Jours fériés : l’approche laïque chassée par l’appel à la « solidarité »

Infographie de la direction de l’information légale et administrative (Premier ministre), service-public.fr 9 nov. 2023-4 oct. 2024, complétée avec les dates du 26 décembre et du Vendredi Saint (calendrier.best) ; ces « jours fériés propres à l’Alsace-Moselle » avaient fait l’objet d’une prompte intervention du législateur, pour contrecarrer un arrêt de la Cour de cassation (Soc., 26 janv. 2005, n° 02-47569 et 70 ; v. aussi cet échange, l’année suivante, entre Gérard Larcher et Gilbert Meyer, pour qui elle serait incomplète ; v. encore Florence Dartois, ina.fr 26 déc. 2023 et la note 24 du présent billet)

Vingt ans après l’instauration d’une première « journée de solidarité »1« Mise en place l’année suivant la canicule meurtrière de 2003, qui a fait 15.000 morts, elle permet de financer la prise en charge des personnes dépendantes. Ce jour de travail de 7 heures non rémunéré a été initialement fixé au lundi de Pentecôte. Mais depuis 2008 – quand le lundi de Pentecôte est redevenu férié face à la pression des syndicats et de l’opinion – il est désormais laissé à l’appréciation des employeurs publics et privés » (Flavien Groyer, « Le lundi de Pentecôte est-il férié, chômé, rémunéré ? », francebleu.fr 13-18 mai 2024 ; « Suppression d’un jour férié : comment a été instaurée la journée de solidarité envers les personnes âgées et handicapées ? », ladepeche.fr le 11 nov., rappelant qu’en 2004, il y avait « là en germe les composantes de ce que l’on appelle la cinquième branche de la Sécurité sociale, qui verra le jour 15 ans plus tard » (v. la note suivante)., d’aucuns en envisagent une seconde : évoquée par des parlementaires2Chantal Deseyne, Solanges Nadille et Anne Souyris, Situation des Ehpad, Rapport d’information n° 778 (2023-2024), déposé le 25 septembre 2024, pp. 16, 115, 198, 206 et 208, rappelant qu’elles ne faisaient que relancer l’une des « pistes de financement envisagées par le rapport Vachey sur la préfiguration de la branche autonomie » (intitulé La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement, ce rapport remis le 15 septembre 2020 consacrait son « Annexe IV » à cette éventuelle « deuxième journée de solidarité », pp. 36 et s. ; page 8, il soulignait cependant « des effets incertains sur l’économie » en remarquant que les « partenaires sociaux y sont dans l’ensemble hostiles ») ; « Fin des 35 heures, suppression d’un jour férié… Gérald Darmanin critique les hausses d’impôts voulues par le gouvernement et assure que les Français doivent “travailler plus” », lindependant.fr (avec AFP) le 6 oct., reprenant les propos du député du Nord dans une interview au quotidien Les Échos ; Guillaume Jacquot, « Seconde journée de solidarité : l’impulsion pourrait venir du Sénat », publicsenat.fr le 4 nov., citant notamment deux des trois co-autrices du rapport précité : alors que la sénatrice écologiste Anne Souyris « encourageait plutôt un relèvement de la CSG », Chantal Deseyne (LR) défend l’idée de sept « nouvelles heures travaillées, mais non rémunérées », sans forcément supprimer un jour férié en particulier, par « un amendement au PLFSS dans deux semaines » (à propos de ces sigles, v. lafinancepourtous.com le 4 sept.). Ajouts au 23 novembre de l’article publié ce jour dans Le Monde par Bertrand Bissuel et Thibaud Métais, « Le temps de travail de nouveau en débat », p. 9 (extrait), signalant l’adoption ce mercredi 20 de l’amendement annoncé, contre lequel « les syndicats sont vent debout » et finalement présenté par la mayennaise Élisabeth Doineau (UDI), rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale ; exprimant le 21 « l’avis [défavorable] du gouvernement sur la proposition du Sénat », Laurent Saint-Martin « trouve [cependant] que le débat a bien été posé » ; comparer Thomas Piketty sur francetvinfo.fr le même jour, l’économiste insistant d’emblée sur le « grand gâchis humain » en cours, les besoins en productivité nécessitant d’« investir beaucoup plus dans l’éducation, dans l’Université notamment ». et des ministres3Isabelle Ficek, Leïla de Comarmond et Solenn Poullennec, « Sécurité sociale : le gouvernement ouvert au débat sur la suppression d’un deuxième jour férié », lesechos.fr 29 oct. 2024, citant les ministres du Budget (Laurent Saint-Martin, sur TF1) et de l’Économie et des Finances (Antoine Armand, sur LCI deux jours avant)., elle avait pu sembler écartée par l’entourage de Michel Barnier4Marie Nidiau, « Suppression d’un deuxième jour férié : Matignon ferme la porte à cette mesure », latribune.fr 5 nov. 2024.

Elle a été reprise et même précisée ce lundi par Jean-François Copé5Juliette Brossault, « “Pas besoin d’un jour férié” : Copé favorable à la suppression du 11-Novembre pour “faire des économies” », bfmtv.com 11 nov. 2024 : « “Il faut effectivement travailler plus”, conclut l’ancien ministre du Budget de Jean-Pierre Raffarin sous Jacques Chirac [sur France Inter, après avoir soutenu qu’ils auraient] “courageusement” supprimé le jour de Pentecôte » (v. supra). ; il s’en est suivi une réaction ambigüe du Premier ministre, prenant la défense d’UNE « journée fériée à laquelle nous sommes attachés » : le fait qu’il se soit exprimé ainsi « en déplacement à Meaux (Seine-et-Marne) »6« “Nous sommes attachés au 11-Novembre” : Michel Barnier n’envisage pas de supprimer ce jour férié », leparisien.fr 11 nov. 2024, dont le maire n’est autre que l’ancien ministre du Budget UMP7« Fondé sous le nom d’Union pour la majorité présidentielle en vue des élections législatives de 2002, [c]e parti devient quelques mois plus tard l’Union pour un mouvement populaire, gardant les mêmes initiales » UMP ; au 4 novembre, la page wikipedia.org qui lui est consacrée rappelle qu’il « soutient les gouvernements nommés par Jacques Chirac entre 2002 et 2007, puis par Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2012 », avant que ce dernier ne le fasse renommer, trois ans plus tard, Les Républicains. En 2004, alors que Michel Barnier avait remplacé Dominique de Villepin au ministère des Affaires étrangères le 31 mars, Jean-François Copé restait porte-parole du Gouvernement et ministre délégué lors du remaniement du 29 novembre, mais désormais au Budget (à l’Intérieur auparavant)., fait penser à un jeu de rôles destiné à préparer l’opinion. Quoiqu’il en soit8Dans son éditorial du jour, Philippe Rioux y voit « un coup de communication (…) pour éviter un vrai débat plus au fond » (« Suppression d’un jour férié : écran de fumée », ladepeche.fr 11 nov. 2024)., la perspective actuelle est bien éloignée du solidarisme9V. mon billet du 15 septembre 2018, avec un peu d’histoire des idées (solidaristes). ; l’appel à la « solidarité »10Au passage, Louis Maurin, « Neuf millions de pauvres, un chiffre exagéré », inegalites.fr 24 oct. 2024 : « Au seuil à 50 % du niveau de vie médian – seuil plus restrictif – notre pays compte déjà cinq millions de pauvres. Un niveau suffisant pour justifier tous les appels à la solidarité ». dissimule très mal une politique d’austérité qui ne dit plus son nom11Benoît Bréville, « Une idée dangereuse », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 1, cet éditorial renvoyant à Mark Blyth, Austerity. The History of a Dangerous Idea (Oxford University Press, 2013)..

Alors que « le principe de laïcité (…) se fait métonymie de la République et est, de ce fait, appelé à la rescousse sur une infinité de terrains »12Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, p. 11 : suit une énumération reproduite par Alain Policar dans sa Préface à FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p. (pp. 4 et s., spéc. page 10)., il est intéressant de le voir chassé des discours politiques relatifs aux jours fériés13V. toutefois Jean-Marc Proust, « Supprimer un jour férié ? Oui, mais pour en faire une journée sans religions », marianne.net 7 nov. 2024 (extrait).. Pour cause, une approche laïque digne de ce nom peut difficilement se satisfaire du statu quo (qu’il ne s’agit ici de remettre en cause qu’en en réduisant le nombre14Dans un éditorial, Laurence Ferrari postule qu’il s’agira en définitive de supprimer « un jour de fête catholique » (cnews.fr 30-31 oct. 2024 ; dans le même sens, v. celui d’Arnaud Alibert, « Jours fériés, jours heureux, jours sérieux », la-croix.com le 31).).

FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p.

Cela m’est apparu évident durant ma recherche doctorale et c’est pourquoi ma thèse comprend trois pages15Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 344 à 347 ; je tiens un extrait de ces trois pages à la disposition de toute personne qui le souhaiterait grâce au formulaire de contact – je l’avais opéré pour le partager à mes étudiant·es de la faculté de droit de Grenoble, le 29 mars 2018, avec notamment cet article de presse intitulé « L’histoire des jours fériés religieux » (et ceux « chrétiens dans l’Union européenne » : v. Nicolas Senèze, la-croix.com 1er juin 2012). reprenant notamment des citations de Jean Rivero (début 1990) et de deux membres de la « Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République » (fin 2003).

