le Daladier du XXIe siècle ? », pp. 30 et s.)..

« Paris, le 14 juillet 1936. Sur la tribune officielle, Thérèse (à gauche) est la seule femme au premier rang de l’estrade. Aux côtés de son époux Léon Blum, de Maurice Thorez et de Roger Salengro (de gauche à droite), elle lève son poing ganté pour célébrer la victoire du Front populaire » (Charles De Saint Sauveur, « Le sacrifice de la “citoyenne Blum” », leparisien.fr 7 mai 2016, recensant la biographie de Dominique Missika, Thérèse : le Grand Amour caché de Léon Blum, Alma ; v. auparavant le livre que l’historienne avait consacré, en 2009, à sa relation avec sa troisième épouse, Jeanne Reichenbach)

Au lendemain de la formation du gouvernement du Front populaire, Maurras commentait : « Le cabinet juif est fait »18Figurant en Une de L’Action française 5 juin 1936 (titré « La France sous le juif »), cette phrase est citée par Edwy Plenel, « Front populaire : Blum contre Macron », Mediapart 16 juin 2024 ; outre le rappel par le fondateur du journal en ligne de ce que Gérald Darmanin avait fait référence, le 6 décembre 2022, à Jacques Bainville (Hugues Maillot, lefigaro.fr le 7), l’avoir entendu ce vendredi 28 juin sur franceinfo m’incite à modifier cette note le 9 juillet pour revenir sur le retrait d’investiture évoqué et, surtout, à « un fait incontestable » plus récent que ces « tweets à caractère antisémite » (Jacques Pezet, liberation.fr le 27 ; lanouvellerepublique.fr le 28). Dans son livre intitulé Le séparatisme islamiste : manifeste pour la laïcité (L’Observatoire, 2021), Gérald Darmanin développait une idée exprimée dans Libération dès 2015 : « Il faut que l’État impose aux musulmans ce que Napoléon a imposé aux juifs » (23 nov. ; v. déjà sa tribune du 14 janv., citée dans ma thèse en bas de page 566, n° 3651) ; il le faisait toutefois en ressassant des clichés antisémites, dans une indifférence quasi-générale (v. Sébastien Fontenelle, « Darmanin, écrivain », politis.fr 31 mars 2021, renvoyant aux « timides articles » parus dans L’Huma et L’Obs, ainsi qu’au « passionnant entretien avec l’historien Pierre Birnbaum, qui remet quelques points sur quelques i : « Napoléon et les Juifs : politique “scandaleuse” », sur www.arretsurimages.net [v. respectivement les 25, 23-24 et à nouveau 25] ». ; ainsi accueillait-il un évènement dont il convient de rappeler, au présent, la genèse : après la manifestation antiparlementaire du 6 février 1934, organisée par les ligues d’extrême-droite, les partis communistes et socialistes s’unissent et, en juillet, « signent un “pacte d’unité d’action antifasciste”. En juin 1935, le parti radical [les rejoint avant un défilé marquant, à la date symbolique du 14 juillet et grâce à d’autres formations politiques, syndicales et associatives, la naissance du] Front populaire (…). Il remporte une nette victoire aux élections législatives de 1936, envoyant 386 députés sur 608 sièges à la Chambre des députés, dont 147 pour la SFIO [Section française de l’Internationale ouvrière19V. l’étude de Ji-Hyun Jeon, « Quelques jalons pour une histoire des juristes au sein du Parti socialiste-SFIO (1905-1939) », in Carlos Miguel Herrera, Les juristes face au politique. Le droit, la gauche, la doctrine sous la Troisième République, t. II, Kimé, 2005, p. 45, spéc. pp. 46 et 48 : « du moment de sa création en 1905 jusqu’à la veille de la Deuxième Guerre mondiale », l’alors doctorante en histoire à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), en recense 251.]. Le socialiste Léon Blum forme un gouvernement de coalition. En moins de deux mois sont votés la semaine de quarante heures, les congés payés et les conventions collectives »20Stéphanie Trouillard, « Après l’appel à un nouveau “Front populaire”, retour sur “l’immense espoir” suscité en 1936 », france24.com 11 juin 2024.

AFP, illustration reprise depuis l’article de Marion Pignot, « En images : Suffragettes, Hubertine Auclert et IVG… Il y a 80 ans, les Françaises votaient », 20minutes.fr 21 avr. 2024 (à l’occasion du 170ème anniversaire de la naissance de cette dernière, v. mon billet du 10 avril 2018 ; récemment, v. la tribune de Camille Froidevaux-Metterie, « Voter RN pour les femmes, c’est braquer une arme contre soi », lemonde.fr 13 juin 2024)

« Ce train de réformes marque durablement la société française et le modèle républicain, comme le souligne Jean Vigreux (…)[, pour qui] il ne faut pas non plus perdre de vue “les désillusions suscitées” par le Front populaire : “Il y a eu trois secrétaires d’État, femmes21Plus précisément sous-secrétaires d’État (note modifiée le 3 août, complétée le 12 en renvoyant au premier épisode de la série de Mediapart, « Ministres pionnières du Front Populaire », signé ce jour par Antoine Perraud) : Suzanne Lacore à la Protection de l’enfance, Cécile Brunschvicg à l’Éducation nationale et Irène Joliot-Curie à la Recherche scientifique ; à propos de cette dernière et outre mon billet signalé en note 9, v. le texte de Jean-Christophe Féraud, « Irène Curie et Frédéric Joliot, atomes très crochus », Libération 1er août 2024, pp. II-III des feuilles « été » ; à la page 22 liée, lire Alexandra Schwartzbrod, « Blum, itinéraire d’un lettré », p. 22, à propos de l’adaptation en livre, en 2023, du podcast de Philippe Collin cité ci-après. J’ajoute aussi la localisation des rues Léon Blum les plus proches pour moi – auxquelles j’ai prêté attention à la faveur de mes dernières courses à pied : au nord, à Bourg-lès-Valence, elle se situe juste avant la rue Édith Piaf (au passage, quelques réactions dans la presse étrangère à « la cérémonie d’ouverture des JO de Paris », courrierinternational.com 27 juill.) ; à Valence sud, dans le quartier de Valensolles, c’est depuis la rue Jules Ferry (où se trouvait une école réhabilitée en MPT, inaugurée le 12 avril) que l’on accède à la rue Léon Blum (pour une photo prise en 1984 – l’année de ma naissance – entre ces deux rues, v. le site memoire-drome.com ; elles peuvent être aussi reliées, à pied, par l’allée René Cassin – à qui j’ai consacré, en 2018, l’un de mes portraits). ; mais cela n’a pas permis d’accorder le droit de vote aux femmes. D’un point de vue colonial, il faut aussi souligner l’inégalité des droits entre ceux qui étaient sous le code de l’indigénat et le reste des colons européens. La non-intervention lors de la guerre civile en Espagne a aussi créé des blessures” »22Stéphanie Trouillard (citant Jean Vigreux), art. préc..

Livrant « une contribution majeure à l’histoire du droit politique français »23Éric Desmons, « Préface », in Vincent Le Grand, Léon Blum (1872-1950) : gouverner la République, LGDJ, 2008, p. VI, Vincent Le Grand écrivait en 2008 : « Si la vie lui en avait laissé le temps, le vieil homme aurait [certainement approuvé] l’arrêt Dehaene24Relatif au droit de grève et figurant parmi les « grands arrêts de la jurisprudence administrative » (GAJA), l’arrêt Dehaene se trouve évoqué à la page 19 du Livret de méthodologie, ainsi qu’aux notes 16 et 22 de mon billet du 23 octobre 2019, dont le titre fait écho à la proposition mise en exergue au seuil de ce billet : Services publics de l’enseignement laïque (gratuité) et de la restauration scolaire (« lois »). Dès le premier épisode du podcast intitulé Léon Blum, une vie héroïque, produit par Philippe Collin pour France Inter, Pierre Birnbaum rappelle que « tout étudiant – de nos jours – de deuxième année de droit administratif sera amené à étudier les conclusions de Léon Blum sur l’arrêt Lemonnier » (« Juif alsacien, dandy parisien », radiofrance.fr 5 déc. 2022, dans le dernier quart d’heure). L’association française pour la recherche en droit administratif (AFDA) a consacré l’un de ses « printemps de la jeune recherche juridique », en 2012, à Léon Blum (v. ce lien, les articles ayant été publiés à la RFDA 2013) ; dix ans plus tard, à l’occasion du 150ème anniversaire de sa naissance, la direction de la bibliothèque et des archives du Conseil d’État a réuni pour un colloque des « Ressources documentaires » (nov. 2022, 30 p.). rendu par le Conseil d’État trois mois après sa mort », en 1950 ; plus en phase avec l’actualité, un autre extrait mérite d’être cité pour conclure : « “Dans une démocratie, même aussi imparfaite que la nôtre, proclamait Léon Blum, nulle autorité n’est concevable sans responsabilité correspondante”. Irresponsable devant le Parlement comme devant le suffrage universel, le président de la République ne pouvait pas posséder de pouvoirs propres. Blum souhaitait en conséquence que le bicéphalisme de l’exécutif français puisse connaître la même évolution qu’en Angleterre, où l’effacement royal avait été compensé par la promotion du Premier ministre. Ce transfert d’autorité répondant au principe des vases communicants n’est pas sans faire penser à celui qui devait s’opérer plus près de nous lors des périodes de cohabitation qu’a connues la Cinquième République. L’effacement imposé alors au président de la République constitue de fait une issue dont Blum se serait sans doute félicité parce qu’elle a pour conséquence de rapprocher la France du parlementarisme à l’anglaise qu’il tenait comme référence »25Vincent Le Grand, thèse préc., 2008, pp. 500 et 325, citant Léon Blum, « La question est posée », Le Populaire 16 oct. 1923 – en invitant à « approfondir cette question du lien particulier entre autorité et responsabilité en régime parlementaire », en lisant Pierre Pactet, « L’évolution contemporaine de la responsabilité gouvernementale dans les démocraties pluralistes », in Le Pouvoir. Mélanges offerts à Georges Burdeau, LGDJ, 1977, p. 208.

« Revitaliser le Parlement [et a]broger le 49.3 », telles sont précisément deux des propositions du NFP dans le cadre d’une VIème République, instaurée « par la convocation d’une assemblée constituante citoyenne élue »26Contrat de législature préc., juin 2024, p. 15, après le paragraphe consacré au « nouveau droit à la retraite »..

Notes

1 Il y a un peu plus de cinq ans, le 13 mai 2019, j’avais publié un billet à l’approche du scrutin, à propos des revendications de la liberté de circulation – qui se font parfois au détriment du droit à l’éducation.
2 « Législatives : François Ruffin souhaite “la véritable gratuité de l’école” », bfmtv.com 12 juin 2024 ; ajout le 9 juillet de cet extrait de Marine Tondelier, au soir du second tour, x.com le 7
3 NFP, Contrat de législature préc., juin 2024, p. 5 ; v. Olivier Chartrain, « Nouveau Front Populaire : fin du “choc des savoirs” et l’ambition de rebâtir l’école publique », humanite.fr le 14, Philippe Watrelot, « La gauche et l’école : un programme prometteur à développer », alternatives-economiques.fr le 26 et, mis en ligne entretemps, comparateur.nosservicespublics.fr/education
4 V. par ex. Frédéric Monier (entretien avec, par Olivier Doubre), « La référence au Front populaire permet de lier conscience du danger et victoire possible », politis.fr le 18
5 Fabien Escalona, « Front populaire : les gauches réveillent le mythe de 1936 », Mediapart le 11 ; v. aussi les textes rassemblés sur le blog du journal, sous le titre « Léon Blum, Front populaire et référence mémorielle ».
6 V. tout d’abord mes billets des 31 janvier 2020 (au cinquième paragraphe) et 29 février 2020 (en note 9), ainsi que ma note de jurisprudence liée (Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai, au point 2).
7 Texte publié le 28 juillet 2018
8 V. ma thèse, aux (notes de bas de) pages (202, 247,) 550, (717,) 718, 760 (et 1006).
9 Le 23 septembre 2018, lors de l’actualisation de mon billet intitulé « De Marie Curie à Paul Langevin », 4 févr. 2018
10 Pour reprendre une jolie formule, Blum est quant à lui « parvenu au sommet en empruntant le chemin des crêtes » (Jacques Julliard, Les gauches françaises. 1762-2012 : Histoire, politique et imaginaire, Flammarion, 2012, p. 556).
11 « Duhamel (BFM) recadre sèchement Odoul (RN) sur Léon Blum », entrevue.fr 11 juin 2024 : si l’heure mentionnée est la bonne, la formule a été employée deux minutes avant le tweet de l’essayiste plagiaire Rachel Khan (reproduit par Ronan Tésorière, « Législatives : Bernard Cazeneuve et Julien Dray tirent à boulets rouges sur « le Front Populaire », leparisien.fr le 11) ; Mathilde Serra, « “Il doit se retourner dans sa tombe” : Emmanuel Macron adresse une pensée à Léon Blum après la formation d’un “Front populaire” », lefigaro.fr les 12-13
12 V. la tribune intitulée « Réponse collective à une infamie : Sur l’accusation d’antisémitisme portée contre la France insoumise », auposte.fr 17 juin 2024, ainsi que celle co-signée, notamment, par Danièle Lochak, « Nous, citoyens juifs, notre devoir est de refuser l’instrumentalisation de l’antisémitisme et de faire barrage au RN », Libération le 20, blogs.mediapart.fr le 26, déplorant notamment l’enrôlement de Blum dans des « accusations diffamantes » (v. encore Denis Sieffert, « À propos d’un antisémitisme à gauche réel ou supposé », politis.fr le 25). Sur ce site, v. mes billets des 25 mars 2019 – en note 30 – et 30 mai 2020 – à partir de la troisième illustration, où je revenais sur les mises en cause d’Edgar Morin et d’Achille Mbembe ; j’ajoute ici quelques mots à propos de celles liées au terme « rescapé », repris avec insistance par Rachel Khan dans son tweet du 10 juin dernier (v. la note 11 supra), suite à celui qu’elle avait adressé à Mathilde Panot à l’encontre du rappeur Médine : la réaction de l’intéressé avait provoqué les initiatives de 47 députés Renaissance « demand[ant] à EELV et LFI de ne pas l’inviter », leberry.fr 11 août 2023, François Cormier-Bouligeon allant jusqu’à saisir « la justice en adressant un courrier à la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, au titre de l’article 40 du Code pénal » (selon Thomas Lorentz, midilibre.fr le 24), des défections aux universités d’été des écologistes (ibid.), un article dans la presse locale drômoise à l’approche de celles du parti LFI (ledauphine.com le 22) et des propos très clairs de Médine à Châteauneuf-sur-Isère (bfmtv.com le 28 ; revenant quant à lui sur « cette polémique sous l’angle du droit pénal », Thomas Besse, « Controverse sur le tweet de Médine visant Rachel Khan : quid juris ? », le leclubdesjuristes.com le 8 sept.). Durant l’une des manifestations contre l’extrême droite, après sa victoire aux élections européennes, j’ai pu constater à Valence (v. la dernière photo illustrant l’article d’Alexandra Marie Ertiani, francetvinfo.fr 15 juin 2024) que certains slogans visaient explicitement l’antisémitisme et contrastaient, donc, avec le « silence » qui demeure encore souvent au sein des « organisations de la gauche radicale et de l’antiracisme français » (v. Camilla Brenni, Memphis Krickeberg, Léa Nicolas-Teboul & Zacharias Zoubir, « Le non-sujet de l’antisémitisme à gauche », Vacarme févr. 2019, n° 86).
13 « Macron (plutôt) contre une réédition des pamphlets antisémites de Céline », nouvelobs.com (avec AFP) 8 mars 2018
14 Daniel Schneidermann, « Maurras, une amnésie d’État ? », liberation.fr 4 févr. 2018
15 V. son entretien publié dans L’Express du 22 décembre 2020, provoquant notamment ce communiqué des Juives et juifs révolutionnaires, « Macron, Maurras, Pétain et l’antisémitisme », dijoncter.info 27 déc. 2020-1er févr. 2022 et cette tribune du directeur du Musée d’art et d’histoire du judaïsme Paul Salmona, « A quoi sert la mise au ban de Maurras par la justice si l’amnésie vient la recouvrir ? », lemonde.fr 7 janv. 2021 ; v. encore Rémi Noyon, « “Un tout organique”  : Macron entre Durkheim et Maurras », nouvelobs.com 18 juill. 2022 ; Sébastien Fontenelle, « Les trous de mémoire de M. Macron », politis.fr le 20
16 Nicolas Truong, « Front populaire », Le Monde 27 juin 2024, p. 31, en datant cette phrase du fondateur de l’action française au 15 mai 1936, après avoir cité les historiens Antoine Prost et Jean Vigreux, auteurs respectivement d’Autour du Front populaire. Aspects du mouvement social au XXème siècle (Seuil, 2006) et d’Histoire du Front populaire. 1936, l’échappée belle ([Tallandier, 2016,] Texto, 2022).
17 Jean Lacouture, Léon Blum, Seuil, 1977 (édition abrégée), p. 205 [249]. V. par ailleurs page 95, pour revenir aux questions pédagogiques : « L’enfant unique de Lise et Léon Blum est né en 1902, Robert, à l’éducation duquel son père voue une attention passionnée » ; ces lignes sont extraites du chapitre intitulé « Le sillage de Jaurès », pp. 72 à 120 : le biographe rappelle que l’affaire Dreyfus « a noué à jamais [leurs] deux vies » et termine sur l’assassinat de Jaurès, le 31 juillet 1914 (pour une nouvelle récente dans laquelle ce dernier ne meurt pas, v. Camille Leboulanger, « La Générale », in Dévorer le futur, Goater, 2023, p. 23 ; s’agissant de sa contribution à l’affirmation du droit à l’éducation, v. mon portrait). Ajout au 9 juillet de plusieurs lignes en réaction à un échange entre Raphaël Kempf et Aleksandar Nikolic ; L’Équipe du dimanche 7 juillet a consacré ultérieurement à ce dernier un portrait, titré « L’inconnu national », permettant de présenter brièvement celui qui s’est trouvé, quatre ans après avoir adhéré au Front National, « bombardé “conseiller sport” » de la patronne » en 2017 : « Mère portugaise, père serbe (décédé), binational, enfant métisse et parcours idéologique entamé, à 15 ans, dans la foulée de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) avant une brève adhésion au PC », il justifie aujourd’hui son évolution politique par des formules antisémite et pro-palestinienne entendues lors d’une projection du film La vie est belle dans son lycée des Yvelines (Alban Traquet avec A.D., page 15) ; député européen élu en 2024, il était 19ème sur la liste du RN, qui a obtenu 30 sièges (sur les 81 français et 720 européens) le 9 juin – soit la majorité des plus ou moins quatre-vingt « “Patriotes pour l’Europe”, imaginé[s] par le Premier ministre hongrois Viktor Orban » (Romain Herreros, « Le groupe présidé par Jordan Bardella au Parlement européen torpille la “normalisation” du RN », huffingtonpost.fr 8 juill. ; v. aussi cet article avec AFP, le situant « derrière la droite pro-européenne (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D), surpassant les libéraux de Renew (76 sièges), groupe auquel appartient le parti du président français Emmanuel Macron, et le groupe de droite radicale ECR associé à la Première ministre italienne Giorgia Meloni (78 sièges). »). Le 1er juillet, l’avocat revenait sur la genèse de sa candidature NFP dans la 1ère circonscription de Paris en évoquant son livre « sur Léon Blum » (Ennemis d’État. Les lois scélérates, des anarchistes aux terroristes, La Fabrique, 2019, spéc. pp. 32 et s. à partir de son article à La Revue blanche 1er juill. 1898, reproduit pp. 125 et s., signé « Un [jeune] juriste » et repris dans « une brochure de 62 pages » en 1899 ; je la citais dans ma thèse en note de bas de page 247, n° 1484, tout comme l’un des deux autres auteurs – Francis de Pressensé, pour son parcours ultérieur, spéc. pp. 314, 547 et s.). L’eurodéputé RN de rétorquer avec aplomb que celui-ci « était pour la préférence nationale » ; le Front populaire l’aurait « mis[e] en vigueur » et le nier relèverait d’une « inculture historique » (LCP, à partir de 35 min. 30). Gérard Noiriel vient justement de publier, en mars dans la collection « Tracts » (n° 55), Préférence nationale. Leçon d’histoire à l’usage des contemporains, Gallimard, 2024, 58 p., avec page suivante ces notes 10 et 9 : « La plupart de mes références sur les années 1930 sont extraites de l’étude de Jean-Charles Bonnet, Les Pouvoirs publics et l’immigration dans l’entre-deux-guerres, Centre d’histoire économique et sociale de la région lyonnaise, 1976 [v. la recension de de cette thèse de 3ème cycle par Martine Charlot, Migrants Formation 1980, n° 40, pp. 2-3] ; Imre Ferenczi, « La statistique des étrangers notamment au point de vue français », Journal de la société statistique de Paris 1937, n° 78, pp. 288-310 : en s’appuyant sur cet article, l’historien écrit : « En 1930, d’après les chiffres du Bureau international du Travail, la proportion d’étrangers immigrés en France était de 8,6 %, soit un chiffre supérieur à celui d’aujourd’hui (7,8 %) » ; elle baissait dès l’année suivante, lorsque « l’effondrement de la bourse de Wall Street (octobre 1929) avait déjà produit ses effets. (…) Alors que l’immigration avait été invisible (…) – parce qu’il fallait combler les déficits du marché du travail – elle redevint un “problème” dès le début des années 1930 » (pp. 16-17). Après un « quasi-consensus sur la “préférence nationale” [qui] aboutit au vote de la loi du 10 août 1932, adoptée à l’unanimité malgré 128 abstentions de gauche et d’extrême-gauche », les « décrets-lois adoptés entre mai et novembre 1938 poussèrent au paroxysme la stratégie, née au cours des années 1880, visant à intégrer le discours de l’extrême-droite [la] concernant ». Entretemps, la « victoire du Front populaire marqua un coup d’arrêt dans cette fuite en avant (…). Certes, la proposition du PCF en faveur d’un statut juridique des immigrés ne fut pas adoptée et la politique antérieure du contingentement des flux migratoires fut prolongée. Néanmoins, les nouveaux gouvernants firent preuve d’une attitude plus souple et plus humaine, surtout pour les réfugiés. Les décrets-lois imposés par [Édouard Daladier, successeur de Léon Blum] plongèrent donc la gauche dans une consternation bien illustrée par ces propos du communiste Georges Lévy : « qui aurait pu croire que deux ans après la victoire du Front populaire, les immigrés, au lieu du statut juridique escompté, se verraient octroyer un ensemble de mesures policières propres à faire passer la France pour une marâtre » (pp. 18, 24 et 26-27, avant d’ouvrir ses « Réflexions sur la loi Asile et immigration du 19 décembre 2023 » par ce titre : « Emmanuel Macron, le Daladier du XXIe siècle ? », pp. 30 et s.).
18 Figurant en Une de L’Action française 5 juin 1936 (titré « La France sous le juif »), cette phrase est citée par Edwy Plenel, « Front populaire : Blum contre Macron », Mediapart 16 juin 2024 ; outre le rappel par le fondateur du journal en ligne de ce que Gérald Darmanin avait fait référence, le 6 décembre 2022, à Jacques Bainville (Hugues Maillot, lefigaro.fr le 7), l’avoir entendu ce vendredi 28 juin sur franceinfo m’incite à modifier cette note le 9 juillet pour revenir sur le retrait d’investiture évoqué et, surtout, à « un fait incontestable » plus récent que ces « tweets à caractère antisémite » (Jacques Pezet, liberation.fr le 27 ; lanouvellerepublique.fr le 28). Dans son livre intitulé Le séparatisme islamiste : manifeste pour la laïcité (L’Observatoire, 2021), Gérald Darmanin développait une idée exprimée dans Libération dès 2015 : « Il faut que l’État impose aux musulmans ce que Napoléon a imposé aux juifs » (23 nov. ; v. déjà sa tribune du 14 janv., citée dans ma thèse en bas de page 566, n° 3651) ; il le faisait toutefois en ressassant des clichés antisémites, dans une indifférence quasi-générale (v. Sébastien Fontenelle, « Darmanin, écrivain », politis.fr 31 mars 2021, renvoyant aux « timides articles » parus dans L’Huma et L’Obs, ainsi qu’au « passionnant entretien avec l’historien Pierre Birnbaum, qui remet quelques points sur quelques i : « Napoléon et les Juifs : politique “scandaleuse” », sur www.arretsurimages.net [v. respectivement les 25, 23-24 et à nouveau 25] ».
19 V. l’étude de Ji-Hyun Jeon, « Quelques jalons pour une histoire des juristes au sein du Parti socialiste-SFIO (1905-1939) », in Carlos Miguel Herrera, Les juristes face au politique. Le droit, la gauche, la doctrine sous la Troisième République, t. II, Kimé, 2005, p. 45, spéc. pp. 46 et 48 : « du moment de sa création en 1905 jusqu’à la veille de la Deuxième Guerre mondiale », l’alors doctorante en histoire à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), en recense 251.
20 Stéphanie Trouillard, « Après l’appel à un nouveau “Front populaire”, retour sur “l’immense espoir” suscité en 1936 », france24.com 11 juin 2024
21 Plus précisément sous-secrétaires d’État (note modifiée le 3 août, complétée le 12 en renvoyant au premier épisode de la série de Mediapart, « Ministres pionnières du Front Populaire », signé ce jour par Antoine Perraud) : Suzanne Lacore à la Protection de l’enfance, Cécile Brunschvicg à l’Éducation nationale et Irène Joliot-Curie à la Recherche scientifique ; à propos de cette dernière et outre mon billet signalé en note 9, v. le texte de Jean-Christophe Féraud, « Irène Curie et Frédéric Joliot, atomes très crochus », Libération 1er août 2024, pp. II-III des feuilles « été » ; à la page 22 liée, lire Alexandra Schwartzbrod, « Blum, itinéraire d’un lettré », p. 22, à propos de l’adaptation en livre, en 2023, du podcast de Philippe Collin cité ci-après. J’ajoute aussi la localisation des rues Léon Blum les plus proches pour moi – auxquelles j’ai prêté attention à la faveur de mes dernières courses à pied : au nord, à Bourg-lès-Valence, elle se situe juste avant la rue Édith Piaf (au passage, quelques réactions dans la presse étrangère à « la cérémonie d’ouverture des JO de Paris », courrierinternational.com 27 juill.) ; à Valence sud, dans le quartier de Valensolles, c’est depuis la rue Jules Ferry (où se trouvait une école réhabilitée en MPT, inaugurée le 12 avril) que l’on accède à la rue Léon Blum (pour une photo prise en 1984 – l’année de ma naissance – entre ces deux rues, v. le site memoire-drome.com ; elles peuvent être aussi reliées, à pied, par l’allée René Cassin – à qui j’ai consacré, en 2018, l’un de mes portraits).
22 Stéphanie Trouillard (citant Jean Vigreux), art. préc.
23 Éric Desmons, « Préface », in Vincent Le Grand, Léon Blum (1872-1950) : gouverner la République, LGDJ, 2008, p. VI
24 Relatif au droit de grève et figurant parmi les « grands arrêts de la jurisprudence administrative » (GAJA), l’arrêt Dehaene se trouve évoqué à la page 19 du Livret de méthodologie, ainsi qu’aux notes 16 et 22 de mon billet du 23 octobre 2019, dont le titre fait écho à la proposition mise en exergue au seuil de ce billet : Services publics de l’enseignement laïque (gratuité) et de la restauration scolaire (« lois »). Dès le premier épisode du podcast intitulé Léon Blum, une vie héroïque, produit par Philippe Collin pour France Inter, Pierre Birnbaum rappelle que « tout étudiant – de nos jours – de deuxième année de droit administratif sera amené à étudier les conclusions de Léon Blum sur l’arrêt Lemonnier » (« Juif alsacien, dandy parisien », radiofrance.fr 5 déc. 2022, dans le dernier quart d’heure). L’association française pour la recherche en droit administratif (AFDA) a consacré l’un de ses « printemps de la jeune recherche juridique », en 2012, à Léon Blum (v. ce lien, les articles ayant été publiés à la RFDA 2013) ; dix ans plus tard, à l’occasion du 150ème anniversaire de sa naissance, la direction de la bibliothèque et des archives du Conseil d’État a réuni pour un colloque des « Ressources documentaires » (nov. 2022, 30 p.).
25 Vincent Le Grand, thèse préc., 2008, pp. 500 et 325, citant Léon Blum, « La question est posée », Le Populaire 16 oct. 1923 – en invitant à « approfondir cette question du lien particulier entre autorité et responsabilité en régime parlementaire », en lisant Pierre Pactet, « L’évolution contemporaine de la responsabilité gouvernementale dans les démocraties pluralistes », in Le Pouvoir. Mélanges offerts à Georges Burdeau, LGDJ, 1977, p. 208
26 Contrat de législature préc., juin 2024, p. 15, après le paragraphe consacré au « nouveau droit à la retraite ».

