Une laïcité vendéenne ?

Illustration empruntée à ©JPY, « La Roche sur Yon : La crèche de Noël de l’Hôtel du Département définitivement validée par la Justice », actu.fr 6 oct. 2017 (article réagissant à l’arrêt d’appel)

Dans une décision récente (CE, 14 févr. 2018, Fédération de la libre pensée de Vendée, n° 416348), le Conseil d’État a refusé l’admission d’un pourvoi en cassation formé contre un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes. Cette dernière a en effet admis l’« installation temporaire, qui résulte d’un usage culturel local et d’une tradition festive » – une tradition assez relative, « depuis plus de 20 ans »… – d’une crèche de Noël dans les locaux ouverts au public de l’hôtel du département de la Vendée (CAA Nantes, 6 oct. 2017, n° 16NT03735, cons. 4 ; AJDA 2017, p. 1918, obs. de Marie-Christine de Montecler, intitulées « Crèches : à Nantes, c’est oui, à Lyon, c’est non »).

Tout comme il aurait été peu probable – mais non moins discutable – qu’il renvoie la question prioritaire de constitutionnalité que le tribunal administratif de Lyon a refusé de lui soumettre la veille de cet arrêt (v. la note de Paul-Maxence Murgue-Varoclier, publiée sur le site de l’Association LYOnnaise de Droit Administratif : Alyoda 2018, n° 1), le Conseil d’État se retranche derrière la « [p]rocédure d’admission des pourvois en cassation », mise en exergue dans un encadré (> Lire le communiqué). Le même jour, il procède à l’identique en rejetant le pourvoi de la Ligue des droits de l’Homme (> Lire le communiqué). L’association laïque reprochait à la Cour administrative d’appel de Marseille une « dénaturation des pièces du dossier » avec son arrêt n° 17MA01337 du 3 juillet 2017 (comparer le considérant 4 et, à l’époque, cet article de Guillaume Gendron, « Au tribunal, “l’affaire lamentable” de Sisco ramenée aux faits », Libération.fr 18 août 2016).

L’actualité juridique. Droit administratif rend brièvement compte de ces deux décisions dans son numéro 6 du 19 février, avant de résumer l’arrêt n° 17DA00054 du 16 novembre 2017, rendu par la Cour administrative d’appel de Douai (v. respectivement AJDA 2018, pp. 304, 308 et 312). En définitive, ce qui méconnaît l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 dans la commune d’Hénin-Beaumont reste permis par l’interprétation du Conseil d’État dans le département de la Vendée.

Capture d’écran depuis l’article de Joël Bigorgne, « Il y a quinze ans, le logo vendéen faisait polémique », ouest-france.fr 19 déc. 2014

Il est intéressant de rapprocher cette (non-)décision d’un autre arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Nantes, le 11 mars 1999 à propos de la laïcité scolaire (pp. 331-332). L’accumulation des décisions conduit à se demander s’il ne faudra pas à terme ajouter un nouvel idéaltype aux « laïcités françaises » identifiées par Jean Baubérot (éd. MSH, 2015).

Ajout au 15 mai 2018, pour cet extrait d’un entretien avec Jean-Éric Schoettl – commenté sur d’autres points et ce jour, dans ce (long) billet –, « La laïcité en questions », Constitutions 2017 p. 19 : « Il est depuis longtemps admis en France, ce qui la distingue là encore des pays voisins, qu’aucun crucifix ne doit être accroché aux murs des écoles publiques »…

Ajouts au 3 juin 2018, avec d’abord un entretien avec Jean-Baptiste Jacquin de Jean-Marc Sauvé (« La société est divisée, voire fracturée », Le Monde 30 avr. 2018, p. 6) : à l’heure de quitter ses fonctions, le vice-président du Conseil d’État attribue en toute tranquillité le « retour des tensions sur les manifestations des cultes historiques, notamment du culte catholique », à l’« émergence de l’islam ».