Un entretien récent me permet d’amender légèrement le propos : en 2017, j’écrivais page 346 que Jean Baubérot avait soutenu, « dès le départ », sa proposition inclusive des personnes des confessions juive et musulmane (à travers l’introduction dans le calendrier scolaire16« Dans le monde de l’entreprise », le Rapport proposait d’instaurer la « pratique du crédit du jour férié [qui] est déjà courante dans certains pays ou organisations internationales » : v. la citation reprise à la fin de ce document de l’Académie de Versailles, « Faut-il remettre en question le calendrier des jours fériés à l’école au nom de la laïcité ? », 7 p . ; à la page 6 se trouve reproduit un extrait du Vademecum « La laïcité à l’école » (déc. 2021, fiche 16). Concernant ce texte et outre ma note sous CAA Lyon, 23 juill. 2019, n° 17LY04351 (« Interdiction des mères voilées dans les locaux scolaires : quand la laïcité repose sur une croyance », Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai), v. récemment FNLP, Vade-mecum laïcité : une intrusion dans l’école au nom des obscures valeurs de la Macronie, mai 2024 – floréal CCXXXII, n° 28 de la collection Arguments de la Libre Pensée, 62 p., avec une préface de l’historienne Valentine Zuber et une recension par Christian Eyschen, pp. 47 et s., du livre dirigé par Françoise Lantheaume et Sébastien Urbanski, Laïcité, discriminations, racisme. Les professionnels de l’éducation à l’épreuve (PUL, 2023). Dans la première partie (pp. 7 et s.), Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger taclent aux pages 11 et 16 ce « Conseil [des “sages”] qui n’a jamais répondu aux demandes de la Libre Pensée pour agir sur des cas concrets en défense de la Laïcité, mais qui consacre tous ses efforts à la chasse aux musulmans » ; « les recensions des atteintes “graves” à la Laïcité se résument au port de signes et vêtements religieux (devinez lesquels), mais jamais à la loi Debré, les autres lois antilaïques ou la Hanoucca à l’Élysée ». V. à ce sujet Romain David, « Hanouka à l’Elysée : « “Faute morale”, “idée stupide”, “sujet explosif”… Les sénateurs fustigent l’attitude d’Emmanuel Macron », publicsenat.fr 8 déc. 2023 ; Nicolas Cadène, « La présence du président de la République à une manifestation religieuse n’est pas le problème », vidéo lemonde.fr ; Guillaume Baticle et Jean-Paul Markus (relus par Clément Benelbaz), lessurligneurs.eu les 11 et 22 ; CE, 30 oct. 2024, Association des libres penseurs de France (ADLPF) et a., n° 490587, 491096, 492651, 492656 et 492663, cons. 2, estimant qu’« il ne ressort pas des pièces du dossier que le Président de la République aurait pris une décision autorisant la tenue d’une cérémonie religieuse » (rendant compte de la décision, lemonde.fr (avec AFP) cite Laurent Domingo : « Lors de l’audience, le 26 septembre, le rapporteur public avait souligné que la requête “n’a pas l’objet que les requérants aimeraient lui donner » car « il n’existe pas de décision administrative d’allumer la bougie” ») ; comparer l’extrait placé au début de la vidéo précitée : le 7 décembre, le grand rabbin de France Haïm Korsia avait pourtant bien pris soin de solliciter une telle autorisation… d’un ou – le plus souvent – deux jours fériés pour les fêtes de Kippour et de l’Aïd-el-Kebir17« Michèle Teboul, directrice du Conseil Représentatif des institutions juives de France (Crif) et l’islamologue Ghaleb Bencheikh, décrivent ces deux événements » (qu’il n’est pas possible de dater selon les calendriers grégorien – dont dépend le jour de l’An – ou révolutionnaire, auquel se réfère la Libre Pensée dans ses publications précitées ; v. le convertisseur du site herodote.net) : « Yom Kippour est célébré huit jours après le nouvel An, Roch Hachana. La date est déterminée par le calendrier juif – qui compte 11 mois – donc chaque année, c’est décalé. Et tous les 33 ans, Kippour et l’Aïd-el-Kebir sont fêtés le même jour » ; « Une fois que la petite fête est fixée (l’Aïd-el-Fitr, NDLR), celle-ci en découle automatiquement puisque c’est 70 jours après la fin du ramadan. L’Aïd-el-Kebir n’est pas assujetti à l’observation de la lune, la date est donc unanime » (entretien avec Audrey Avesque, « L’Aïd et Kippour célébrés en même temps, une première depuis 33 ans », laprovence.com 3 oct. 2014).) ; rappelant qu’elle « a été, de loin, la plus discutée », l’historien explique avoir quant à lui18De l’autre membre de la commission Stasi sus-évoqué, Patrick Weil (entretien avec, par Samuel Lacroix), « Il faut garantir à chacun un jour férié au choix », philomag.com 26 mai 2023 « proposé, quelques années auparavant (Le Monde 21 décembre 1999) un projet un peu différent : que les lundis de Pâques19« Mais pourquoi le lundi de Pâques est-il férié alors qu’il ne correspond à rien ? », tf1info.fr 21 avr. 2019 ; v. aussi Charles Conte, « Les banquets du “vendredi-dit-saint” contre les interdits religieux », blogs.mediapart.fr le 18 : « La date de Pâques, fête mobile, est traditionnellement fixée au dimanche après la pleine lune qui suit le 21 mars (équinoxe de printemps). Le carême (du latin quadragesima qui signifie quarantième ou quarantaine) désigne la période de quarante jours (dimanches non compris) qui précède Pâques. Peu suivi de nos jours, le carême était comparable, par la rigueur de ses interdits, au ramadan musulman. C’était une période de jeûne, plus ou moins rigoureux, en particulier pour la viande, et d’abstinence sexuelle obligatoire pour tous ». et de Pentecôte20« Le dimanche de Pâques (…) détermine à la fois les dates de l’Ascension [un jeudi, à ne confondre avec l’Assomption, le 15 août] et de la Pentecôte » (Maxime Ferrer, générateur lemonde.fr 1er janv. 2022- 30 oct. 2024) ; elle se célèbre « à une date mobile calculée par le Comput. Elle tombe toujours un dimanche entre le 10 mai et le 13 juin. Elle se poursuit le lendemain dans certains pays par un lundi férié ou chômé payé, dit “lundi de Pentecôte” » (wikipedia.org au 31 oct. 2024). ne soient plus considérés comme des jours fériés ; en revanche, tel le 1er mai et le 14 juillet, le 9 décembre deviendrait férié et chômé, comme “fête de la laïcité21Comparer Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger, « Errare humanum est, sed vademecum diabolicum », in FNLP, Arguments n° 28 préc., p. 16 : « Rappelons la position de la Libre Pensée [v. aussi la note suivante] : (…) [l]a Laïcité n’a pas besoin de journée officielle, mais de mesures visant à la défendre concrètement. Le reste est du cinéma médiatique, et ce n’est pas une journée par an qu’il faut la défendre, mais tous les jours ». Je ne me souviens pas d’avoir déjà traité de cette question sur ce site ; le 20 novembre 2018, à l’occasion de la « Journée des droits de l’enfant », j’en abordais une connexe en écrivant à propos des jours fériés religieux que, dans un État laïque de droits, leur remplacement par des journées internationales comme celle de ceux de tous les enfants pourrait être envisagé. Le risque serait toutefois d’alimenter les critiques des détracteurs d’une prétendue religion de ces droits (en renvoyant à la conclusion générale de ma thèse préc., pp. 1227-1228)., et un autre jour, en alternance, serait attribué à une religion minoritaire. On a taxé ces propositions de “communautaristes”, mais je vois mal en quoi les jours fériés catholiques actuels seraient “laïques” et une diversification des jours fériés “communautariste”22Comparer Christian Eyschen, recensant le livre de Jean-Marc Schiappa, La France n’a pas de racines chrétiennes, fnlp.fr 26 mars 2017 ; Jacqueline Lalouette (entretien avec, par Samuel Dufay), « Les jours fériés, une tradition française : “Le sens de certaines fêtes s’est transformé” », lexpress.fr 29 mai 2023 (extrait) : « Depuis longtemps, les libres penseurs réclament la suppression des fêtes religieuses, ou, à défaut, leur changement de signification. Ainsi, dès les années 1890, la Fédération française de la Libre Pensée laïcisa la fête de Noël en célébrant des fêtes de l’enfance dites “Noëls humaines”». Recensant son livre Jours de fête. Jours fériés et fêtes légales dans la France contemporaine, Tallandier, 2010, v. Robert Solé, lemonde.fr le 22 sept. ; soulignant les « analyses neuves sur la laïcisation de l’espace et du temps » qui figuraient déjà dans sa « thèse de doctorat d’État », publiée sous le titre La libre pensée en France (1848-1940), Albin Michel, 1997 (préface de Maurice Agulhon), v. la recension de Jean-Marie Mayeur, Annales 1999, n°54-6, pp. 1403 à 1405 (spéc. p. 1404).. (…) D’autres mesures proposées devaient permettre de “reconnaître la Libre-Pensée et les Humanistes rationalistes comme une option spirituelle à part entière”. La question du voile n’est arrivée qu’en fin de course, et (…) on a fait l’impasse sur tout examen de la loi Debré, sur la situation en Alsace-Moselle23Après les développements susmentionnés de ma thèse (2017), j’aborde à partir de la page 348 le mécanisme de dispense de l’enseignement religieux en Alsace-Moselle, évoqué par ailleurs dans mes billets du 9 juillet 2018 et celui publié à l’attention première de mes L3 en Sciences de l’éducation – le 30 avril 2020 (dans le II. B. ; v. plus largement celui autour de l’appel de note 11 dans ma dissertation du 26 mars de la même année, rédigée pour mes M1 en contentieux constitutionnel). Ajout au 23 novembre, concernant les références de Jean Baubérot à la « question du voile » et « la loi Debré », d’un renvoi à d’autres billets, d’une part des 26 janvier et août 2018, d’autre part aux (appels de) notes 15 à 19 pour le dernier publié (fin septembre 2024). (…) »24Jean Baubérot (entretien avec, par Charles Mercier), in FNLP, Arguments n° 29 préc., sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p., pp. 107 et s., spéc. 108-109 (souligné dans le texte). Alors secrétaire général de la Libre Pensée, son désormais vice-président écrit page 21 : « À la fin du Rapport, l’Alsace-Moselle est mentionnée, mais c’est pour soutenir le maintien du Statut clérical d’exception auquel “les habitants sont particulièrement attachés” (v. ma thèse, pp. 359-360) en mélangeant sciemment les avantages sociaux et les privilèges religieux qui n’ont rien à voir avec » (le lien entre les deux ne peut cependant pas systématiquement être balayé d’un revers de main : v. Isabelle Nassoy, lalsace.fr 1-2 avr. 2021 ; Éric Sander, « Non à la suppression des jours fériés et chômés spécifiques à l’Alsace et à la Moselle », pétition change.org 2 juin 2023) ; avec Joachim Salmero, alors président de la Fédération (entre 1996 et 2007 selon la notice rédigée par Hugues Lenoir, complétée par Guillaume Davranche et Rolf Dupuy, maitron.fr), Christian Eyschen avait été auditionné par la Commission le 3 octobre 2003 : le texte de leur intervention est reproduit pp. 40 et s., avec dix pages plus loin au titre des propositions de la Libre pensée « la fin [de ce Statut], que nous ne saurions confondre avec les lois sociales progressistes acquises dans cette région ». Une tribune récente fait allusion à ces territoires, « où deux millions de salariés bénéficient, pour des raisons historiques, d’un régime de santé spécial. Sa généralisation dépend seulement de la volonté politique du gouvernement et des parlementaires de supprimer la rente des assurances-maladie privées dites “complémentaires”, moins égalitaires, moins solidaires et surtout moins efficientes que la Sécurité sociale » (François Bourdillon et alii, « Pour une assurance complémentaire gérée par la Sécurité sociale », Le Monde 27-28 oct. 2024, p. 27, quelques lignes après cet extrait – la Une du quotidien étant titrée « Santé : vers une hausse du ticket modérateur », avec un renvoi à la page 8 (v. déjà la légende de ma première illustration le 31 décembre 2023) ; v. aussi Alban Beaudouin, Jean-Loup de Saint-Phalle et Richard Monvoisin, « Pour une Sécurité sociale de la mort. Les obsèques ne sont pas une marchandise », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 21 (extrait) : après avoir renvoyé à leur encadré intitulé « Des édits de Louis XIV à la loi Sueur [du 8 janvier 1993] » (extrait, mentionnant les « libres-penseurs ») et au livre de Laura Petersell et Kévin Certenais, Régime Général. Pour une Sécurité sociale de l’alimentation (Riot, 2022), les auteurs en défendent une qui, « suivant l’esprit qui présida à sa création en 1945, [couvrirait] le risque décès, par l’universalisation et l’automatisation des aides existantes et une assistance administrative gratuite aux familles » ; outre celle de la CPAM sont évoquées dans l’article les aides de la Carsat et la CAF, en précisant qu’un « milliard d’euros par an ne seraient jamais réclamés, selon le site Tranquillite.fr » (où l’on trouve notamment ce texte de son fondateur Teddy Bredelet, 1er janv. 2024)..