Rejet du recours contre le couvre-feu biterrois

Il y a quelques heures, ce mercredi, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a conclu à l’absence de « doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté du maire de Béziers du 22 avril » (ré)instaurant un couvre-feu1Dès l’annonce de cette mesure, en anticipant l’idée qu’elle pourrait être cette fois légale, v. le billet de Jean-Paul Markus, « Robert Ménard instaure un couvre-feu pour les mineurs à Béziers : les conditions posées par le juge », lessurligneurs.eu 23 avr. 2024 (écrit le 21 et relu par Isabelle Muller-Quoy), commençant par rappeler l’ordre donné quelques jours plus tôt par le « ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin à Pointe-à-Pitre » (témoignant de ce que, loin de constituer un barrage contre l’extrême-droite, la macronie lui sert de plus en plus souvent de tremplin…) ; v. Amandine Ascensio, « À la Guadeloupe, un couvre-feu loin de traiter les problèmes de fond », Le Monde 25 avr. 2024, p. 9, avec l’encadré « Vers un couvre-feu à Béziers et Nice » et les tribunes citées en illustration et ci-après, avec enfin celle de l’anthropologue David Puaud, « Les effectifs des éducateurs de rue sont devenus une variable d’ajustement économique » (page 29). ; il a donc rejeté le référé-suspension de la Ligue des Droits de l’Homme (LDH).

Le Petit Journal 17 nov. 1907 (illustration reprise depuis le compte « Passionnés d’Histoire », facebook.com 24 mars 2021), dans lequel était pointé déjà un « fléau de la délinquance juvénile » décrite comme « toujours plus violente, plus nombreuse, plus précoce »… (Véronique Blanchard et David Niget, « La répression des jeunes est une idée populaire, mais c’est un échec », Le Monde 25 avr. 2024, p. 28)

L’ordonnance est rendue compte tenu « notamment » des « données chiffrées2V. déjà CE Ord., 10 mai 2024, Le Lakou-LKP, n° 493935, cons. 3, à propos de l’arrêté du préfet de la Guadeloupe du 20 avril, relatif à des secteurs des communes des Abymes et de Pointe-à-Pitre : avant de conclure à l’absence d’atteinte manifestement illégale « à la liberté d’aller et venir, à la liberté de réunion ou à l’intérêt supérieur de l’enfant (cons. 5), le juge des référés du Conseil d’État raisonnait à partir des « données chiffrées versées à l’instruction par le ministre » ; comparer la tribune du sociologue Christian Mouhanna (sociologue au CNRS et CESDIP), « En dépit de dramatiques faits divers, le nombre de mineurs délinquants baisse », Ibid., p. 28, à propos de « ceux qui instrumentalisent ces faits divers terribles pour en tirer des leçons sur les évolutions de la société et en faire le terreau de politiques prônant davantage de sanctions. Ces derniers ignorent, ou font semblant d’ignorer, que les lois pénalisant les mineurs n’ont cessé de se multiplier depuis le milieu des années 1990, et jusque très récemment ». versées à l’instruction » – pour parties relatives aux « mineurs, en particulier de moins de 13 ans » –, conjuguées au fait que l’interdiction en cause se trouve « circonscrite » à ces enfants-là, dans le temps et « géographiquement à trois secteurs de la commune classés en quartiers prioritaires de la ville »3TA Montpellier Ord., 15 mai 2024, LDH, n° 2402422, cons. 6 ; à propos des 4 et 5 – « l’autorité de la chose jugée par le Conseil d’État le 6 juin 2018 » étant mise en avant par l’association requérante –, v. mon billet (du 20)..

Dans la matinée, l’avocate de la LDH avait notamment plaidé la cause des enfants et « parents des quartiers populaires »4Sophie Mazas, citée par Solange de Fréminville, « Couvre-feu pour les moins de 13 ans à Béziers : devant la justice, la LDH dénonce “un fantasme ” et “une instrumentalisation politique” », liberation.fr 15 mai 2024 ; par ailleurs présidente de l’association dans l’Hérault (34), elle a réagi à l’ordonnance en annonçant un (nouveau) pourvoi en cassation : « Déjà, lors de l’arrêté de couvre-feu de 2014, le tribunal administratif avait validé [en 2016] la décision du maire d’extrême droite, alors que le Conseil d’État avait annulé [en 2018 (suivre le second lien de ma note 3)] en raison de l’absence de situation particulière justifiée : on ne peut limiter la liberté des personnes que sur la base d’éléments réels. La LDH saisit donc le Conseil d’État dans le contentieux de l’urgence et maintient la procédure en annulation qui sera audiencée sous [dix-huit] mois »5Citée par Alix Drouillat, lagazettedemontpellier.fr 15 mai 2024 et « Couvre-feu pour les moins de 13 ans à Béziers : la justice rejette le recours de la LDH, qui va saisir le Conseil d’État », francetvinfo.fr 15 mai 2024 ; proposant « un état du droit » à cette date, v. Éric Landot, blog.landot-avocats.net 15 mai 2024 (lu le lendemain). Version (provisoire ?) stabilisée cinq jours après la publication de ce billet, après avoir renvoyé le 17 à un autre rejet en référé(-liberté cette fois), CE Ord., 7 déc. 2021, Mme B. et a., n° 459131, évoqué par Nacira Guénif-Souilamas, « Nouvelle-Calédonie : “Les choses se sont dégradées de façon définitive au lendemain du 3e référendum”, estime une professeure de sociologie », francetvinfo.fr 16 mai 2024 ; v. aussi les points de vue de François Roux – avocat honoraire du FLNKS, appelant à « une médiation des Nations-Unies » (entretien avec, par Fabrice Dubault, 17 mai 2024) – et Mathias Chauchat – professeur de droit public, pour qui l’« égalité du droit de suffrage ne peut pas être lue dans les mêmes termes dans un territoire en situation coloniale » (cité par Raphaël Godet et Élise Lambert, extrait d’un « article à lire pour comprendre pourquoi l’archipel s’embrase à nouveau », 17 mai 2024) ; v. enfin « La Ligue des droits de l’Homme et la Quadrature du Net attaquent en justice le blocage de TikTok en Nouvelle-Calédonie », 17 mai 2024  ; Ilyes Ramdani, « À Nouméa comme à Nanterre, le gouvernement face à ses vieux démons coloniaux », Mediapart 19 mai 2024, soulignant la répression et la dépolitisation des jeunes Kanaks qui, comme le note la veille Benoît Trépied – dans un entretien avec Lucie Delaporte – « vivent une dépossession sociale et coloniale » : « Lorsque la CCAT (Cellule de coordination des actions de terrain) – créée par des partis indépendantistes pour s’opposer au passage en force de Macron via des mobilisations collectives – a organisé des manifestations, ils sont venus en masse » ; l’anthropologue rappelle que, « quand les indépendantistes ont appelé à ne pas aller voter, au troisième référendum de 2021, il y a eu 56 % d’abstention. Ces chiffres témoignent d’une discipline électorale très importante de la part de gens qui ont, le reste du temps, un rapport plutôt distancié au personnel politique ». Contrairement à ce qu’a affirmé le 20 mai 2024 Alix Bouilhaguet – dans la matinale de France Info, au détour d’une question curieusement formulée, l’Assemblée générale de l’ONU a noté que ce référendum s’était tenu « dans des circonstances difficiles, marquées par la pandémie de COVID-19 et le boycott du scrutin par certains groupes d’électeurs inscrits » (point 6 de la résolution du 16 juin 2022, larje.unc.nc)..

Actualisation (dans le dernier week-end de juillet), « Couvre-feux pour mineurs à Béziers et Nice : le Conseil d’État confirme le rejet de la demande de suspension », letelegramme.fr 26 juill. 2024 (le 5 novembre 2018, j’avais signalé dans mon billet du 20 mai la note publiée par Hugo Avvenire et évoqué la thèse dans laquelle il s’était engagé, Le concept d’espace public. Contribution à une théorie de la spatialisation du régime des libertés [finalement intitulée Espaces publics et libertés : Contribution à l’étude de la spatialisation du droit], Thèse Université Toulouse Capitole, 2022, §§ 823, 855, 973 et 1052-1053, avec un renvoi à ladite note de jurisprudence ; ses paragraphes 941-942 [pp. 408-409] sur l’accessibilité « nécessaire à l’effectivité du droit à l’éducation » m’amènent à renvoyer au texte que j’ai publié le 8 avril 2019, dix ans après cet arrêt Laruelle relatif aux « enfants handicapés », ainsi qu’à ma propre thèse [2017], spéc. les pages 798, 871, 873, 1188-1189 et 1200 à 1204).

Notes

1 Dès l’annonce de cette mesure, en anticipant l’idée qu’elle pourrait être cette fois légale, v. le billet de Jean-Paul Markus, « Robert Ménard instaure un couvre-feu pour les mineurs à Béziers : les conditions posées par le juge », lessurligneurs.eu 23 avr. 2024 (écrit le 21 et relu par Isabelle Muller-Quoy), commençant par rappeler l’ordre donné quelques jours plus tôt par le « ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin à Pointe-à-Pitre » (témoignant de ce que, loin de constituer un barrage contre l’extrême-droite, la macronie lui sert de plus en plus souvent de tremplin…) ; v. Amandine Ascensio, « À la Guadeloupe, un couvre-feu loin de traiter les problèmes de fond », Le Monde 25 avr. 2024, p. 9, avec l’encadré « Vers un couvre-feu à Béziers et Nice » et les tribunes citées en illustration et ci-après, avec enfin celle de l’anthropologue David Puaud, « Les effectifs des éducateurs de rue sont devenus une variable d’ajustement économique » (page 29).
2 V. déjà CE Ord., 10 mai 2024, Le Lakou-LKP, n° 493935, cons. 3, à propos de l’arrêté du préfet de la Guadeloupe du 20 avril, relatif à des secteurs des communes des Abymes et de Pointe-à-Pitre : avant de conclure à l’absence d’atteinte manifestement illégale « à la liberté d’aller et venir, à la liberté de réunion ou à l’intérêt supérieur de l’enfant (cons. 5), le juge des référés du Conseil d’État raisonnait à partir des « données chiffrées versées à l’instruction par le ministre » ; comparer la tribune du sociologue Christian Mouhanna (sociologue au CNRS et CESDIP), « En dépit de dramatiques faits divers, le nombre de mineurs délinquants baisse », Ibid., p. 28, à propos de « ceux qui instrumentalisent ces faits divers terribles pour en tirer des leçons sur les évolutions de la société et en faire le terreau de politiques prônant davantage de sanctions. Ces derniers ignorent, ou font semblant d’ignorer, que les lois pénalisant les mineurs n’ont cessé de se multiplier depuis le milieu des années 1990, et jusque très récemment ».
3 TA Montpellier Ord., 15 mai 2024, LDH, n° 2402422, cons. 6 ; à propos des 4 et 5 – « l’autorité de la chose jugée par le Conseil d’État le 6 juin 2018 » étant mise en avant par l’association requérante –, v. mon billet (du 20).
4 Sophie Mazas, citée par Solange de Fréminville, « Couvre-feu pour les moins de 13 ans à Béziers : devant la justice, la LDH dénonce “un fantasme ” et “une instrumentalisation politique” », liberation.fr 15 mai 2024
5 Citée par Alix Drouillat, lagazettedemontpellier.fr 15 mai 2024 et « Couvre-feu pour les moins de 13 ans à Béziers : la justice rejette le recours de la LDH, qui va saisir le Conseil d’État », francetvinfo.fr 15 mai 2024 ; proposant « un état du droit » à cette date, v. Éric Landot, blog.landot-avocats.net 15 mai 2024 (lu le lendemain). Version (provisoire ?) stabilisée cinq jours après la publication de ce billet, après avoir renvoyé le 17 à un autre rejet en référé(-liberté cette fois), CE Ord., 7 déc. 2021, Mme B. et a., n° 459131, évoqué par Nacira Guénif-Souilamas, « Nouvelle-Calédonie : “Les choses se sont dégradées de façon définitive au lendemain du 3e référendum”, estime une professeure de sociologie », francetvinfo.fr 16 mai 2024 ; v. aussi les points de vue de François Roux – avocat honoraire du FLNKS, appelant à « une médiation des Nations-Unies » (entretien avec, par Fabrice Dubault, 17 mai 2024) – et Mathias Chauchat – professeur de droit public, pour qui l’« égalité du droit de suffrage ne peut pas être lue dans les mêmes termes dans un territoire en situation coloniale » (cité par Raphaël Godet et Élise Lambert, extrait d’un « article à lire pour comprendre pourquoi l’archipel s’embrase à nouveau », 17 mai 2024) ; v. enfin « La Ligue des droits de l’Homme et la Quadrature du Net attaquent en justice le blocage de TikTok en Nouvelle-Calédonie », 17 mai 2024  ; Ilyes Ramdani, « À Nouméa comme à Nanterre, le gouvernement face à ses vieux démons coloniaux », Mediapart 19 mai 2024, soulignant la répression et la dépolitisation des jeunes Kanaks qui, comme le note la veille Benoît Trépied – dans un entretien avec Lucie Delaporte – « vivent une dépossession sociale et coloniale » : « Lorsque la CCAT (Cellule de coordination des actions de terrain) – créée par des partis indépendantistes pour s’opposer au passage en force de Macron via des mobilisations collectives – a organisé des manifestations, ils sont venus en masse » ; l’anthropologue rappelle que, « quand les indépendantistes ont appelé à ne pas aller voter, au troisième référendum de 2021, il y a eu 56 % d’abstention. Ces chiffres témoignent d’une discipline électorale très importante de la part de gens qui ont, le reste du temps, un rapport plutôt distancié au personnel politique ». Contrairement à ce qu’a affirmé le 20 mai 2024 Alix Bouilhaguet – dans la matinale de France Info, au détour d’une question curieusement formulée, l’Assemblée générale de l’ONU a noté que ce référendum s’était tenu « dans des circonstances difficiles, marquées par la pandémie de COVID-19 et le boycott du scrutin par certains groupes d’électeurs inscrits » (point 6 de la résolution du 16 juin 2022, larje.unc.nc).

Une « facette de la fin de la guerre d’Algérie » saisie par la CEDH

Photo de FRANCK FIFE / AFP, reprise depuis l’article d’Adel Miliani, « République démocratique du Congo : comprendre la “crise oubliée” que dénoncent les footballeurs de la CAN », lemonde.fr 10 févr. 2024, rappelant que la « rébellion [M23] est, selon un rapport d’experts des Nations unies, soutenue par le Rwanda voisin », avant de citer Pierre Jacquemot, maître de conférences à l’IEP de Paris (puis de renvoyer à un compte-rendu du rapport de déc. 2022 ; pour celui de 2023, v. rfi.fr le 29 déc.) ; v. aussi  Christophe Châtelot, « La renaissance sans compromis du Rwanda », Le Monde 7-8 avr. 2024, pp. 20-21 : ce « 7 février, en demi-finale de la plus populaire des compétitions sportives du continent, la Coupe d’Afrique des nations, organisée cette année en Côte d’Ivoire, l’attitude des footballeurs congolais a marqué les esprits lors de l’hymne national. Une main en bâillon sur la bouche et deux doigts imitant le canon d’un pistolet sur la tempe, ils dénonçaient le silence de la communauté internationale face aux violences subies par les populations dans l’est de la RDC. Et dont Kinshasa attribue la responsabilité à son voisin rwandais, ce que ce dernier dément vigoureusement. (…) Kigali est aujourd’hui loin d’être isolé – au grand dam de Kinshasa, qui dénonce l’inaction d’une communauté internationale pourtant prompte, fait-il remarquer, à condamner l’agression russe contre l’Ukraine » (v. ainsi la tribune publiée fin mars par le président Félix Tshisekedi, en particulier cet extrait ; lors des commémorations du 7 avril, selon le compte-rendu d’Anna Sylvestre-Treiner, son homologue « rwandais a, en substance, invoqué le droit et même la nécessité de se défendre » – une rhétorique souvent mobilisée à propos du gouvernement d’Israël).

Au terme de mon billet du mois de janvier, j’évoquais la plainte pour génocide déposée par l’Afrique du Sud contre Israël (en renvoyant à celui que j’ai publié il y a plus de cinq ans sur les génocides) ; le 28 mars, à La Haye (Pays-Bas), la Cour Internationale de Justice (CIJ) a statué sur la demande tendant à la modification de l’ordonnance du 26 janvier 2024 indiquant des mesures conservatoires : observant « que les conditions désastreuses dans lesquelles vivent les Palestiniens de la bande de Gaza se sont, depuis, encore détériorées », cette population devant « désormais faire face à une famine qui s’installe », elle indique notamment que l’État d’Israël doit « [v]eiller, avec effet immédiat, à ce que son armée ne commette pas d’actes constituant une violation de l’un quelconque des droits des Palestiniens de Gaza en tant que groupe protégé en vertu de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (…) »1CIJ, 28 mars 2024, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), ordonnance accessible sur le site de la Cour (icj-cij.org/fr/affaire/192), §§ 18, 21 et 51, 2 b) (« Par quinze voix contre une »)..

Trois jours plus tôt, à Genève (Suisse), Francesca Albanese estimait quant à elle dans un rapport au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies : « La nature et l’ampleur écrasante de l’assaut israélien sur Gaza et les conditions de vie destructrices qu’il a causées révèlent une intention de détruire physiquement les Palestiniens en tant que groupe »2« Guerre Israël-Hamas, jour 171 : une rapporteuse de l’ONU accuse Israël de commettre plusieurs « actes de génocide » dans la bande de Gaza », lemonde.fr (avec AFP) 25-26 mars 2024 ; dans Mediapart, Rachida El Azzouzi interrogeait l’avocate italienne, rapporteure spéciale pour les territoires palestiniens : « Votre analyse est critiquée par plusieurs chancelleries, notamment en France, où le ministre des affaires étrangères, Stéphane Séjourné, affirme qu’”accuser l’État juif3Comparer « l’entretien accordé à l’AFP et à deux radios de la communauté juive française, Radio J et RCJ », par le président Nicolas Sarkozy : « Un “État juif” n’a pas de signification », Agence France-Presse 18 oct. 2011, rappelant la conférence de presse du ministre français des Affaires étrangères, le 18 juill. préc. ; v. auparavant la lettre ouverte de l’historien Shlomo Sand à Alain Juppé (le 15 juin) et, ultérieurement, ce texte du journaliste Alain Gresh, « Israël, Etat juif ? Doutes français » (blog.mondediplo.net le 1er août). Ajouts au 19 avril – à l’occasion de celui opéré en note 12 de mon précédent billet, au lendemain d’une nouvelle interdiction préoccupante – de ces rappels de Rima Hassan les 29 octobre et 7 novembre derniers, à travers ce communiqué de soutien de la FNLP le 17 févr. 2024 de génocide, c’est franchir un seuil moral”. Que leur répondez-vous ? Le génocide est défini par le droit international. (…) Je suis troublée par cette hypothèse dogmatique selon laquelle un État ne pourrait pas commettre certains crimes en raison de son histoire »4Francesca Albanese (entretien avec, par Rachida El Azzouzi), « Aucun État n’est au-dessus des lois », Mediapart 30 mars 2024 : « Israël a annoncé en février 2024 [v. lefigaro.fr (avec AFP) le 12] qu’il m’interdisait le territoire. Mais en réalité, aucun rapporteur spécial de l’ONU pour les Territoires palestiniens occupés n’a été autorisé à entrer dans le pays au cours des seize dernières années »….

Dans un message rendu public le jeudi 4 avril, la présidence de la République française avait eu des mots très forts sur le propre passé de cette dernière, qui contrastent avec ses contradictions présentes vis-à-vis d’Israël5Ariane Lavrilleux et Nina Hubinet (Marsactu), « Guerre à Gaza : la France a fourni en secret des équipements de mitrailleuses à Israël », disclose.ngo 25 mars 2024 ; sur la base de cette enquête, v. la lettre signée par Mathilde Panot et alii : « Guerre à Gaza : 115 parlementaires demandent à Macron l’arrêt immédiat des ventes d’armes à Israël », bfmtv.com le 5 avr. : « À l’instar de plusieurs ONG (Médecins du monde, Save the Children, Oxfam, Handicap International, nous considérons que la France est en contradiction avec les traités internationaux qu’elle a signés en continuant à fournir du matériel militaire à Israël ». V. aussi ce « texte à l’initiative de l’Institut du Genre en Géopolitique », blogs.mediapart.fr le 3 : avant qu’« une contradiction majeure » soit pointée, il est noté : « Parmi les géants français de l’armement, Thalès envoie encore à ce jour du matériel à Israël, permettant ainsi l’assassinat de plusieurs dizaines de milliers de Palestinien·nes, dont 70 % étaient des femmes et des enfants ». Ces 8 et 9 avril avaient lieu les audiences de la CIJ relatives à la requête du Nicaragua « déposée le 15 mars devant la plus haute instance judiciaire des Nations unies », pour lui demander « d’ordonner un embargo sur les armes vendues par Berlin à l’État hébreu » (Stéphanie Maupas, « L’Allemagne mise en cause pour “plausible” complicité avec Israël », Le Monde 9 avr., p. 3 : « selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stochholm », il s’agit du « deuxième fournisseur d’armes (…), derrière les États-Unis ». Dans l’édition du lendemain, page 25, v. Benjamin Barthe, « L’IA, amplificateur des crimes de guerre dans la bande de Gaza », revenant sur « deux enquêtes publiées par la presse israélienne » – la première du quotidien Haaretz le 31 mars, à propos des kill zones « à l’origine de la mort, fin décembre 2023, de trois otages du Hamas » ; au nom de son éradication a lieu « une massification 2.0 des meurtres de civils »). ; elle avait en effet fait savoir qu’Emmanuel Macron « rappellera notamment [le 7] que, quand la phase d’extermination totale contre les Tutsi a commencé [il y a exactement trente ans au Rwanda6Dans la vidéo diffusée ce dimanche 7 avril à Kigali, Emmanuel Macron s’en tiendra finalement au discours qu’il avait tenu dans la capitale rwandaise le 27 mai 2021 (il avait alors admis la « responsabilité accablante [de la France] dans un engrenage qui a abouti au pire », ce qui va déjà trop loin selon un communiqué du 8 avril 2024 [ajout le 20 de l’entretien avec Maria Malagardis de Vincent Duclert, liberation.fr et, à propos du prédécesseur de Jean Glavany à la présidence de l’Institut François Mitterrand, lire l’enquête publiée le 8 par Michael Pauron, « Hubert Védrine, le bâillon en bandoulière », afriquexxi.info]) ; v. le 9 dans Le Monde préc. (A. S.-T., p. 4), politis.fr (Denis Sieffert, « Rwanda : la phrase que Macron n’a pas prononcée ») et Mediapart (Fabrice Arfi et Ellen Salvi, « Macron et les mots perdus : le génocide des Tutsis révèle des fractures internes à l’Élysée » : « Selon plusieurs sources informées, le texte évoqué par l’Élysée le 4 avril existe bel et bien : il a été rédigé par les conseillers de la présidence avant d’être communiqué à la presse. (…) Mais impossible de savoir, à ce stade, qui a autorisé la diffusion de ces éléments de discours »).], la communauté internationale avait les moyens de savoir et d’agir, par sa connaissance des génocides que nous avaient révélée les survivants des Arméniens et de la Shoah, et que la France, qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n’en a pas eu la volonté »7« Rwanda : pour Emmanuel Macron, la France “aurait pu arrêter le génocide”, mais n’en a “pas eu la volonté” », lemonde.fr (avec AFP) 4-5 avr. 2024 ; v. aussi Pierre Lepidi, « Rwanda, le compte à rebours d’un printemps sanglant », Le Monde des 7-8, p. 28 : « Enrichi par les mots de Gaël Faye, le documentaire [Rwanda, vers l’apocalypse – actuellement en ligne et diffusé dimanche soir sur France 5 – revient sur sa] période préparatoire. (…) La soirée se poursuit avec l’émission « La Case du siècle et un autre documentaire, Rwanda, désobéir ou laisser mourir ?, qui montre les hésitations de la communauté internationale pendant la tragédie rwandaise »..

Photo d’Abdelkader Tamazount, reprise depuis l’entretien de son frère Charles avec Julien Pellicier, « “Un contentieux de masse va s’ouvrir”, assure un enfant de harki après la condamnation de la France par la CEDH », sudouest.fr 4-5 avr. 2024 (la citation du titre du présent billet est extraite de la fin de ce texte) ; il y a un peu plus de trois ans, le président du Comité harkis et vérité annonçait : « C’est la première fois que notre histoire va être jugée par des non-Français et des non-Algériens » (cité par Mustapha Kessous, « Les harkis et leurs descendants s’estiment toujours “indésirables” des mémoires franco-algériennes », lemonde.fr 23-26 janv. 2021)

Le même jour, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a rendu un arrêt relatif à une autre affaire aux enjeux mémoriels importants ; il résulte du recours de cinq requérants dont quatre – trois frères et leur sœur aînée, Zohra Tamazount, née en 1960 – « sont arrivés en France au moment de l’indépendance de l’Algérie en 1962 ou sont nés en France dans les années suivantes. Ils ont vécu dans des camps d’accueil pour harkis, principalement celui de Bias, dans le Lot-et-Garonne, jusqu’en 1975 »8« La Cour européenne des droits de l’homme condamne la France pour son accueil des harkis “pas compatible avec le respect de la dignité humaine” », francetvinfo.fr (avec AFP) 4 avr. 2024 : « Le cinquième requérant [Kaddour Mechalikh], dont le père avait été exécuté en 1957 par le Front de libération national [FLN] algérien, et qui avait rejoint la France en 1980, n’a en revanche pas obtenu gain de cause »..

Au terme de mon billet consacré au 17 octobre 1961, j’étais revenu sur les décisions rendues par les juridictions françaises en 2015, 2017 et 2018, en expliquant que j’avais placé les deux premières, dans ma thèse, au sein du chapitre sur la référence au service public pour saisir le bienfait éducation9Avant d’évoquer l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Versailles en note de bas de page 188 de cette thèse (2017, note n° 1099 de la première partie), je citais le jugement rendu par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, ainsi que je le rappelais à la fin de mon billet du 15 oct. 2018 (deux paragraphes avant les notes et ajouts, avec la dernière illustration), ainsi que la note publiée en 2015 par Hafida Belrhali (v. depuis « Harkis : de l’arrêt du 3 octobre 2018 au projet de loi de reconnaissance et de réparation », DA févr. 2022, étude n° 2) ; elle fait partie des membres de la CNIH, dont le rôle a pu être présenté à la faculté de droit de Grenoble le 24 mai 2023, et où se tiendra ce vendredi 12 avril 2024 un nouveau séminaire (en plus de cette professeure de droit public, interviendront la doctorante Anaïs Al Nasr et les historien·nes Anne Dulphy et Abderahmen Moumen)..

Après avoir rappelé que les cinq « requérants sont des enfants de harkis (auxiliaires d’origine algérienne ayant combattu aux côtés de l’armée française pendant la guerre d’Algérie) » et au « vu de l’ensemble des circonstances de la cause, la Cour conclut [dans un premier temps] que la déclaration d’incompétence du Conseil d’État, au nom de la doctrine des actes de gouvernement, limitée aux demandes des requérants en ce qu’elles visaient à engager la responsabilité pour faute de l’État du fait de l’absence de protection des harkis et de leurs familles en Algérie et du défaut de rapatriement systématique vers la France, ne saurait être considérée comme excédant la marge d’appréciation dont jouissent les États pour limiter le droit d’accès d’une personne à un tribunal. Partant, il n’y a pas eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention »10CEDH, 4 avr. 2024, Tamazount et autres c. France, n° 17131/19, §§ 1 et 126-127.

Dans un second temps, en revanche, « et s’en remettant aux décisions des juridictions internes, la Cour ne peut que constater que les conditions de vie quotidienne des résidents du camp de Bias (…) n’étaient pas compatibles avec le respect de la dignité humaine et s’accompagnaient en outre d’atteintes aux libertés individuelles. La Cour relève que les juridictions nationales n’ont pas explicitement qualifié ces atteintes à la lumière des dispositions de la Convention. Toutefois, il ressort des décisions internes qu’elles sont, en substance, parvenues au constat de violation des articles 3 et 8 de la Convention et de l’article 1 du Protocole n°1 »11Arrêt préc., § 155 ; cette relecture est assez audacieuse au regard des §§ 137 et 138 : « La Cour rappelle d’emblée que la France a ratifié la Convention et son Protocole n° 1 le 3 mai 1974 (…). Elle considère donc la période passée par les requérants au sein du camp de Bias avant l’entrée en vigueur de [ces textes] à l’égard de la France échappe à sa compétence ratione temporis »..