Capture d’écran depuis l’émission de Cotentin et Usul, « 5G : un débit en débat », Mediapart 5 oct. 2020 ; « Quand [Macron] désigne » des religieux (aux États-Unis ? v. Louis Fraysse, « Qui sont les amish ? », reforme.net 31 déc. 2019-15 sept. 2020), les défenseurs de la laïcité française (historique) regardent Fourvière ; tout ça pour renvoyer à mon billet du 31 janv., à la note n° 33

Quelques jours plus tard, ensuite, le « Ministre des cultes (…) oppose le voile à la “société française” » (Lénaïg Bredoux et Faïza Zerouala, Mediapart 18 mai 2018, actualisé le 20 : « “C’est du prosélytisme”, a-t-il encore affirmé, parlant également de “provocation”. (…) Sur la laïcité, Gérard Collomb, longtemps élu à Lyon où l’empreinte catholique est forte, avait plutôt la réputation d’être en phase avec la ligne d’Emmanuel Macron, celle d’une « “conception apaisée”. “Je ne suis pas de ceux qui veulent reléguer les religions dans la sphère de l’intime, expliquait-il en 2013 devant le premier synode de l’Église protestante unie de France. Je crois au contraire qu’elles ont toute leur place dans la vie de la cité”. Une conception qui ne vaut manifestement plus, à ses yeux, pour l’islam »). V. à ce sujet cet article de Frantz Durupt (« Voile, “islamisme”… de Mennel à Maryam Pougetoux, des polémiques et des méthodes qui se répètent », Libération.fr 14 mai 2018) et ce thread Twitter d’Anaïs Leleux ; v. encore le texte du président d’honneur de la LDH Michel Tubiana, cité dans mon billet sur les sorties scolaires in fine.

Cette information enfin de Bruno Bouvet, « Des crucifix imposés dans les établissements publics de Bavière », La Croix.com avec AFP 3 juin 2018, avec ce rappel : « Des crucifix prennent déjà place dans les salles de classe des écoles primaires et les salles d’audience des tribunaux bavarois » (à propos de la situation allemande, v. ma thèse, pp. 373 et s. ; suivent pp. 380 et s. des développements sur les arrêts Lautsi contre Italie ; rendus en 2009 et 2011 par la Cour européenne des droits de l’Homme, ils sont aussi abordés pp. 849 et s. du point de vue de celui à l’instruction, garanti par l’article 2 du premier protocole à la Convention).

Ajout au 9 décembre 2018 (au détour de mon billet sur les laïcités-séparation), avec un jugement montrant comment l’interdit posé par l’article 28 de la loi de 1905 est, depuis les arrêts d’Assemblée du 9 nov. 2016 (n° 395122 et 395223), facilement tourné : TA Lyon, 22 nov. 2018, LDH, n° 1709278 ; dalloz-actualite.fr du 30 (extrait), obs. Emmanuelle Maupin, « Les crèches installées en région Auvergne-Rhône-Alpes sont culturelles » (reprises à l’AJDA du 3 déc., p. 2322). . Peu de temps après avoir renouvelé sa décision, fin 2017, Laurent Wauquiez allait présider Les Républicains ; en 2003, il avait participé, en tant qu’auditeur au Conseil d’État, aux travaux de la Commission Stasi : elle avait d’autres propositions que d’installer des crèches de Noël.

Ajout fin avril 2025 de mon billet du 11 novembre 2024 (Jours fériés : l’approche laïque chassée par l’appel à la « solidarité »), près d’un an après avoir remplacé les premiers liens par d’autres actifs (ce à quoi oblige régulièrement les sites des juridictions…), à l’occasion d’une relecture en parcourant la thèse d’Hugo Avvenire, durant le dernier week-end de juillet 2024 (v. aussi l’actualisation de mon billet du 15 mai ; dans ses développements sur « les crèches de Noël dans les espaces publics », aux §§ 550 et s., il signale en note de bas de page 242 [n° 1091] un arrêt sanctionnant la présence d’« une statue de Saint Michel implantée sur une place publique, érigée auparavant pour une école confessionnelle » : CAA Nantes, 16 septembre 2022, Fédération de Vendée de la libre pensée, n° 22NT00333, points 9 et suivants). C’est également à cette date que j’ai ajouté les illustrations ci-dessus et je termine en attirant l’attention sur le point 5° d’un communiqué publié une semaine avant (fnlp.fr/2024/07).

De Marie Curie à Paul Langevin

Crédits : LASKI/SIPA (franceculture.fr 6 oct. 2016)

En 1903, Marie Skłodowska-Curie fut la première femme à obtenir en France un doctorat de sciences physiques (v. Juliette Rennes, Le mérite et la nature. Une controverse républicaine : l’accès des femmes aux professions de prestige, 1880-1940, Fayard, 2007, p. 559, recensant les « premières »).