Photo D.R., reprise depuis A.B. et T.C., « Nécrologie : Jean Debraine, figure de l’engagement militant », ledauphine.com 21-22 oct. 2024 (extrait ; pour des citations de la version publiée – postée sur Facebook par la Fédération Ardèche-Drôme de la Libre Pensée –, v. les notes 25 et 28 du présent billet)

Je n’aurais sans doute pas eu connaissance de ce texte si je n’avais pas rencontré Jean Debraine (v. ci-contre) ; c’était il y a un peu plus de six mois, à l’occasion d’un… jour férié25J’espère avoir l’occasion, dans les mois à venir, de révéler ce qui m’avait conduit à le reconnaître et l’aborder, avenue Félix Faure à Valence, lors de la « fête du Travail Journée internationale de lutte pour les droits des travailleuses et travailleurs ; je m’en tiens ici à confier qu’après quelques minutes d’échanges, Jean m’avait donné un bulletin de la Fédération Ardéchoise et Drômoise de Libre Pensée (FADLP, ou LP 07-26, dont il était secrétaire), afin d’utiliser l’adresse mail figurant en dernière page ; j’allais lui écrire au terme de ce mercredi 1er mai et il me répondra le lendemain, en m’adressant une abondante documentation qui viendra alimenter un texte projeté depuis quelques temps. Si j’avais pu avoir un aperçu de son activité militante (v. par ex. Frédérique Fays, « Les Libres Penseurs, ardents défenseurs de la laïcité », ledauphine.com 20 août 2016, à propos du Congrès national au lycée agricole du Valentin ; Thibaut Carage, « Loi Immigration : plus de 500 personnes ont manifesté contre une loi “raciste” », 14 janv. 2024) et l’écouter dans l’émission de Radio Diois enregistrée à Die le 9 mars (rdwa.fr le 15), j’ignorais son « goût pour l’architecture » et son passé de postier en Ardèche – où il été candidat aux législatives en 1986 –, tout comme le fait qu’il a « été correspondant local du Dauphiné libéré, de 2015 à 2019 », où travaille sa fille Agathe (A.B. et T.C., « Nécrologie : Jean Debraine, figure de l’engagement militant », édition du 21 oct. 2024, p. 23 ; texte posté sur Facebook par la FADLP, à laquelle il a adhéré en 1995). Le lendemain de la publication de ce Carnet, le quotidien consacrait sa Une à Charles Aznavour (1924-1918) ; page 3, une colonne était intitulée « Ces lieux marqués à jamais » : si la « liste est non exhaustive », elle commence par « le square qui porte son nom » à Valence, depuis son inauguration en sa présence en mai 2011, et qui se trouve devant le Centre du Patrimoine Arménien (CPA). Elle se termine surtout par le buste offert par la ville de Talin à sa jumelle Bourg-lès-Valence (en face de la rue du port, où j’ai habité pendant près de quinze ans). Il est alors sommairement indiqué : « Samedi 21 septembre 2024, l’hymne arménien, La Marseillaise et les célèbres chansons de l’artiste ont retenti au square Michel-Terisse (…) ». La ville bourcaine publiait alors une vidéo, sur sa page Facebook, sans même faire l’effort de couper « la bénédiction de la statue par deux prêtres d’églises arméniennes » (Lisa Guinic, francebleu.fr le 22). Il est probable que cela n’ait pas échappé au secrétaire de la FADLP…, en mai26Suivant le décret n° 2006-388 du 31 mars, et outre les 1er et 8 mai visés par l’article L3133-1 du Code du travail, le mois de mai est aussi celui de la Journée nationale des mémoires de la traite et de l’esclavage et de leurs abolitions, le 10 (wikipedia.org au 13 mars 2024) ; cette dernière est commémorée par des jours fériés spécifiques à l’outre-mer : le 22 en Martinique, le 27 en Guadeloupe et le 28 à Saint-Martin – depuis 2019, ainsi que le rappelait cette année Estelle Gasnet (soualigapost.com le 27), en précisant toutefois qu’« une erreur “matérielle” s’est glissée [en 2018 à l’article L3422-2] et n’a jamais été corrigée ». Ce texte législatif mentionne également le 10 juin en Guyane, le 27 avril à Mayotte et le 20 décembre à La Réunion (v. aussi Johanne Chung To Sang, Harry Amourani et Florent Marot, « Supprimer un jour férié de plus dans l’année ? À La Réunion, peu apprécient l’idée », le 30 oct.). Concernant la Polynésie, v. Delphine Barrais, « Ces îles françaises ont trois jours fériés supplémentaires et l’un d’eux va changer, voici pourquoi », ouest-france.fr le 12 juin : « le 5 mars (arrivée de l’Évangile), le 29 mars (Vendredi saint, férié comme en Alsace et en Moselle) et, à partir de 2025, le 20 novembre » (Matari’i i nia, qui « correspond au lever des Pléiades [constellations] » et viendra remplacer « la fête de l’Autonomie instaurée en 1985 par Gaston Flosse », dont la date rappelait « l’annexion de la Polynésie par la France le 29 juin 1890 »).. En ce 11 novembre27« 11 Novembre : pourquoi ce jour est-il férié, pourrait-il ne plus l’être ? », lavoixdunord.fr 5 nov. 2024 : « Ce jour-là [en 1918], à 5 h 45, dans le wagon-salon du Maréchal Foch, le ministre d’État allemand Erzberger signait l’armistice, marquant la fin des combats de la Première Guerre mondiale ». Outre le rassemblement ardéchois de Joyeuse, depuis vingt-et-un ans, la FADLP avait initié le 11 novembre 2023 son pendant drômois de Peyrins (avec la Fédération Nationale Laïque des Associations des Amis des monuments Pacifistes) ; à cette occasion, Jean Debraine avait prononcé un discours (reproduit dans Le Mécréant ardécho-drômois n° 175 – Bulletin de la FADLP – 4e trimestre 2023, pp. 10 à 12), dans lequel il affirmait : « Oui, ce qu’a fait le Hamas s’apparente à un crime de guerre du type d’Oradour-sur-Glane [le 10 juin 1944]. Mais ce que fait Tsahal aujourd’hui, cela s’apparente à un génocide du Peuple palestinien » (p. 11). Actualisé du fait de « l’invasion du Liban », le message de cette fin d’année 2024 reprend celui de Jean-Sébastien Pierre à Sartilly (Manche), le dimanche 17 mars (« Devant la stèle des caporaux de Souain, le président de la Libre pensée a appelé aux cessez-le-feu [à Gaza et en Ukraine] », ouest-france.fr le 18). Rappelant que la LP « est anticléricale, antimilitariste et internationaliste [et ne peut donc] rien avoir de commun avec les courants hégémoniques aujourd’hui au sein de la mouvance sioniste, qui prônent la synthèse entre le nationalisme, le militarisme et le cléricalisme et entendent embrigader tous les juifs du monde (estampillés « diaspora ») sous sa bannière », v. le dossier réalisé par Pierre-Yves Modicom, Claude Singer, Quentin Dauphiné, José Arias et Jean-Marc Schiappa pour la Commission Administrative Nationale de la FNLP, « Contre l’antisémitisme, dissiper les mirages du sionisme », La Raison juill.-août 2024, n° 693, pp. 16-21, spéc. p. 19 ; je renvoie aussi à la fin de mon billet du 15 janvier, et au début de celui du 9 avril, en ajoutant le lien conduisant aux ordonnances des 24 mai, 28 mars et 26 janvier ; dans la première, intitulée Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), v. le § 49, pp. 16-17 (avec la déclaration de Philippe Lazzarini du 13 se terminant sur le « sort des enfants de Gaza », dont des « centaines de milliers n’ont plus accès à l’éducation ») ; v. aussi l’analyse de Rafaëlle Maison, « À la Cour internationale de justice, un revers pour Israël », orientxxi.info le 30, ce reportage de CNN, publié sur X par le compte Caisses de grève le 20 avr. et ces liens ultérieurs : à propos de l’avis consultatif du 19 juillet, Jean-Pierre Filiu, « Quand la CIJ parle d’un seul et même “territoire palestinien occupé” », lemonde.fr le 18 août, Catherine Maia et Ghislain Poissonnier, « Avis de la CIJ de 2024 relatif à l’occupation du Territoire palestinien : une analyse au prisme du droit international des droits humains », La Revue des Droits de l’Homme ADL, le 7 oct., ainsi que Farah Safi et Patrick Zahnd (Juristes pour le respect du droit international), « Ventes d’armes à Israël : “La position de la France demeure timide et en retrait de ses engagements internationaux” », lemonde.fr le 5 nov. ; d’un point de vue éducatif et sanitaire, « Éducide en Palestine – Défendons le droit universel à l’éducation ! », solidarite-laique.org le 4 juin (renvoyant pour ce terme à Neve Gordon, professeur de droit à Londres et Lewis Turner, maître de conférences en politique internationale à Newcastle ; v. aussi le 27 oct.) ; « Bande de Gaza : le médecin humanitaire Raphaël Pitti fait part de “sa colère très profonde” face à l’absence “de pression politique” de la part “des Occidentaux” », francetvinfo.fr le 16 août ; Céline Martelet, « Les enfants de Gaza privés d’école », politis.fr le 27 (extrait) ; « UNRWA bannie d’Israël : crime et écœurement », regards.fr le 29 oct. (confirmant ce telex intitulé « L’UNRWA, un témoin indésirable ? », monde-diplomatique.fr le 2 févr.), « Proche-Orient : les enfants pris au piège d’une guerre sans fin », unicef.fr le 6 nov. (ajouts « mandats d’arrêt émis mercredi 21 novembre par la Cour pénale internationale (CPI) contre le premier ministre israélien (…) et son ex-ministre de la défense, Yoav Gallant », à partir de Stéphanie Maupas, « Le mandat d’arrêt de la CPI contre Benyamin Nétanyahou, un tournant pour la justice internationale », lemonde.fr extrait ; dans un entretien avec Axel Nodinot, Béligh Nabli note qu’il est venu « toutefois s’entrechoquer avec un autre événement – politique, celui-là – de la veille : le rejet [au Conseil de sécurité de l’ONU] de la résolution appelant à un cessez-le-feu à Gaza et au Liban, après que les États-Unis ont usé de leur droit de veto » ; il n’en demeure pas moins que cette décision « vient ouvrir une brèche, une perspective qui n’existe pas aujourd’hui sur le plan politique et diplomatique, dans la mesure où Israël continue de bénéficier d’un soutien de ses principaux alliés » : v. humanite.fr le 21 ; Bastien Loeuillot, « “Immunité” de Nétanyahou : une pluie de condamnations à gauche, de vives critiques de juristes et d’ONG », liberation.fr (avec AFP) le 27 : « “La France a cédé aux exigences israéliennes, on n’aurait pas fait ça avec Poutine”, regrette l’eurodéputée insoumise Rima Hassan ».)., dix jours après « un dernier hommage lors d’une cérémonie publique et laïque »28Je reprends ici les formules d’un message de la Commission administrative de la FADLP le 18 octobre dernier, précisant que cette cérémonie se déroulerait à Mercurol le vendredi 1er novembre (Justine Audollent, « Toussaint 2024 : pourquoi le 1er novembre est-il un jour férié ? », rtl.fr 1er nov. 2024). Ce jour-là, je fêtais mes quarante ans, à quelques encablures des « chemins de terre de Gilhac-et-Bruzac » – évoqués dans la nécrologie précitée ; il y est ensuite noté que, sa « fibre humaniste, internationaliste aussi, Jean Debraine la ressent dès ses 14 ans et un voyage en Algérie ». Les Fils de la Toussaint, tel est le titre du premier volume sur La guerre d’Algérie d’Yves Courrière (Fayard, 1968) ; ainsi que le rappelait Denis Sieffert il y a une dizaine d’années, « ces indépendantistes algériens qui, le 1er novembre 1954, ont déclenché l’insurrection », étaient neuf (« Aït Ahmed, l’homme qui a gagné la guerre et perdu la paix », politis.fr 27 déc. 2015 ; v. aussi Camille Renard, radiofrance.fr 12 janv. 2021 : « En 1989, à l’occasion d’un documentaire de Patrice Gélinet diffusé sur France Culture, Hocine Aït Ahmed témoignait des sources de son engagement en Algérie (…), à partir de l’événement fondateur du massacre de Sétif » ; sur cet « autre 8 mai 1945 », écouter Anaïs Kien, podcast Le Journal de l’histoire 11 mai 2021). Au passage, « Football : Rachid Mekhloufi, attaquant légendaire [de l’ASSE] et symbole de l’indépendance algérienne, est décédé », rfi.fr 8 nov. 2024 (v. aussi ce texte « pour les jeunes », signé Adel Bentaha pour sofoot.com le 9 ; ajout le 23 du « bel hommage de l’AS Saint-Étienne », au coup d’envoi du match contre Montpellier, et de cette vidéo sur Mekloufi « vu par Éric Cantona – Les rebelles du foot », Portraits du Monde 26 mai, spéc. l’échange avec Bernard Pivot à partir de la 10ème minute, « les morts de 45 à Sétif » étant aussi évoqués vers la 3ème par Michel Nait-Challal, auteur de Dribbleurs de l’indépendance. L’incroyable histoire de l’équipe de football du FLN algérien, éd. Prolongations, 2008)., je tiens à saluer sa mémoire29Le 19 mai, je lui avais adressé l’extrait de thèse précité(e), à la veille du lundi de Pentecôte (v. le début du présent billet). Nous avions alors plusieurs fois remis notre rencontre à plus tard, en pensant pouvoir nous voir à l’occasion des AmFIs à Châteauneuf-sur-Isère (la Fédération Ardèche-Drôme de la Libre Pensée tenait un stand au village associatif) ; y passant le samedi 24 août, je n’avais pas voulu interrompre la conversation dans laquelle il était engagé – alors que j’étais moi-même pressé. On croit toujours qu’on pourra recroiser une personne à l’avenir….