Si l’intérêt concret de cet arrêt porte sur l’indemnisation « des dommages matériel et moral découlant du séjour au sein du camp de Bias », revue à la hausse12À l’unanimité, après que la Cour a « considéré que le montant de 15 000 EUR octroyé à chacun des requérants par les juridictions internes était modique et qu’il ne suffisait pas à réparer l’intégralité des violations constatées » (§ 176)., je m’en tiendrai pour ma part à trois observations : d’abord, il convient de remarquer que l’article 2 du premier protocole à la Convention était invoqué, mais que la « Cour, maîtresse de la qualification juridique des faits, considère que l’attitude indigne des autorités nationales dénoncée par les requérants à l’égard de leurs besoins éducatifs est englobée par les questions posées sous l’angle des articles 3 et 8 »13Arrêt préc., §§ 1, 128 et 129, avant de reproduire ces articles 3 et 8 (« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (…) »), puis le premier du Protocole n° 1 (relatif au « droit au respect de ses biens » ; v. la première illustration de mon billet du 6 août 2018) ; à propos du second, je renvoie à ma thèse préc., pp. 803 et s. Selon un important arrêt rendu ce jour, « l’article 8 doit être considéré comme englobant un droit pour les individus à une protection effective, par les autorités de l’État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie » (CEDH G. C., 9 avr. 2024, Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, n° 53600/20, § 519 ; pour un résumé, v. echr.coe.int)..

Ensuite, bien que le « droit à l’instruction » n’apparaisse pas expressément dans l’arrêt (en raison de ce choix), il est bien fait mention de « la scolarisation des enfants dans une école interne au camp, en dehors du système d’éducation de droit commun »14CEDH, 4 avr. 2024, préc., § 153 ; v. auparavant les §§ 33, 57-58, 128, 140, 144 et 152 ; si la Cour n’a pas souhaité renvoyer à une jurisprudence désormais abondante15V. là encore ma thèse préc., pp. 856 et s., c’est peut-être pour esquiver le prisme non-discriminatoire et parce qu’il « ressort des conclusions de la rapporteure publique, adoptées dans le cadre du pourvoi en cassation introduit par M. Abdelkader Tamazount, que le montant global accordé (…) [a été] majoré en vue de tenir compte des troubles propres au défaut de scolarisation »16Arrêt préc., § 159 (cette dernière expression est reprise des conclusions, ainsi qu’en atteste la fin du § 40 où elles sont largement reproduites)..

Article de Guillaume Béars, La Dépêche 18 nov. 2022, à propos du « film poignant de Dalila Kerchouche » selon le site harkisdordogne.com ; « les enfants n’ont pas eu le droit d’aller à l’école de la République. “Pourquoi ?”, martèle » cette journaliste qui y est née, en 1973 (Mustapha Kessous, « “Bias, le camp du mépris”, sur France.tv : quand la France parquait les harkis derrière des barbelés », lemonde.fr le 6 déc. : « On tente de saisir toutes les violences décrites en écoutant les témoignages poignants – en français et en arabe – de quatre femmes, dont celui de Yamina Tamazount [qui avait alors 97 ans] » ; v. déjà – et plus largement – cette brève vidéo de Brut. le 21 sept. 2021).

Enfin, « la Cour rejette l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Gouvernement selon laquelle MM. Abdelkader, Aïssa et Brahim Tamazount et Mme Zohra Tamazount ne peuvent plus se prétendre victimes (…) et conclut, au regard des considérations qui précèdent, que le séjour des requérants au sein du camp de Bias, pour la période du 3 mai 1974 au 31 décembre 1975, a emporté violation des articles » précités. Cet arrêt peut donc être ajouté aux « [s]ources relatives aux (…) filles de Harkis », dont le rôle a été – et reste sans doute – « insuffisamment mis en avant »17« Sources relatives aux mamans, épouses, filles de Harkis et Harkettes », harkis.gouv.fr.

Notes

1 CIJ, 28 mars 2024, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), ordonnance accessible sur le site de la Cour (icj-cij.org/fr/affaire/192), §§ 18, 21 et 51, 2 b) (« Par quinze voix contre une »).
2 « Guerre Israël-Hamas, jour 171 : une rapporteuse de l’ONU accuse Israël de commettre plusieurs « actes de génocide » dans la bande de Gaza », lemonde.fr (avec AFP) 25-26 mars 2024
3 Comparer « l’entretien accordé à l’AFP et à deux radios de la communauté juive française, Radio J et RCJ », par le président Nicolas Sarkozy : « Un “État juif” n’a pas de signification », Agence France-Presse 18 oct. 2011, rappelant la conférence de presse du ministre français des Affaires étrangères, le 18 juill. préc. ; v. auparavant la lettre ouverte de l’historien Shlomo Sand à Alain Juppé (le 15 juin) et, ultérieurement, ce texte du journaliste Alain Gresh, « Israël, Etat juif ? Doutes français » (blog.mondediplo.net le 1er août). Ajouts au 19 avril – à l’occasion de celui opéré en note 12 de mon précédent billet, au lendemain d’une nouvelle interdiction préoccupante – de ces rappels de Rima Hassan les 29 octobre et 7 novembre derniers, à travers ce communiqué de soutien de la FNLP le 17 févr. 2024
4 Francesca Albanese (entretien avec, par Rachida El Azzouzi), « Aucun État n’est au-dessus des lois », Mediapart 30 mars 2024 : « Israël a annoncé en février 2024 [v. lefigaro.fr (avec AFP) le 12] qu’il m’interdisait le territoire. Mais en réalité, aucun rapporteur spécial de l’ONU pour les Territoires palestiniens occupés n’a été autorisé à entrer dans le pays au cours des seize dernières années »…
5 Ariane Lavrilleux et Nina Hubinet (Marsactu), « Guerre à Gaza : la France a fourni en secret des équipements de mitrailleuses à Israël », disclose.ngo 25 mars 2024 ; sur la base de cette enquête, v. la lettre signée par Mathilde Panot et alii : « Guerre à Gaza : 115 parlementaires demandent à Macron l’arrêt immédiat des ventes d’armes à Israël », bfmtv.com le 5 avr. : « À l’instar de plusieurs ONG (Médecins du monde, Save the Children, Oxfam, Handicap International, nous considérons que la France est en contradiction avec les traités internationaux qu’elle a signés en continuant à fournir du matériel militaire à Israël ». V. aussi ce « texte à l’initiative de l’Institut du Genre en Géopolitique », blogs.mediapart.fr le 3 : avant qu’« une contradiction majeure » soit pointée, il est noté : « Parmi les géants français de l’armement, Thalès envoie encore à ce jour du matériel à Israël, permettant ainsi l’assassinat de plusieurs dizaines de milliers de Palestinien·nes, dont 70 % étaient des femmes et des enfants ». Ces 8 et 9 avril avaient lieu les audiences de la CIJ relatives à la requête du Nicaragua « déposée le 15 mars devant la plus haute instance judiciaire des Nations unies », pour lui demander « d’ordonner un embargo sur les armes vendues par Berlin à l’État hébreu » (Stéphanie Maupas, « L’Allemagne mise en cause pour “plausible” complicité avec Israël », Le Monde 9 avr., p. 3 : « selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stochholm », il s’agit du « deuxième fournisseur d’armes (…), derrière les États-Unis ». Dans l’édition du lendemain, page 25, v. Benjamin Barthe, « L’IA, amplificateur des crimes de guerre dans la bande de Gaza », revenant sur « deux enquêtes publiées par la presse israélienne » – la première du quotidien Haaretz le 31 mars, à propos des kill zones « à l’origine de la mort, fin décembre 2023, de trois otages du Hamas » ; au nom de son éradication a lieu « une massification 2.0 des meurtres de civils »).
6 Dans la vidéo diffusée ce dimanche 7 avril à Kigali, Emmanuel Macron s’en tiendra finalement au discours qu’il avait tenu dans la capitale rwandaise le 27 mai 2021 (il avait alors admis la « responsabilité accablante [de la France] dans un engrenage qui a abouti au pire », ce qui va déjà trop loin selon un communiqué du 8 avril 2024 [ajout le 20 de l’entretien avec Maria Malagardis de Vincent Duclert, liberation.fr et, à propos du prédécesseur de Jean Glavany à la présidence de l’Institut François Mitterrand, lire l’enquête publiée le 8 par Michael Pauron, « Hubert Védrine, le bâillon en bandoulière », afriquexxi.info]) ; v. le 9 dans Le Monde préc. (A. S.-T., p. 4), politis.fr (Denis Sieffert, « Rwanda : la phrase que Macron n’a pas prononcée ») et Mediapart (Fabrice Arfi et Ellen Salvi, « Macron et les mots perdus : le génocide des Tutsis révèle des fractures internes à l’Élysée » : « Selon plusieurs sources informées, le texte évoqué par l’Élysée le 4 avril existe bel et bien : il a été rédigé par les conseillers de la présidence avant d’être communiqué à la presse. (…) Mais impossible de savoir, à ce stade, qui a autorisé la diffusion de ces éléments de discours »).
7 « Rwanda : pour Emmanuel Macron, la France “aurait pu arrêter le génocide”, mais n’en a “pas eu la volonté” », lemonde.fr (avec AFP) 4-5 avr. 2024 ; v. aussi Pierre Lepidi, « Rwanda, le compte à rebours d’un printemps sanglant », Le Monde des 7-8, p. 28 : « Enrichi par les mots de Gaël Faye, le documentaire [Rwanda, vers l’apocalypse – actuellement en ligne et diffusé dimanche soir sur France 5 – revient sur sa] période préparatoire. (…) La soirée se poursuit avec l’émission « La Case du siècle et un autre documentaire, Rwanda, désobéir ou laisser mourir ?, qui montre les hésitations de la communauté internationale pendant la tragédie rwandaise ».
8 « La Cour européenne des droits de l’homme condamne la France pour son accueil des harkis “pas compatible avec le respect de la dignité humaine” », francetvinfo.fr (avec AFP) 4 avr. 2024 : « Le cinquième requérant [Kaddour Mechalikh], dont le père avait été exécuté en 1957 par le Front de libération national [FLN] algérien, et qui avait rejoint la France en 1980, n’a en revanche pas obtenu gain de cause ».
9 Avant d’évoquer l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Versailles en note de bas de page 188 de cette thèse (2017, note n° 1099 de la première partie), je citais le jugement rendu par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, ainsi que je le rappelais à la fin de mon billet du 15 oct. 2018 (deux paragraphes avant les notes et ajouts, avec la dernière illustration), ainsi que la note publiée en 2015 par Hafida Belrhali (v. depuis « Harkis : de l’arrêt du 3 octobre 2018 au projet de loi de reconnaissance et de réparation », DA févr. 2022, étude n° 2) ; elle fait partie des membres de la CNIH, dont le rôle a pu être présenté à la faculté de droit de Grenoble le 24 mai 2023, et où se tiendra ce vendredi 12 avril 2024 un nouveau séminaire (en plus de cette professeure de droit public, interviendront la doctorante Anaïs Al Nasr et les historien·nes Anne Dulphy et Abderahmen Moumen).
10 CEDH, 4 avr. 2024, Tamazount et autres c. France, n° 17131/19, §§ 1 et 126-127
11 Arrêt préc., § 155 ; cette relecture est assez audacieuse au regard des §§ 137 et 138 : « La Cour rappelle d’emblée que la France a ratifié la Convention et son Protocole n° 1 le 3 mai 1974 (…). Elle considère donc la période passée par les requérants au sein du camp de Bias avant l’entrée en vigueur de [ces textes] à l’égard de la France échappe à sa compétence ratione temporis ».
12 À l’unanimité, après que la Cour a « considéré que le montant de 15 000 EUR octroyé à chacun des requérants par les juridictions internes était modique et qu’il ne suffisait pas à réparer l’intégralité des violations constatées » (§ 176).
13 Arrêt préc., §§ 1, 128 et 129, avant de reproduire ces articles 3 et 8 (« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ; « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (…) »), puis le premier du Protocole n° 1 (relatif au « droit au respect de ses biens » ; v. la première illustration de mon billet du 6 août 2018) ; à propos du second, je renvoie à ma thèse préc., pp. 803 et s. Selon un important arrêt rendu ce jour, « l’article 8 doit être considéré comme englobant un droit pour les individus à une protection effective, par les autorités de l’État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie » (CEDH G. C., 9 avr. 2024, Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, n° 53600/20, § 519 ; pour un résumé, v. echr.coe.int).
14 CEDH, 4 avr. 2024, préc., § 153 ; v. auparavant les §§ 33, 57-58, 128, 140, 144 et 152
15 V. là encore ma thèse préc., pp. 856 et s.
16 Arrêt préc., § 159 (cette dernière expression est reprise des conclusions, ainsi qu’en atteste la fin du § 40 où elles sont largement reproduites).
17 « Sources relatives aux mamans, épouses, filles de Harkis et Harkettes », harkis.gouv.fr

Sécurité sociale et école inclusive (à partir de deux décisions du Conseil constitutionnel)

S’il est possible d’avoir conscience de l’importance du système de protection sociale en l’ayant abordé d’une manière largement théorique, avoir eu à en bénéficier directement rend encore plus sensible à la nécessité de le préserver. Au terme de cette année 2023, qui m’a conduit à m’intéresser professionnellement aux politiques publiques de logement et de santé – en m’éloignant donc du droit de l’éducation –, je réagis ici brièvement à deux décisions rendues par le Conseil constitutionnel.

Campagne de pétitions intitulée « Pas de taxe sur ma santé », renouvelée cette année et à laquelle participe Mutami : v. Jocelyne Le Roux et Sophie Elorri (entretien avec, par Delphine Delarue), « Nous devons revenir aux fondamentaux d’une Sécurité sociale de haut niveau », vivamagazine.fr 4 déc. 2023 (la présidente déléguée concède « quelques mesures en faveur de la prévention, notamment dans le domaine de la lutte contre la précarité menstruelle », avant de déplorer : « En vingt ans, les taxes sur les contrats santé ont été multipliées par 8. Elles atteignent aujourd’hui 14,1 %. Et depuis plusieurs années, on assiste à un désengagement de la Sécurité sociale et à un transfert de ses charges vers les mutuelles ». V. aussi Astrid Cousin, « Mutuelle et réforme 100% Santé : changements en vue pour janvier 2024 », magnolia.fr 25 avr. 2023, notant que les organismes complémentaires « financent déjà 70% de [cette réforme] » – remontant à 2019 et supprimant les restes à charge, pour lutter contre le renoncement aux soins).

Dans la première, ses membres ont refusé que « le versement des indemnités journalières [(d’arrêt de travail) soit] désormais suspendu par l’organisme local d’assurance maladie sans l’intervention préalable du service du contrôle médical », autrement dit sur la seule base du « rapport du médecin diligenté par l’employeur »1CC, 21 déc. 2023, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, n° 2023-860 DC, cons. 44 ; v. « Une mesure polémique sur les arrêts de travail censurée par le Conseil constitutionnel », publicsenat.fr 22 déc. 2023, résumant ce qui a été par ailleurs validé, notamment « la limitation à trois jours – sauf exception – des arrêts de travail par téléconsultation. Une durée correspondant au délai de carence non indemnisé par la Sécu »..

Cette inconstitutionnalité se fonde sur les termes de l’alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946, dont la seconde phrase prévoit : « Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence »2À propos de cette affirmation explicite d’un droit, v. ma thèse, 2017, en note de bas de page 646, n° 112 ; concernant la formule reprise à la fin de ce considérant 41, v. Grégory Mollion, « Les garanties légales des exigences constitutionnelles », RFDC 2005, p. 257 ; Ariane Vidal-Naquet, Les  « garanties  légales  des  exigences constitutionnelles » dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, thèse Panthéon-Assas, 2007, 671 p..

Illustration reprise depuis le texte intitulé « École inclusive : un projet de réforme en trompe-l’œil », accens-avocats.com 13 oct. 2023

La seconde décision, rendue une semaine plus tard, sanctionne le recours à « une procédure contraire à la Constitution » dans l’insertion dans la loi de finances de plusieurs dispositions3V. aussi Elsa Conesa, « Budget 2024 : le « cadeau fiscal » à la FIFA censuré », Le Monde 30 déc. 2023, p. 10 ; c’est en particulier le cas de l’« article 233 [qui réécrivai]t l’article L. 351-3 du code de l’éducation afin de prévoir la création de pôles d’appui à la scolarité4Ces « pôles d’appui à la scolarité » (PAS) devaient se substituer aux « pôles inclusifs d’accompagnement localisés [PIAL] créés dans chaque département [pour assurer] la coordination des moyens d’accompagnement humain au sein des écoles et établissements scolaires » (art. 25 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance – prévoyant par ailleurs « l’extension des obligations des communes en matière scolaire », pour reprendre le titre mon focus publié à l’AJCT 2020, p. 28 ; v. Éléa Pommiers, « Une réforme de l’école inclusive censurée par le Conseil constitutionnel », Le Monde 31 déc. 2023-2 janv. 2024, p. 10 (cet article prend place après celui d’Isaline Boiteux, « Un arrêt maladie sans carence pour les victimes de fausse couche », rappelant qu’une « femme sur dix est confrontée à une interruption spontanée de grossesse au cours de sa vie, soit près de 200 000 grossesses chaque année. (…) Cette mesure, adoptée à l’unanimité par le Parlement le 29 juin 2023 dans le cadre de la loi visant à favoriser [leur] accompagnement psychologique [et qui entre en vigueur le premier janvier], entend lever un frein qui pouvait jusqu’alors les empêcher de prendre le temps de récupérer »). chargés de définir, pour certains établissements scolaires, les mesures d’accessibilité destinées à favoriser la scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers »5CC, 28 déc. 2023, Loi de finances pour 2024, n° 2023-862 DC, cons. 133 et 130 ; v. Dominique Momiron, « Sale temps pour l’école inclusive (II) », cafepedagogique.net 20 nov. 2023, lequel avait anticipé l’éventualité que cet article soit considéré comme un « cavalier législatif », et rappelle que les élèves en situation de handicap « sont minoritaires en nombre dans le contingent des élèves présentant des besoins éducatifs particuliers » (avant de préciser ; v. aussi la fin de mon billet du 3 avr. 2018 et, cette année, le colloque intitulé Les « élèves à besoins éducatifs particuliers » (EBEP) : regards des sciences sociales (15-16 juin), actu.univ-fcomte.fr 22 mai 2023)..

Le Collectif Handicaps, regroupement d’une cinquantaine d’associations, s’était dressé contre cet article (53, selon le projet de loi) : « Alors que la France a été condamnée à plusieurs reprises par l’ONU et le Conseil de l’Europe pour violation du droit à l’éducation, il est urgent de se doter d’une véritable vision politique sur l’école inclusive. L’heure n’est plus au catalogue de mesures, mais à une politique publique cohérente portant à la fois sur la coopération entre les différents acteurs et la formation des équipes pédagogiques et médico-sociales pour répondre aux besoins de tous les enfants, sans exclusion d’aucune situation de handicap »6Communiqué intitulé « Création des Pôles d’Appui à la Scolarité : le Projet de Loi de Finances 2024 ne peut pas être adopté en l’état » (collectifhandicaps.fr 19 oct. 2023) ; pour les décisions auxquelles il est fait allusion, v. ma thèse pp. 795 et s., mon billet du 25 févr. 2019 et CEDS, 19 oct. 2022, Forum européen des personnes handicapées (EDF) et Inclusion Europe c. France, n° 168/2018, décision sur le bien-fondé (rendue publique le 17 avr. 2023), §§ 231 à 273 (signalant et résumant cette décision, v. lexisveille.fr le 19). Dans la jurisprudence administrative, annulant CAA Lyon, 8 nov. 2018, n° 16LY04217 (v. le premier point de mon billet du 8 avril 2019), CE, 19 juill. 2022, n° 428311.

Photo reprise depuis le recueil de témoignages d’Andrea Desideri, intitulé « On est oubliées, on n’existe pas », revolutionpermanente.fr 3 oct. 2023 ; à propos des accompagnant·es d’élèves en situation de handicap (AESH), v. mon billet du 30 sept. 2018, la note 11 de celui du 29 déc. 2019, cette Rép. min. publiée au JO Sénat 17 oct. 2019, p. 5286 et, en application de l’article 25 de la loi Blanquer – venu modifier l’art. L. 917-1 du Code de l’éducation –, le décret n° 2020-1287 du 23 oct. « portant création de l’indemnité de fonctions particulières allouée aux [AESH référent·e·s], avec l’arrêté correspondant, fixant son montant à 600 euros, « à compter du mois de septembre 2020 ». Citée en note 6 du présent billet, une décision du CEDS comprend des développements spécifiques aux AESH (§§ 69-70, 234 à 238 et 264 à 272).

« “Rapprocher le médico-social et l’école, apporter des réponses plus rapides à des familles et des élèves qui aujourd’hui attendent de long mois sont autant d’impératifs sur lesquels le ministère avancera dans les prochains mois, quel qu’en soit le vecteur”, a réagi la Rue de Grenelle auprès du Monde après la censure du Conseil constitutionnel »7Éléa Pommiers, art. préc., laquelle commente : « Si l’essentiel des réformes de l’éducation nationale passe par la voie réglementaire, ces transformations de l’école inclusive ne pourront vraisemblablement pas faire l’économie d’une loi – et donc de débats parlementaires alors même que le gouvernement ne dispose pas d’une majorité absolue »..

Ce dernier a enregistré, durant cette même semaine, quatre saisines relatives à la constitutionnalité de la loi « immigration »8Yves-Marie Robien, « Loi immigration : le Conseil constitutionnel saisi quatre fois », ouest-france.fr 27 déc. 2023, dans un contexte où la « dénonciation d’un “gouvernement des juges” français et européens a été largement relayée par les têtes d’affiche des médias du groupe Bolloré9V. la cartographie « Médias français, qui possède quoi ? », Le Monde diplomatique et Acrimed, déc. 2023, notamment les animateurs Cyril Hanouna et Pascal Praud, ou le chroniqueur Mathieu Bock-Côté »10Clément Guillou, « L’État de droit, nouvelle frontière du RN contre l’immigration », Le Monde 29 déc. 2023, p. 8, présentant ce front comme la seconde de ses « guerres idéologiques sur l’immigration » – avec « la préférence nationale, dont le principe a été inscrit par le parti Les Républicains (LR) dans cette loi avec l’aval de la majorité ». Ajout le 4 janvier de la tribune signée ce jour dans le même quotidien par Elvire Guillaud et Michaël Zemmour, « Le critère de nationalité n’est pas, depuis les origines, dans le répertoire de la Sécurité sociale », p. 20, notant qu’« à [leur] connaissance, personne, à l’université ou dans les administrations, n’a songé jusqu’ici à évaluer l’impact d’un tel tournant xénophobe de la politique sociale »..

« Dès le 9 décembre, la Défenseure des droits Claire Hédon a alerté dans une tribune au Monde et souligné combien ce texte de loi était d’une “gravité majeure pour les droits fondamentaux” des personnes étrangères en France »11Nejma Brahim, « Immigration : une loi qui bafoue les droits les plus fondamentaux », Mediapart 19 déc. 2023 ; d’une manière plus générale, la défenseure des droits a antérieurement déclaré à basta! que, si la dématérialisation peut faciliter les démarches, elle « ne doit pas signifier la disparition du téléphone et de l’accueil dans les services publics. Le problème est là : les réclamants ne peuvent plus aller voir quelqu’un » (Claire Hédon – entretien avec, par Ivan du Roy et Pierre Jequier-Zalc –, « L’intersectionnalité n’est pas un gros mot », basta.media 9 févr. 2022, citation reprise par Emma Bougerol, « Payer pour percevoir ses aides : le désengagement de l’État laisse place au privé », basta.media 28 août 2023 ; à propos des titres de séjour, Nathan Chaize, « À Lyon, la préfecture du Rhône “fabrique elle-même ses sans-papiers” », lyoncapitale.fr 3 mai 2023). ; le Conseil constitutionnel saura-t-il les protéger, en saisissant notamment l’occasion d’affirmer enfin clairement le droit à l’éducation (en l’occurrence de celles poursuivant des études supérieures)12V. mes billets des 25 juill. 2019 et 26 mars 2020 ; comparer avec les saisines des parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat, les 26 et 27 déc. 2023, contre cette Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (2023-863 DC ; disponibles ici) : concernant les étudiant·es, l’argumentation repose sur le « principe d’égalité » et/ou la « liberté d’enseignement » (v. respectivement les pp. 19-21 et 11-12 ; s’agissant de ces alternatives au droit à l’éducation, pour reprendre le titre de la première partie de ma thèse, pp. 59 et s., v. spéc. mes pp. 183 à 279 – et, dans la seconde, 1097 à 1099) ; v. aussi les entretiens avec Serge Slama et Véronique Champeil-Desplats,« À propos de la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », La Revue des Droits de l’Homme ADL 23 et 24 janv. 2024, renvoyant tous deux à la contribution extérieure présentée au CC concernant les « étudiants internationaux », qui reprend cet argument à la page 9 (ajout au 29 septembre, à l’occasion de la rédaction de mon billet relatif au gouvernement Barnier). ?

Notes

1 CC, 21 déc. 2023, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, n° 2023-860 DC, cons. 44 ; v. « Une mesure polémique sur les arrêts de travail censurée par le Conseil constitutionnel », publicsenat.fr 22 déc. 2023, résumant ce qui a été par ailleurs validé, notamment « la limitation à trois jours – sauf exception – des arrêts de travail par téléconsultation. Une durée correspondant au délai de carence non indemnisé par la Sécu ».
2 À propos de cette affirmation explicite d’un droit, v. ma thèse, 2017, en note de bas de page 646, n° 112 ; concernant la formule reprise à la fin de ce considérant 41, v. Grégory Mollion, « Les garanties légales des exigences constitutionnelles », RFDC 2005, p. 257 ; Ariane Vidal-Naquet, Les  « garanties  légales  des  exigences constitutionnelles » dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, thèse Panthéon-Assas, 2007, 671 p.
3 V. aussi Elsa Conesa, « Budget 2024 : le « cadeau fiscal » à la FIFA censuré », Le Monde 30 déc. 2023, p. 10
4 Ces « pôles d’appui à la scolarité » (PAS) devaient se substituer aux « pôles inclusifs d’accompagnement localisés [PIAL] créés dans chaque département [pour assurer] la coordination des moyens d’accompagnement humain au sein des écoles et établissements scolaires » (art. 25 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance – prévoyant par ailleurs « l’extension des obligations des communes en matière scolaire », pour reprendre le titre mon focus publié à l’AJCT 2020, p. 28 ; v. Éléa Pommiers, « Une réforme de l’école inclusive censurée par le Conseil constitutionnel », Le Monde 31 déc. 2023-2 janv. 2024, p. 10 (cet article prend place après celui d’Isaline Boiteux, « Un arrêt maladie sans carence pour les victimes de fausse couche », rappelant qu’une « femme sur dix est confrontée à une interruption spontanée de grossesse au cours de sa vie, soit près de 200 000 grossesses chaque année. (…) Cette mesure, adoptée à l’unanimité par le Parlement le 29 juin 2023 dans le cadre de la loi visant à favoriser [leur] accompagnement psychologique [et qui entre en vigueur le premier janvier], entend lever un frein qui pouvait jusqu’alors les empêcher de prendre le temps de récupérer »).
5 CC, 28 déc. 2023, Loi de finances pour 2024, n° 2023-862 DC, cons. 133 et 130 ; v. Dominique Momiron, « Sale temps pour l’école inclusive (II) », cafepedagogique.net 20 nov. 2023, lequel avait anticipé l’éventualité que cet article soit considéré comme un « cavalier législatif », et rappelle que les élèves en situation de handicap « sont minoritaires en nombre dans le contingent des élèves présentant des besoins éducatifs particuliers » (avant de préciser ; v. aussi la fin de mon billet du 3 avr. 2018 et, cette année, le colloque intitulé Les « élèves à besoins éducatifs particuliers » (EBEP) : regards des sciences sociales (15-16 juin), actu.univ-fcomte.fr 22 mai 2023).
6 Communiqué intitulé « Création des Pôles d’Appui à la Scolarité : le Projet de Loi de Finances 2024 ne peut pas être adopté en l’état » (collectifhandicaps.fr 19 oct. 2023) ; pour les décisions auxquelles il est fait allusion, v. ma thèse pp. 795 et s., mon billet du 25 févr. 2019 et CEDS, 19 oct. 2022, Forum européen des personnes handicapées (EDF) et Inclusion Europe c. France, n° 168/2018, décision sur le bien-fondé (rendue publique le 17 avr. 2023), §§ 231 à 273 (signalant et résumant cette décision, v. lexisveille.fr le 19). Dans la jurisprudence administrative, annulant CAA Lyon, 8 nov. 2018, n° 16LY04217 (v. le premier point de mon billet du 8 avril 2019), CE, 19 juill. 2022, n° 428311
7 Éléa Pommiers, art. préc., laquelle commente : « Si l’essentiel des réformes de l’éducation nationale passe par la voie réglementaire, ces transformations de l’école inclusive ne pourront vraisemblablement pas faire l’économie d’une loi – et donc de débats parlementaires alors même que le gouvernement ne dispose pas d’une majorité absolue ».
8 Yves-Marie Robien, « Loi immigration : le Conseil constitutionnel saisi quatre fois », ouest-france.fr 27 déc. 2023
9 V. la cartographie « Médias français, qui possède quoi ? », Le Monde diplomatique et Acrimed, déc. 2023
10 Clément Guillou, « L’État de droit, nouvelle frontière du RN contre l’immigration », Le Monde 29 déc. 2023, p. 8, présentant ce front comme la seconde de ses « guerres idéologiques sur l’immigration » – avec « la préférence nationale, dont le principe a été inscrit par le parti Les Républicains (LR) dans cette loi avec l’aval de la majorité ». Ajout le 4 janvier de la tribune signée ce jour dans le même quotidien par Elvire Guillaud et Michaël Zemmour, « Le critère de nationalité n’est pas, depuis les origines, dans le répertoire de la Sécurité sociale », p. 20, notant qu’« à [leur] connaissance, personne, à l’université ou dans les administrations, n’a songé jusqu’ici à évaluer l’impact d’un tel tournant xénophobe de la politique sociale ».
11 Nejma Brahim, « Immigration : une loi qui bafoue les droits les plus fondamentaux », Mediapart 19 déc. 2023 ; d’une manière plus générale, la défenseure des droits a antérieurement déclaré à basta! que, si la dématérialisation peut faciliter les démarches, elle « ne doit pas signifier la disparition du téléphone et de l’accueil dans les services publics. Le problème est là : les réclamants ne peuvent plus aller voir quelqu’un » (Claire Hédon – entretien avec, par Ivan du Roy et Pierre Jequier-Zalc –, « L’intersectionnalité n’est pas un gros mot », basta.media 9 févr. 2022, citation reprise par Emma Bougerol, « Payer pour percevoir ses aides : le désengagement de l’État laisse place au privé », basta.media 28 août 2023 ; à propos des titres de séjour, Nathan Chaize, « À Lyon, la préfecture du Rhône “fabrique elle-même ses sans-papiers” », lyoncapitale.fr 3 mai 2023).
12 V. mes billets des 25 juill. 2019 et 26 mars 2020 ; comparer avec les saisines des parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat, les 26 et 27 déc. 2023, contre cette Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (2023-863 DC ; disponibles ici) : concernant les étudiant·es, l’argumentation repose sur le « principe d’égalité » et/ou la « liberté d’enseignement » (v. respectivement les pp. 19-21 et 11-12 ; s’agissant de ces alternatives au droit à l’éducation, pour reprendre le titre de la première partie de ma thèse, pp. 59 et s., v. spéc. mes pp. 183 à 279 – et, dans la seconde, 1097 à 1099) ; v. aussi les entretiens avec Serge Slama et Véronique Champeil-Desplats,« À propos de la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », La Revue des Droits de l’Homme ADL 23 et 24 janv. 2024, renvoyant tous deux à la contribution extérieure présentée au CC concernant les « étudiants internationaux », qui reprend cet argument à la page 9 (ajout au 29 septembre, à l’occasion de la rédaction de mon billet relatif au gouvernement Barnier).