Dans un article intitulé « Egalité des sexes : les manuels d’enseignement moral et civique peuvent mieux faire », Violaine Morin écrit : « Sur un corpus de vingt-cinq manuels d’EMC parus après juin 2015, le centre Hubertine-Auclert (…) conclut à une ” certaine invisibilité ” des femmes célèbres, dont les occurrences constituent une liste éclectique où, à la différence des figures masculines, le nombre de mentions n’a pas de rapport avec le degré de célébrité du personnage : Marie Rose Moro, pédopsychiatre à Paris, est citée plus souvent que Marie Curie » (Le Monde 16 janv. 2018). Huit jours plus tard sortait en salle le biopic de Marie Noëlle, et il est possible aussi de visionner Marie Curie, au-delà du mythe (documentaire réalisé en 2011). Jusqu’au 4 mars, une exposition lui est consacrée au Panthéon ; invité le 6 novembre dernier par Mathieu Vidard, avec les physiciennes Elisabeth Bouchaud et Héléne Langevin Joliot (sa petite fille), le directeur du Musée Curie (Renaud Huynh) explique que l’exposition est aussi une occasion de parler de Pierre Curie (1859-1906).

« Derrière chaque grand homme se cache une femme » ; attribué à Gabriel Marie Legouvé, le père d’Ernest (v. ma thèse, pp. 79 et 992), cet adage hétéronormé pourrait-il être retourné ? A l’époque, rien n’est moins sûr, au regard de « l’affaire Langevin/Curie » (novembre 1911)[1], qui a inspiré un spectacle pensé par l’historien Gérard Noiriel et l’actrice Martine Derrier. Mais aujourd’hui ? Spécialiste des questions d’éducation pour le journal Le Monde, Mattea Battaglia rappelait – dans un article publié le même jour que celui précité – « le recours, à la Libération, à deux professeurs au Collège de France, Paul Langevin, physicien, et Henri Wallon, psychologue, pour élaborer le projet global de réforme dont on vient de célébrer le 70e anniversaire » (« Tout l’univers de Jean-Michel Blanquer »).

Image reprise sur histoires-de-sciences.over-blog.fr 10 août 2017

Un an après le décès du premier, ce plan Langevin-Wallon (1947) appelait à l’inscription dans la loi du « droit de tous les enfants, de tous les adolescents à l’éducation » (v. pp. 717 et s.) ; il faudra attendre la loi Jospin pour que ce soit le cas (pp. 985 et s., spéc. pp. 989-990 à propos du plan et de la mixité, avec une citation de Nicole Mosconi, l’une des membres de mon jury).

Ajouts au 12 mai 2018

Si la page Wikipédia consacrée à Sarmiza Bilcescu-Alimănișteanu la présente, à ce jour, comme « la première femme docteure en droit dans le monde », en 1890 (p. 1225, dans ma conclusion générale), l’encyclopédie libre rappelle qu’elle fut précédée, deux ans plus tôt, par la belge Marie Popelin (évoquant « la première femme docteure en droit » de son institution, Yvon Englert, cité par Jean-Pierre Stroobants, « L’Université libre de Bruxelles, engagée et citoyenne », Le Monde Économie & Entreprise 9 mai 2018 ; une question posée à cet « ancien doyen de la faculté de médecine et recteur, depuis 2016, de l’ULB, créée en 1834, quatre ans à peine après la naissance de la Belgique », permet de renvoyer à un autre billet : « Ce qui était décrit, il y a quelques années, comme une véritable ” invasion ” des établissements belges pose-t-il problème ? ” Non, sauf peut-être dans quelques filières qui ne sont pas extensibles. Les étudiants français sont comme les autres, bénéficient des mêmes droits et des mêmes statuts “, explique Yvon Englert »).

Ajouts au 20 juill. 2018

A l’occasion de l’entrée de Simone Veil au Panthéon, la rédaction de Mediapart rappelait, le 1er juillet : « En 1907, Sophie Berthelot n’a accompagné son mari qu’en hommage à « sa vertu conjugale ». En 1995, soit plus de soixante ans après sa mort, la scientifique Marie Curie était la première femme à pénétrer le saint des saints, pour ses qualités propres, en même temps cependant que son mari. En 2015, les deux résistantes Germaine Tillion et Geneviève de Gaulle-Anthonioz lui succèdent, poussées par les revendications grandissantes des associations féministes sur ces questions ».