Notes

1 « Mise en place l’année suivant la canicule meurtrière de 2003, qui a fait 15.000 morts, elle permet de financer la prise en charge des personnes dépendantes. Ce jour de travail de 7 heures non rémunéré a été initialement fixé au lundi de Pentecôte. Mais depuis 2008 – quand le lundi de Pentecôte est redevenu férié face à la pression des syndicats et de l’opinion – il est désormais laissé à l’appréciation des employeurs publics et privés » (Flavien Groyer, « Le lundi de Pentecôte est-il férié, chômé, rémunéré ? », francebleu.fr 13-18 mai 2024 ; « Suppression d’un jour férié : comment a été instaurée la journée de solidarité envers les personnes âgées et handicapées ? », ladepeche.fr le 11 nov., rappelant qu’en 2004, il y avait « là en germe les composantes de ce que l’on appelle la cinquième branche de la Sécurité sociale, qui verra le jour 15 ans plus tard » (v. la note suivante).
2 Chantal Deseyne, Solanges Nadille et Anne Souyris, Situation des Ehpad, Rapport d’information n° 778 (2023-2024), déposé le 25 septembre 2024, pp. 16, 115, 198, 206 et 208, rappelant qu’elles ne faisaient que relancer l’une des « pistes de financement envisagées par le rapport Vachey sur la préfiguration de la branche autonomie » (intitulé La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement, ce rapport remis le 15 septembre 2020 consacrait son « Annexe IV » à cette éventuelle « deuxième journée de solidarité », pp. 36 et s. ; page 8, il soulignait cependant « des effets incertains sur l’économie » en remarquant que les « partenaires sociaux y sont dans l’ensemble hostiles ») ; « Fin des 35 heures, suppression d’un jour férié… Gérald Darmanin critique les hausses d’impôts voulues par le gouvernement et assure que les Français doivent “travailler plus” », lindependant.fr (avec AFP) le 6 oct., reprenant les propos du député du Nord dans une interview au quotidien Les Échos ; Guillaume Jacquot, « Seconde journée de solidarité : l’impulsion pourrait venir du Sénat », publicsenat.fr le 4 nov., citant notamment deux des trois co-autrices du rapport précité : alors que la sénatrice écologiste Anne Souyris « encourageait plutôt un relèvement de la CSG », Chantal Deseyne (LR) défend l’idée de sept « nouvelles heures travaillées, mais non rémunérées », sans forcément supprimer un jour férié en particulier, par « un amendement au PLFSS dans deux semaines » (à propos de ces sigles, v. lafinancepourtous.com le 4 sept.). Ajouts au 23 novembre de l’article publié ce jour dans Le Monde par Bertrand Bissuel et Thibaud Métais, « Le temps de travail de nouveau en débat », p. 9 (extrait), signalant l’adoption ce mercredi 20 de l’amendement annoncé, contre lequel « les syndicats sont vent debout » et finalement présenté par la mayennaise Élisabeth Doineau (UDI), rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale ; exprimant le 21 « l’avis [défavorable] du gouvernement sur la proposition du Sénat », Laurent Saint-Martin « trouve [cependant] que le débat a bien été posé » ; comparer Thomas Piketty sur francetvinfo.fr le même jour, l’économiste insistant d’emblée sur le « grand gâchis humain » en cours, les besoins en productivité nécessitant d’« investir beaucoup plus dans l’éducation, dans l’Université notamment ».
3 Isabelle Ficek, Leïla de Comarmond et Solenn Poullennec, « Sécurité sociale : le gouvernement ouvert au débat sur la suppression d’un deuxième jour férié », lesechos.fr 29 oct. 2024, citant les ministres du Budget (Laurent Saint-Martin, sur TF1) et de l’Économie et des Finances (Antoine Armand, sur LCI deux jours avant).
4 Marie Nidiau, « Suppression d’un deuxième jour férié : Matignon ferme la porte à cette mesure », latribune.fr 5 nov. 2024
5 Juliette Brossault, « “Pas besoin d’un jour férié” : Copé favorable à la suppression du 11-Novembre pour “faire des économies” », bfmtv.com 11 nov. 2024 : « “Il faut effectivement travailler plus”, conclut l’ancien ministre du Budget de Jean-Pierre Raffarin sous Jacques Chirac [sur France Inter, après avoir soutenu qu’ils auraient] “courageusement” supprimé le jour de Pentecôte » (v. supra).
6 « “Nous sommes attachés au 11-Novembre” : Michel Barnier n’envisage pas de supprimer ce jour férié », leparisien.fr 11 nov. 2024
7 « Fondé sous le nom d’Union pour la majorité présidentielle en vue des élections législatives de 2002, [c]e parti devient quelques mois plus tard l’Union pour un mouvement populaire, gardant les mêmes initiales » UMP ; au 4 novembre, la page wikipedia.org qui lui est consacrée rappelle qu’il « soutient les gouvernements nommés par Jacques Chirac entre 2002 et 2007, puis par Nicolas Sarkozy entre 2007 et 2012 », avant que ce dernier ne le fasse renommer, trois ans plus tard, Les Républicains. En 2004, alors que Michel Barnier avait remplacé Dominique de Villepin au ministère des Affaires étrangères le 31 mars, Jean-François Copé restait porte-parole du Gouvernement et ministre délégué lors du remaniement du 29 novembre, mais désormais au Budget (à l’Intérieur auparavant).
8 Dans son éditorial du jour, Philippe Rioux y voit « un coup de communication (…) pour éviter un vrai débat plus au fond » (« Suppression d’un jour férié : écran de fumée », ladepeche.fr 11 nov. 2024).
9 V. mon billet du 15 septembre 2018, avec un peu d’histoire des idées (solidaristes).
10 Au passage, Louis Maurin, « Neuf millions de pauvres, un chiffre exagéré », inegalites.fr 24 oct. 2024 : « Au seuil à 50 % du niveau de vie médian – seuil plus restrictif – notre pays compte déjà cinq millions de pauvres. Un niveau suffisant pour justifier tous les appels à la solidarité ».
11 Benoît Bréville, « Une idée dangereuse », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 1, cet éditorial renvoyant à Mark Blyth, Austerity. The History of a Dangerous Idea (Oxford University Press, 2013).
12 Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, p. 11 : suit une énumération reproduite par Alain Policar dans sa Préface à FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p. (pp. 4 et s., spéc. page 10).
13 V. toutefois Jean-Marc Proust, « Supprimer un jour férié ? Oui, mais pour en faire une journée sans religions », marianne.net 7 nov. 2024 (extrait).
14 Dans un éditorial, Laurence Ferrari postule qu’il s’agira en définitive de supprimer « un jour de fête catholique » (cnews.fr 30-31 oct. 2024 ; dans le même sens, v. celui d’Arnaud Alibert, « Jours fériés, jours heureux, jours sérieux », la-croix.com le 31).
15 Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 344 à 347 ; je tiens un extrait de ces trois pages à la disposition de toute personne qui le souhaiterait grâce au formulaire de contact – je l’avais opéré pour le partager à mes étudiant·es de la faculté de droit de Grenoble, le 29 mars 2018, avec notamment cet article de presse intitulé « L’histoire des jours fériés religieux » (et ceux « chrétiens dans l’Union européenne » : v. Nicolas Senèze, la-croix.com 1er juin 2012).
16 « Dans le monde de l’entreprise », le Rapport proposait d’instaurer la « pratique du crédit du jour férié [qui] est déjà courante dans certains pays ou organisations internationales » : v. la citation reprise à la fin de ce document de l’Académie de Versailles, « Faut-il remettre en question le calendrier des jours fériés à l’école au nom de la laïcité ? », 7 p . ; à la page 6 se trouve reproduit un extrait du Vademecum « La laïcité à l’école » (déc. 2021, fiche 16). Concernant ce texte et outre ma note sous CAA Lyon, 23 juill. 2019, n° 17LY04351 (« Interdiction des mères voilées dans les locaux scolaires : quand la laïcité repose sur une croyance », Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai), v. récemment FNLP, Vade-mecum laïcité : une intrusion dans l’école au nom des obscures valeurs de la Macronie, mai 2024 – floréal CCXXXII, n° 28 de la collection Arguments de la Libre Pensée, 62 p., avec une préface de l’historienne Valentine Zuber et une recension par Christian Eyschen, pp. 47 et s., du livre dirigé par Françoise Lantheaume et Sébastien Urbanski, Laïcité, discriminations, racisme. Les professionnels de l’éducation à l’épreuve (PUL, 2023). Dans la première partie (pp. 7 et s.), Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger taclent aux pages 11 et 16 ce « Conseil [des “sages”] qui n’a jamais répondu aux demandes de la Libre Pensée pour agir sur des cas concrets en défense de la Laïcité, mais qui consacre tous ses efforts à la chasse aux musulmans » ; « les recensions des atteintes “graves” à la Laïcité se résument au port de signes et vêtements religieux (devinez lesquels), mais jamais à la loi Debré, les autres lois antilaïques ou la Hanoucca à l’Élysée ». V. à ce sujet Romain David, « Hanouka à l’Elysée : « “Faute morale”, “idée stupide”, “sujet explosif”… Les sénateurs fustigent l’attitude d’Emmanuel Macron », publicsenat.fr 8 déc. 2023 ; Nicolas Cadène, « La présence du président de la République à une manifestation religieuse n’est pas le problème », vidéo lemonde.fr ; Guillaume Baticle et Jean-Paul Markus (relus par Clément Benelbaz), lessurligneurs.eu les 11 et 22 ; CE, 30 oct. 2024, Association des libres penseurs de France (ADLPF) et a., n° 490587, 491096, 492651, 492656 et 492663, cons. 2, estimant qu’« il ne ressort pas des pièces du dossier que le Président de la République aurait pris une décision autorisant la tenue d’une cérémonie religieuse » (rendant compte de la décision, lemonde.fr (avec AFP) cite Laurent Domingo : « Lors de l’audience, le 26 septembre, le rapporteur public avait souligné que la requête “n’a pas l’objet que les requérants aimeraient lui donner » car « il n’existe pas de décision administrative d’allumer la bougie” ») ; comparer l’extrait placé au début de la vidéo précitée : le 7 décembre, le grand rabbin de France Haïm Korsia avait pourtant bien pris soin de solliciter une telle autorisation…
17 « Michèle Teboul, directrice du Conseil Représentatif des institutions juives de France (Crif) et l’islamologue Ghaleb Bencheikh, décrivent ces deux événements » (qu’il n’est pas possible de dater selon les calendriers grégorien – dont dépend le jour de l’An – ou révolutionnaire, auquel se réfère la Libre Pensée dans ses publications précitées ; v. le convertisseur du site herodote.net) : « Yom Kippour est célébré huit jours après le nouvel An, Roch Hachana. La date est déterminée par le calendrier juif – qui compte 11 mois – donc chaque année, c’est décalé. Et tous les 33 ans, Kippour et l’Aïd-el-Kebir sont fêtés le même jour » ; « Une fois que la petite fête est fixée (l’Aïd-el-Fitr, NDLR), celle-ci en découle automatiquement puisque c’est 70 jours après la fin du ramadan. L’Aïd-el-Kebir n’est pas assujetti à l’observation de la lune, la date est donc unanime » (entretien avec Audrey Avesque, « L’Aïd et Kippour célébrés en même temps, une première depuis 33 ans », laprovence.com 3 oct. 2014).
18 De l’autre membre de la commission Stasi sus-évoqué, Patrick Weil (entretien avec, par Samuel Lacroix), « Il faut garantir à chacun un jour férié au choix », philomag.com 26 mai 2023
19 « Mais pourquoi le lundi de Pâques est-il férié alors qu’il ne correspond à rien ? », tf1info.fr 21 avr. 2019 ; v. aussi Charles Conte, « Les banquets du “vendredi-dit-saint” contre les interdits religieux », blogs.mediapart.fr le 18 : « La date de Pâques, fête mobile, est traditionnellement fixée au dimanche après la pleine lune qui suit le 21 mars (équinoxe de printemps). Le carême (du latin quadragesima qui signifie quarantième ou quarantaine) désigne la période de quarante jours (dimanches non compris) qui précède Pâques. Peu suivi de nos jours, le carême était comparable, par la rigueur de ses interdits, au ramadan musulman. C’était une période de jeûne, plus ou moins rigoureux, en particulier pour la viande, et d’abstinence sexuelle obligatoire pour tous ».
20 « Le dimanche de Pâques (…) détermine à la fois les dates de l’Ascension [un jeudi, à ne confondre avec l’Assomption, le 15 août] et de la Pentecôte » (Maxime Ferrer, générateur lemonde.fr 1er janv. 2022- 30 oct. 2024) ; elle se célèbre « à une date mobile calculée par le Comput. Elle tombe toujours un dimanche entre le 10 mai et le 13 juin. Elle se poursuit le lendemain dans certains pays par un lundi férié ou chômé payé, dit “lundi de Pentecôte” » (wikipedia.org au 31 oct. 2024).
21 Comparer Christian Eyschen et Benoît Schneckenburger, « Errare humanum est, sed vademecum diabolicum », in FNLP, Arguments n° 28 préc., p. 16 : « Rappelons la position de la Libre Pensée [v. aussi la note suivante] : (…) [l]a Laïcité n’a pas besoin de journée officielle, mais de mesures visant à la défendre concrètement. Le reste est du cinéma médiatique, et ce n’est pas une journée par an qu’il faut la défendre, mais tous les jours ». Je ne me souviens pas d’avoir déjà traité de cette question sur ce site ; le 20 novembre 2018, à l’occasion de la « Journée des droits de l’enfant », j’en abordais une connexe en écrivant à propos des jours fériés religieux que, dans un État laïque de droits, leur remplacement par des journées internationales comme celle de ceux de tous les enfants pourrait être envisagé. Le risque serait toutefois d’alimenter les critiques des détracteurs d’une prétendue religion de ces droits (en renvoyant à la conclusion générale de ma thèse préc., pp. 1227-1228).
22 Comparer Christian Eyschen, recensant le livre de Jean-Marc Schiappa, La France n’a pas de racines chrétiennes, fnlp.fr 26 mars 2017 ; Jacqueline Lalouette (entretien avec, par Samuel Dufay), « Les jours fériés, une tradition française : “Le sens de certaines fêtes s’est transformé” », lexpress.fr 29 mai 2023 (extrait) : « Depuis longtemps, les libres penseurs réclament la suppression des fêtes religieuses, ou, à défaut, leur changement de signification. Ainsi, dès les années 1890, la Fédération française de la Libre Pensée laïcisa la fête de Noël en célébrant des fêtes de l’enfance dites “Noëls humaines”». Recensant son livre Jours de fête. Jours fériés et fêtes légales dans la France contemporaine, Tallandier, 2010, v. Robert Solé, lemonde.fr le 22 sept. ; soulignant les « analyses neuves sur la laïcisation de l’espace et du temps » qui figuraient déjà dans sa « thèse de doctorat d’État », publiée sous le titre La libre pensée en France (1848-1940), Albin Michel, 1997 (préface de Maurice Agulhon), v. la recension de Jean-Marie Mayeur, Annales 1999, n°54-6, pp. 1403 à 1405 (spéc. p. 1404).
23 Après les développements susmentionnés de ma thèse (2017), j’aborde à partir de la page 348 le mécanisme de dispense de l’enseignement religieux en Alsace-Moselle, évoqué par ailleurs dans mes billets du 9 juillet 2018 et celui publié à l’attention première de mes L3 en Sciences de l’éducation – le 30 avril 2020 (dans le II. B. ; v. plus largement celui autour de l’appel de note 11 dans ma dissertation du 26 mars de la même année, rédigée pour mes M1 en contentieux constitutionnel). Ajout au 23 novembre, concernant les références de Jean Baubérot à la « question du voile » et « la loi Debré », d’un renvoi à d’autres billets, d’une part des 26 janvier et août 2018, d’autre part aux (appels de) notes 15 à 19 pour le dernier publié (fin septembre 2024).