Un « Manuel » publié par l’Organisation des Nations Unies ; et à l’écran, la « destruction » de l’une d’entre elles : l’Irak

« The French version of the Right to Education Handbook1« To mark the first ever International Day of Education, [RTE] in collaboration with UNESCO, have published the Right to education handbook » (right-to-education.org 24 janv. 2019).(…) is now available » ; dans son e-Bulletin de janvier, l’organisation Right to Education Initiative (RTE) signale ainsi cette version française, également publiée avec et par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) : Manuel sur le droit à l’éducation, 2020, 284 p.

L’« Avant-propos », page 4, est co-signé par Stefania Giannini (v. ci-contre) et David Archer – en tant que président du bureau exécutif de RTE (dont il relaye régulièrement les tweets ; v. ainsi le 24 janvier, à l’occasion du troisième #EducationDay2Quant à elle directrice générale de l’organisation onusienne, Audrey Azoulay a alors adressé un message se terminant par ce chiasme : « En cette Journée internationale, l’UNESCO vous invite à promouvoir l’éducation comme droit fondamental, et plus puissant instrument de développement qui soit. Car défendre l’avenir de ce droit, c’est défendre le droit à l’avenir » (unesco.org 24 janv. 2021). David Archer est par ailleurs responsable des services publics à ActionAid, et c’est à ce titre qu’il est remercié à la page 5 du Manuel préc. (v. aussi p. 212, s’agissant de Promoting Rights in Schools (PRS), « fruit d’une collaboration » entre cette ONG et celle dont il préside le bureau exécutif, RTE) ; v. son retweet de ce jour, concernant les Principes directeurs relatifs aux obligations des États…, dits Principes d’Abidjan ; célébrant leur première année, abidjanprinciples.org 13 févr. 2020).

Il est rappelé que RTE « est une organisation internationale de défense des droits humains (…), établie en 2000 par la première Rapporteuse spéciale des Nations unies sur le droit à l’éducation » ; les travaux de Katarina Tomaševski (1953-2006) ont inspiré les miens : ils constituent un point d’entrée dans ma thèse (2017), à partir du dernier de mes portraits (last but not least)3À partir du pdf de ma thèse, l’expression « Nations Unies » se retrouve 155 fois ; il est possible d’avoir un aperçu plus rapide en utilisant le mot-clé « onus » (67 résultats)..

Le Manuel précité comprend huit chapitres. Il s’agit de décliner l’idée du tout premier, rappelant que l’éducation est « un droit humain » (p. 21, avec une présentation synthétique des critiques formulées à l’encontre des droits – « humains » –, en général, pp. 39 et s.). Les intitulés des deuxième et quatrième peuvent être discutés : à la « reconnaissance » du droit à l’éducation, pour en faire la présentation en/« dans le droit international » (pp. 45 à 72), je maintiens ma préférence pour les termes affirmation et consécration (v. mes pp. 627 et s., puis 725 et s.) ; page 135, les obligations des États sont qualifiées de « légales » et, si elles « émanent d’une grande variété de sources » (p. 157), elles sont bien encore ici supra-législatives. Entretemps, page 76, le modèle des « 4A » est par contre représenté en commençant par une traduction habile : « Available » devient « À disposition » (plutôt que « Dotations » ; v. mes pp. 1188 et s.).

Couverture du Manuel préc., UNESCO (avec RTE, 2019-2020)

Le cinquième chapitre s’efforce de relier l’un des dix-sept objectifs de développement durable, « l’ODD 4-Éducation 2030 », au droit à l’éducation (pp. 159 à 168).

Assurer sa « [m]ise en œuvre nationale » et son « suivi » sont l’objet des chapitres 6 et 7, avec notamment un tableau et une présentation des comités onusiens (pp. 215 et s.), mais aussi – auparavant – un renvoi au huitième et dernier au moment de rappeler que sa protection nationale peut relever d’« un statut constitutionnel ou inférieur » (p. 178).

« Reddition des comptes et droit à l’éducation », tel est le titre du chapitre 8, page 240 : « Le droit international des droits humains (DIDH), s’il est correctement mis en œuvre, fournit un moyen clé pour [l’]accroître » ; ils « désignent et délimitent les responsabilités de fond (…)[,] identifient les garants et les titulaires de droits », ainsi que leurs relations au « contenu normatif » du droit à l’éducation. Il s’agit d’en faire un « droit justiciable » ; au plan constitutionnel, ce n’est « formellement » le cas que pour un peu plus d’une centaine d’États (pp. 243, 245 et 249, à partir des « recherches de RTE, basées sur les données de l’Initiative de Toronto sur les droits économiques et sociaux (…) et le Comparative Constitutions Project, en 2014 », publiées en anglais en 2017 ; v. aussi les pp. 46 à 49 de mon introduction, mon avant-dernier chapitre – pp. 1145 à 1185 – et, pour un renvoi à ceux dirigés par Diane Roman, ma page travaux).

Page 250, un tableau les classe selon cette « justiciabilité » (constitutionnelle) : avec 36 pays dont l’Australie, l’Allemagne et les États-Unis, la France est rangée dans la colonne « Aucun droit à l’éducation » ; les 107 les mieux placés vont de l’Albanie au Yémen, en comprenant l’Italie, l’Espagne ou la Turquie (v. déjà mon approche comparative, non contredite par CC, 11 oct. 2019, Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politiques et sociales et autres [Droits d’inscription pour l’accès aux établissements publics d’enseignement supérieur], n° 2019-809 QPC ; v. l’ajout du jour, à la fin de ce billet du 25 juillet ; comparer la note 757, page suivante du Manuel préc., avec cette proposition de correction en contentieux constitutionnel, le 26 mars 2020).

Parmi les 53 pays de la colonne intermédiaire, « Principe directeur/droit ambitieux à l’éducation », figurent l’Arabie Saoudite, le Mali4Sauf oubli, je ne l’ai pas encore directement évoqué, dans mes écrits ; j’y ai passé un mois en 2005, en me rendant dans la région de Mopti – un an après Yves Faucoup ; une quinzaine d’années plus tard, j’avais remarqué son billet intitulé « Massacre au pays des Dogons », blogs.mediapart.fr 11 juin 2019 ; dans la continuité du mien du 29 décembre, j’avais mis de côté plusieurs articles, dont celui de Nathalie Guibert, « Au Sahel, le nouveau visage de « Barkhane » », Le Monde.fr 13 janv. 2020 (extrait, avec une carte), rappelant qu’« un ennemi principal est désigné : l’organisation État islamique dans le grand Sahara (EIGS) » ; « Dans le centre du Mali, (…) place à la mission de l’ONU, la Minusma, jusqu’ici présente uniquement dans le nord du pays, et récemment réorientée ». Il y a deux jours était annoncée cette « enquête sur les lieux d’une frappe aérienne française à Bounti », france24.com avec AFP 29 janv. 2021 et l’Irak.

Un documentaire (v. ci-contre, ainsi que la présentation de Catherine Pacary, lemonde.fr 31 janv. 2021) revient notamment sur « la destruction de ses infrastructures et de ses systèmes sociaux, éducatifs et de santé », lors de la première guerre du Golfe il y a trente ans ; « Réputé jusqu’à la fin des années 1980 comme étant le pays ou les femmes sont les plus éduquées, doté du système éducatif et universitaire le plus développé et performant dans la région, l’Irak des années 2000 est sur la liste des pays avec le plus haut taux d’illettrisme et de mortalité infantile »5Pour le dire en citant Zahra Ali, « La fragmentation du genre dans l’Irak post-invasion », NQF 2018/1, Vol. 37, pp. 86 et s. (traduction de sa contribution à l’ouvrage dirigé par Amal Ghazal et Jens Hanssen, The Oxford Handbook of Contemporary Middle-Eastern and North African History, 2017), qui montre plus loin qu’avec la « retribalisation sociale » alors enclenchée, la « violence confessionnelle est clairement genrée »..

Notes

1 « To mark the first ever International Day of Education, [RTE] in collaboration with UNESCO, have published the Right to education handbook » (right-to-education.org 24 janv. 2019).
2 Quant à elle directrice générale de l’organisation onusienne, Audrey Azoulay a alors adressé un message se terminant par ce chiasme : « En cette Journée internationale, l’UNESCO vous invite à promouvoir l’éducation comme droit fondamental, et plus puissant instrument de développement qui soit. Car défendre l’avenir de ce droit, c’est défendre le droit à l’avenir » (unesco.org 24 janv. 2021). David Archer est par ailleurs responsable des services publics à ActionAid, et c’est à ce titre qu’il est remercié à la page 5 du Manuel préc. (v. aussi p. 212, s’agissant de Promoting Rights in Schools (PRS), « fruit d’une collaboration » entre cette ONG et celle dont il préside le bureau exécutif, RTE) ; v. son retweet de ce jour, concernant les Principes directeurs relatifs aux obligations des États…, dits Principes d’Abidjan ; célébrant leur première année, abidjanprinciples.org 13 févr. 2020
3 À partir du pdf de ma thèse, l’expression « Nations Unies » se retrouve 155 fois ; il est possible d’avoir un aperçu plus rapide en utilisant le mot-clé « onus » (67 résultats).
4 Sauf oubli, je ne l’ai pas encore directement évoqué, dans mes écrits ; j’y ai passé un mois en 2005, en me rendant dans la région de Mopti – un an après Yves Faucoup ; une quinzaine d’années plus tard, j’avais remarqué son billet intitulé « Massacre au pays des Dogons », blogs.mediapart.fr 11 juin 2019 ; dans la continuité du mien du 29 décembre, j’avais mis de côté plusieurs articles, dont celui de Nathalie Guibert, « Au Sahel, le nouveau visage de « Barkhane » », Le Monde.fr 13 janv. 2020 (extrait, avec une carte), rappelant qu’« un ennemi principal est désigné : l’organisation État islamique dans le grand Sahara (EIGS) » ; « Dans le centre du Mali, (…) place à la mission de l’ONU, la Minusma, jusqu’ici présente uniquement dans le nord du pays, et récemment réorientée ». Il y a deux jours était annoncée cette « enquête sur les lieux d’une frappe aérienne française à Bounti », france24.com avec AFP 29 janv. 2021
5 Pour le dire en citant Zahra Ali, « La fragmentation du genre dans l’Irak post-invasion », NQF 2018/1, Vol. 37, pp. 86 et s. (traduction de sa contribution à l’ouvrage dirigé par Amal Ghazal et Jens Hanssen, The Oxford Handbook of Contemporary Middle-Eastern and North African History, 2017), qui montre plus loin qu’avec la « retribalisation sociale » alors enclenchée, la « violence confessionnelle est clairement genrée ».

« Point de vue situé, projet universel »

C’est par un « Préambule » ainsi titré que Fatima Ouassak commence son livre La puissance des mères. Pour un nouveau sujet révolutionnaire (La Découverte, 2020, avec l’introduction et la table des matières).

V. ci-contre

Ayant eu le privilège de passer presque toute l’année dans un environnement « très sensible aux enjeux écologiques » (p. 49), la parution de cet ouvrage – à la rentrée – avait attiré mon attention, et je devrais enfin pouvoir, en 2021, le lire jusqu’au bout (donc aux pages pertinentes, sur la question ci-après abordée).

En cette fin décembre, je me borne à signaler ici le rejet – par le Conseil d’État le 11 –, du pourvoi de la Commune de Chalon-sur-Saône (n° 426483, avec un communiqué de presse) ; deux mois auparavant, Dominique Albertini consacrait un portrait à « Gilles Platret, le « Wauquiez de Chalon » » (Libération 8 oct. 2020, pp. 8-9). Un an après l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon, qui lui avait déjà donné tort le 23 octobre 2018, j’étais revenu sur cette affaire de menus de substitution dans les cantines scolaires : v. les derniers paragraphes de ce billet.

En attendant l’avis du Conseil d’État : recourir à l’IEF ou l’empêcher, de quel droit ?

« Dès la rentrée 2021, l’instruction (…) à domicile [ci-après en famille, l’IEF] sera strictement limitée, notamment aux impératifs de santé » ; ainsi l’a décidé Emmanuel Macron, le vendredi 2 octobre dernier, après en avoir « beaucoup débattu avec les ministres »1« Discours du Président de la République sur le thème de la lutte contre les séparatismes », elysee.fr 2 oct. 2020.

Capture d’écran de cette vidéo du 12 nov. : le geste d’Alana (10 ans, au premier plan) semble assez spontané ; et son sourire, juste après, m’a désarmé… (avertissement : c’est pas parce que je l’ai « capturée », que le chercheur que je suis écrit « pour l’IEF » ; peut-être seulement contre l’idée d’« [i]nterdire, limiter, forcer, obliger » ? En l’état, je ne sais pas !)

Cette annonce a surpris, alors que des écoles étaient fermées2« Covid19 – Point de situation du vendredi 2 octobre 2020 » (« Données arrêtées au jeudi à 13h »), education.gouv.fr ; surtout, qu’un tel moment soit choisi – un mois après la rentrée – pour annoncer une telle restriction pouvait difficilement être anticipé : quelques mois auparavant seulement, un rappeur havrais avait ainsi pu dédicacer un morceau « aux parents, qui ont fait l’école à la maison pendant le confinement » (ça rime)3Jules Pecnard, « Quand Édouard Philippe découvrait l’existence du rappeur Médine », lefigaro.fr 11 juin 2018 ; Arte. Les concerts à la maison, 29 avr. 2020, à 3’30.

Certaines pratiques allaient « vraiment au cœur de la « coéducation » », notait dès la mi-avril Benoît Urgelli – un chercheur en sciences de l’éducation4Benoît Urgelli (v. la note suivante et, plus généralement, univ-lyon2.fr) ; au passage, v. la Lettre d’information du laboratoire Éducation, Cultures, Politiques (ECP), nov. 2020, n° 4 (signalant l’ouvrage de Claire Polo, Le débat fertile. Explorer une controverse dans l’émotion, UGA éd.), avec ce propos introductif de Stéphane Simonian : « Par ces temps difficiles, la recherche est peut-être une ressource, un souffle. Mais elle ne saurait masquer un contexte chahuté par la crise sanitaire qui désorganise nos modes de fonctionnement et d’organisation » ; à cet égard, je tiens à remercier encore les personnes que j’ai sollicitées récemment – notamment celle qui m’a permis d’emprunter l’ouvrage ci-dessus, dans la foulée de ma « descente » ce mercredi 25 (ce bref passage à Grenoble m’a aussi permis de continuer à parcourir le livre de Françoise Waquet, Une histoire émotionnelle du savoir (XVIIe-XXIe siècle), CNRS éd., 2019, en particulier les développements titrés « La bibliothèque : lieux désertés, lieux aimés », pp. 73 et s.)., par ailleurs administrateur de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) du Rhône et de la métropole de Lyon5Benoît Urgelli (entretien avec, par Violaine Morin), « Les enfants vont perdre deux mois d’école, est-ce un drame ? », Le Monde 16 avr. 2020, p. 14 ; le 24 juin, Philippe Bongrand revenait pour les Savanturiers à « ce qu’on appelle aujourd’hui, mais pas hier, la coéducation » : v. les premières minutes du webinaire « Se repérer dans la galaxie de l’école à la maison », organisé dans le cadre de l’Université numérique de l’éducation ; ces regards croisés avec Pauline Proboeuf, animés par Ange Ansour, ont été mis en ligne le 2 juill.. Dans le même esprit enthousiaste, Julie Gameiro, professeure des écoles stagiaire à Nîmes, a « saisi l’occasion, « trop belle », du confinement, pour consacrer son mémoire à l’évolution de [la] relation parents/enseignants »6Lorraine Rossignol, « La coéducation, une révolution », Télérama le 1er, n° 3677, p. 36, spéc. p. 38, concernant l’école du Mas de Mingue ; s’agissant de celle dite Jean-Moulin, également à Nîmes, v. le 4 (au passage, à propos du résistant qui fût son secrétaire, v. Jean Chichizola, lefigaro.fr 26 nov., rappelant sa prise de position publique du 30 avr. 2017 : « Marine Le Pen (…), c’est la France de Maurras qui continue » ; Jean Lebrun, qui connaissait bien Daniel Cordier, revient en des termes touchants sur ce « mort à cent ans ». Critiquant l’hommage national aux Invalides, Olivier Charneux, tetu.com le 27 ; v. enfin Hugo Ruaud, publicsenat.fr le 29 : « Hubert Germain, centenaire, est le dernier représentant vivant des Compagnons de la Libération. Inévitablement, la question de la postérité se pose. Bien sûr, les communes concernées sont garantes de cette mémoire » ; parmi elles, Grenoble, ainsi que je le rappelais dans mon billet du 30 mai (en note 2)..

Alors qu’il était affirmé que l’« école redevient obligatoire »7Le Monde 23 juin, p. 15 ; v. depuis la toute première phase prononcée par « Karim Benmiloud, le recteur de l’académie de Clermont-Ferrand, [qui prévoyait] « une rentrée particulière mais sereine et apaisée », lamontagne.fr 27 août 2020. « On attribue à Joseph Goebbels la phrase « un mensonge répété mille fois se transforme en vérité ». Il n’a pas été prouvé que cette citation vient bien de lui » (nospensees.fr 19 oct. 2017) ; en tout état de cause, l’idée selon laquelle l’école serait « obligatoire », depuis Jules Ferry, a peut-être fini par être une vérité au sein de l’Éducation nationale, facilitant ainsi l’annonce de l’officialiser (juridiquement)., le Conseil d’État ordonnait de ne pas statuer « sur la requête d’appel de la commune de Marseille » : un juge des référés du tribunal administratif (TA) de cette ville lui avait enjoint, le 5 juin, « de mettre en œuvre, dans un délai de trois jours à compter de son ordonnance [n° 2004097], les modalités d’accueil des élèves âgés de trois et plus dans les classes des toutes petites sections et des petites sections » ; « compte tenu de ce qu’au plan national, toutes les écoles maternelles, tous niveaux de classe confondus, accueillent à nouveau l’ensemble de leurs élèves depuis le 22 », la ou le juge estimait le lendemain que les conclusions de « la commune de Marseille ont perdu leur objet » (n° 441106, cons. 5).

Dans les derniers jours de septembre, j’intégrais cette ordonnance à des observations qui viennent d’être publiées : j’insiste ici sur le contraste avec les prises de positions des juges de TA, acceptant avec beaucoup de facilité l’invocation du droit à l’éducation8« Les maires et le déconfinement, ou le déploiement du droit à l’éducation en référé », AJCT 2020, p. 542 (n° 11 du 19 nov., sommaire), obs. sous TA Montreuil Ord., 20 mai 2020, Mme Aline C., n° 2004683 ; Toulon le 28, Préfet du Var, n° 201320 ; La Réunion le 29, Mmes X. et Y., n° 2000415 ; Marseille le 5 juin, Mme Abderrahman Ben Allel et a., n° 2004097 ; Guadeloupe le même jour, M. B. A., n° 2000422 ; Nîmes les 9 et 10, Préfet du Gard, n° 2001571 (2001572, 2001573, 2001576 et 2001577) et n° 2001594) ; CE Ord., le 23, Commune de Marseille, préc. ; c’est qu’il s’agissait, dans cette configuration contentieuse, non pas de l’opposer à l’État, mais de lui donner raison.

Durant le premier confinement, Patricia Rrapi remarquait que « la protection de la santé devient un droit du gouvernement »9Patricia Rrapi, « Le Préambule de la Constitution de 1946, fondement constitutionnel de l’état d’urgence », La Revue des Droits de l’Homme ADL 8 juin, § 13, avant montrer en quoi ce cons. 17 « favorise aussi un éclatement plus général encore ». ; à l’occasion du second (ou deuxième ?), s’agirait-il que ce « droit » recouvre aussi celui à l’éducation (ou à l’instruction)) ?

Les deux mois qui viennent de s’écouler m’incitent à formuler cette hypothèse de travail : sollicité à plusieurs reprises, j’ai en effet profité du report d’un colloque pour réfléchir un peu à la question. En cette fin d’année où il aura mieux fallu rester chez soi10Mona Chollet, Chez soi. Une odyssée de l’espace domestique, La Découverte, 2015 ; lire Ousama Bouiss, « Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ? Les enseignements de Pierre Bayard », theconversation.com 14 mars 2019 : « se libérer de la volonté de paraître cultivé », un beau projet ! Aux éditions de Minuit, en 2007, il proposait « le concept de « bibliothèque collective » » ; et d’inviter à « se pencher davantage sur [chaque livre et] sa situation »., je l’ai fait notamment en échangeant, après avoir monté au séchoir une remorque de noix (dioises)11Non loin de ma maman – ça rime aussi avec confinement -, et avec mon papa, dans un endroit « parfois appelée la pampa » (Pierre Lasterra, « Une 3e circonscription vaste, disparate et indécise… », ledauphine.com 30 mai 2012 – soit un mois avant la dernière réélection d’Hervé Mariton (UMP) – avant de préciser qu’elle « est une des plus vastes de France »..

Plus récemment, il y a neuf jours exactement, l’une des trois députées LaREM du département12« Dans la Drôme, quatre femmes élues députées », ledauphine.com 18 juin 2017 alertait Jean Castex : des « familles drômoises se sont senties profondément touchées par le discours prononcé par le Président » ; récusant tout « parallèle entre l’IEF et [la] rupture avec les valeurs de notre République »13Comparer Philippe Bongrand (entretien avec, par Cécile Bourgneuf, « L’existence de cas de radicalisation est incontestable, mais c’est marginal », Libération (site web) 4 oct. 2020 ; v. surtout sa tribune avec l’équipe ANR SociogrIEF, « La décision de supprimer l’instruction en famille, sauf raison de santé, justifierait un débat public », Le Monde le 15, p. 29 : leurs « recherches montrent la très grande diversité des motivations des familles », irréductibles « aux dimensions religieuses ou « séparatistes » » ; entretemps, Valentin Bertrand, « Les écoles par correspondance défendent leur raison d’être », francebleu.fr le 11 : « « Bienvenue dans la cellule de radicalisation », ironise Cyril Metreau »., et s’affirmant « particulièrement attentive à ce que [la] majorité soit à la hauteur du débat parlementaire sur un sujet de société majeur », l’élue voudrait « pouvoir disposer de données, de raisons voire d’un argumentaire précis et étayé justifiant de l’obligation de l’instruction à l’école dès 3 ans »14Communiqué de presse, à partir du texte « La députée de la Drôme Célia de Lavergne interpelle le Premier Ministre au sujet de l’Instruction en famille… », mediascitoyens-diois.info 20 nov. 2020 (avec les coordonnées de Kim O’Dowd, son attachée parlementaire)..

Auparavant, Célia de Lavergne ajoute toutefois : « L’Instruction en famille est un droit (…), et ce depuis 1882 » ; est-ce vrai ? Et est-elle, selon cette loi dite Ferry, « un droit au même titre que l’instruction dans les écoles ou les établissements scolaires publics ou privés » (comme affirmé dans le passage d’abord tronqué) ? Il est permis d’en douter15V. le texte d’André D. Robert et Jean-Yves Seguy, « L’instruction dans les familles et la loi du 28 mars 1882 : paradoxe, controverses, mise en œuvre (1880-1914) », Histoire de l’éducation 2015/2, n° 144, pp. 29 et s., lesquels commencent par rappeler les termes de son article 4, qui ne fait que réserver la possibilité de donner l’enseignement primaire obligatoire « dans les familles, par le père de famille lui-même ou par toute personne qu’il aura choisie »., surtout si l’on veut bien prêter attention aux affirmations onusiennes et européennes du droit à l’éducation depuis 194816Pour un aperçu du droit international par l’initiative collaborative RTE, « Existe-t-il un droit à l’instruction à domicile ? », right-to-education.org, 2018 ; et de conclure : « la réponse est non »., préalables à la reformulation du droit français (en 1975, 1989 et 1998 – qu’elle reconnaît en faisant allusion à la bien mal-nommée loi n° 98-1165 du 18 décembre17Une loi qui n’a « pas été déférée au Conseil constitutionnel », comme le note Pierre-Henri Prélot, « L’enseignement privé confessionnel primaire et secondaire », in Francis Messner, Pierre-Henri Prélot et Jean-Marie Woehrling (dir.), Traité de droit français des religions, LexisNexis, 2ème éd., 2013, p. 1826, en note de bas de page, après avoir affirmé : « La liberté de l’enseignement domestique comme composante essentielle de la liberté de l’enseignement n’est guère soulignée en doctrine. Elle est pourtant essentielle » ; et de la reformuler en « droit », avant d’aller jusqu’à le qualifier – trois pages plus loin – de « fondamental (…), étant entendu que l’instruction constitue un droit pour les enfants et une obligation pour les parents ». À la RDLF 2018, thèse n° 10, je reviens sur les confusions suscitées par la référence à « l’obligation scolaire », en écrivant que le Conseil constitutionnel pourrait aider à les dissiper en rehaussant la référence au droit à l’éducation ; une occasion de le consacrer enfin pourrait être donnée par le projet de loi annoncé., plus précisément à son article premier in fine).

Dans ma thèse (2017), la démonstration de ma première partie aboutit à la conclusion selon laquelle le service public et les libertés publiques sont des références non seulement alternatives au droit à l’éducation, mais aussi porteuses des droits de l’État [et] des parents (notamment)18Je reprends ici à nouveau, en la raccourcissant un peu, une phrase de mon résumé préc. ; si je m’étais employé à tenter de contrer la tendance qui m’apparaissait dominer dans ma « communauté » de formation – celle des juristes (pas franchement étatiste sur les questions scolaires) –, je me demande aujourd’hui si j’ai assez critiqué sa symétrique (pour aller vite), consistant à rabattre ce droit sur celui parfois reconnu à l’État.