Dans une tribune publiée dans Le Monde, le 8, page 28, Lauren Elkin traite de la représentation des femmes dans l’espace public : elle évoque « Marie Curie (avec son mari bien sûr) dans le 5e [arrondissement de Paris,] George Sand au jardin du Luxembourg, en robe, et non en costume d’homme, tenue qu’elle préférait [et] Maria Deraismes, seule femme ouvertement militante féministe dans le groupe, au square des Epinettes, dans le 17e » (pour une autre citation de son texte, v. ce portrait in fine).

Sarmiza Bilcescu et Jeanne Chauvin sont évoquées par l’historienne Bibia Pavard dans l’émission Les Savantes de Lauren Bastide (première diffusion le 14). L’étudiante d’origine polonaise dont le nom – français – donne son titre à ce billet n’est pas directement mentionnée dans ma thèse (à propos des étudiantes étrangères, v. par contre la note de bas de page 80, n° 418) ; tout juste est-il question de l’école élémentaire Marie Curie à Bobigny, en Seine-Saint-Denis (note de bas de page 1131, n° 3119).

Ajouts au 23 septembre 2018

Dans un entretien avec Philippe Meirieu (« Blanquer ne va pas faire progresser l’école », Mediapart 18 sept. 2018), Faïza Zerouala intègre à l’une de ses questions un lien à propos du plan Langevin-Wallon ; fin 2017, Emmanuel Laurentin invitait certains des auteurs du livre mobilisé dans mes développements y relatifs, signalés ci-dessus. L’émission commence avec un épisode de La fabrique de l’histoire scolaire, conçue par Séverine Liatard. Cette immersion au lycée Jean Zay d’Aulnay-sous-Bois (93) aborde la distinction entre histoire et mémoire ; elle donne aux intervenants l’occasion de faire le lien avec cette figure du Front populaire, à qui j’ai consacré ce billet.

Image reprise chezmamielucette.eklablog.com 17 mars 2019

Cette semaine a été difficile à Nanterre (92) : une partie du corps enseignant déplore les conditions dans lesquelles s’est opérée la fusion du lycée professionnel Paul Langevin avec celui polyvalent Frédéric et Irène Joliot-Curie ; la fille de Pierre et Marie était l’une des « trois « sous-secrétaires d’Etat » femmes » nommées par Léon Blum en 1936, « dans un pays où les femmes ne votent pas » (Michelle Perrot (entretien avec, par Anne Chemin), « Cette panthéonisation est une exception », Le Monde Idées 30 juin 2018, à l’approche de celle de Simone Veil). Le Parisien signale la mise en œuvre, ce mardi, du droit de retrait.

Ajout au 23 octobre 2019, pour signaler ce billet à propos de son actualité.

Ajout des illustrations au 29 décembre 2019, en signalant au passage :

  • une réponse ministérielle du 30 mai 2019, p. 2870, « Situation du lycée Paul Langevin de Suresnes » ;
  • cet extrait de Florence Rochefort, « Le rôle laïcisateur du Planning familial (1956-1968) », in Bard et J. Mossuz-Lavau (dir.), Le Planning familial : histoire et mémoire (1956-2006), PUR, 2007, p. 53, spéc. p. 62 : « À la démarche de vulgarisation engagée par l’aile laïque du [Planning] s’associent des mouvements laïques, notamment l’Union rationaliste (qui se trouvait déjà engagée, dans les années trente, aux côtés de Berty Albrecht pour la réforme sexuelle, en la personne de son fondateur Paul Langevin) ».
  • ce livre de Sylvain Laurens, Militer pour la science. Les mouvements rationalistes en France (1930-2005), EHESS, 2019, recensé par Régis Meyran, scienceshumaines.com en juillet.