24 Jean Baubérot (entretien avec, par Charles Mercier), in FNLP, Arguments n° 29 préc., sept. 2024 – fructidor CCXXXII, 119 p., pp. 107 et s., spéc. 108-109 (souligné dans le texte). Alors secrétaire général de la Libre Pensée, son désormais vice-président écrit page 21 : « À la fin du Rapport, l’Alsace-Moselle est mentionnée, mais c’est pour soutenir le maintien du Statut clérical d’exception auquel “les habitants sont particulièrement attachés” (v. ma thèse, pp. 359-360) en mélangeant sciemment les avantages sociaux et les privilèges religieux qui n’ont rien à voir avec » (le lien entre les deux ne peut cependant pas systématiquement être balayé d’un revers de main : v. Isabelle Nassoy, lalsace.fr 1-2 avr. 2021 ; Éric Sander, « Non à la suppression des jours fériés et chômés spécifiques à l’Alsace et à la Moselle », pétition change.org 2 juin 2023) ; avec Joachim Salmero, alors président de la Fédération (entre 1996 et 2007 selon la notice rédigée par Hugues Lenoir, complétée par Guillaume Davranche et Rolf Dupuy, maitron.fr), Christian Eyschen avait été auditionné par la Commission le 3 octobre 2003 : le texte de leur intervention est reproduit pp. 40 et s., avec dix pages plus loin au titre des propositions de la Libre pensée « la fin [de ce Statut], que nous ne saurions confondre avec les lois sociales progressistes acquises dans cette région ». Une tribune récente fait allusion à ces territoires, « où deux millions de salariés bénéficient, pour des raisons historiques, d’un régime de santé spécial. Sa généralisation dépend seulement de la volonté politique du gouvernement et des parlementaires de supprimer la rente des assurances-maladie privées dites “complémentaires”, moins égalitaires, moins solidaires et surtout moins efficientes que la Sécurité sociale » (François Bourdillon et alii, « Pour une assurance complémentaire gérée par la Sécurité sociale », Le Monde 27-28 oct. 2024, p. 27, quelques lignes après cet extrait – la Une du quotidien étant titrée « Santé : vers une hausse du ticket modérateur », avec un renvoi à la page 8 (v. déjà la légende de ma première illustration le 31 décembre 2023) ; v. aussi Alban Beaudouin, Jean-Loup de Saint-Phalle et Richard Monvoisin, « Pour une Sécurité sociale de la mort. Les obsèques ne sont pas une marchandise », Le Monde diplomatique nov. 2024, p. 21 (extrait) : après avoir renvoyé à leur encadré intitulé « Des édits de Louis XIV à la loi Sueur [du 8 janvier 1993] » (extrait, mentionnant les « libres-penseurs ») et au livre de Laura Petersell et Kévin Certenais, Régime Général. Pour une Sécurité sociale de l’alimentation (Riot, 2022), les auteurs en défendent une qui, « suivant l’esprit qui présida à sa création en 1945, [couvrirait] le risque décès, par l’universalisation et l’automatisation des aides existantes et une assistance administrative gratuite aux familles » ; outre celle de la CPAM sont évoquées dans l’article les aides de la Carsat et la CAF, en précisant qu’un « milliard d’euros par an ne seraient jamais réclamés, selon le site Tranquillite.fr » (où l’on trouve notamment ce texte de son fondateur Teddy Bredelet, 1er janv. 2024).
25 J’espère avoir l’occasion, dans les mois à venir, de révéler ce qui m’avait conduit à le reconnaître et l’aborder, avenue Félix Faure à Valence, lors de la « fête du Travail Journée internationale de lutte pour les droits des travailleuses et travailleurs ; je m’en tiens ici à confier qu’après quelques minutes d’échanges, Jean m’avait donné un bulletin de la Fédération Ardéchoise et Drômoise de Libre Pensée (FADLP, ou LP 07-26, dont il était secrétaire), afin d’utiliser l’adresse mail figurant en dernière page ; j’allais lui écrire au terme de ce mercredi 1er mai et il me répondra le lendemain, en m’adressant une abondante documentation qui viendra alimenter un texte projeté depuis quelques temps. Si j’avais pu avoir un aperçu de son activité militante (v. par ex. Frédérique Fays, « Les Libres Penseurs, ardents défenseurs de la laïcité », ledauphine.com 20 août 2016, à propos du Congrès national au lycée agricole du Valentin ; Thibaut Carage, « Loi Immigration : plus de 500 personnes ont manifesté contre une loi “raciste” », 14 janv. 2024) et l’écouter dans l’émission de Radio Diois enregistrée à Die le 9 mars (rdwa.fr le 15), j’ignorais son « goût pour l’architecture » et son passé de postier en Ardèche – où il été candidat aux législatives en 1986 –, tout comme le fait qu’il a « été correspondant local du Dauphiné libéré, de 2015 à 2019 », où travaille sa fille Agathe (A.B. et T.C., « Nécrologie : Jean Debraine, figure de l’engagement militant », édition du 21 oct. 2024, p. 23 ; texte posté sur Facebook par la FADLP, à laquelle il a adhéré en 1995). Le lendemain de la publication de ce Carnet, le quotidien consacrait sa Une à Charles Aznavour (1924-1918) ; page 3, une colonne était intitulée « Ces lieux marqués à jamais » : si la « liste est non exhaustive », elle commence par « le square qui porte son nom » à Valence, depuis son inauguration en sa présence en mai 2011, et qui se trouve devant le Centre du Patrimoine Arménien (CPA). Elle se termine surtout par le buste offert par la ville de Talin à sa jumelle Bourg-lès-Valence (en face de la rue du port, où j’ai habité pendant près de quinze ans). Il est alors sommairement indiqué : « Samedi 21 septembre 2024, l’hymne arménien, La Marseillaise et les célèbres chansons de l’artiste ont retenti au square Michel-Terisse (…) ». La ville bourcaine publiait alors une vidéo, sur sa page Facebook, sans même faire l’effort de couper « la bénédiction de la statue par deux prêtres d’églises arméniennes » (Lisa Guinic, francebleu.fr le 22). Il est probable que cela n’ait pas échappé au secrétaire de la FADLP…
26 Suivant le décret n° 2006-388 du 31 mars, et outre les 1er et 8 mai visés par l’article L3133-1 du Code du travail, le mois de mai est aussi celui de la Journée nationale des mémoires de la traite et de l’esclavage et de leurs abolitions, le 10 (wikipedia.org au 13 mars 2024) ; cette dernière est commémorée par des jours fériés spécifiques à l’outre-mer : le 22 en Martinique, le 27 en Guadeloupe et le 28 à Saint-Martin – depuis 2019, ainsi que le rappelait cette année Estelle Gasnet (soualigapost.com le 27), en précisant toutefois qu’« une erreur “matérielle” s’est glissée [en 2018 à l’article L3422-2] et n’a jamais été corrigée ». Ce texte législatif mentionne également le 10 juin en Guyane, le 27 avril à Mayotte et le 20 décembre à La Réunion (v. aussi Johanne Chung To Sang, Harry Amourani et Florent Marot, « Supprimer un jour férié de plus dans l’année ? À La Réunion, peu apprécient l’idée », le 30 oct.). Concernant la Polynésie, v. Delphine Barrais, « Ces îles françaises ont trois jours fériés supplémentaires et l’un d’eux va changer, voici pourquoi », ouest-france.fr le 12 juin : « le 5 mars (arrivée de l’Évangile), le 29 mars (Vendredi saint, férié comme en Alsace et en Moselle) et, à partir de 2025, le 20 novembre » (Matari’i i nia, qui « correspond au lever des Pléiades [constellations] » et viendra remplacer « la fête de l’Autonomie instaurée en 1985 par Gaston Flosse », dont la date rappelait « l’annexion de la Polynésie par la France le 29 juin 1890 »).
27 « 11 Novembre : pourquoi ce jour est-il férié, pourrait-il ne plus l’être ? », lavoixdunord.fr 5 nov. 2024 : « Ce jour-là [en 1918], à 5 h 45, dans le wagon-salon du Maréchal Foch, le ministre d’État allemand Erzberger signait l’armistice, marquant la fin des combats de la Première Guerre mondiale ». Outre le rassemblement ardéchois de Joyeuse, depuis vingt-et-un ans, la FADLP avait initié le 11 novembre 2023 son pendant drômois de Peyrins (avec la Fédération Nationale Laïque des Associations des Amis des monuments Pacifistes) ; à cette occasion, Jean Debraine avait prononcé un discours (reproduit dans Le Mécréant ardécho-drômois n° 175 – Bulletin de la FADLP – 4e trimestre 2023, pp. 10 à 12), dans lequel il affirmait : « Oui, ce qu’a fait le Hamas s’apparente à un crime de guerre du type d’Oradour-sur-Glane [le 10 juin 1944]. Mais ce que fait Tsahal aujourd’hui, cela s’apparente à un génocide du Peuple palestinien » (p. 11). Actualisé du fait de « l’invasion du Liban », le message de cette fin d’année 2024 reprend celui de Jean-Sébastien Pierre à Sartilly (Manche), le dimanche 17 mars (« Devant la stèle des caporaux de Souain, le président de la Libre pensée a appelé aux cessez-le-feu [à Gaza et en Ukraine] », ouest-france.fr le 18). Rappelant que la LP « est anticléricale, antimilitariste et internationaliste [et ne peut donc] rien avoir de commun avec les courants hégémoniques aujourd’hui au sein de la mouvance sioniste, qui prônent la synthèse entre le nationalisme, le militarisme et le cléricalisme et entendent embrigader tous les juifs du monde (estampillés « diaspora ») sous sa bannière », v. le dossier réalisé par Pierre-Yves Modicom, Claude Singer, Quentin Dauphiné, José Arias et Jean-Marc Schiappa pour la Commission Administrative Nationale de la FNLP, « Contre l’antisémitisme, dissiper les mirages du sionisme », La Raison juill.-août 2024, n° 693, pp. 16-21, spéc. p. 19 ; je renvoie aussi à la fin de mon billet du 15 janvier, et au début de celui du 9 avril, en ajoutant le lien conduisant aux ordonnances des 24 mai, 28 mars et 26 janvier ; dans la première, intitulée Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), v. le § 49, pp. 16-17 (avec la déclaration de Philippe Lazzarini du 13 se terminant sur le « sort des enfants de Gaza », dont des « centaines de milliers n’ont plus accès à l’éducation ») ; v. aussi l’analyse de Rafaëlle Maison, « À la Cour internationale de justice, un revers pour Israël », orientxxi.info le 30, ce reportage de CNN, publié sur X par le compte Caisses de grève le 20 avr. et ces liens ultérieurs : à propos de l’avis consultatif du 19 juillet, Jean-Pierre Filiu, « Quand la CIJ parle d’un seul et même “territoire palestinien occupé” », lemonde.fr le 18 août, Catherine Maia et Ghislain Poissonnier, « Avis de la CIJ de 2024 relatif à l’occupation du Territoire palestinien : une analyse au prisme du droit international des droits humains », La Revue des Droits de l’Homme ADL, le 7 oct., ainsi que Farah Safi et Patrick Zahnd (Juristes pour le respect du droit international), « Ventes d’armes à Israël : “La position de la France demeure timide et en retrait de ses engagements internationaux” », lemonde.fr le 5 nov. ; d’un point de vue éducatif et sanitaire, « Éducide en Palestine – Défendons le droit universel à l’éducation ! », solidarite-laique.org le 4 juin (renvoyant pour ce terme à Neve Gordon, professeur de droit à Londres et Lewis Turner, maître de conférences en politique internationale à Newcastle ; v. aussi le 27 oct.) ; « Bande de Gaza : le médecin humanitaire Raphaël Pitti fait part de “sa colère très profonde” face à l’absence “de pression politique” de la part “des Occidentaux” », francetvinfo.fr le 16 août ; Céline Martelet, « Les enfants de Gaza privés d’école », politis.fr le 27 (extrait) ; « UNRWA bannie d’Israël : crime et écœurement », regards.fr le 29 oct. (confirmant ce telex intitulé « L’UNRWA, un témoin indésirable ? », monde-diplomatique.fr le 2 févr.), « Proche-Orient : les enfants pris au piège d’une guerre sans fin », unicef.fr le 6 nov. (ajouts « mandats d’arrêt émis mercredi 21 novembre par la Cour pénale internationale (CPI) contre le premier ministre israélien (…) et son ex-ministre de la défense, Yoav Gallant », à partir de Stéphanie Maupas, « Le mandat d’arrêt de la CPI contre Benyamin Nétanyahou, un tournant pour la justice internationale », lemonde.fr extrait ; dans un entretien avec Axel Nodinot, Béligh Nabli note qu’il est venu « toutefois s’entrechoquer avec un autre événement – politique, celui-là – de la veille : le rejet [au Conseil de sécurité de l’ONU] de la résolution appelant à un cessez-le-feu à Gaza et au Liban, après que les États-Unis ont usé de leur droit de veto » ; il n’en demeure pas moins que cette décision « vient ouvrir une brèche, une perspective qui n’existe pas aujourd’hui sur le plan politique et diplomatique, dans la mesure où Israël continue de bénéficier d’un soutien de ses principaux alliés » : v. humanite.fr le 21 ; Bastien Loeuillot, « “Immunité” de Nétanyahou : une pluie de condamnations à gauche, de vives critiques de juristes et d’ONG », liberation.fr (avec AFP) le 27 : « “La France a cédé aux exigences israéliennes, on n’aurait pas fait ça avec Poutine”, regrette l’eurodéputée insoumise Rima Hassan ».).
28 Je reprends ici les formules d’un message de la Commission administrative de la FADLP le 18 octobre dernier, précisant que cette cérémonie se déroulerait à Mercurol le vendredi 1er novembre (Justine Audollent, « Toussaint 2024 : pourquoi le 1er novembre est-il un jour férié ? », rtl.fr 1er nov. 2024). Ce jour-là, je fêtais mes quarante ans, à quelques encablures des « chemins de terre de Gilhac-et-Bruzac » – évoqués dans la nécrologie précitée ; il y est ensuite noté que, sa « fibre humaniste, internationaliste aussi, Jean Debraine la ressent dès ses 14 ans et un voyage en Algérie ». Les Fils de la Toussaint, tel est le titre du premier volume sur La guerre d’Algérie d’Yves Courrière (Fayard, 1968) ; ainsi que le rappelait Denis Sieffert il y a une dizaine d’années, « ces indépendantistes algériens qui, le 1er novembre 1954, ont déclenché l’insurrection », étaient neuf (« Aït Ahmed, l’homme qui a gagné la guerre et perdu la paix », politis.fr 27 déc. 2015 ; v. aussi Camille Renard, radiofrance.fr 12 janv. 2021 : « En 1989, à l’occasion d’un documentaire de Patrice Gélinet diffusé sur France Culture, Hocine Aït Ahmed témoignait des sources de son engagement en Algérie (…), à partir de l’événement fondateur du massacre de Sétif » ; sur cet « autre 8 mai 1945 », écouter Anaïs Kien, podcast Le Journal de l’histoire 11 mai 2021). Au passage, « Football : Rachid Mekhloufi, attaquant légendaire [de l’ASSE] et symbole de l’indépendance algérienne, est décédé », rfi.fr 8 nov. 2024 (v. aussi ce texte « pour les jeunes », signé Adel Bentaha pour sofoot.com le 9 ; ajout le 23 du « bel hommage de l’AS Saint-Étienne », au coup d’envoi du match contre Montpellier, et de cette vidéo sur Mekloufi « vu par Éric Cantona – Les rebelles du foot », Portraits du Monde 26 mai, spéc. l’échange avec Bernard Pivot à partir de la 10ème minute, « les morts de 45 à Sétif » étant aussi évoqués vers la 3ème par Michel Nait-Challal, auteur de Dribbleurs de l’indépendance. L’incroyable histoire de l’équipe de football du FLN algérien, éd. Prolongations, 2008).
29 Le 19 mai, je lui avais adressé l’extrait de thèse précité(e), à la veille du lundi de Pentecôte (v. le début du présent billet). Nous avions alors plusieurs fois remis notre rencontre à plus tard, en pensant pouvoir nous voir à l’occasion des AmFIs à Châteauneuf-sur-Isère (la Fédération Ardèche-Drôme de la Libre Pensée tenait un stand au village associatif) ; y passant le samedi 24 août, je n’avais pas voulu interrompre la conversation dans laquelle il était engagé – alors que j’étais moi-même pressé. On croit toujours qu’on pourra recroiser une personne à l’avenir…