« Jérôme est venu de Grenoble pour exprimer son inquiétude. © Radio France » ; photo prise devant la préfecture par Claire Guédon (« “On nous prive de liberté” : des parents manifestent pour défendre l’école à la maison à Valence », francebleu.fr 20 nov. 2020)

Cette autre tendance se manifestait dans l’avis « rendu par le Conseil d’État sur un projet de loi relatif à une école de la confiance », il y a tout juste deux ans19Avis rendu public par le Gouvernement le 5 déc. 2018 (v. infra la note 22). : après avoir partiellement repris à son compte un arrêt20CE, 19 juill. 2017, Assoc. Les Enfants d’Abord et a., n° 406150, cons. 3 – arrêt assez habilement écarté par Jean-Éric Schoettl, membre honoraire de l’institution (Le Figaro 9 oct. 2020, n° 23684, p. 18) puis mobilisé par Me Bernard Fau (v. la vidéo de Droit Instruction 17 nov. 2020, « diffusée par les associations Led’a, Laia, Cise, Unie et les collectifs Félicia et L’école est la maison »)., le Conseil d’État prêtait à la Cour européenne une décision de la Commission21Comm.EDH, 6 mars 1984 (v. infra)., cette erreur22Avis préc. du 29 nov. 2018 (public le 5 déc.), n° 396047, §12 ; « Depuis que la Cour européenne des droits de l’homme a été rendue permanente, le 1er novembre 1998, la commission a été supprimée », rappelle wikipedia.org (page actualisée le 25 nov. 2019). Ajout au 23 février 2021 – alors que je me suis remis « à l’IEF » (v. la toute dernière note) –, en me bornant pour l’heure à faire observer que cette erreur a été réitérée (v. supra ma note 7) au § 60 de « l’avis du Conseil d’État sur le projet de loi « confortant le respect, par tous, des principes de la République » (dit « séparatisme » ou laïcité) », mis en ligne par l’avocat Éric Landot le 7 déc. 2020, rendu public par le Gouvernement à la date symbolique du 9 décembre (conseil-etat.fr) ; v. supra ma deuxième illustration, avec les « critiques de l’historien » Jean Baubérot (entretien avec, par Claire Legros), « Le gouvernement affirme renforcer la laïcité, alors qu’il porte atteinte à la séparation des religions et de l’État », Le Monde 15 déc. 2020, p. 30 (annoncé à la Une, ce mardi-là) : « Dans ses discours de Mulhouse [le 18 février] et des Mureaux [le 2 octobre], Emmanuel Macron cherchait un équilibre entre le séparatisme produit par la République et le radicalisme religieux. Il n’en reste rien dans le projet de loi (…) ». pouvant s’expliquer par la reprise de la même formule depuis23CEDH, 11 sept. 2006, Konrad c. Allemagne, n° 35504/03 ; il aurait toutefois été mieux inspiré en en citant une autre, selon laquelle la seconde phrase de l’article 2 du premier protocole additionnel à la Convention « consacre le rôle de l’État dans le domaine de l’éducation »24Je reprends ici l’essentiel de ma thèse, 2017, pp. 832-833, 1030 et 1197-1198.

En effet, son prétendu « droit d’instaurer une scolarisation obligatoire » est certes affirmé, mais moyennant une importante réserve à laquelle il n’a pas été assez prêté attention : « qu’elle ait lieu dans les écoles publiques ou grâce à des leçons particulières de qualité » ; or, dans la décision citée, « instruire leurs enfants à domicile » n’avait pas été interdit aux « parents requérants »25Comm.EDH, 6 mars 1984, Famille H. c. Royaume-Uni, n° 10233/83 ; DR 37, p. 109, spéc. p. 112 ; il n’est d’ailleurs pas du tout certain que la Cour accepterait aussi facilement la condamnation pénale d’une carence parentale « sans aucun doute étroitement liée au problème de la dyslexie des enfants » (pour citer la page 111 de cette décision disponible en ligne)..

Ce n’était pas le cas non plus avec la loi alors projetée, dite Blanquer ; dans un article rédigé l’année dernière, actualisé avant son adoption, je commentais comme suit la référence au « droit à l’instruction dans la famille reconnu par le législateur » (§17 de l’avis préc.) : Si elle est permise par la loi française, ce n’est pas en tant que droit à, expression qu’il est préférable de réserver aux bénéficiaires de l’éducation pour éviter de perpétuer des confusions qui peuvent être délibérément entretenues26Extrait de ma contribution intitulée « Le droit à l’éducation », in Sara Brimo et Christine Pauti (dir.), L’effectivité des droits. Regards en droit administratif, éd. mare & martin, 2019, p. 39, spéc. pp. 47-48, avec en note n° 59 cette précision : L’éducation est le mot le plus souvent utilisé au plan international, depuis 1948 ; l’art. 2 [du premier protocole additionnel à la Conv.EDH] (« Nul ne peut se voir refuser le droit à l’instruction (…) ») est, pour ainsi dire, l’exception européenne qui confirme la règle » (reprise mot pour mot ici, pour permettre à qui le souhaite de citer – c’est mieux que de plagier)..

L’avant-projet de loi « confortant les principes républicains », dans sa version transmise au Conseil d’État, peut d’ores et déjà être consulté27V. à partir de dalloz-actualite.fr 18 nov., obs. de Pierre Januel (dans ce billet, les passages soulignés sont tous de mon fait). ; reste à savoir si et quand il sera possible de faire de même avec son nouvel avis. Ayant beaucoup appris des écrits de politistes, de socio-historien·e·s et, même parfois, de philosophes, je ne saurais trop recommander aux juristes – que la question de l’IEF intéresse – de lire en sciences de l’éducation et de la formation28Philippe Bongrand et Dominique Glasman, « Instruction(s) en famille. Explorations sociologiques d’un phénomène émergent », Revue française de pédagogie oct.-nov.-déc. 2018/4, n° 205, p. 5 (introduction au dossier, paru en février 2020) ; Jean-Marie Pottier, « Contrôler l’éducation à la maison », scienceshumaines.com août-sept. 2020, n° 328, recensant en outre les articles de Pauline Proboeuf (« S’affranchir de l’institution scolaire pour émanciper l’enfant ? », Émulations 2019, n° 29), Géraldine Farges et Élise Tenret (« Évaluer l’instruction en dehors de l’école. Une enquête sur la fabrication du jugement des inspecteurs dans les contrôles de l’instruction dans la famille », Sociologie 2020/2)..

Ouvrage cité ci-contre – à propos duquel v. infra la note 4 –, en signalant le « Chapitre 12. La question des Misérables », pp. 313 et s. Pour une lecture de cet « immense classique (…) du grand Victor Hugo », @GrandeLibrairie 26 août 2020 ; le mois suivant, « Mohamed-Iyad Smaïne, un Caladois de 15 ans, émeut [à nouveau] avec sa lecture sur RTL », leprogres.fr le 30 sept.

J’ai plaisir à terminer ce trop long billet en laissant la place à l’éloquence d’un adolescent. Pour ma part, je me retrancherai derrière un livre, écrit par deux auteurs avec lesquels j’ai d’importants désaccords ; à la réflexion, et je pèse mes mots, ils sont plus souvent théoriques et, surtout, méthodologiques, que politiques (et encore moins poétiques ; v. la légende ci-contre).

Après avoir affirmé « l’invention par Hugo de la notion de « droit de l’enfant », dont on sait la fortune juridique dans les Conventions internationales du vingtième siècle », ils en viennent à sa critique « des outrances du « droit du père » », lors de son opposition à ce qui allait devenir la loi Falloux (1850) ; « elle fait de l’enfant non un être qui s’appartient à soi, mais un être possédé par la famille, dont se trouve légitimée l’éventuelle volonté de le façonner à son gré, voire à son image. Hugo, on l’a vu, oppose « le droit de l’État » à un tel « droit » ». Dans les pages consacrées à ce discours, on peut lire que « la contrainte multiforme exercée par le « parti clérical » est vivement dénoncée » (« une loi qui a un masque. (Bravo !) ») ; et de placer en exergue, plus loin, cet extrait : « L’instruction primaire obligatoire, c’est le droit de l’enfant qui est plus sacré encore que le droit du père et qui se confond avec le droit de l’État » (v. Henri Peña-Ruiz et Jean-Paul Scot, Un poète en politique. Les combats de Victor Hugo, Flammarion, 2003, pp. 360-361, 109 et 122).

Soucieux d’éviter des relectures anachroniques29Invité récemment de la Radio chrétienne francophone (RCF) – Alsace, pour une émission intitulée « Le droit en débat », Grégor Puppinck se livre à nouveau à une lecture plus qu’orientée des textes pertinents, en particulier les travaux préparatoires du protocole additionnel à la Convention (il procède d’ailleurs à un simple copier-coller de ses Observations écrites soumises à la Cour le 9 décembre 2016, 11 p., spéc. pp. 10-11 ; Officiel ECLJ 22 oct. 2020) ; la CEDH s’est prononcée depuis et, pour le dire en une phrase, sur le modèle de mon précédent billet : Scolarisation obligatoire, la Cour européenne ne condamne pas l’Allemagne (v. mes ajouts dans celui-ci, le 20). Ajout, le 23 février 2021, de cette précision : « Les militants de l’éducation à la maison mettent régulièrement en avant que c’est une loi adoptée sous le IIIe Reich, pour des raisons d’endoctrinement. Leur débat est complexe, car une des raisons avancées pour le maintien de la loi est que l’école construit des démocrates » (Philippe Bongrand (entretien avec, par Jean-Christophe Henriet), « Ceux qui délèguent et ceux qui assument », Journal du Centre 10 avr. 2019, p. 5, à l’occasion d’une « journée d’échanges sur les modes d’instruction en Morvan »)., je me bornerai à cette piste de réflexion pour conclure : peut-être fallait-il en passer par-là, pour assurer la séparation – laïque – de l’Église (catholique) et de l’État (français) ; en pensant avec Hugo, mais aussi contre lui, l’enjeu n’est-il pas aujourd’hui d’autonomiser – voire émanciper, pour reprendre un mot qui plaît aux auteurs précités – la référence au droit à l’éducation ?

Au fait, le 25 novembre, c’était la Journée nationale contre le harcèlement (à l’école)30À partir de l’article 5 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet pour une école de la confiance, v. Valérie Piau (entretien avec, par Sophie de Tarlé), etudiant.lefigaro.fr 5 nov. ; dans l’émission Ça commence aujourd’hui, Bilal Hassani livrait ce jour-là un témoignage (avant de lancer quelques jours plus tard un appel au gouvernement, sur le plateau de Quotidien le 10). Paragraphe modifié après réflexion et révisions du présent texte (en essayant de le rendre plus lisible ; pour mes billets à venir, je me fixe ici l’objectif de diviser le nombre de notes par deux – soit 15, comme max.) ; n’hésitez pas à m’écrire si vous avez des réactions ou informations à partager, les discours du – et sur le – droit de l’IEF font partie de mes projets d’étude pour 2021 (ajout au 23 février, en renvoyant aussi à Antonello Lambertucci, « Interdiction de l’instruction à domicile : enjeux et problématiques », La Revue du SIA nov. 2020, n° 37, p. 7, ainsi qu’à mon billet suivant in fine)., lequel était présenté par la députée précitée comme l’une des causes du recours à l’IEF – il y a neuf jours, le 20, cependant qu’on célébrait les droits de l’enfant.

Ajout au 15 décembre, pour dédier ce billet à la mémoire de la tante d’un ami d’enfance, la  sœur d’une personne d’une grande hospitalité (je l’ai éprouvée plus d’une fois…) ; alors que je lui présentais mes condoléances (hier), elle m’a rappelé, d’une part, qu’elle était croyante – ce qui n’était pas vraiment un secret, pas plus qu’elle ne devrait s’offusquer que je la qualifie de « catho de gauche ». D’autre part, ou par voie de conséquence, elle m’a indiqué avoir choisi comme lecture (la semaine dernière) ce poème de Victor Hugo : « Aux arbres » (ce qui m’a conduit, évidemment, à lui parler de la deuxième illustration supra ; lire Les Contemplations, Nelson éd., 1856, poetica.fr).

Notes

1 « Discours du Président de la République sur le thème de la lutte contre les séparatismes », elysee.fr 2 oct. 2020
2 « Covid19 – Point de situation du vendredi 2 octobre 2020 » (« Données arrêtées au jeudi à 13h »), education.gouv.fr
3 Jules Pecnard, « Quand Édouard Philippe découvrait l’existence du rappeur Médine », lefigaro.fr 11 juin 2018 ; Arte. Les concerts à la maison, 29 avr. 2020, à 3’30
4 Benoît Urgelli (v. la note suivante et, plus généralement, univ-lyon2.fr) ; au passage, v. la Lettre d’information du laboratoire Éducation, Cultures, Politiques (ECP), nov. 2020, n° 4 (signalant l’ouvrage de Claire Polo, Le débat fertile. Explorer une controverse dans l’émotion, UGA éd.), avec ce propos introductif de Stéphane Simonian : « Par ces temps difficiles, la recherche est peut-être une ressource, un souffle. Mais elle ne saurait masquer un contexte chahuté par la crise sanitaire qui désorganise nos modes de fonctionnement et d’organisation » ; à cet égard, je tiens à remercier encore les personnes que j’ai sollicitées récemment – notamment celle qui m’a permis d’emprunter l’ouvrage ci-dessus, dans la foulée de ma « descente » ce mercredi 25 (ce bref passage à Grenoble m’a aussi permis de continuer à parcourir le livre de Françoise Waquet, Une histoire émotionnelle du savoir (XVIIe-XXIe siècle), CNRS éd., 2019, en particulier les développements titrés « La bibliothèque : lieux désertés, lieux aimés », pp. 73 et s.).
5 Benoît Urgelli (entretien avec, par Violaine Morin), « Les enfants vont perdre deux mois d’école, est-ce un drame ? », Le Monde 16 avr. 2020, p. 14 ; le 24 juin, Philippe Bongrand revenait pour les Savanturiers à « ce qu’on appelle aujourd’hui, mais pas hier, la coéducation » : v. les premières minutes du webinaire « Se repérer dans la galaxie de l’école à la maison », organisé dans le cadre de l’Université numérique de l’éducation ; ces regards croisés avec Pauline Proboeuf, animés par Ange Ansour, ont été mis en ligne le 2 juill.
6 Lorraine Rossignol, « La coéducation, une révolution », Télérama le 1er, n° 3677, p. 36, spéc. p. 38, concernant l’école du Mas de Mingue ; s’agissant de celle dite Jean-Moulin, également à Nîmes, v. le 4 (au passage, à propos du résistant qui fût son secrétaire, v. Jean Chichizola, lefigaro.fr 26 nov., rappelant sa prise de position publique du 30 avr. 2017 : « Marine Le Pen (…), c’est la France de Maurras qui continue » ; Jean Lebrun, qui connaissait bien Daniel Cordier, revient en des termes touchants sur ce « mort à cent ans ». Critiquant l’hommage national aux Invalides, Olivier Charneux, tetu.com le 27 ; v. enfin Hugo Ruaud, publicsenat.fr le 29 : « Hubert Germain, centenaire, est le dernier représentant vivant des Compagnons de la Libération. Inévitablement, la question de la postérité se pose. Bien sûr, les communes concernées sont garantes de cette mémoire » ; parmi elles, Grenoble, ainsi que je le rappelais dans mon billet du 30 mai (en note 2).
7 Le Monde 23 juin, p. 15 ; v. depuis la toute première phase prononcée par « Karim Benmiloud, le recteur de l’académie de Clermont-Ferrand, [qui prévoyait] « une rentrée particulière mais sereine et apaisée », lamontagne.fr 27 août 2020. « On attribue à Joseph Goebbels la phrase « un mensonge répété mille fois se transforme en vérité ». Il n’a pas été prouvé que cette citation vient bien de lui » (nospensees.fr 19 oct. 2017) ; en tout état de cause, l’idée selon laquelle l’école serait « obligatoire », depuis Jules Ferry, a peut-être fini par être une vérité au sein de l’Éducation nationale, facilitant ainsi l’annonce de l’officialiser (juridiquement).
8 « Les maires et le déconfinement, ou le déploiement du droit à l’éducation en référé », AJCT 2020, p. 542 (n° 11 du 19 nov., sommaire), obs. sous TA Montreuil Ord., 20 mai 2020, Mme Aline C., n° 2004683 ; Toulon le 28, Préfet du Var, n° 201320 ; La Réunion le 29, Mmes X. et Y., n° 2000415 ; Marseille le 5 juin, Mme Abderrahman Ben Allel et a., n° 2004097 ; Guadeloupe le même jour, M. B. A., n° 2000422 ; Nîmes les 9 et 10, Préfet du Gard, n° 2001571 (2001572, 2001573, 2001576 et 2001577) et n° 2001594) ; CE Ord., le 23, Commune de Marseille, préc.
9 Patricia Rrapi, « Le Préambule de la Constitution de 1946, fondement constitutionnel de l’état d’urgence », La Revue des Droits de l’Homme ADL 8 juin, § 13, avant montrer en quoi ce cons. 17 « favorise aussi un éclatement plus général encore ».
10 Mona Chollet, Chez soi. Une odyssée de l’espace domestique, La Découverte, 2015 ; lire Ousama Bouiss, « Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ? Les enseignements de Pierre Bayard », theconversation.com 14 mars 2019 : « se libérer de la volonté de paraître cultivé », un beau projet ! Aux éditions de Minuit, en 2007, il proposait « le concept de « bibliothèque collective » » ; et d’inviter à « se pencher davantage sur [chaque livre et] sa situation ».
11 Non loin de ma maman – ça rime aussi avec confinement -, et avec mon papa, dans un endroit « parfois appelée la pampa » (Pierre Lasterra, « Une 3e circonscription vaste, disparate et indécise… », ledauphine.com 30 mai 2012 – soit un mois avant la dernière réélection d’Hervé Mariton (UMP) – avant de préciser qu’elle « est une des plus vastes de France ».
12 « Dans la Drôme, quatre femmes élues députées », ledauphine.com 18 juin 2017
13 Comparer Philippe Bongrand (entretien avec, par Cécile Bourgneuf, « L’existence de cas de radicalisation est incontestable, mais c’est marginal », Libération (site web) 4 oct. 2020 ; v. surtout sa tribune avec l’équipe ANR SociogrIEF, « La décision de supprimer l’instruction en famille, sauf raison de santé, justifierait un débat public », Le Monde le 15, p. 29 : leurs « recherches montrent la très grande diversité des motivations des familles », irréductibles « aux dimensions religieuses ou « séparatistes » » ; entretemps, Valentin Bertrand, « Les écoles par correspondance défendent leur raison d’être », francebleu.fr le 11 : « « Bienvenue dans la cellule de radicalisation », ironise Cyril Metreau ».
14 Communiqué de presse, à partir du texte « La députée de la Drôme Célia de Lavergne interpelle le Premier Ministre au sujet de l’Instruction en famille… », mediascitoyens-diois.info 20 nov. 2020 (avec les coordonnées de Kim O’Dowd, son attachée parlementaire).
15 V. le texte d’André D. Robert et Jean-Yves Seguy, « L’instruction dans les familles et la loi du 28 mars 1882 : paradoxe, controverses, mise en œuvre (1880-1914) », Histoire de l’éducation 2015/2, n° 144, pp. 29 et s., lesquels commencent par rappeler les termes de son article 4, qui ne fait que réserver la possibilité de donner l’enseignement primaire obligatoire « dans les familles, par le père de famille lui-même ou par toute personne qu’il aura choisie ».
16 Pour un aperçu du droit international par l’initiative collaborative RTE, « Existe-t-il un droit à l’instruction à domicile ? », right-to-education.org, 2018 ; et de conclure : « la réponse est non ».
17 Une loi qui n’a « pas été déférée au Conseil constitutionnel », comme le note Pierre-Henri Prélot, « L’enseignement privé confessionnel primaire et secondaire », in Francis Messner, Pierre-Henri Prélot et Jean-Marie Woehrling (dir.), Traité de droit français des religions, LexisNexis, 2ème éd., 2013, p. 1826, en note de bas de page, après avoir affirmé : « La liberté de l’enseignement domestique comme composante essentielle de la liberté de l’enseignement n’est guère soulignée en doctrine. Elle est pourtant essentielle » ; et de la reformuler en « droit », avant d’aller jusqu’à le qualifier – trois pages plus loin – de « fondamental (…), étant entendu que l’instruction constitue un droit pour les enfants et une obligation pour les parents ». À la RDLF 2018, thèse n° 10, je reviens sur les confusions suscitées par la référence à « l’obligation scolaire », en écrivant que le Conseil constitutionnel pourrait aider à les dissiper en rehaussant la référence au droit à l’éducation ; une occasion de le consacrer enfin pourrait être donnée par le projet de loi annoncé.
18 Je reprends ici à nouveau, en la raccourcissant un peu, une phrase de mon résumé préc.
19 Avis rendu public par le Gouvernement le 5 déc. 2018 (v. infra la note 22).
20 CE, 19 juill. 2017, Assoc. Les Enfants d’Abord et a., n° 406150, cons. 3 – arrêt assez habilement écarté par Jean-Éric Schoettl, membre honoraire de l’institution (Le Figaro 9 oct. 2020, n° 23684, p. 18) puis mobilisé par Me Bernard Fau (v. la vidéo de Droit Instruction 17 nov. 2020, « diffusée par les associations Led’a, Laia, Cise, Unie et les collectifs Félicia et L’école est la maison »).
21 Comm.EDH, 6 mars 1984 (v. infra).
22 Avis préc. du 29 nov. 2018 (public le 5 déc.), n° 396047, §12 ; « Depuis que la Cour européenne des droits de l’homme a été rendue permanente, le 1er novembre 1998, la commission a été supprimée », rappelle wikipedia.org (page actualisée le 25 nov. 2019). Ajout au 23 février 2021 – alors que je me suis remis « à l’IEF » (v. la toute dernière note) –, en me bornant pour l’heure à faire observer que cette erreur a été réitérée (v. supra ma note 7) au § 60 de « l’avis du Conseil d’État sur le projet de loi « confortant le respect, par tous, des principes de la République » (dit « séparatisme » ou laïcité) », mis en ligne par l’avocat Éric Landot le 7 déc. 2020, rendu public par le Gouvernement à la date symbolique du 9 décembre (conseil-etat.fr) ; v. supra ma deuxième illustration, avec les « critiques de l’historien » Jean Baubérot (entretien avec, par Claire Legros), « Le gouvernement affirme renforcer la laïcité, alors qu’il porte atteinte à la séparation des religions et de l’État », Le Monde 15 déc. 2020, p. 30 (annoncé à la Une, ce mardi-là) : « Dans ses discours de Mulhouse [le 18 février] et des Mureaux [le 2 octobre], Emmanuel Macron cherchait un équilibre entre le séparatisme produit par la République et le radicalisme religieux. Il n’en reste rien dans le projet de loi (…) ».
23 CEDH, 11 sept. 2006, Konrad c. Allemagne, n° 35504/03
24 Je reprends ici l’essentiel de ma thèse, 2017, pp. 832-833, 1030 et 1197-1198
25 Comm.EDH, 6 mars 1984, Famille H. c. Royaume-Uni, n° 10233/83 ; DR 37, p. 109, spéc. p. 112 ; il n’est d’ailleurs pas du tout certain que la Cour accepterait aussi facilement la condamnation pénale d’une carence parentale « sans aucun doute étroitement liée au problème de la dyslexie des enfants » (pour citer la page 111 de cette décision disponible en ligne).
26 Extrait de ma contribution intitulée « Le droit à l’éducation », in Sara Brimo et Christine Pauti (dir.), L’effectivité des droits. Regards en droit administratif, éd. mare & martin, 2019, p. 39, spéc. pp. 47-48, avec en note n° 59 cette précision : L’éducation est le mot le plus souvent utilisé au plan international, depuis 1948 ; l’art. 2 [du premier protocole additionnel à la Conv.EDH] (« Nul ne peut se voir refuser le droit à l’instruction (…) ») est, pour ainsi dire, l’exception européenne qui confirme la règle » (reprise mot pour mot ici, pour permettre à qui le souhaite de citer – c’est mieux que de plagier).
27 V. à partir de dalloz-actualite.fr 18 nov., obs. de Pierre Januel (dans ce billet, les passages soulignés sont tous de mon fait).
28 Philippe Bongrand et Dominique Glasman, « Instruction(s) en famille. Explorations sociologiques d’un phénomène émergent », Revue française de pédagogie oct.-nov.-déc. 2018/4, n° 205, p. 5 (introduction au dossier, paru en février 2020) ; Jean-Marie Pottier, « Contrôler l’éducation à la maison », scienceshumaines.com août-sept. 2020, n° 328, recensant en outre les articles de Pauline Proboeuf (« S’affranchir de l’institution scolaire pour émanciper l’enfant ? », Émulations 2019, n° 29), Géraldine Farges et Élise Tenret (« Évaluer l’instruction en dehors de l’école. Une enquête sur la fabrication du jugement des inspecteurs dans les contrôles de l’instruction dans la famille », Sociologie 2020/2).
29 Invité récemment de la Radio chrétienne francophone (RCF) – Alsace, pour une émission intitulée « Le droit en débat », Grégor Puppinck se livre à nouveau à une lecture plus qu’orientée des textes pertinents, en particulier les travaux préparatoires du protocole additionnel à la Convention (il procède d’ailleurs à un simple copier-coller de ses Observations écrites soumises à la Cour le 9 décembre 2016, 11 p., spéc. pp. 10-11 ; Officiel ECLJ 22 oct. 2020) ; la CEDH s’est prononcée depuis et, pour le dire en une phrase, sur le modèle de mon précédent billet : Scolarisation obligatoire, la Cour européenne ne condamne pas l’Allemagne (v. mes ajouts dans celui-ci, le 20). Ajout, le 23 février 2021, de cette précision : « Les militants de l’éducation à la maison mettent régulièrement en avant que c’est une loi adoptée sous le IIIe Reich, pour des raisons d’endoctrinement. Leur débat est complexe, car une des raisons avancées pour le maintien de la loi est que l’école construit des démocrates » (Philippe Bongrand (entretien avec, par Jean-Christophe Henriet), « Ceux qui délèguent et ceux qui assument », Journal du Centre 10 avr. 2019, p. 5, à l’occasion d’une « journée d’échanges sur les modes d’instruction en Morvan »).
30 À partir de l’article 5 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet pour une école de la confiance, v. Valérie Piau (entretien avec, par Sophie de Tarlé), etudiant.lefigaro.fr 5 nov. ; dans l’émission Ça commence aujourd’hui, Bilal Hassani livrait ce jour-là un témoignage (avant de lancer quelques jours plus tard un appel au gouvernement, sur le plateau de Quotidien le 10). Paragraphe modifié après réflexion et révisions du présent texte (en essayant de le rendre plus lisible ; pour mes billets à venir, je me fixe ici l’objectif de diviser le nombre de notes par deux – soit 15, comme max.) ; n’hésitez pas à m’écrire si vous avez des réactions ou informations à partager, les discours du – et sur le – droit de l’IEF font partie de mes projets d’étude pour 2021 (ajout au 23 février, en renvoyant aussi à Antonello Lambertucci, « Interdiction de l’instruction à domicile : enjeux et problématiques », La Revue du SIA nov. 2020, n° 37, p. 7, ainsi qu’à mon billet suivant in fine).

Éducation inclusive : la Cour européenne condamne l’Italie

Il y a trois semaines, saisie par une élève – par l’intermédiaire de son père –, la première section de la CEDH a condamné l’Italie.

Née en 2004, cette « jeune fille autiste non verbale » n’avait pu « bénéficier d’un soutien scolaire spécialisé pendant ses deux premières années d’école primaire (2010/2011 et 2011/2012) ». La mairie d’Eboli (v. le point ci-contre) étant restée silencieuse, ses parents avaient formé un recours devant le tribunal administratif de la région de Campanie, en invoquant la loi n° 104 promulguée vingt ans plus tôt, en 1992 ; le Conseil d’État italien ayant lui aussi rejeté leur requête, en 2015, son père la dirigea – avec un avocat milanais – vers la Cour de Strasbourg. Elle « conclut qu’en l’espèce, le Gouvernement n’a pas démontré que les autorités nationales aient réagi avec la diligence requise pour garantir à la requérante la jouissance de son droit à l’éducation sur un pied d’égalité avec les autres élèves, de manière à ménager un juste équilibre entre les intérêts concurrents en jeu »1CEDH, 10 sept. 2020, G.L. c. Italie, n° 59751/15, §§ 1-2, 14, 16 et 72 : « Partant, il y a eu violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole n° 1 ». Merci à Denis de m’avoir signalé cet arrêt..