[1] En 2020, dans sa recension du biopic de Marjane Satrapi, Charlotte Chaulin retourne la formule à propos de Pierre Curie (« Radioactive. Un film sous haute tension », herodote.net 6 mars ; extraits in fine) ; Le Monde des Livres du 15 mai proposant « 40 livres pour rêver le monde d’après » (p. 8), la neurologue Isabelle Arnulf en retenait un à propos de Marie Curie (1867-1934), ou plutôt trois : elle « n’a écrit que des articles scientifiques, mais le récit de sa vie – qu’elle soit encensée par sa fille dans la « Bibliothèque verte » (Madame Curie, par Ève Curie, réédition Folio, 1981), plus classique dans Marie Curie, par Janine Trotereau (Folio, 2011), ou que l’on découvre ses amours cachées dans Marie Curie prend un amant, d’Irène Frain (Seuil, 2015) – est un récit de courage. Courage de résister aux Russes en Pologne, de décider de sa vie avec sa sœur, de travailler, de combattre le machisme, de croire qu’éducation et science apporteront forcément, fatalement le bonheur à l’humanité. Tout en faisant du vélo avec son Pierre de mari, en nageant en Bretagne et en élevant ses filles. J’aime bien ce courage. Il m’en donne, pour le « monde d’après » (note du 30 mai, à l’occasion de ce billet). Ajout le 1er juin 2025 de ce clip – réalisé par Leïla Sy – d’un morceau qui reprend dès sa première phrase l’adage genré ici commenté : « Kery James feat. Imany – Le Mystère Féminin », 30 juill. 2013

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Foulard et accompagnatrices de sorties scolaires

Capture d’écran de cette vidéo disponible sur YouTube depuis le 16 janvier 2018 (réalisée le 11 janvier 2025)

Le Cercle des enseignant·es laïques, en partenariat avec le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), a réalisé un bref support pédagogique intitulé « Laïcité et sorties scolaires » (v. ci-contre). Les étapes qui y sont rappelées sont analysées dans ma thèse pp. 404-405 et 516 à 520 ; la page suivante permet de situer le propos (conclusion du chapitre 2 du titre consacré aux libertés publiques comme alternatives au droit à l’éducation).

Interdire le foulard aux accompagnatrices de sorties scolaires ne sert pas la réalisation du droit à l’éducation, dont l’affirmation fait l’objet de ma seconde partie (pp. 627 et s.) ; comme d’autres restrictions, celles que s’autorisent encore certains établissements – publics comme privés (v. l’ordonnance signalée en note de bas de page 609) – pourraient être considérées comme portant atteinte à l’obligation internationale de faciliter l’exercice de ce droit (pp. 1180 et s.).

Photo issue du site newsestlyonnais.fr ; « Meyzieu a gagné plus de 5000 habitants en une dizaine d’années, Saint-Priest près de 7000 et Vaulx-en-Velin presque 10 000 » ; Annemasse et Montélimar complètent ce « top 5 des villes d’Auvergne-Rhône-Alpes où la population augmente le plus vite » (Julien Verchère, mesinfos.fr 8 janv. 2025) ; cette illustration me permet d’ajouter aussi cet article de Dolores Mazzola, france3-regions.francetvinfo.fr 26 juin 2019 (mis à jour près d’un an après, il rappelle la mobilisation des parents contre l’« amendement adopté le 15 mai par le Sénat (…) visant à interdire le port de signes religieux pour les accompagnants de sorties scolaires. Ainsi, début juin dernier, un collectif avait manifesté devant (…) l’école Brossolette [Valence]. En Isère, des parents s’étaient mobilisés devant l’école Auguste-Delaune, à Echirolles »)

Ajouts au 30 mai 2018, avec d’une part ces textes du président d’honneur de la LDH Michel Tubiana, le 20 avril et du chargé de mission à la LDE Charles Conte, le 28 ; d’autre part, le 17 mai, la revue de l’association lyonnaise de droit administratif rendait compte d’un jugement ambigu (TA Lyon, 19 oct. 2017, Mmes B. et C., n° 1505363 ; Rev.jurisp. ALYODA 2018, n° 2, concl. J. Arnould et note N. Charrol). Il l’a été aux conclusions timidement contraires du rapporteur public et se trouve frappé d’appel devant la CAA de Lyon (n° 17LY04351) ; était en cause l’école primaire Condorcet (et Marcel Pagnol) de Meyzieu : dans une lettre en date du 2 avril 2015, la rectrice d’académie interprétait l’étude du Conseil d’État de décembre 2013 dans le sens de l’interdiction (v. les pages préc., spéc. 519).