Handicap et laïcité : deux postes d’observation du gouvernement Barnier

Photo des dernières secondes de la finale des JO 2024, reprise depuis l’article de Prince J. Grimes, « Gabby Williams’ buzzer-beater against Team USA drew so many Kevin Durant toe comparisons in the gold medal game », usatoday.com 11 août 2024 (v. aussi Pierre-Andréa Fraile, « WNBA – En feu aux US, Gabby Williams fait involontairement le buzz avec… Kevin Durant ! », parlons-basket.com 6 sept. 2024 ; « Éliminée des play-offs [avec le Seattle Storm], Gabby Williams rejoint officiellement le Fenerbahçe », lequipe.fr le 29)

Après plusieurs articles intéressants à analyser1V. en particulier celui mis en ligne le 30 juillet : « Dans un intertitre, le journal [Le Monde] souligne que “Lucie Castets s’accroche (…). L’Élysée s’agace de la posture jugée vindicative de la trentenaire qui entend appliquer le programme du [Nouveau Front Populaire], comprenant le rétablissement de l’impôt sur la fortune ou l’abrogation de la réforme des retraites [v. mes précédents billets]”. (…) Pourquoi ne pas titrer : “Macron fera tout pour bloquer le programme du NFP” ? » (Daniel Schneidermann, « Matignon : l’aimable série d’été du Monde », 26 août 2024)., des journalistes écrivaient au début du mois : « Le chef de l’État est rentré dans le money time, comme on dit au basket-ball, ce moment où tout se joue »2Sandrine Cassini et Nathalie Segaunes, « Cazeneuve reçu par Macron, sans certitudes », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7 ; le même jour, Charlotte Belaïch et Jean-Baptiste Daoulas, « Casting pour Matignon. Au suivant ! », Libération, p. 8 : « Puisque Macron ne voit aucun profil politique capable d’éviter une censure immédiate à l’Assemblée, place donc à l’option de la société civile avec Thierry Beaudet » (elle sera de courte durée)..