Alors pendante, l’affaire était évoquée2Avec une autre affaire pendante, qui s’est soldée par arrêt – évoqué au § 70 – de non-violation le 25 juin 2019 (Stoian v. Romania, n° 289/14, § 111 ; également rendu à l’unanimité). par Johan Lievens et Marie Spinoy, au terme d’une note intitulée « Éducation inclusive : la Cour est-elle à bonne école ? », RTDH 2019, n° 119, p. 707, spéc. p. 718 ; l’arrêt s’inscrit dans le prolongement d’une jurisprudence dessinée trois ans plus tôt, que je rappelais – juste avant de consacrer quelques lignes à l’expérience italienne – dans un billet du 3 avril 20183Comparer l’Opinion concordante du juge Wojtyczek, in fine (p. 27, spéc. p. 29) – où il cite, « en particulier, Dupin c. France, no 2282/17 » ; à propos de cet arrêt du 24 janvier 2019, v. le 8 avril, au point 4..

Notes

1 CEDH, 10 sept. 2020, G.L. c. Italie, n° 59751/15, §§ 1-2, 14, 16 et 72 : « Partant, il y a eu violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 2 du Protocole n° 1 ». Merci à Denis de m’avoir signalé cet arrêt.
2 Avec une autre affaire pendante, qui s’est soldée par arrêt – évoqué au § 70 – de non-violation le 25 juin 2019 (Stoian v. Romania, n° 289/14, § 111 ; également rendu à l’unanimité).
3 Comparer l’Opinion concordante du juge Wojtyczek, in fine (p. 27, spéc. p. 29) – où il cite, « en particulier, Dupin c. France, no 2282/17 » ; à propos de cet arrêt du 24 janvier 2019, v. le 8 avril, au point 4.

Maternité de Die : une fermeture contraire au(x) droit(s)

Entrée de l’hôpital de Die (photo prise personnellement ce mercredi 29 juillet 2020)

Il y a environ trois semaines, le tribunal administratif (TA) de Grenoble a donné raison au Collectif de défense de l’hôpital de Die (après une audience « publique » le 23 juin[i]). Ce jugement commence par affirmer que « la décision attaquée, qui fait grief tant au personnel de l’établissement qu’aux tiers, ne peut être regardée comme une mesure d’ordre intérieur. Par suite, [elle n’est pas insusceptible de recours et] la fin de non-recevoir opposée sur ce point par le centre hospitalier de Die doit être écartée » (TA Grenoble, 7 juill. 2020, Collectif de défense de l’hôpital de Die, n° 1801892, cons. 2[ii]).

Dans un second temps, alors que son juge des référés n’avait pas su construire un raisonnement pour suspendre « la fermeture de services hospitaliers à compter du 1er janvier 2018 », la « décision implicite née le 29 » est annulée ; elle l’est par le TA plus de deux ans et demi plus tard, mais pour un motif qui se dédouble et ramène bien en 2017 : « L’absence de consultation du conseil de surveillance et de concertation avec le directoire préalablement à la décision de ne pas solliciter le renouvellement des autorisations litigieuses a été de nature à priver tant les patients que le personnel du centre hospitalier de Die d’une garantie » (cons. 2 et 4, en résumant entretemps les articles L. 6143-1 et L. 6143-7 du code de la santé publique ; il y a là une application de la jurisprudence Danthony[iii]).

Il se trouve que l’un des juges avait rendu l’ordonnance à laquelle il vient d’être fait allusion (TA Grenoble Ord., 28 déc. 2017, Collectif de défense de l’hôpital de Die et autres, n° 1706777)[iv] ; la relire conduit à remarquer que le Collectif et al. avançait notamment que « le conseil de surveillance de l’hôpital n’a pas été consulté, en méconnaissance [du premier article précité] ». Je n’en parlais même pas dans ma note de jurisprudence[v] : en mobilisant des décisions du Conseil d’État, je critiquais cependant une occasion manquée de rendre utile le référé-suspension (Rev.jurisp. ALYODA 2018, n° 3).

S’il faut regretter là encore le silence sur les « droits » et « l’État », et sans ignorer les subtilités propres à ce jugement[vi] – qui n’entraîne pas, en lui-même, la réouverture de la maternité –, il convient pour l’heure d’y voir une belle manifestation d’indépendance, qui incite à ne pas désespérer de la juridiction administrative ; même placée devant le fait accompli, elle sait parfois ne pas s’incliner, en laissant rêver à un véritable État de droits[vii].

Actualisation à partir de mon billet du 8 août 2024 – spéc. le huitième paragraphe (avec les notes 26 à 32) à propos de CAA Lyon, 3 mai 2022, Centre hospitalier de Die, n° 20LY02168, contredisant le TA de Grenoble spéc. aux cons. 7 et 8


Salle d’audience, grenoble.tribunal-administratif.fr 16 nov. 2015 (ce mardi 23 juin 2020, le nombre de chaises apparaissant au premier plan avait été ramené à quatre)

[i] Je remercie l’avocate du Collectif de défense de l’hôpital de Die pour m’avoir permis d’assister à cette audience, qui était initialement prévue le mardi 17 mars ; le 15, j’apprenais qu’elle n’aurait pas lieu et, le lendemain, j’allais me confiner dans le Haut-Diois. Le lundi 22 juin, curieux d’aller plus loin que le seul sens des conclusions (v. @ColHopitaldie, le 20), je faisais le trajet inverse – en voiture, cette fois, pour une autre raison de service public (lui aussi dégradé, depuis plusieurs années ; v. ce billet, en note n° 2 in fine).

[ii] Le contraire eût été, sur ce point, vraiment surprenant : il convient néanmoins de remarquer l’absence de motivation – ou, à tout le moins, son caractère tautologique : la fermeture d’une maternité n’est pas une mesure d’ordre intérieur (MOI), parce qu’elle fait grief ; elle n’est donc pas une MOI. Jean Rivero avait consacré sa thèse à ces mesures, en 1934 (v. évent. la mienne, 2017, pp. 151 et 155, surtout ; v. aussi page 504 et, dans ma seconde partie, en note de bas de page 1176, n° 3389) ; mutatis mutandis, v. Éric Péchillon, « Y a-t-il trop peu de mesures d’ordre intérieur à l’université ? », in Mickaël Baubonne, Robert Carin et Anna Neyrat (dir.), Le contentieux universitaire et la modernité, Lextenso/LGDJ, 2019, p. 81

[iii] CE Ass. (et Sect.), 23 déc. 2011, Danthony et a., n° 335033 ; Les grands arrêts de la jurisprudence administrative (GAJA), Dalloz, 22ème éd., 2019, le second arrêt portant aussi sur des arrêtés et non seulement un décret, tous ces textes étant en l’occurrence relatifs à la création de la nouvelle École Normale Supérieure (ENS) de Lyon, regroupant l’ancienne et celle de Fontenay-Saint-Cloud ; « si l’on considère l’importance respective des deux vices de procédure possibles, celui de la violation des garanties (…) a une portée plus radicale que celui ayant seulement pu avoir une influence sur le contenu de la décision (…) » (§ 5, pp. 890-891 ; l’application du second cas de figure m’avait semblé pouvoir avoir inspiré celle du premier, avant que je ne change d’avis (v. mon billet du 7 juillet 2019, actualisé le 12 août ; pour une autre illustration, CAA Lyon, 2 avr. 2020, Métropole de Lyon, n° 18LY02847 ; Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 2, « Assistant maternel [sic] : procédure applicable à la modification de son agrément » ; selon le considérant 5, le « défaut de saisine de la commission consultative paritaire, devant laquelle Mme E… aurait été à même de présenter ses observations, l’a privée d’une garantie ». Pourvoi en cassation en cours, n° 440937). V. plus largement Stéphanie Douteaud, « De l’annulation platonique à la résiliation platonique », AJDA 2019, p. 2329, rappelant que cette jurisprudence était destinée à combattre ce type d’annulation.

Dessin repris du billet d’Éric Landot, le 7 mai 2020 (le port du masque étant obligatoire, ce mardi 23 juin 2020, la tâche de la rapporteure publique et des avocates s’en trouvait compliquée)

Elle a été provoquée par Claude Danthony (v. aussi le 9 nov. 2019, n° 412388 ; AJDA 2020, p. 358, note André Legrand, intitulée : « Nouvelle annulation des statuts de la COMUE de Lyon » ; « Le feuilleton n’est pas terminé »). Après le discours du président de la République, le 14 juillet 2020, le mathématicien écrivait avoir « perdu une heure 15 de [s]on temps. Des mots, des mots et rien de concret » ; le lendemain, et toujours sur twitter, il commentait la nomination de Claire Landais comme secrétaire générale du gouvernement (SGG ; v. aussi Pierre Alonso, liberation.fr le 22). Elle a remplacé Marc Guillaume, que j’évoquais dans mon billet du 31 janvier (in fine), et qui a quant à lui été nommé préfet de la région Île-de-France, quelques jours après avoir été « débarqué à l’initiative du nouveau Premier ministre » (Dominique Albertini, Libération le 23, pp. 1 et 10-11). Il y a une quinzaine d’années, Jean Castex était « directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) au ministère de la santé » (Paul Benkimoun et Michel Delberghe, « La rentabilité imposée à l’hôpital », lemonde.fr 22 févr.-11 mai 2006).

[iv] Après avoir toutefois organisé, ce qui mérite d’être salué, une audience publique le 22 décembre 2017. L’ordonnance du 28 a été explicitement approuvée dans les conclusions prononcées ce 23 juin 2020, le juge l’ayant rendue se tenant à quelques mètres ; compte-tenu du désistement consécutif à l’irrecevabilité de ce premier recours, cela ne pose pas de difficultés… du moins selon la jurisprudence du Conseil d’État : v. les obs. de Paul Cassia in Les grands arrêts du contentieux administratif (GACA),co-écrit avec Jean-Claude Bonichot et Bernard Poujade, Dalloz, 7ème éd., 2020 (mis à jour au 15 oct. 2019), pp. 103 et 105-106

© F3 RA, illustrant l’article d’Aude Henry, francetvinfo.fr 10 déc. 2017 (v. depuis le reportage de Romain Mahdoud, Le Média 12 nov. 2019, ainsi que cette Lettre du Collectif de défense de l’hôpital de Die, le 24 juill. 2020)

[v] Sinon indirectement, à travers mes développements relatifs à la démocratie sanitaire (v. aussi le billet associé à ma note, à partir de l’onglet Travaux de recherche ; le doute n’est ici pas permis : des « droits » étaient invoqués, ainsi qu’en témoigne le résumé de la requête du Collectif). Dans une tribune publiée dans Le Monde le 20 juillet, page 28, le professeur d’éthique médicale Emmanuel Hirsch note que cette « démocratie en santé a été bafouée ces derniers mois » ; il regrette auparavant l’exclusion de la société civile « du processus décisionnel instruit au sein d’instances indifférentes à l’exigence de concertation ». Le jugement rendu par le TA de Grenoble le 7 atteste qu’il n’a pas fallu attendre la pandémie de Covid-19 pour que ladite démocratie soit méconnue.

[vi] Alors qu’il est rappelé que la requête du Collectif tendait à l’annulation du refus du directeur du centre hospitalier de Die « de demander le renouvellement de l’autorisation de fonctionnement des activités de gynécologie-obstétrique et de chirurgie de son établissement », le TA l’interprète comme la contestation de son refus « de solliciter de nouveau ces autorisations » (cons. 1, en se référant dans son injonction – sans revenir sur cette reformulation – à « la demande présentée par le Collectif » ; comme la rapporteure publique, les trois juges ne reviennent pas sur celle « d’enjoindre au directeur de l’Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes, sans délai et sous astreinte de 300 euros par jour de retard, de délivrer au centre hospitalier de Die une telle autorisation et de faire publier sans délai les offres de postes correspondants aux besoins de fonctionnement des services concernés » : en 2020 comme au 29 décembre 2019, la question reste posée de savoir si cette ARS entend faire partie des actrices de l’effectivité du droit à la santé génésique, dans le Diois).

[vii] En ce jour marqué par cette sortie de Gérald Darmanin, dont la nomination symbolise l’« indifférence aux droits des femmes » du régime (Éric Fassin pour La Déferlante, le 19 juill. ; v. aussi @GeraldineMagnan, le 26), je reprendrai pour finir cet extrait d’une chanson pour Adama Traoré : « arrêtez de nous berner, arrêtez de nous [Bernay] » ! (v. à nouveau ce billet, spéc. la note n° 5).

Ajouts au 28 novembre : le 24 juillet, une personne m’a encouragé, par mail, à écrire (à nouveau) ; ma réponse, le lendemain, avait été laconique. J’ai retrouvé, depuis, la force d’exprimer que je n’avais, à ce moment-là, pas du tout la tête à ça ; je m’étais d’ailleurs fait violence pour publier ce texte – qui m’a valu d’être ensuite à plusieurs reprises contacté –, juste avant de parvenir à de vrais moments de détente (en août, et grâce à des enfants, sans doute).

Françoise Waquet, Une histoire émotionnelle du savoir (XVIIe-XXIe siècle), CNRS éd., 2019, avec en ligne les pp. 7 à 13 et la table des matières ; merci à Mouafo pour ce prêt de 24h chrono, suite à la réunion professionnelle que nous avions à Grenoble, en cette Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes (au passage, v. les ressources de la maisonegalitefemmeshommes.fr)

Je viens d’apprendre que cette personne est actuellement en congé maternité, et je ne résiste pas à l’envie de lui dédier mon billet ; à elle comme à d’autres, je recommande un livre que je viens seulement d’entamer (je savais déjà qu’il serait passionnant, dès lors que j’avais lu cette brève recension de Frédérique Letourneux, scienceshumaines.com avr. 2019 ; v. ci-contre).

Selon le site parler-francais.eklablog.com et à « l’origine, dédier a un sens religieux ». Toutefois, sous « l’influence de l’anglais dedicated, dédié s’emploie de plus en plus souvent au sens élargi de « consacré, réservé, spécialisé, destiné, affecté » » ; c’est avec cette signification souple que je recours à ce terme ici.

En marche vers les municipales (1). Étude(s) d’impact et Conseil(s) d’État (laïque ?)

Dessin de Diego Aranega, Le Canard enchaîné 16 oct. 2019, p. 2

Dans mon avant-dernier billet, je terminais par une citation sans en préciser l’auteur (v. ci-contre) ; l’arrêt du Conseil d’État qui s’y trouve évoqué reste attendu, tout comme celui qui devrait être rendu à propos du port du voile (par des mères) et des activités scolaires. Pour celles ayant lieu en classe, une interdiction a été admise par la Cour administrative d’appel de Lyon dans un arrêt du 23 juillet (n° 17LY04351), soit trois jours avant la loi n° 2019-791 « pour une école de la confiance » ; à la fin de l’année, j’ai rédigé successivement une note et un article qui ont fait l’objet de publications en ce mois de janvier. Parce que je les ai pensées ensemble, en ayant en tête un triptyque, je les complète enfin en ouvrant cette série de billets.

En avril 2019, le sociologue Éric Fassin invitait à remarquer sur LCP des « images [qui] montrent Marine Le Pen se levant parmi les premiers pour mieux applaudir le ministre », en novembre 2017 à l’Assemblée nationale (twitter.com, in fine)[1]. L’ancien professeur de droit avait alors commis une belle erreur[2] ; moins de deux ans plus tard, il se livrait à ce qui devrait être considéré comme un manquement à la laïcité de l’État : ayant pour sa part déclaré qu’il « n’est pas souhaitable que les responsables politiques s’érigent en théologiens »[3], Aurélien Taché a été sommé par Jean-Michel Blanquer de s’expliquer : « Ce 22 octobre, l’entretien, d’une quarantaine de minutes, est glacial. (…) « Le problème, ce n’est pas que tu dises que le voile n’est pas souhaitable, insiste M. Taché, c’est que tu le dises comme ministre ! ». Le député finit [toutefois par devoir] s’excuser, par voie de communiqué. (…) Blanquer est un moine laïque pour qui l’école est sacrée », résume Jean-Marc Borello, haut cadre de LRM ». Soucieux d’éviter ce qui « brouillerait la lisibilité de son propos »[4], le ministre préfère se définir comme un « républicain social » – lui qui « rogne les fonds sociaux » (nationaux)[5].

Dans une émission montrant qu’il est possible d’avoir un engagement à « La République En Marche », tout en ne limitant pas son intérêt pour l’Amérique latine à la communication politique, il m’a appris qu’existerait un « Bolivar d’extrême-centre » ; surtout, pour Jean-Michel Blanquer, ne pas « manque[r] de contradictions » (selon Goethe, cité par Jean-Noël Jeanneney), ce serait faire preuve de « dialectique »[6]

Le 24 septembre, mettant en scène son indignation d’une affiche de la FCPE, il affirmait sur RMC-BFM TV : « Il faut avoir le sens de l’histoire ». Précisément, cette Fédération des Conseils de Parents d’Élèves – des écoles publiques – « s’est construite autour du principe de laïcité, à la fin des années 1940, à l’initiative du Syndicat national des instituteurs qui a voulu en faire un allié dans sa lutte contre l’extension de l’enseignement privé »[7].

Vingt jours avant la déclaration précitée, un historien en commentait une autre, faite sur France Inter le 17 juin 2019 (« Il y a une phrase de Jean Zay que j’aime bien : « Il faut que les querelles des hommes s’arrêtent aux portes de l’école ». Aujourd’hui, il faut qu’elles s’arrêtent aux portes du baccalauréat ») ; et de remarquer que « son prédécesseur du Front populaire » prônait quant à lui une « démocratie sociale », encouragée par des mesures scolaires. Olivier Loubes ne manquait pas de noter que « l’actuelle extension de l’obligation d’instruction à partir de 3 ans facilite le financement de l’enseignement privé, renforçant la concurrence déloyale envers l’école publique (pour la défense de laquelle Jean Zay avait d’ailleurs produit, en 1936, le texte cité par Jean-Michel Blanquer [… et par Samuel Deliancourt, rapporteur public à la CAA de Lyon : v. ma note en ligne]) »[8].

Publié dans la revue L’actualité juridique. Collectivités territoriales (AJCT), mon article s’ouvre et se termine sur des lois Ferry, lui aussi régulièrement cité par son actuel successeur ; si la « loi Blanquer » restera peut-être dans les mémoires pour avoir modifié l’article 4 de la loi du 28 mars 1882 – relatif à l’âge de l’obligation d’instruction –, le sens alors conféré à la liberté de conscience des élèves a été dédoublé il y a plus de soixante ans (au nom d’une autre liberté, celle des établissements privés). À partir d’une intervention pour le moins osée de l’épouse du président de la République, dans une école et en présence du ministre, Éric Fassin notait fin octobre « qu’on parle aujourd’hui tout le temps de laïcité, et jamais ou presque du financement public des écoles religieuses »[9], prévu par cette loi Debré (v. ci-dessous[10], dans le cadre de ma première partie : Confiance de l’État (laïque) envers les établissements privés (catholiques)).

« Focus sur… l’extension des obligations des communes en matière scolaire. Loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance », AJCT 2020, p. 28, spéc. p. 30

À la fin de l’été 2018, abordant dans un billet la pensée de Milton Friedman, je notais que ce dernier livrait comme exemple cette loi, adoptée moins de trois ans avant la première édition de Capitalism and Freedom[11] . Dans une double recension récente, Jean Baubérot remarque : « Curieusement, quand on parle des laïcités d’autres pays, on vous rétorque souvent : « Oui, mais ce n’est pas comme chez nous » ! Effectivement le Canada-Québec n’a pas de loi Debré »… Auparavant, il note : « La laïcité et la religion font beaucoup parler d’elles à l’occasion d’« affaires » montées en neige par les médias »[12].

Même lorsqu’ils sont bien intentionnés, cela arrive : un exemple est fourni dans un documentaire disponible sur le site d’Arte pendant un an ; dans la première partie, après que la ville de Meyzieu a été représentée, il est affirmé qu’en 1989 à Creil, « trois jeunes filles refusent d’ôter le voile pour aller en cours, comme la loi les y oblige » (Du public à l’intime, respectivement à partir des 17 et 25èmes minutes). Elle n’existera qu’à partir de 2004, et il n’y a pas de loi qui soit applicable aux parents d’élèves, contrairement à ce qu’a pu affirmer dix ans plus tard le directeur concerné dans l’affaire jugée cet été par la CAA de Lyon (suivre les notes ci-dessous pour accéder à mon commentaire). Intitulé Nous, Français musulmans, ce documentaire retient un « casting » qui interroge, mais il a le mérite de donner la parole aux premières concernées.

À l’approche des quarante ans de la CEDEF (CEDAW en anglais), l’actuelle vice-présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes « soulign[ait] l’importance de promouvoir [cette Convention internationale ,] dès le plus jeune âge, en affirmant qu’elle devrait être affichée dans les salles de classe » (Nicole Ameline, le 8 juillet 2019) ; la loi n° 2019-791 du 26 juillet s’en tient aux emblèmes nationaux et au drapeau européen : là où l’article 3 de la loi Peillon avait déjà procédé à « l’ajout d’un article L. 111-1-1 dans le Code de l’éducation »[13], en laissant aux communes le soin « de prendre en charge les dépenses de pavoisement de leurs écoles »[14], celui de la loi Blanquer a inséré un article L. 111-1-2 qui vise quant à lui les « salles de classe » (là aussi dans les « Dispositions générales » du Titre Ier : Le droit à l’éducation)[15].

« Considérant que les collectivités territoriales doivent déjà assumer un certain nombre de décisions onéreuses prises unilatéralement par le Gouvernement » – j’en énumère quelques-unes à la fin de mon article –, le sénateur Yves Détraigne (Marne – UC) a posé le 21 novembre une question écrite relative aux « problèmes logistiques et financiers que cette nouvelle obligation engendre », avec cette affirmation que « la plupart des classes ne s’en sont pas encore parées ». Il vient de lui être répondu qu’il appartenait aux responsables d’établissement de commander l’affiche mise à disposition par le ministère, laquelle « est par ailleurs téléchargeable sur [son] site » (JO Sénat 30 janv. 2020, p. 578). Autrement dit : vous arrivez trop tard, débrouillez-vous !

Dans son commentaire de la loi – plus général que le mien –, Marc Debene classe cet article 3 parmi les « dispositions [qui] semblent plutôt relever du domaine réglementaire (…), de la circulaire ou du règlement intérieur » ; l’ancien recteur remarque que cet affichage « viendra s’ajouter à celui représentant la charte de la laïcité à l’école »[16]. J’ajoute que cette circulaire n° 2013-144 ne vise alors que « les écoles et établissements d’enseignement du second degré publics »[17].

Trois jours après avoir nommé comme chef de cabinet un ancien assistant parlementaire de Bruno Bourg-Broc (UMP)[18], le ministre de l’Éducation nationale l’assurait : « Il n’y aura pas de loi Blanquer, j’en serai fier » ; « Il y aura des évolutions du système, qui ne seront pas verticales »[19]… Dans mon article, je remarque que les membres du groupe Les Républicains (LR) de l’Assemblée nationale contestaient curieusement la constitutionnalité de cette loi – plus précisément de son article 17 – à partir d’une décision rendue en 1994, justement relative à un texte porté par le député précité et pour l’invalider[20] ; plus loin, je compare la décision de conformité à la Constitution du 24 juillet 2019 avec celle relative à la loi Carle[21] – le 22 octobre 2009, en rappelant au passage le rôle joué par le sénateur Michel Charasse.

Quelques mois plus tard, ce dernier était nommé par Nicolas Sarkozy au Conseil constitutionnel (le 25 février 2010) ; l’année suivante, il devenait « chevalier » de la légion d’honneur[22] puis, fin 2017 et là aussi en même temps, membre du « Conseil d’orientation du Domaine de Chambord »[23]. Après avoir suggéré la nomination d’une autre « sage » au ministère de la justice – en la personne de Nicole Belloubet[24] –, il était invité à énumérer des « moments d’exception durant [son] mandat » au Conseil constitutionnel, alors qu’il venait de le quitter ; le premier auquel il songeait était la défense, en février 2013, des « principes de la laïcité »[25]. En présence de la Garde des Sceaux[26], une réception avait lieu ce lundi à l’Élysée pour lui remettre les insignes d’« officier », le président le qualifiant à cette occasion d’« intransigeant » sur la question. Le 29 septembre 2019, je remarquais que ce mot là (aussi) devient de plus en plus l’un des signaux d’un certain positionnement laïque.

Photo © Service PHOTOGRAPHES, reprise de Sandrine Thomas, « Michel Charasse décoré par le président de la République Emmanuel Macron pour “toute une vie à servir la République” », lamontagne.fr 27 janv. 2020

Quelques jours avant cette cérémonie (v. ci-contre), lors de son déplacement en Israël pour le soixante-quinzième anniversaire de la libération d’Auschwitz, les 22 et 23 janvier 2020, Emmanuel Macron a montré qu’il ne l’était guère – intransigeant – concernant la séparation des pouvoirs : « si à la fin le juge devait décider que la responsabilité pénale n’est pas là, le besoin de procès, lui, est là » ; durant son retour, il a précisé l’« idée » aux journalistes admis dans l’avion présidentiel (du Monde, du Figaro et de Radio J) : « La question de la responsabilité pénale est l’affaire des juges, la question de l’antisémitisme est celle de la République »[27]. Vide de sens – sinon politique –, cette opposition en rappelle une autre : « Le port du voile dans l’espace public n’est pas mon affaire, c’est ça la laïcité » ; « à l’école, (…) c’est mon affaire » (Réunion la 1ère 24 oct.). « La question de l’antisémitisme » tend à jouer le même rôle que celle de « la laïcité » : prendre des grands airs pour surtout communiquer.

Le 5 décembre 2018, le Gouvernement avait rendu public l’avis du Conseil d’État sur le « projet de loi relatif à une école de la confiance », dont il avait « été saisi le 22 octobre » ; il était alors affirmé que l’« étude d’impact complète et bien documentée qui accompagne le projet répond aux exigences de l’article 8 de la loi organique n° 2009-403 » (29 nov., n° 396047, §§ 1 et 2). Selon cette disposition, « la méthode de calcul retenue » doit être indiquée ; en l’occurrence, je rappelle dans mon article qu’il s’est agi d’une extrapolation à partir de données du secrétariat général de l’enseignement catholique (4 déc. 2018, pp. 25 à 36, après une relativisation fondée sur des « prévisions d’évolutions démographiques des prochaines années »). « On ne réclamera rien du jour au lendemain », tentait de rassurer – un an plus tard – l’adjoint au SGEC[28] ; il n’ignore sans doute pas qu’il n’est parfois pas nécessaire de le faire : à Marseille, par exemple, une nouvelle augmentation du « forfait communal » a été justifiée par l’adoption de cette loi Blanquer[29].

Cette semaine, le Conseil d’État a fait irruption dans le débat public, avec son avis du « 24 janvier sur les deux projets de loi relatifs à la réforme des retraites » ; les « projections financières « restent lacunaires », écrit-il, au point que, « dans certains cas, [l’étude d’impact] reste en deçà de ce qu’elle devrait être » »[30]. Mieux encore, le projet de loi comprend des dispositions « contraires à la Constitution » (v. l’extrait reproduit par le professeur des écoles Lucien Marboeuf, blog.francetvinfo.fr 26 janv. 2020). Il comprend une « référence à une loi de programmation [qui] garantit les compensations promises par le gouvernement au monde enseignant et universitaire, pour équilibrer les « pertes » engendrées par les nouvelles règles de calcul des pensions » ; le gouvernement a « décidé de ne pas suivre le Conseil d’État et de conserver cette disposition, prenant le risque d’une censure par le Conseil constitutionnel »[31].

Il convient de préciser que le secrétaire général du Gouvernement exerçait auparavant cette fonction auprès des « sages » (de 2007 à 2015) : auteur d’une étude récente sur la « production normative »[32], il a été mis en cause à la suite d’une enquête du journal Le Monde, d’abord sans citer son nom[33] ; selon les informations de Mediapart, « Marc Guillaume a évidemment informé Matignon à chaque étape du dossier Delevoye [dès la mi-2017]. Il l’a fait d’autant plus facilement que le directeur de cabinet d’Édouard Philippe, Benoît Ribadeau-Dumas, est l’un de ses proches (…). Dans l’institution dont ils sont issus [le Conseil d’État], Marc Guillaume et Benoît Ribadeau-Dumas sont même affublés d’un sobriquet moqueur : « la fine équipe ». (…) [L]e premier ministre (…) a été informé en temps réel, en septembre 2019, que [la double rémunération de Jean-Paul Delevoye] se poursuivait, en violation de la Constitution. Si Marc Guillaume a été complaisant, il n’a pas été le seul… »[34].

L’œil de de Willem (Libération 15 janv. 2020) ; « le 49.3 n’est pas fait pour museler les oppositions mais pour contraindre les majorités. J’ai appris ça ans de vieux manuels de droit » (« Le juriste de Matignon », cité par Le Canard enchaîné 15 janv. 2020, p. 2, avant ce commentaire : « Les manuels du vieux monde n’ont pas toujours tort… »).