Ajout au 30 septembre 2018 : Dominique Schnapper, dans un entretien avec Joan Scott (propos recueillis par Anne Chemin, sous le titre « Laïcité, de la théorie à la pratique ») publié hier dans Le Monde Idées, réagit à son évocation de la circulaire Chatel : l’ancienne membre du Conseil constitutionnel ne prend aucune distance avec ce texte de… 2012 ; s’il « interdit aux femmes voilées d’accompagner les sorties scolaires, ce n’est pas parce que les signes religieux sont interdits dans la rue, mais parce que les accompagnatrices sont considérées comme des « auxiliaires » du service public ». La sociologue préside le « Conseil des sages de la laïcité » de l’Éducation nationale…

Ajout au 29 septembre 2019 (avec les dernières parenthèses le 9 octobre) : dans un arrêt du 23 juillet, la CAA de Lyon a rejeté l’appel susmentionné ; la situation litigieuse ne visant pas, à proprement parler, les sorties scolaires, la Cour s’autorise à ajouter une nouvelle implication au « principe de laïcité de l’enseignement public », remontée – par rapport au jugement précité – dans le considérant de principe (n° 17LY04351, cons. 3). Compte tenu de la position « personnelle » du ministre, il fait peu de doute que ses services défendront celle de la rectrice devant le Conseil d’État (sous réserve qu’il ait bien été saisi) : que des mères portant un foulard « participent à des activités qui se déroulent à l’intérieur des classes » (cons. 4), quel affreux « communautarisme » (Dominique Schnapper) !

Ajout au 7 janvier 2020 pour signaler ma note sous cet arrêt ; Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1 : « Interdiction des mères voilées dans les locaux scolaires : quand la laïcité repose sur une croyance ».

Illustration reprise depuis l’un des épisodes des podcasts.lemonde.fr (publié le 21 novembre 2024)

Ajouts d’un lien actif (janv.-mai 2020) et des illustrations à l’occasion d’une… sortie de « Bruno Retailleau, l’idéologue du ministère de l’intérieur », début 2025 : « Pour Bruno Retailleau, les accompagnatrices de sorties scolaires “n’ont pas à être voilées” », lemonde.fr (avec AFP) 7 janv. 2025 : « Ce qui est en jeu, dit-il [dans une interview au Parisien mise en ligne lundi 6 au soir], ce sont les conquêtes de l’Occident, comme l’égalité hommes-femmes, la liberté de conscience ou notre laïcité française » ; outre le fait de les présenter comme telles, qu’il puisse oser se revendiquer de ces exemples témoigne surtout des conquêtes des droites françaises ces dernières décennies (en ce sens, Lauriane Clément, « L’offensive de Bruno Retailleau sur le port du voile, signe d’une “droitisation de la laïcité” », la-croix.com le 8, extrait ; v. déjà mon billet du 29 septembre 2024 – en ajoutant qu’elles n’ont pu avoir lieu que parce qu’une partie des mouvements de gauche les a accompagnées), le parcours de l’intéressé illustrant à lui-seul la porosité avec l’extrême-droite (écouter l’épisode ci-contre). Concernant les propos du ministre, v. encore Hanane Karimi (entretien avec, par Marie Turcan), « En France, le musulman est associé au danger », Mediapart 10 janv. 2025 : autrice du livre Les femmes musulmanes ne sont-elles pas des femmes ? (éd. Hors d’atteinte, 2023), la sociologue termine par cette remarque (notamment) : « On nous demande de répondre “en réaction”. Or, ce n’est pas comme ça qu’on fait connaissance et savoir »…

Ajout au 31 mars 2025 de son article intitulé « De l’application à l’extension de la nouvelle laïcité : le cas des mères accompagnatrices », Mouvements 2021/3, n° 107, pp. 104 à 112 (sa « contribution s’intéresse à la mise à l’agenda politique de cette interdiction, alors qu’elle est déjà effective dans certains établissements », en renvoyant en note 20 aux travaux d’Houda Asal, qui « a mené une enquête ethnographique d’une durée de deux ans auprès d’un collectif de mères accompagnatrices », Mamans Toutes Égales [MTE, 2017], ainsi qu’à la recherche sur ce collectif et celui dénommé Sorties Scolaires : Avec Nous ! [SSAN], par Alexandra Kassir et Jeffrey G. Reitz [2016, et qu’elle étudiera elle-même avec  Samir Hadj Belgacem, Sociétés contemporaines 2022/3, n° 127, pp. 95 à 119] ; en 2021, elle concluait sur la crainte « que des pressions pour interdire la visibilité religieuse des femmes musulmanes s’exercent à présent de façon accrue dans d’autres espaces, comme les compétitions sportives internationales », soit exactement ce qui s’est passé en 2023 et 2025).