Le 8 août, je terminais mon précédent billet sur l’hypothèse d’une nomination à Matignon ; c’était sous-estimer la situation dans laquelle Emmanuel Macron allait se placer3Au passage, « Emmanuel Macron a-t-il déclaré que “le Président ne devrait pas pouvoir rester s’il avait un désaveu en termes de majorité” ? », liberation.fr 30 août 2024, rappelant le contexte de cette affirmation, « dans la nuit du 18 au 19 mars 2019 », après que la parole a été « donnée à Olivier Beaud, professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon-Assas »., en cherchant à se prémunir d’une (trop rapide) motion de censure du Rassemblement National : ce dernier obtiendra donc que Xavier Bertrand ne soit même pas ministre de Michel Barnier4John Timsit, « Gouvernement : Marine Le Pen fait planer la menace d’une censure si Éric Dupond-Moretti ou Xavier Bertrand étaient nommés », lefigaro.fr 18 sept. 2024. Après ce scalp, tout porte à croire que « Marine Le Pen sauvera le gouvernement tant qu’elle le jugera utile pour légitimer son programme et alimenter le récit de son influence croissante » ; déjà, lors de « l’adoption de la dernière loi immigration5V. le long article de Romain Imbach, Maxime Vaudano et Stéphanie Pierre, « La loi “immigration”, dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945 », lemonde.fr 25-26 févr. 2024, en décembre 2023 », elle avait pu « revendiqu[er] une “victoire idéologique” »6Clément Guillou et Corentin Lesueur, « La stratégie du RN pour mettre le gouvernement au service de ses idées », Le Monde 24 sept. 2024, p. 8, après la chronique de Solenn de Royer, « Le grand retournement » (avant de ne pouvoir s’empêcher d’écrire que « les chances de la coalition de gauche de se voir proposer Matignon » aurait été « torpillé[es] » par… Jean-Luc Mélenchon le 7 juillet à 20h, ce qui constitue là aussi un joli retournement) ; v. aussi l’éditorial intitulé « Gouvernement : une alliance [de perdants] à rebours du Front républicain », p. 29 (en ligne). et elle ne peut donc que se satisfaire que Bruno Retailleau soit à l’Intérieur7« “Quand on mélange serviettes et torchons, au bout du compte cela (…) sclérose la France et la conduit dans le mur”, scandait-il encore durant l’été face aux appels à une coalition. “Celui qui pourra me faire retourner ma veste n’est pas encore né” » (« Figure d’une droite conservatrice, irritant de la macronie… Qui est Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l’Intérieur ? », lamontagne.fr (avec AFP) 21 sept. 2024 ; pour d’autres déclarations, aussi tonitruantes qu’elles auront été rapidement remisées, v. Célestine Gentilhomme, « Le rétropédalage express du député RN Jean-Philippe Tanguy après avoir qualifié Michel Barnier de “stupide” », lefigaro.fr le 8). : la veille de la nomination du premier ministre (le 5 septembre), il revenait sur RMC sur les articles censurés en janvier8CC, 25 janv. 2024, Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, n° 2023-863 DC : sur un total de 35, « 32 des déclarations de non-conformité à la Constitution l’ont été au motif que ces articles constituaient des “cavaliers législatifs”. Autrement dit, ils ont été considérés comme ayant été intégrés par des amendements n’ayant pas de lien, même indirect, avec le projet de loi initial, et le Conseil constitutionnel n’a cessé de le préciser, ces censures ne présagent rien de leur conformité ou non à la Constitution sur le fond » (Nicolas Klausser, Véronique Champeil-Desplats et Marie-Laure Basilien-Gainche, « Petit à petit, l’illibéralisme fait son nid : quand la loi immigration annonce d’autres atteintes à l’État de droit. », La Revue des Droits de l’Homme 2024, n° 25, mis en ligne le 6 févr., soulignant que ces censures remarquées ne doivent pas faire oublier que « ce ne sont pas moins de 52 dispositions de restrictions ou de fragilisation des droits des étrangers qui sont entrées en vigueur dans notre ordre juridique vendredi 26 janvier 2024 ») ; il en va ainsi des articles censurés aux cons. 47 à 55 (à comparer avec l’appel de note 12 de mon billet du 31 décembre)., en invitant à les « reprendre » dans un nouveau texte9Cité par Jacques Paugam, « Gouvernement Barnier : à l’Intérieur, Bruno Retailleau prêt à relancer l’offensive sur l’immigration », lesechos.fr 21-22 sept. 2024 ; v. aussi ce tweet de Daniel Schneidermann, relayant l’édito de Patrick Cohen le 20 – juste avant sa nomination – et les réactions recensées par Robin Serradeil (« Une “régression vers les origines ethniques” : le dérapage de Bruno Retailleau, sénateur LR, au sujet des émeutes en France », ladepeche.fr 5 juill. 2023). Ajout des propos tenus par l’ancien premier ministre sur France Inter (« Nouvelle loi immigration : “pas une priorité” pour Gabriel Attal, Jordan Bardella “attend” le texte “avec impatience” », liberation.fr (avec AFP) 14 oct. 2024), avec la réaction du ministre de l’Intérieur le lendemain sur France 2 : « Moi, je ne propose rien de plus que ce qui a déjà été voté par la majorité de Gabriel Attal il y a, encore une fois, quelques mois » (« Vers une nouvelle loi immigration en 2025 : à quoi faut-il s’attendre ? », sudouest.fr (avec AFP) le 15)….

Plus généralement, « [c]ette figure des Républicains n’a pas hésité à marcher dans les pas du RN depuis des années, en adoptant par exemple l’expression “Français de papiers” » ; Michel Barnier avait quant à lui fait de même en s’affirmant, fin 2021, « favorable à l’interdiction du voile au sein des universités mais aussi “dans l’espace public” »10Nejma Brahim et Marie Turcan, « Immigration, racisme, islamophobie : le “grand danger” du nouveau gouvernement Barnier », Mediapart 23 sept. 2024, renvoyant sur ce dernier point au « premier débat entre les candidats au Congrès des Républicains » (LCI et lefigaro.fr 8 nov. 2021). Cet article s’ouvre sur ce tweet du 20 avril 2013, dans lequel Othman Nasrou déclarait « que le racisme et l’homophobie [seraient] l’apanage d’une infime minorité » ; il est désormais secrétaire d’État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations… Il est rappelé plus loin que « le nouveau ministre de l’enseignement supérieur, Patrick Hetzel, [s’est signalé par la co-signature avec Michèle Tabarot, en avril 2024, d’]une proposition de résolution en faveur de la création de ce qu’ils appellent une “commission d’enquête relative à l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes dans l’enseignement supérieur” » ; « L’interdiction de l’abaya à l’école, mesure phare portée par Gabriel Attal à son arrivée à l’Éducation nationale, a [enfin] rencontré un fort succès, à l’époque, chez (…) Astrid Panosyan-Bouvet, nouvelle ministre du Travail » (v. CE, 27 sept. 2024, Syndicat Sud Éducation et associations La voix lycéenne, Le poing levé et Action droits des musulmans, n° 487944, dans le prolongement des ordonnances des 7 et 25 septembre 2023, citées dans mon billet du 15 janv. et l’article de Stéphanie Hennette-Vauchez, « École publique, école privée : la laïcité à hue et à dia ? », Revue du droit des religions 2024, n° 17, mis en ligne le 17 mai, §§ 6-7)..

En 1999, il avait « cofondé (…) le club Dialogue et Initiative, créé pour préfigurer l’union des droites »11Pierre Jova, « Michel Barnier, “l’ancien monde” à Matignon », lavie.fr 11 sept. 2024 : « Pour comprendre le Premier ministre, il faut partir des faubourgs de Grenoble, où il est né en 1951, et arpenter sa chère Savoie – la vallée de la Tarentaise, précisément – dont il a l’accent » ; « Outre Jean-Pierre Raffarin, l’autre figure de Dialogue et Initiative était Jacques Barrot, héraut de la démocratie-chrétienne en France ». ; c’est à la demande de ce groupe de réflexion, ayant porté l’un de ses membres à Matignon (déjà), que François Baroin avait rédigé – quatre ans plus tard – l’important rapport intitulé Pour une nouvelle laïcité12Je renvoie sur ce point à la note de bas de page 435 (n° 2767) de ma thèse, à laquelle il est possible d’accéder directement en tapant le mot-clé « Barnier » ; j’enchaîne page suivante en citant la Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République (à propos de laquelle v. FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024, 119 p. Surpris par la dénonciation de la loi Jospin – v. spéc. pp. 34-35, 54 et 75 –, je renvoie à mes pp. 497 et s.).. Ce texte constitue un jalon essentiel de l’appropriation de « la laïcité » à droite, qui est allée cette fois-ci jusqu’à envisager un ministère dédié13V. la réaction de Pablo Pillaud-Vivien, « Un ministère de la Laïcité ? “C’est une provocation à l’égard de la gauche (…), ça va devenir un ministère de l’islamophobie” » (RTL 19 sept. 2024)..

« Anne Genetet (Renaissance) : “Les LR n’ont jamais voulu travailler avec nous, ce n’est pas faute de leur avoir tendu la main, ils nous ont tapé dessus” », bfmtv.com 20 sept. 2024 : proposée ce matin-là, comme cela apparaît au bas de cette capture d’écran, la députée macroniste du Nord Violette Spillebout dénoncera des « coups bas » (v. John Timsit, lefigaro.fr le 23) ; auparavant, « c’était plutôt la députée LR du Doubs et vice-présidente de l’Assemblée nationale Annie Genevard qui tenait la corde » (Marc Belpois, « Qui est Anne Genetet, nouvelle ministre de l’Éducation du gouvernement Barnier ? », telerama.fr 21 sept. 2024 , v. aussi les références citées à la note 17 du présent billet)