Pour conclure, Édouard Philippe ayant promis que les femmes seraient « les grandes gagnantes » de la réforme, une « autre entourloupe » mérite d’être particulièrement soulignée ; elle l’a été par le collectif Nos retraites : « dans la présentation des cas faite par le gouvernement, (…) les personnes commencent [toutes] à travailler à 22 ans ». Dans la vraie vie, « une ATSEM commence plutôt à travailler vers 18 ans »[35]


[1] Signalé par Éric Fassin, lequel commentait : « Et voilà, contre « l’antiracisme politique », le Front national au cœur du pacte républicain » (« Le mot race – Le mot et la chose (2/2) », AOC 11 avr. 2019 ; v. aussi Lilian Thuram (entretien avec, par Louise Fessard et Michaël Hajdenberg), « Le Blanc est vu comme neutre », Mediapart 5 oct. 2019).

[2] Gary Dagorn, « Jean-Michel Blanquer ne peut pas poursuivre un syndicat pour diffamation », lemonde.fr 23 nov. 2017

[3] Aurélien Taché (entretien avec, par Olivier Pérou), « Julien Odoul récupère les mots de Jean-Michel Blanquer », Le Point.fr 14 oct. 2019 ; dans le même sens, Éric Fassin (entretien avec), « Ça n’est pas à l’État de dicter une religion ou une absence de religion », francetvinfo.fr le 15 (en réduisant toutefois « la laïcité » à « la liberté religieuse ») ; parmi les nombreuses réactions, v. encore cette tribune d’un collectif d’universitaires et de militantes, le 22

[4] Solenn de Royer, « Jean-Michel Blanquer, le début d’une ambition », Le Monde 11 déc. 2019, pp. 22-23, annoncé à la Une : « Il a été très meurtri par cette séquence [dans le même sens, v. « Les sanglots longs de Blanquer », Le Canard enchaîné 30 oct. 2019, p. 2], ulcéré d’être caricaturé comme il l’a été », raconte la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye. (…) « Rappelle-moi tout de suite », ordonne le ministre par message privé sur Twitter. M. Taché, qui n’aime pas ce « ton professoral », fait le mort. Ulcéré, M. Blanquer exige du bureau exécutif de LRM qu’il saisisse la commission des conflits, pour sanctionner l’effronté. Le patron du mouvement, Stanislas Guerini, décide de réunir les deux hommes dans son bureau pour une « médiation » » ; v. la suite dans le texte – ci-dessus – et, à propos de ces « sanglots » et « ulcères » du ministre, Pierre Merle (« Jean-Michel Blanquer est-il victime de « bobards » ? ») et, surtout, Achille Mbembe, « Pourquoi ont-ils tous peur du postcolonial ? », AOC (6 mai 2019 et) 21 janv. 2020 : « En ces temps où les plus forts se prennent pour des victimes, des gens qui ont tous pignon sur la place publique (…) se mettent soudain à pleurnicher » ; et de poursuivre, avant de viser notamment ces « catéchistes de la laïcité défenseurs d’un modèle républicain policier et autoritaire tout content d’éborgner à la pelle » : « Ravis de se retrouver entre soi, n’ont-ils pas pris l’habitude, des années durant, de pérorer sans interruption ni réplique à longueur de saisons ? ».

[5] V. mon premier billet du 29 décembre dernier, avant l’appel de note n° 37, ainsi que cet article de Jérôme Canard, « À l’école, des classes vertes option vaches maigres », Le Canard enchaîné 31 déc. 2019, p. 4, signalant que la section bretonne de la fédération des Pupilles de l’enseignement public (PEP) « vient de perdre l’appel d’offres triennal de la Ville de Paris » ; pour la Direction des affaires scolaires (Dasco), c’est pour « pallier certaines difficultés de recrutement » et « favoriser l’emploi local » que le prestataire doit désormais recruter lui-même le personnel d’animation. Au-delà de cet exemple parisien, le journaliste en mentionne un autre corrézien – en citant un conseiller pédagogique regrettant que « de plus en plus de collectivités locales se désengagent » – et conclut que les élèves « devront s’estimer heureux » de pouvoir « visiter le département d’à côté ».

[6] « Simon Bolivar, encore et toujours », franceculture.fr 16 nov. 2019

[7] Mattea Battaglia et Camille Stromboni, « Rodrigo Arenas, un militant « musclé » à la tête de la FCPE », Le Monde 13 nov. 2019, p. 10

[8] Olivier Loubes, « Jean-Michel Blanquer agit à contresens de Jean Zay », Le Monde (site web) 4 sept. 2019. Plusieurs billets de ce site renvoient à celui de l’Association LYOnnaise de Droit Administratif, sur lequel est accessible ma note, ainsi que celle d’Emma Burtey et Laura Barrière, étudiantes en Master 2 à Lyon 3 ; élève-avocat en stage à la DAJ de cette ville, Kilian Laurent rappelle la lettre du 2 mars 2011 signée par l’« alors ministre de l’éducation nationale ».

Tout roule pour l’intéressé depuis, en tout cas d’un point de vue salarial : v. Christophe Nobili, « L’ex-ministre Luc Chatel fait un casse au salon de l’auto », Le Canard enchaîné 15 janv. 2020, p. 4, terminant en citant le « neveu de [s]on cousin », Benoît Désveaux, directeur général d’un « géant français de la com’, Hopscotch » : « Nous prônons la fête, le fun, la réappropriation de la ville dans la liberté d’aller et de venir » ; la boucle est bouclée, il y a là l’un des droits des femmes en cause, en tout cas pour les sorties scolaires (visées en 2011, et depuis ; citant Emmanuel Macron, face à Edwy Plenel et Jean-Jacques Bourdin le 15 avril 2018, v. Nicolas Charrol, Rev.jurisp. ALYODA 2018, n° 2).

Les notes précitées reviennent sur un texte de 2013 qui traduisait une réaction – sur saisine du DDD – qui n’était à mon goût pas assez énergique ; je l’avais dit à Christian Vigouroux, qui était alors président de la Section du rapport et des études du Conseil d’État, à l’occasion une conférence organisée par l’École Doctorale Sciences Juridiques de Grenoble, le 12 mars 2014 ; j’aurais préféré m’être trompé dans mon pronostic, craignant de nouvelles difficultés pour ces accompagnatrices… Pour une critique récente de l’étude qu’il venait présenter – celle annuelle 2013, à ne pas confondre avec la précédente –, v. Emmanuel Decaux, « Soft law et bonne foi. Quelques considérations sur le droit international des droits de l’homme », in Penser le droit à partir de l’individu. Mélanges en l’honneur d’Élisabeth Zoller, Dalloz, 2018, p. 65, spéc. pp. 66 et 77 : « Le Conseil d’État dans son étude récente sur Le droit souple s’en tient quant à lui à une approche manichéenne qui sauve la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, car il s’agit de « juges » supra-nationaux, mais qui cadre mal avec les spécificités du droit international public, en rejetant dans les ténèbres extérieures, tout ce qui relève du « développement progressif du droit international », pour reprendre la formule de l’article 13 § 1 a) de la Charte des Nations unies qi est la matrice de la codification » (et de renvoyer au Colloque d’Aix-en-Provence de la SFDI, La codification du droit international, Pedone, 1999) ; le conseiller du Gouvernement « met dans la même voiture-balai les résolutions des organes intergouvernementaux et les activités des organes de traités en matière de droits de l’homme (treaty bodies). Sans revenir ici sur la notion même de quasi-contentieux, il faut souligner l’angle aveugle que constitue cette impasse intellectuelle, aussi bien sur le plan théorique qu’en matière procédurale » (et de renvoyer cette fois à sa contribution aux Mélanges Genevois, Dalloz, 2009).

Affiche empruntée à Jean-François Chalot, agoravox.fr 23 nov. 2015

[9] Éric Fassin, « Laïcité versus sécularisation : de la liberté religieuse à l’islamophobie politique », 28 oct. 2019 : « pendant toute sa carrière, Brigitte Macron a enseigné dans des établissements où l’on parle religion et où les signes religieux de l’institution sont pour le moins ostensibles ». Le sociologue de rappeler le slogan de gauche, « à école publique, fonds publics ; à école privée, fonds privés » (v. ci-contre et les pp. 72 et 580 de ma thèse, respectivement à partir de la loi Guizot, sous la monarchie de Juillet, et du programme du CNAL, sous la quatrième République ; entretemps, v. par ex. en note de bas de page 732, n° 655, concernant René Cassin).

[10] À la note n° 14 de mon article, je renvoie à un texte de Jean-Louis Vasseur, qui relève déjà de l’histoire du droit : « Stopper le financement public d’une école maternelle privée : un droit reconnu aux communes, mais sous conditions », Le Courrier des maires juin-juill. 2018, n° 324-325, p. 34 ; aux notes n° 9 et 35, à deux autres articles de l’avocat : « Le financement par les communes des écoles privées sous contrat » et « Les cantines scolaires dans les écoles primaires », Zepros Territorial oct. 2018, n° 6, p. 40 et sept. 2019, n° 12, p. 49 ; également en ligne, Mélanie Drégoir et Aline Landreau, « La dépense d’éducation des collectivités territoriales : 36,2 milliards d’euros en 2017 », note d’information de la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), mars 2019, n° 19.07, 4 p. ; « 157 milliards d’euros consacrés à l’éducation en 2018 : 6,7 % du PIB », note d’information de la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), oct. 2019, n° 19.38, 4 p. ; Raphaël Menelon, « Les coûts locaux de l’éducation, enseignement et périscolaire », publication de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL), Cap sur nov. 2019, n° 10, 17 p.

[11] V. mon billet du 30 août 2018, « Hayek, Friedman et le « chèque éducation » » ; sans s’arrêter à la préférence accordée à « la liberté même » sur les droits – en tout cas celui à l’éducation –, v. récemment Vincent Valentin, « Et si le marché assurait la réalisation des droits de solidarité ? », RDLF 2020 chron. n° 02

[12] Jean Baubérot, « Sociologie des religions et des laïcités », 18 janv. 2020

[13] Philippe Raimbault, « La refondation de l’école de la République au prisme de la loi Peillon », JCP A 2013, 2307, § 12

[14] JO Sénat 12 avr. 2018, p. 1767 (Réponse du Ministère de l’éducation nationale à la question écrite n° 01964 de M. Jean Louis Masson, sénateur de la Moselle non-inscrit) ; v. « Dupont-Aignan sans drapeau ni devise », Le Canard enchaîné 7 nov. 2018, p. 5 : « les frontons des 16 écoles [primaires dépendant de la municipalité de Yerres, dont il fut vingt-deux ans le maire] ne s’ornent que du drapeau tricolore » ; « le maire en titre, Olivier Clodong, traîne les pieds » (préfet de l’Essonne alors saisi, selon l’hebdomadaire).

[15] Pendant les travaux préparatoires, Violaine Morin, « Le drapeau obligatoire en classe suscite l’émoi chez les enseignants », Le Monde 14 févr. 2019, p. 12 ; Anne Angles et Elsa Bouteville, « Amendement « Drapeau » : les nouveaux alchimistes de l’éducation », AOC le 20

[16] Marc Debene, « L’École sous le pavillon de la confiance », AJDA 2019, pp. 2300 et s.

[17] Datée du 6 septembre 2013, elle a été publiée au BO du 12, n° 33 ; intitulée « Charte de la laïcité à l’École. Valeurs et symboles de la République », elle s’adresse « aux directrices et directeurs d’établissement d’enseignement privé sous contrat », mais seulement pour les rappeler au respect de la loi précitée. À propos de cette simple circulaire, je renvoie à ma thèse page 488 ; pour un écho récent à la contradiction pointée (fin 2017), Mattea Battaglia, « Les élèves français adhèrent massivement au principe de laïcité », Le Monde 30 janv. 2020, p. 14, rendant compte de l’« enquête sur la « laïcité et la religion au sein de l’école et dans la société » rendue publique, mercredi 29 janvier, par le Centre national d’étude des systèmes scolaires (Cnesco) » : « plus des trois quarts des sondés (76 % des élèves de 3e et 80 % des terminales) se déclarent attachés à l’expression de leurs croyances (ou de leur absence de croyances) en classe, tant qu’ils respectent l’opinion d’autrui » ; quelques lignes plus loin, il est cependant affirmé que « les élèves sondés, et plus encore leurs enseignants, se disent majoritairement attachés au fait que la religion ne soit pas visible dans l’espace scolaire dans la lignée de la loi de 2004 sur les signes religieux à l’école publique »…

[18] Christophe Pacohil, qui fût par ailleurs « chef de cabinet de François Baroin alors que celui-ci était ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie » : v. touteduc.fr 23 mai 2017 (à propos de ce dernier, v. l’un de mes prochains billets).

[19] Le Monde.fr avec AFP 26 mai 2017

[20] Bruno Bourg-Broc, à propos duquel v. fin 2017 mes pp. 1094 à 1096

[21] Évoquant la procédure prévue par cette loi Carle, v. les conclusions de Vincent Daumas sur CE, 12 mai 2017, Commune de Villeurbanne, n° 391730 ; JCP A 2017, 2147. En complément des notes n° 8 et 19 de mon article – qui se limite aux communes – et à propos de ce « régime (…) à deux vitesses » que je n’ai pu qu’évoquer, v. Laetitia Janicot, « Le principe de compensation financière des transferts de compétences entre l’État et les collectivités territoriales. Le rôle essentiel des juges interprètes de la Constitution », in Jean-Marie Pontier et Didier Guignard (dir.), Constitution et collectivités territoriales. Réflexions sur le 60e anniversaire de la Constitution, LexisNexis, 2019, p. 185, spéc. pp. 192-193 ; l’« évolution des compétences des collectivités territoriales » est évoquée à l’article 55 de la loi Blanquer, habilitant le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnance concernant les « conseils de l’éducation nationale » ; l’article 25 est venu modifier l’article L. 917-1 du Code de l’éducation, relatif aux « accompagnants des élèves en situation de handicap » (AESH), en prévoyant à l’alinéa 4 que l’« autorité compétente de l’État en matière d’éducation et les collectivités territoriales peuvent s’associer par convention en vue d[’un] recrutement commun » (au-delà de la mise à disposition de ces « agents contractuels de l’État », selon l’avant-dernier alinéa. V. le document d’information mis en ligne sur le site du ministère le 27 août 2019 – version actualisée en octobre, consultée début décembre). « Laisser la place aux initiatives locales », telle était la dernière des « propositions et actions concrètes issues du congrès 2018 à Saint-Étienne de l’ANDEV (Manifeste pour l’éducation inclusive, non daté, 6 p.). À propos des AESH, je renvoie à la note n° 11 de l’un de mes billets du 29 décembre 2019, actualisé début janvier.

[22] v. Gilles Lalloz et Pierre Peyret, « L’Auvergnat Michel Charasse promu officier de la Légion d’honneur », lamontagne.fr 14 juill. 2019 ; Jean-François Cirelli a été élevé à ce grade par un décret du 31 décembre – immédiatement remarqué (Laure Bretton, « BlackRock : la Légion d’honneur qui passe mal », liberation.fr 1er janv. 2020) – cependant qu’était nommé « chevalier » un certain Cédric Siré (v. « Le pur plaisir d’être un people », Le Canard enchaîné 15 janv. 2020, p. 5 : « cofondateur du site Purepeople, avec l’aide de Mimi Marchand, ancienne associée et grande copine du couple Macron… Ce site, qui diffuse souvent des clichés volés de l’agence de Mimi, Bestimage, est pourtant régulièrement condamné pour violation de la vie privée » ; « également le cofondateur, en 2007, du groupe de médias en ligne Webedia qu’il continue d’ailleurs de diriger, même » s’il « appartient, depuis 2013, à Marc Ladreit de Lacharrière, qui, lui, est toujours grand-croix de la Légion d’honneur, malgré sa condamnation pour l’emploi fictif de Penelope Fillon. L’honneur est sauf ! »). À propos de ladite légion, v. encore infra, à l’antépénultième note (n° 33).

[23] Michel Charasse a été nommé en décembre 2017, « ce qui l’a conduit à se déporter dans une QPC qui impliquait ledit domaine, mais n’en demeure pas moins une violation des incompatibilités » (Thomas Hochmann, « Et si le Conseil constitutionnel était une « Cour constitutionnelle de référence » ? », RDLF 2019, chron. n° 32, renvoyant à CC, 2 févr. 2018, Association Wikimédia France et autre [Droit à l’image des domaines nationaux], n° 2017-687 QPC).

[24] v. « Les réseaux très « vieux monde » d’Emmanuel Macron », lemonde.fr 27 avr. 2019 ; Marc Endeweld était notamment le 15 décembre sur Sud Radio (écouter autour de la 5ème min.). Des extraits du livre recensé par Ariane Chemin sont disponibles en ligne ; il y est aussi relaté une rencontre en janvier 2018, avec « le ministre Jacques Mézard – détesté par Charasse »… à qui il a succédé au Conseil constitutionnel le 12 mars 2019 (nominations du président de la République).

[25] Michel Charasse (entretien avec, par Claude Lesme), « Je serai toujours de tous les combats de la République », lamontagne.fr 17 mars 2019 ; à propos de la décision à laquelle il fait allusion (CC, 21 févr. 2013, Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité [Traitement des pasteurs des églises consistoriales dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle], n° 2012-297 QPC), v. ma note de bas de page 237, n° 1416 et, surtout, mes pp. 258-259, 354 à 358 et 1122

Photo Sandrine Thomas (art. préc., 2020).

[26] Nicole Belloubet n’était pas encore en fonction en février 2013 ; elle a remplacé Jacqueline de Guillenchmidt le 14 mars, jusqu’à sa nomination au Gouvernement le 22 juin 2017 (le 25 octobre, le Président du Sénat nommait au Conseil constitutionnel la magistrate Dominique Lottin), immédiatement saluée par Michel Charasse, « l’un des membres du Conseil constitutionnel auprès de qui elle a siégé pendant quatre ans » (Capucine Coquand, magazine-decideurs.com 26 juin 2017). La ministre a cette semaine dû revenir sur les propos tenus sur Europe 1, assimilant « l’insulte à la religion » à « une atteinte à la liberté de conscience » (v. Mattea Battaglia et Charlotte Herzog, « L’« affaire Mila » repose la question du droit au blasphème en France », Le Monde 31 janv. 2020, p. 14) ; si le Conseil avait – à partir de 2013 – songé à affirmer le droit à l’éducation, peut-être l’ancienne professeure de droit public aurait-elle été mieux inspirée : elle aurait pu rappeler qu’il appartient à l’État de protéger ce droit de l’adolescente iséroise, victime de cyber-harcèlement lesbophobe et de menaces de mort (v. ma thèse, pp. 792, 1072 et 1179).

[27] Cité respectivement par Cédric Pietralunga puis Louise Couvelaire et Jean-Baptiste Jacquin, Le Monde le 25, p. 4, et le 27, p. 10, « au sujet de l’affaire Sarah Halimi » – pendante devant la Cour de cassation, après un arrêt de la cour d’appel de Paris le 19 décembre 2019, rendu suite à une audience publique devant la chambre de l’instruction –, avant de citer l’avocat de Kobili Traoré, puis des juges syndiquées, stupéfaites de voir le président de ladite République s’asseoir ainsi sur « l’indépendance de l’autorité judiciaire » (dont il est, selon l’article 64 de la Constitution, le « garant »). Plus loin, avant le rappel du premier coup de pression dans la même affaire – « en juillet 2017, lors de l’hommage aux victimes de la rafle du Vél d’Hiv » –, les journalistes citent celui de Katia Dubreuil, la présidente du Syndicat de la magistrature : « les prisons sont aujourd’hui encombrées de nombreuses personnes dont la place serait plutôt en soins psychiatriques et qui auraient dû être jugées irresponsables, même si c’est forcément douloureux pour les parties civiles ». Dans le même sens, Loeiz Lemoine, « Affaire Halimi : il ne faut pas céder au « besoin de procès » », actu-juridique.fr 29 janv. 2020 ; le lendemain, la Cour européenne des droits de l’Homme est venue une nouvelle fois « sanctionner la schizophrénie de la politique carcérale française », selon un éditorial publié ce jour (Le Monde.fr le 31 ; Julien Mucchielli, « CEDH : la France condamnée pour ses prisons indignes », dalloz-actualite.fr).

[28] Yann Diraison, cité par Mattea Battaglia, « École obligatoire à 3 ans : les mairies face au surcoût », Le Monde 11 oct. 2019, p. 11 ; comparer Jean-Michel Blanquer (entretien avec, par Mattea Battaglia, Nathalie Brafman et Violaine Morin), « Aller à la racine des inégalités sociales », Le Monde 1er sept. 2018, p. 8 : « La fuite qui a pu exister vers le privé a souvent été liée à des réformes aux conséquences mal évaluées comme celle des rythmes scolaires ou celle du collège »… V. Jean-Paul Delahaye, « Comment l’élitisme social est maquillé en élitisme républicain », Observatoire des inégalités 11 mars 2019 ; Mattea Battaglia et Camille Stromboni, « Les stratégies d’évitement de la carte scolaire », Le Monde le 31 déc., p. 7) ; l’adjoint au SGEC a par ailleurs affirmé que « Renasup, le réseau des établissements de l’enseignement catholique qui proposent des formations du supérieur (essentiellement des BTS et des classes préparatoires), a négocié avec le ministère de l’enseignement supérieur une convention portant sur sa participation à Parcoursup » ; elle « accorde à l’enseignement privé des possibilités de sélection des candidats un peu plus larges » (cité par Denis Peiron, « L’enseignement catholique veut « jouer la carte de l’ouverture sociale » », La Croix 16 déc. 2019, p. 8).

[29] V. la page 282 du Recueil des actes administratifs de la ville de Marseille, déc. 2019 ; contestant cette justification, v. le recours formé et signalé par Gilles Rof, lequel précise qu’une partie des « contribuables à l’origine de cette procédure » a participé à l’annulation d’une autre délibération – celle relative au « PPP des écoles » (« L’état des écoles de Marseille plombe la fin de l’ère Gaudin », Le Monde 29 janv. 2020, p. 11 ; v. ici en note n° 28). V. aussi François De Monès et Annabelle Perrin, « Les écoles à Béziers, parent pauvre de la politique de Robert Ménard », Mediapart (proposé par Le D’Oc) 13 janv. 2020, signalant l’augmentation décidée pour cette année, lors du conseil municipal du 16 décembre 2019.

[30] Bertrand Bissuel, « Retraites : l’exécutif révèle son étude d’impact », Le Monde 27 janv. 2020, p. 6 (annoncé à la Une) : « des inconnues subsistent. Le Conseil d’État s’en est d’ailleurs plaint ».

[31] Camille Stromboni, « Inquiétude des enseignants autour de la revalorisation de leur salaire », Le Monde ce 31, p. 11 ; v. l’éditorial « Enseignants : l’indispensable revalorisation », Le Monde.fr 28 déc. 2019. Fin 2018, un chercheur au centre d’histoire sociale de Paris et à la FSU – une des fédérations alors mobilisées –, concluait que la « stratégie de saturation de l’espace médiatique [du ministre] peut être contre-productive si les enseignants ne mesurent pas de changement, au quotidien » (Laurent Frajerman (entretien avec, par Mattea Battaglia), « M. Blanquer est en train d’associer l’image d’une réforme à l’austérité budgétaire », lemonde.fr 12 nov. 2018) ; il semble qu’il ait fallu attendre cette séquence pour que cela se vérifie nettement.

« Des danseuses de l’opéra de Paris dansent sur le parvis du palais Garnier contre la réforme des retraites, le 24 décembre 2019.
afp.com/STEPHANE DE SAKUTIN » (lexpress.fr le 29)

[32] Marc Guillaume, « La production normative, entre constance et évolutions », in La scène juridique : harmonies en mouvement. Mélanges en l’honneur de Bernard Stirn, Dalloz, 2019, p. 301, précisant que cet « article n’exprime que le point de vue de son auteur » ; dans le même ouvrage, Patrick Frydman, « Bernard Stirn, président de la Caisse de retraites de l’Opéra », p. 231, avec une conclusion, page 235, évoquant un « contexte fort délicat »… V. encore Jean-Philippe Thiellay, « Le président des étoiles », p. 533, spéc. pp. 541-542

[33] v. Daniel Schneidermann, « Dits et non dits du supra-monde », ASI 17 déc. 2019 ; comparer Richard Schittly, « Financement de l’élection de Macron : l’enquête classée sans suite à Lyon », Le Monde 22 janv. 2020, p. 9 : il est alors précisé que c’est ce qu’« a indiqué le procureur de la République Nicolas Jacquet, dans sa décision de classement de sept pages, que Le Monde a pu consulter ». Le nom est donc cité, cette fois, mais il manque une autre information : v. Antoine Sillières, « Qui est Nicolas Jacquet, nouveau procureur de la République de Lyon ? », lyoncapitale.fr 24 janv. 2019 ; « Ces Lyonnais distingués par la promotion du 1er janvier 2020 de la Légion d’honneur », lyonmag.com 1er janv. 2020 (à propos de ladite légion, v. aussi supra, à la note n° 22) : ignorance et/ou renvoi d’ascenseur ? Dans le recueil de textes de Perry Anderson (traduit de l’anglais par Cécile Arnaud) Le Nouveau Vieux Monde. Sur le destin d’un auxiliaire de l’ordre américain, des italiques sont employées à propos de cette dernière expression (« renvoi d’ascenseur ») : utilisant le français dans le texte original, l’historien britannique s’interrogeait, en 2004 : « existe-t-il un équivalent aussi parlant dans une autre langue ? » (Agone, 2011, p. 194). Pour rester sur le rapport aux cultes, l’un des cinq arrêts du 19 juillet 2011 – évoqués dans mon billet du 9 décembre 2018 – ne concernait-il pas un ascenseur, celui réalisé pour mener à la basilique de Fourvière ? La cérémonie qui s’y déroule le 8 septembre « fournit la meilleure illustration (…) des relations particulières entre l’église et le pouvoir politique lyonnais » (lexpress.fr 13 sept. 2015 ; récemment, Richard Schittly, « À Lyon, la lutte souterraine entre Collomb et Kimelfeld », Le Monde 12 sept. 2019, p. 9 : ayant retrouvé son siège en novembre 2018, le « maire de Lyon apporte une médaille symbolique à l’évêque Michel Dubost, selon la tradition des Échevins. Depuis le Moyen Âge, pour conjurer les mauvais sorts, les élus portent leur soutien à l’Église, qui, en retour, bénit la ville. (…) Sur l’esplanade de Fourvière, le maire est applaudi à deux reprises, lorsqu’il fait savoir dans son discours qu’il a appelé Philippe Barbarin, avant la cérémonie ») ; à partir des protestations du collectif laïque Auvergne Rhône-Alpes, v. Florent Deligia, « Lyon : une manifestation contre le vœu des échevins », lyoncapitale.fr 20 août 2018 ; la dernière fois, c’était « … sans le cardinal Barbarin » (lyonmag.com 8 sept. 2019).

Ajout pour actualiser les indications qui accompagnent les première et dernière illustrations de mon billet du 9 septembre, Pascale Robert-Diard, « Le cardinal Barbarin relaxé en appel », Le Monde 1er févr., p. 13

L’arrêt précité « témoignait d’une interprétation libérale de la loi de séparation » (Maëlle Comte, « Le financement public de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Feu l’intérêt local », AJDA 2019, p. 1207, rappelant que cette dernière « est avant tout un lieu spirituel affecté à l’exercice du culte catholique ») ; le 4 mai 2012, également sur un pourvoi de la Fédération de la Libre pensée et d’action sociale du Rhône (n° 336462), « le Conseil d’État a consacré dans les termes les plus nets l’abandon de la jurisprudence [CE Sect., 9 oct. 1992, Cne de Saint-Louis [c. Association « Siva Soupramanien de Saint-Louis » de la Réunion], n° 94445], abandon qui n’était qu’implicite (…) [le] 19 juillet 2011 » (Jean-François Amédro ; JCP A 2012, 2233). Dans ses conclusions sur cet arrêt, Édouard Geffray minimisait l’évolution (RFDA 2011 p. 967 : « vous préciserez donc votre jurisprudence de section ») ; « depuis 2017 à la direction générale des ressources humaines de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur », ce conseiller d’État a été promu directeur général de l’enseignement scolaire durant l’été 2019 (Mattea Battaglia et Violaine Morin, citée dans mon avant-dernier billet, en note n° 50, à propos de l’arrêt attendu évoqué en introduction de celui-ci).

[34] Laurent Mauduit et Martine Orange, « La HATVP saisit la justice dans l’affaire Delevoye », Mediapart 18 déc. 2019

[35] Tony Le Pennec, « Retraites : le gouvernement trafique (encore) ses cas-types », ASI 24 janv. 2020, dans le cadre de développements intitulées : « Le gouvernement ignore son propre projet de loi » ; à propos de ces « agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles », qui sont « presque exclusivement des femmes » (Violaine Morin, « Dans les écoles, des Atsem en mal de reconnaissance », Le Monde.fr 20 avr. 2018), v. la fin de mon article, AJCT 2020, pp. 31-32

ARS et MDPH, actrices de l’effectivité ?

Couverture de la brochure citée (collectifhopitaldie.org 30 oct. 2017 ; v. en note la référence précise)

Fondateur et ancien président du collectif de défense de l’hôpital de Die, Jean-Pierre Rambaud est mort le 6 avril dernier. Dix ans plus tôt, Le Dauphiné Libéré le citait envisageant « le cas où il serait nécessaire d’aller au tribunal administratif » ; quelques mois plus tard, le 28 novembre 2009 lors de sa 13ème rencontre, la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité s’intéressait à l’utilité « notamment des actions juridiques (…)[,] sans toutefois perdre de vue leurs limites »[1].

Concernant celle de Die, jusqu’à la fin de l’année 2017, aucune action contentieuse n’avait été intentée. La première – un référé-suspension – s’est soldée par une irrecevabilité, accompagnée d’une condamnation à verser 1 000 euros à l’Agence Régionale de Santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes ; près de deux ans après la fermeture de la maternité, le collectif a reçu une « mise en demeure du ministère de la Santé de régler [c]es frais de procès » (collectifhopitaldie.org 13 nov. 2019).

Dans mon commentaire de l’ordonnance rendue le 28 décembre 2017 (v. mes travaux), je pointais une restriction du droit à la santé génésique[2] ; dans l’ouvrage auquel je renvoie dans mon précédent billet, Virginie Donier traite de « [l]’effectivité du droit d’accès au juge »[3] (lequel « doit être entendu stricto sensu comme la possibilité de saisir une juridiction »[4]) : parce qu’il a été mis en cause à Grenoble[5] – le tribunal administratif (TA) devrait bientôt se prononcer au fond –, cela aurait pu conduire l’État à ne pas réclamer cette somme, tout comme pourrait être désormais justifiée – en droit(s) – une participation financière des collectivités publiques du diois.

Photo du TA de Nîmes (empruntée à @MalouChou)

Rédigée pour l’essentiel en janvier, relue et amendée fin mai, ma contribution ne pouvait intégrer deux décisions relatives à l’(in)effectivité du droit à l’éducation des personnes en situation de handicap[6]. La première a été rendue par le TA de Nîmes le 21 juin ; il est possible de la consulter à partir de la version numérique de L’Actualité Juridique. Droit Administratif, revue dans laquelle ont été publiées à la fin de l’année les conclusions du rapporteur public (AJDA 2019, pp. 2258 et s., concl. Vincent L’Hôte sur ce jugement Mme B., n° 1701563).

Le considérant 6 apparaît novateur : s’il est estimé que « les conclusions de Mme B. tendant à rechercher la responsabilité de l’État à raison de l’absence de scolarisation effective et de prise en charge adaptée d’Ilyan doivent être analysées au regard des seules dispositions de l’article L. 246-1 du code de l’action sociale et des familles » (CASF), c’est après avoir reproduit à la suite de celles-ci l’article L. 111-1 du code de l’éducation (cons. 4) et avant d’envisager l’obligation de « prise en charge pluridisciplinaire de toute personne atteinte du handicap résultant du syndrome autistique et des troubles qui lui sont apparentés [un « droit à », selon le cons. 5], ce y compris au regard de [son] droit à l’éducation[7] » ; quant à lui directement prévu par la loi française, ce droit à l’est aussi par des conventions internationales qui auraient pu être mentionnées dans les visas.

Il est précisé auparavant : « Par lettres du 7 février 2017 reçues les 13 et 14, Mme B. a demandé l’indemnisation des préjudices résultant de l’absence de scolarisation effective et de prise en charge adaptée d’Ilyan au ministre de l’éducation nationale et au ministre des affaires sociales et de la santé qui a transmis sa demande à l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France » (cons. 1, vers la fin).

Photo de l’ARS d’Île-de-France (issue du site france-handicap-info.com)

Dans les conclusions, il est noté que ces compétences de l’État « sont exercées par le directeur général [de cette agence régionale]. C’est donc en principe à ce dernier que la demande aurait dû être présentée. Cependant, l’article L. 114-2 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) impose à l’autorité administrative saisie à tort de transmettre la demande à l’autorité administrative compétente ». Après un rappel de la jurisprudence pertinente, le rapporteur public proposait de considérer que « les demandes adressées par la requérante aux ministres sont réputées avoir été transmises au directeur général de l’ARS » (en l’occurrence, ce n’était effectivement pas une femme).

Toutefois, et je reprends ici des extraits du jugement, « en application du b) du 2° de l’article L. 1431-2 du code de la santé publique, les compétences de l’agence régionale de santé se limitent à autoriser la création des instituts médico-éducatifs, à contrôler leur fonctionnement et à leur allouer des ressources, sans être habilitée à imposer la prise en charge d’une personne. [S]i l’absence de prise en charge spécifiquement adaptée aux troubles d’un enfant atteint d’un syndrome autistique, conformément à l’orientation préconisée par la [commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH)], est de nature à révéler une carence de l’État dans la mise en œuvre dispositions de l’article L. 246-1 [du CASF, il n’en va pas ainsi lorsque cette absence ne résulte pas d’un manque de places ; il convient alors de rechercher la responsabilité non de l’État mais] de l’établissement ayant refusé d’accueillir l’enfant » (cons. 8).

Devant être présentée devant les juridictions compétentes, cette action ne permettra pas plus que la première de rendre le droit à l’éducation des personnes concernées immédiatement effectif ; comme le remarquait Vincent L’Hôte dans ses conclusions, « il convient de garder à l’esprit que l’action indemnitaire reste pour elles ou leur famille un pis-aller »[8]. À cette fin – l’effectivité de leurs droits –, il importe non seulement que les « obligations de l’État » soient satisfaites, mais aussi que d’autres personnes, publiques et/ou privées, respectent les leurs : « département, MDPH, structures d’accueil… ».

MDPH de la Vienne (image issue du site handi-cv.com)

Également signalée par l’AJDA, la seconde décision confirme que les décisions prises par la CDAPH – auxquelles il est renvoyé à l’article L. 241-9 du CASF – « sont susceptibles de recours devant l’autorité judiciaire, laquelle est également compétente pour connaître d’éventuelles actions en responsabilité engagées à l’encontre de la maison départementale des personnes handicapées, groupement d’intérêt public, à raison de telles décisions » (cons. 5 ; je souligne)[9].

Après une substitution de motif (cons. 6), le Conseil d’État a décidé le 8 novembre qu’« en jugeant qu’aucune carence ne pouvait, en l’espèce, être reprochée aux services de l’État, lesquels, ne tenaient d’aucun texte compétence pour prendre une décision d’orientation vers un établissement ou service donné à la place de la commission [de la Vienne] ou remettre en cause l’orientation décidée par celle-ci, ni pour imposer à l’Institut régional de jeunes sourds de Poitiers, après l’échec de la médiation entre les parents et la direction de l’établissement, d’accueillir Camille A., la cour administrative d’appel de Bordeaux n’a pas commis d’erreur de droit ni inexactement qualifié les faits de l’espèce » (cons. 7).

Cet arrêt avait été rendu le 16 mai 2017 et je le cite dans ma thèse – en note de bas de page 1090, à l’occasion de développements relatifs à la jurisprudence judiciaire (ayant peut-être fait l’objet d’un nouveau pourvoi devant la Cour de cassation, l’arrêt de renvoi alors évoqué a été rendu ; v. « Poitiers : il fallait réintégrer Camille », lanouvellerepublique.fr 27 août 2018). En attendant d’avoir l’opportunité d’y revenir, ainsi que de consacrer un billet à la situation des personnes sourdes et/ou aveugles[10], je renvoie pour un autre cas d’incompétence de la juridiction administrative à celui que j’ai publié le 17 mai 2018.

Selon une réponse du Secrétariat d’État auprès du Premier ministre, « chargé des personnes handicapées », publiée au JO Sénat le 19 septembre 2019, des propositions pour améliorer le fonctionnement des MDPH « ont fait l’objet d’une première restitution » peu de temps avant l’adoption de la loi Blanquer. Dans son commentaire de ce texte n° 2019-791 du 26 juillet, un ancien recteur évoque le chapitre IV : Le renforcement de l’école inclusive, « peut-être abusivement [présentée] comme un service public »[11] (ici, ou ). Comme le ministre, un autre ancien professeur de droit public est venu récemment illustrer le refus de renouveler l’approche de cette notion à partir du droit à l’éducation.

(boutique-dalloz.fr juin 2018, cité infra).

Désormais recteur, Benoit Delaunay a rédigé ce texte avant de rejoindre l’académie de Toulouse (v. gazette-ariegeoise.fr 24 juill. 2019) : « en se remémorant un échange doctrinal qui s’était tenu lors de [sa] soutenance de thèse », il prétend revenir sur les « rapports qu’entretiennent, en droit administratif, les droits et les obligations »[12]. Au conditionnel, il écrit notamment : « À traits sans doute trop appuyés, les « droits à » pourraient désigner les obligations de moyens cependant que les « droits de » pourraient renvoyer aux obligations de résultat »[13]. Remontant en généralité, il introduit la notion d’effectivité, en affirmant qu’elle n’est « pas des plus limpides mais celle d’obligation n’est pas, ici, des plus utiles » ; celle extracontractuelle lui apparaît « peu opératoire en droit public pour conclure ce qu’on pouvait découvrir plus directement en recourant à des notions classiques du droit administratif comme la légalité ou les lois du service »[14].

Dans l’ouvrage auquel j’ai contribué[15], Gilles Pellissier s’intéresse à l’égalité, qui se décline en l’une de ces « lois » (de Rolland) ; « elle influe sur la répartition des droits sans être, par elle-même, porteuse d’aucun droit »[16]. Christine Pauti traite de la « participation partielle et indirecte du juge administratif à l’effectivité du droit à la culture par le biais du service public »[17]. Christophe Pierucci adopte quant à lui une autre démarche : évoquant des solutions « concern[a]nt le droit à l’éducation »[18], il cite un jugement Kepeklian rendu en 2003.

Fin 2017, je notais que ce dernier ouvre une série de réitérations d’un arrêt Giraud – en 1988, soit l’année précédant l’affirmation par la loi Jospin de ce droit à – et, surtout, que les juges administratifs ne se réfèrent alors qu’à une « obligation légale », bien que cette jurisprudence soit souvent citée comme illustrant les principes de continuité et d’égalité du/devant le service public de l’enseignement (v. ma thèse, pp. 176 à 183, spéc. 179 et 181 – en note de bas de page n° 1062 – pour le jugement cité). Au moins dans sa formulation, elle a depuis évolué (pp. 1196, 1199 et s., spéc. 1200), sans que le « droit à l’éducation » soit toujours affirmé là où il pourrait l’être.

Si « le droit administratif ne saurait se réduire (…) au seul contentieux administratif », c’est à partir de lui que Jean-Claude Ricci et Frédéric Lombard ont proposé en 2018 une « reconstruction d’une partie » de ce droit « sur la base » d’une « notion unique de l’obligation », commune avec le droit civil[19]. Incontestablement stimulant[20], l’ouvrage reste frustrant pour qui voudrait envisager les choses – au-delà du champ délimité par le sous-titre – du point de vue des droits des personnes (physiques) par rapport à l’administration. Celles morales – publiques ou privées – apparaissent privilégiées par la volonté des auteurs de s’en tenir à « l’obligation au sens technique du mot, c’est-à-dire [à] la capacité à s’engager ». Cela revient nécessairement à entendre strictement les droits (publics) subjectifs (v. mes pp. 49 et 1143), y compris s’agissant de ce qu’ils appellent la « responsabilité civile de l’administration » – en donnant l’impression de n’envisager que celui à réparation[21].

Il est tentant de suggérer pour conclure « une définition de l’obligation commune à l’ensemble des juristes » (je souligne), en prenant le risque de perdre en précision[22], avec deux dernières citations : « la Convention européenne [sic ; v. mon précédent billet] de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, dont on sait le rôle capital qu’elle joue, dans son texte même comme dans celui de ses divers protocoles, ne distingue jamais, s’agissant d’obligations, selon que le débiteur ou le créancier de celles-ci est une personne publique ou une personne privée » ; « cette conception (…) se retrouve peu ou prou aussi bien dans l’ordre normatif de l’Union européenne que dans l’ordre international (cf. les deux pactes des Nations unies) »[23].


Infographie accompagnant l’article de Sylvie Ducatteau, « “On laisse les femmes au bord de la route et on nous parle de sécurité” », l’Humanité 29 mars 2019, p. 4

[1] Pour l’hôpital de Die (Drôme). 1987-2017. Trente ans de luttes fructueuses, brochure de 71 pages rédigée du 20 février au 20 avril 2017 par Jean-Pierre Rambaud, pp. 31 (reproduisant Le Dauphiné Libéré 6 avr. 2009, p. 15) et 37 ; le 27 décembre 2019, Vanessa Hirson signalait qu’une « femme, habitant à Saint-Claude (Jura) », a accouché le 16 « dans le camion des pompiers, entre le domicile de ses parents et la maternité de Lons-le-Saunier située à 1h de distance » (v. à partir de ce tweet d’un autre journaliste, Yann Levy, rappelant quelques chiffres). Au début du mois, Frédéric Potet citait « Jean-Michel Mols, le président du comité de défense des usagers du site hospitalier du Blanc » : « On croise les doigts chaque jour pour qu’un accident ne survienne pas » ; le journaliste rappelait auparavant « le nombre de naissances « inopinées » ayant eu lieu aux urgences, à la maison ou en voiture, au cours des quatorze derniers mois [depuis « la décision de mettre fin aux accouchements dans la sous-préfecture de l’Indre » : « sept » (« Au Blanc, les habitants toujours en deuil de leur maternité », Le Monde 5 déc. 2019, p. 11).

[2] Comme déclinaison du « droit à la protection de la santé », à partir de textes internationaux que l’État français s’est engagé à respecter ; reformulant ainsi l’alinéa 11 du Préambule de 1946, qui se borne à affirmer que la Nation garantit cette « protection », v. l’article récent de Pierre Esplugas-Labatut, « Retour sur les services publics constitutionnels : une catégorie mort-née ? », in Culture, Société, Territoires. Mélanges en l’honneur de Serge Regourd, Institut Universitaire Varenne, 2019, p. 831, spéc. p. 834 : « des cliniques ou des écoles privées peuvent en parallèle appuyer l’action des établissements publics d’enseignement ou de santé pour satisfaire le droit à la protection de la santé et le devoir de l’État d’organiser un enseignement public » (comparer la fidélité à l’alinéa 13, contrairement à la page précédente mobilisant la catégorie doctrinale des « droits-créances » ; v. ma thèse pp. 1162-1163 et 1168 et s.).

[3] Titre de sa contribution in Sara Brimo et Christine Pauti (dir.), L’effectivité des droits. Regards en droit administratif, éd. mare & martin, 2019, p. 237 ; dans la sienne, Olga Mamoudy « met de côté le remboursement des frais irrépétibles », not. (« L’organisation par le juge administratif de l’ineffectivité de ses décisions », p. 255, spéc. p. 267).

[4] Page 238, Virginie Donier renvoie sur ce point à une publication antérieure (co-dirigée avec Béatrice Lapérou-Scheneider, L’accès au juge. Recherche sur l’effectivité d’un droit, Bruylant, 2013, pp. 32 et s.), avant d’indiquer mettre « l’accent sur cet aspect en délaissant quelque peu la question de l’office du juge et celle de l’effectivité des décisions de justice » ; à cet égard, outre une journée d’étude au Conseil d’État, le 25 mars 2019 (v. La LJA d’avr., n° 57, p. 6), v. CE Ord., 19 janv. 2016, Association musulmane El Fath, n° 396003, cons. 7, sanctionnant – en référé-liberté – « une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit à un recours effectif ainsi que, par voie de conséquence, aux libertés fondamentales que cette mesure a pour objet de sauvegarder ».

[5] Lui aussi implicitement, compte tenu de l’effet dissuasif d’une telle condamnation pour une petite association. Comparer par ex. la note n° 33 de mon billet du 23 oct. 2019, avec l’arrêt et les ordonnances des notes n° 29, 31 et 32 (mon commentaire permettant de revenir sur les circonstances locales particulières de la fermeture de la maternité de Die, commune de moins de 5 000 habitant·e·s).

[6] « Le droit des personnes handicapées reste en France un droit largement théorique, tant son exercice par les intéressés se heurte souvent à des obstacles matériels qui le prive, de fait, de l’essentiel de sa substance » (première phrase des conclusions de Vincent L’Hôte sur TA Nîmes, 21 juin 2019, n° 1701563 ; AJDA 2019, pp. 2258 et s.).

Exposition « Tes yeux sur mes oreilles » (v. fondationpourlaudition.org)

[7] « Cette exigence d’un accueil pluridisciplinaire inclut et dépasse le droit à l’éducation », était-il proposé dans les concl. préc.. Dans les développements qui suivent, je délaisse la question de l’application en l’espèce des principes dégagés par le TA (cons. 9 à 19 du jugement) ; le rapporteur public a là aussi été suivi : il invitait à retenir – et indemniser – la « carence fautive de l’État dans l’organisation du service » à partir du moment où Mme B. a quitté la région Île-de-France ; dès lors, « l’ensemble des refus opposés à la requérante ont été motivés par une absence de place et ce, jusqu’au 6 septembre 2016, date à laquelle une place s’est libérée ». Peut-être en raison de la fusion à l’origine de l’ARS Occitanie (v. Bryan Faham, latribune.fr 26 oct. 2018), cette dernière n’est pas mentionnée, pas plus que la délégation départementale du Gard (v. jorfsearch.steinertriples.fr janv.-févr. 2019). V. récemment la tribune de familles et de professionnel·le·s de l’Hérault, Le Monde Science & Médecine 26 déc. 2019, p. 7 : l’été, « la plupart des établissements pour enfants et adolescents polyhandicapés (EEAP) et instituts médico-éducatifs (IME) ferment plusieurs semaines. Les familles se retrouvent alors seules », privées d’accès à ces « lieux de soins (…). Il n’est pas juste que les associations et les initiatives personnelles de certains parents pallient seules le manque de structures et de places d’accueil » ; ce collectif « et l’association « La petite fille qui s’attarde » se mobilisent pour qu’il ne soit plus légalement permis de fermer les établissements accueillant des enfants et adolescents polyhandicapés sans que des solutions alternatives soient proposées aux familles ». V. également l’article de Pascale Santi en page 6, signalant « l’exposition de photographies « Tes yeux sur mes oreilles », présentée sur les grilles du square de la Tour-Saint-Jacques, rue de Rivoli, à Paris (4e arrondissement) », jusqu’au 13 janvier (v. ci-contre).

[8] Je signale sur ce point la note n° 39 de ma contribution, renvoyant elle-même à celle de Sara Brimo dans le même ouvrage (préc. ; v. « Sanction de la carence administrative et garantie de l’effectivité des droits », p. 193, spéc. pp. 207 à 210).

[9] CE, 8 nov. 2019, M. A. et Mme C., n° 412440 ; il est notamment renvoyé à TC, 11 déc. 2017, M. B., n° C4105 (après avoir cité d’autres décisions antérieures – dont l’arrêt ici attaqué, à propos duquel v. infra –, Vincent L’Hôte ajoutait dans ses conclusions sur le jugement précité que « les MDPH sont des groupements d’intérêt public dont le département assure la tutelle administrative et financière, selon l’article L. 146-4 du CASF. Les fautes qui leur sont imputables ne sauraient dès lors engager au surplus la responsabilité de l’État »).

[10] À propos du devoir des juridictions vis-à-vis des « personnes présentes à l’instance » en ce qui concerne « l’assistance qu’impose leur surdité », v. CE, 15 mars 2019, M. M., n°414751, cons. 1 ; s’affirmant « entièrement engagé pour permettre à l’École de la République d’être pleinement inclusive », le Ministère a par ailleurs réitéré, le 11 avril (p. 1965), l’affirmation du « droit fondamental à l’éducation » (v. déjà le 30 oct. 2018, p. 9712, et encore le 2 mai 2019, p. 2391 ; comparer le 5 mars 2009, p. 565). Relayant les inquiétudes liées à la dotation des instituts nationaux de jeunes sourds (INJS) et de l’institut national des jeunes aveugles (INJA), v. la question écrite n° 03306 de M. Michel Dagbert (Pas-de-Calais – SOCR), JO Sénat du 15 févr. 2018, p. 623, avec une Réponse du Secrétariat d’État auprès du Premier ministre, chargé des personnes handicapées le 19 avr. 2019, p. 1946 ; v. aussi le reportage pour la rédaction de France Culture d’Hakim Kasmi, diffusé le 16, ainsi que ce décret n° 2019-420 du 7 mai et la Question écrite n° 03125 de la sénatrice Brigitte Micouleau (Haute-Garonne – Les Républicains), le 8 févr. 2018, p. 504, attirant « l’attention de Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation sur l’accessibilité des étudiants sourds aux études supérieures » (Réponse le 9 août 2019, p. 4168). V. plus récemment ce texte du Ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, JO Sénat 24 oct. 2019, p. 5397, ne répondant pas vraiment à la question et enfin l’exposition actuelle signalée supra.

© Photo reprise de la page Facebook du député communiste Sébastien Jumel, venu rencontrer le 7 octobre les AESH du secteur de Dieppe et les représentant·e·s de la CGT Educ’Action et du SNUipp.

[11] Marc Debene, « L’École sous le pavillon de la confiance », AJDA 2019, pp. 2300 et s. Concernant les Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés, v. Thomas Baligand, « Les PIAL : une nouvelle organisation du travail des AESH », ecole-et-handicap.fr 12 juin-19 nov. 2019, Rouguyata Sall, « Les accompagnants des élèves en situation de handicap inquiets pour la rentrée » et Khedidja Zerouali, « La rentrée chaotique des accompagnants d’élèves en situation de handicap », Mediapart les 15 juill. et 10 oct. (respectivement, en empruntant à cette dernière l’illustration ci-contre). Publié au JORF n° 0276 du 28 nov., v. l’arrêté du 23 oct. fixant le cahier des charges des contenus de la formation continue spécifique des AESH ; à celui n° 0294 du 19 déc., le décret n° 2019-1389 du 18 prévoyant un recrutement « par contrat d’une durée de trois ans, renouvelable une fois ».

Ajout au 7 janvier 2020 : dans la newsletter n° 6 du site École et Handicap, il est renvoyé à un texte intitulé « La gestion départementale et les absences des AVS et des AESH », complété par TA Nice Ord., 15 nov. 2019, Mme et M. X., n° 1905359 (mise en ligne par l’association Toupi), cons. 5-6 : concernant une fille de 4 ans, le juge des référés conclut à « une atteinte grave et illégale à son droit à l’éducation » (je souligne cette reformulation bienvenue – mais pas nouvelle – de la jurisprudence initiée par CE Ord., 15 déc. 2010, Ministre de l’Éducation nationale c. Époux Peyrilhe, n° 344729, en renvoyant aux pp. 46-47 de ma contribution en 2019 ; l’oubli du terme « manifestement », avant « illégale », est par contre regrettable) ; de manière discutable, il refuse d’assortir d’une astreinte son injonction d’affecter – sous quinze jours – « un » AESH « à titre pérenne, dans les conditions fixées en août par la CDAPH », en affirmant qu’« une solution de remplacement a été mise en place par l’administration » (c’est en réalité au lendemain de la saisine du juge que le recteur s’est engagé, le 14, à l’affectation d’une « remplaçante » le lundi 18 ; en définitive, cette ordonnance illustre davantage l’hypothèse exclue dans mon introduction, p. 42).

« Saint Joseph – La Salle Toulouse est un établissement catholique d’enseignement, fondé en 1840 par les Frères des Écoles Chrétiennes » ; il « regroupe, sur un même site, une école, un collège, un lycée général et technologique, une unité professionnelle, un campus » (saintjosephtoulouse.org).

Ajout au 7 février, pour signaler TA Toulouse Ord., 5 févr. 2020, M. et Mme D., n° 2000568 : « Par un mémoire en défense enregistré le 3 février 2020, le recteur de l’académie de Toulouse conclu[ai]t au rejet de la requête », au motif d’une affectation à compter « à compter du 1er février », de ce que « l’élève est régulièrement scolarisé » et, surtout, que « les services académiques ne s[eraien]t pas à l’origine de cette situation, cette dernière résulte[rait] d’une absence d’information sur les besoins en personnels AESH du groupe scolaire privé Saint Joseph-Lasalle » ; statuant en référé-liberté, le vice-président du tribunal commence par rappeler que l’enfant, « atteint d’un trouble du spectre autistique, est scolarisé en « 3° prépa pro » [et] bénéficiait d’une aide Individuelle par une auxiliaire de vie (AVS) qui a été renouvelée du 1er juin 2019 au 31 août 2024 pour une durée de 20 heures par semaine », avant de refuser de considérer que « l’objet du litige » aurait « disparu » (cons. 1 et 2).

Lors de l’audience de la veille, le requérant avait « fait remarquer que les pièces produites par le recteur supposées démontrer le recrutement d’une AVS ne mentionnent pas le groupe scolaire dans lequel son fils est scolarisé ». Compte tenu « de la dizaine d’appels téléphoniques ou de la lettre recommandée avec avis de réception du 13 janvier 2020, alertant les services du rectorat » de son absence d’AVS, « M. et Mme D. sont fondés à soutenir qu’il a été porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de leur enfant handicapé de suivre une scolarité adaptée ». Il leur est également donné entièrement raison concernant l’exécution de cette ordonnance : « il y a lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte de 250 euros par jour de retard passé (…) un délai de quinze jours à compter de [s]a notification » (cons. 6 et 7).

Un seul bémol à cette ordonnance – à lire en lien avec l’écrit du recteur cité dans ce billet : « Les requérants, qui ne justifient pas avoir exposé de frais pour les besoins de l’instance en cause, ne sont pas fondés à demander une somme au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative » (cons. 8) ; sans aller peut-être jusqu’à accorder les « 1 000 euros » demandés, le juge des référés aurait pu considérer le temps perdu pour faire valoir un droit reconnu avant l’été (la décision de la MDPH remonte au 16 avril 2019 !). Le jour de l’ordonnance était publiée une recension de L’Effet Louise – à propos d’un autre handicap (la trisomie 21) –, présenté comme « le récit puissant et plein d’humour d’une tranche de vie » d’une enfant de « trois ans, deux bras, deux jambes et toujours ce foutu chromosome en plus ». Caroline Boudet y distingue la « face A », et la « face B » (le vrai handicap) : « C’est comme une vie parallèle dont tu apprends les bases, aux côtés de ton enfant, une vie en noir et blanc, faite de photocopies, de dossiers de plusieurs kilos, de certificats médicaux, de relances par courrier, par mail, par téléphone, d’attente, d’absences de réponse, de demandes de pièces supplémentaires » (citée par S. Ca., « Une place à l’école pour le handicap », Le Monde Science & Médecine 5 févr. 2020, p. 6)…

P.S. Je précise avoir partagé des informations avec le père de l’enfant – que je ne connais(sais) pas –, le 28 janvier ; c’est lui qui a rédigé la requête, « enregistrée le 31 ».

[12] Benoit Delaunay, « Le rapport entre effectivité des droits et obligations de moyen et de résultat », in La scène juridique : harmonies en mouvement. Mélanges en l’honneur de Bernard Stirn, Dalloz, 2019, p. 155 (l’ouvrage semble avoir été publié près d’un an après que la contribution a été rédigée ; elle est datée du 20 nov. 2018).

[13] Art. préc., p. 160 (je souligne ; deux pages auparavant, il emploie en effet cette dernière expression – « obligation de résultat » – à propos de ce qu’il appelle le « droit à la scolarisation [sic] d’enfants handicapés » : il me fait alors l’honneur d’un renvoi à ma note sous l’arrêt Laruelle, publiée il y a presque dix années à la RDP ; ayant un peu évolué depuis, je renvoie à mon tout premier billet, daté du 5 janvier 2018, ainsi qu’à celui du 8 avril dernier).

Alain-Serge Mescheriakoff, Droit des services publics, PUF, 2ème éd., 1997, pp. 189 et 242 : « le service public de l’éducation nationale n’a pas l’obligation juridique [terme oublié par le recteur Benoit Delaunay (v. ci-contre)] de faire réussir les élèves, le service public hospitalier de guérir ses malades » ; « Les droits subjectifs des administrés (…) n’existent que quand les personnes gestionnaires du service ont une obligation juridique envers eux, qui peut être contractuelle ou quasi délictuelle » (v. infra la note n° 21). Dans