Nonobstant sa « disparition »14Pour une autre (moins heureuse), v. la chronique de Stéphane Foucart, « Pour saisir la disparition de l’écologie à droite, il suffit de comparer le Michel Barnier de 1990 et celui de 2024 », lemonde.fr 22 sept. 2024 (extrait) ; « questionner les “conflits de besoins” qui émergent, notamment autour de la question écologique », tel est l’un des thèmes du rapport annuel du collectif Nos services publics (NSP) selon Frantz Durupt (liberation.fr le 24, introduisant un entretien avec Marie Pla, sa co-coordinatrice)., il convient de faire observer que l’objectif n’était pas, là encore15V. ma thèse préc., Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 21 et 556-557, de viser les établissements catholiques sous contrat16V. la tribune ironique de Jean Baubérot-Vincent, « Enfin une bonne nouvelle : la création d’un ministère de la Laïcité ! », nouvelobs.com 20 sept. 2024 : l’idée selon laquelle le Secrétariat général de l’Enseignement catholique s’apparenterait à un « ministère bis » de l’Éducation nationale revient à Bernard Toulemonde, l’un des acteurs du dialogue avec cette « administration » (v. ma thèse préc., 2017, pp. 562-563 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, pp. 46-47) : il s’exprimait dans le cadre d’un dossier dirigé par André Legrand : décédé le 2 juillet 2024, ce dernier a reçu un hommage du ministère, France Universités saluant aussi sa « mémoire » ; en 2017, je le citais vingt-huit fois, notamment pp. 51, 106-107, 163, 627, 1002 – pour s’en tenir à des mises en perspectives juridiques générales (il fait lui aussi partie des « Témoins et acteurs des politiques de l’éducation depuis la Libération », INRP 2008, tome 5, pp. 100-102 ; à propos de cette « grande enquête (…) lancée au début des années 1990 », v. Bénédicte Girault, « Dans les archives orales de l’Éducation nationale, les énarques à la conquête de l’État », theconversation.com 12 sept. 2024).. Tout au contraire, se trouve nommé, sous l’autorité d’Anne Genetet17Marion Mourgue (avec Olivier Beaumont et Pauline Theveniaud), « Nouveau gouvernement : la surprise Anne Genetet à l’Éducation nationale », leparisien.fr 20 sept. 2024, pour qui sa nomination serait « directement lié à l’intervention de Gabriel Attal » (v. la réaction assassine de Sophie Vénétitay, x.com) ; v. Sylvie Lecherbonnier et Éléa Pommiers, « Avec Anne Genetet, l’éducation nationale aux mains d’une macroniste novice sur le sujet », lemonde.fr les 21-23 (extrait), rappelant que son intérêt manifeste pour les questions d’éducation se limite à « un rapport sur la proposition de loi visant à faire évoluer la gouvernance de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ». Sa page Wikipédia – au 23 septembre – atteste en effet de l’importance accordée aux questions scolaires lors de la composition gouvernementale : outre les réactions syndicales recensées le même jour par Maeva-Simone Tjang (« “Une erreur de casting” (…) ? », diplomeo.com), v. les articles de Djéhanne Gani (cafepedagogique.net) et de Marie-Estelle Pech (marianne.net) : « En fait d’éducation, elle n’aura guère connu que le lycée français de Singapour, fréquenté par ses quatre enfants. Ticket d’entrée annuel : 5 000 à 10 000 dollars »… Linh-Lan Dao rappelle qu’elle y aura passé plus de temps à délivrer des « conseils essentialisants et dénigrants, relevant parfois du mépris de classe », à l’égard des employées de maison (francetvinfo.fr le 27)., un « professeur de philosophie – qui selon son profil LinkedIn, a effectué sa scolarité dans un lycée catholique privé de Villefranche-sur-Saône, puis à l’Institut catholique de Paris »18« Alexandre Portier nommé à la réussite scolaire, un ministre délégué défenseur de l’enseignement privé », liberation.fr 21 sept. 2024 – se revendiquant il y a moins de quatre mois au nombre de ceux qui se sont « toujours érigés en défenseurs de l’enseignement privé indépendant ou sous contrat19Quelques références : CC, « Revue doctrinale », avr. 2024, n° 12 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, art. préc., mis en ligne le 17 mai ; Solenne de Royer, « L’inventaire amer de Jean-Michel Blanquer », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7, recensant son livre La Citadelle (Albin Michel), avec notamment cette citation : « Quelle sera l’anthropologie du macronisme ? De sémillants trentenaires, technocrates ou intrigants, les yeux rivés sur les sondages et les écrans pour piloter à vue sans culture, sans vision et sans valeurs »… (extrait, reprenant notamment la version selon laquelle la « saisine du Conseil constitutionnel » ayant conduit à la décision du 21 mai 2021 serait de son initiative [le texte imprimé par le quotidien ne reprend pas ce paragraphe] : dans l’article avec AFP en rendant compte, il est rappelé qu’a été validée « la création d’un forfait scolaire pour les écoles privées dispensant une scolarisation en langues régionales, une mesure potentiellement coûteuse pour certaines communes » ; ce dernier point m’amène à renvoyer à mon article intitulé « Focus sur… l’extension des obligations des communes en matière scolaire. Loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance », AJCT 2020, p. 28, avec un court extrait à la deuxième illustration de ce billet) ; pour une décision admettant, en sens contraire, que « la prime de fidélisation territoriale instituée par le décret du 24 octobre 2020 » en Seine-Saint-Denis ne bénéficie pas aux « maîtres contractuels exerçant leurs fonctions dans les établissements d’enseignement privés sous contrat du second degré » (CE, 13 oct. 2023, Syndicat professionnel de l’enseignement libre catholique (SPELC) Créteil et a., n° 464416, cons. 11 et 5 ; LIJMEN janv. 2024, n° 228) ; Julien Grenet (entretien avec, par Mathilde Goanec), « L’école privée sera majoritaire à Paris dans dix ans », Mediapart 7 févr. 2024 : pour l’économiste, cette tendance s’explique par « la baisse démographique très forte, amorcée depuis 2010, que connaît la capitale », et qui « se répercute quasi intégralement sur l’enseignement public » ; « la part du privé en élémentaire, c’est 27 %, au collège, 37 % et dans les lycées, 40 %. On est très loin de la répartition d’usage [20/80] » ; au niveau national aussi, rapporte une autre étude, « les effectifs des établissements d’enseignement supérieur privés sont en hausse : ils ont augmenté de 60 % depuis 2011 (contre une hausse de 16 % dans le secteur public) » (Juliana Lima et Delphine Dorsi, « Le droit à l’enseignement supérieur à l’épreuve des inégalités socio-économiques et de la privatisation du secteur : une étude sur la France », L’éducation en débats : analyse comparée 2023, vol. 13, n° 2, p. 141, spéc. p. 152, en conclusion ; v. aussi Stéphane Le Bouler, « Dans l’enseignement supérieur, le poids croissant du privé pose de redoutables problèmes de régulation », lemonde.fr 29 janv. 2024) ; v. enfin Brice Le Borgne, « Rentrée scolaire : des données internes à l’Éducation nationale révèlent les inégalités d’enseignement entre public et privé », francetvinfo.fr 3 sept., avec en écho l’appel international du RÉseau de Recherche Francophone sur la Privatisation de l’Éducation (refpe.org) : « Pour l’accès à des données de qualité », relayé par l’organisation Right to Education Initiative (RTE) dans son e-Bulletin du mois. comme de l’instruction en famille »20Max Brisson, Alexandre Portier et François-Xavier Bellamy, « Peut-on reprocher à l’enseignement privé de ne pas avoir abandonné tout ce qui a fait les beaux jours du public ? », lefigaro.fr 29 mai 2024, mis à jour le 3 juin (cette tribune commence par une citation de Victor Hugo, à propos de laquelle v. la dernière illustration de mon billet intitulé « En attendant l’avis du Conseil d’État : recourir à l’IEF ou l’empêcher, de quel droit ? », 29 nov. 2020 ; v. aussi le début de celui du 28 juin dernier, en particulier les références des notes 2 et 3)..

Cela affleure du Rapport d’information sur l’instruction des enfants en situation de handicap qu’il a co-présenté en novembre avec Servane Hugues21« Scolarisation des enfants handicapés : la députée de l’Isère Servane Hugues veut “repenser l’école inclusive” », francebleu.fr 16 nov. 2023 : après qu’il a été noté que « le dispositif d’instruction en famille (IEF) se révèle le choix par défaut pour nombre de parents dont les enfants ne peuvent être scolarisés, notamment les enfants atteints d’autisme ou de troubles du comportement », un encadré est consacré à la loi n° 2021-1109 du 24 août « confortant le respect des principes de la République » ; page suivante, il est écrit qu’elle « complique la tâche des familles »22Délégation [x] droit[s] des enfants, Rapport d’information sur l’instruction des enfants en situation de handicap, n° 1856, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 nov. 2023 (66 p.), spéc. pp. 30 à 32.

D’une manière plus générale, ce Rapport pointe à juste titre « l’absence de statistiques relatives au nombre d’heures de scolarisation effectivement suivies par les enfants23V. aussi « Handicap : “Sur les questions de scolarisation, d’insertion professionnelle, d’accessibilité, on est en retard”, regrette la Défenseure des droits », francetvinfo.fr 30 août 2024 : « Claire Hédon réclame donc “des statistiques précises” notamment sur le nombre d’heures durant lesquelles les “440 000 jeunes en situation de handicap sont scolarisés” ». Ajout au 15 octobre d’un article de Camille Allain, « Budget 2025 : L’Éducation nationale va recruter 2.000 AESH pour les élèves en situation de handicap », 20minutes.fr (avec AFP) le 11, à relier avec la note suivante et la fin de ce billet ; à la fin se trouve évoqué un rapport de la Cour des comptes qui m’avait échappé, L’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, 16 sept. 2024, 159 p. (v. spéc. la page 110 et, plus généralement, le résumé de Djéhanne Gani, cafepedagogique.net le 17).. Le Collectif handicaps a ainsi relevé que certains jeunes n’étaient scolarisés que 30 minutes par semaine. De même, l’Association nationale des parents d’enfants aveugles a indiqué que de nombreux enfants étaient considérés comme scolarisés dès qu’ils étaient acceptés en classe quelques heures par semaine »24Rapport préc., 2023, p. 13 ; « Préciser les conditions et la qualité de la scolarisation (volume horaire en particulier) dans les statistiques officielles recensant le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en classe ordinaire », telle est la première des trente-cinq recommandations listées page 55, en attirant aussi l’attention sur la septième : « Prendre en compte le temps périscolaire dans les notifications des [commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH)] et les projets personnalisés de scolarisation (PPS) » ; après un encadré page 19 sur les accompagnants d’enfants en situation de handicap (AESH) et au terme de deux pages sur ce « pilier fragile de la scolarisation inclusive » (pp. 27 à 29 ; v. ma note 11 le 29 déc. 2019), l’évocation d’un arrêt précède cette recommandation 7 (CE, 20 nov. 2020, Ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, n° 422248, décelant une « erreur de droit » dans CAA Nantes, 15 mai 2018, n° 16NT02951 ; v. mon billet du 30 sept., il y a six ans)..

Photo reprise depuis l’article d’Emmanuel Commissaire, « Jeux paralympiques 2024 : Frédéric Villeroux, le “Zidane du cécifoot”, accueilli en héros dans son club de Gironde », sudouest.fr 20 sept. 2024 (pour revoir son tir au but contre l’Argentine, lavoixdunord.fr le 7 ; « En images : revivez les meilleurs moments des Jeux paralympiques », france24.com le 9)

Si Michel Barnier aurait été « intéressé par l’engagement de l’élu du Beaujolais sur l’inclusion des élèves handicapés à l’école »25Alexandre Pedro, « Alexandre Portier, un proche de Laurent Wauquiez nommé ministre délégué à l’éducation », lemonde.fr 23 sept. 2024 (extrait)., il n’avait cependant pas été jugé utile d’avoir un portefeuille ministériel dédié à la question du handicap, cela alors même que les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP)26V. la tribune de Stéphane Decubber et alii, relayée par lemediasocial.fr 28 août 2024, et celle de Vanessa Bernard, « Les para-athlètes sont célébrés, mais nos enfants handicapés sont délaissés », Libération le 3 sept., p. 20 (extrait, renvoyant à « une récente décision du Conseil de l’Europe, dont le comité des droits sociaux a jugé à l’unanimité que la France violait certaines de ses obligations en la matière » : v. la note 6 de mon billet du 31 décembre 2023) ; membre du collectif Vacances Handicap Familles et « mère d’Elorian, un enfant handicapé de 20 ans », l’autrice prend « pour exemple le domaine de la Porte neuve, à Riec-sur-Belon (Finistère) » et « l’arrêt de la subvention du ministère de l’Éducation nationale pour les séjours adaptés organisés par la MGEN à partir du 31 juillet 2025 ». prenaient fin en pleine rentrée scolaire27« Rentrée scolaire : des “milliers d’enfants” handicapés sans solution, alerte l’Unapei », lemonde.fr (avec AFP) 26 août 2024 ; au passage, plus largement et en commençant par une ordonnance anecdotique rendue six jours plus tôt, par laquelle la « juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu les deux décisions du Directeur académique des services départementaux de l’Éducation nationale (DASEN) des Hauts-de-Seine qui avaient affecté « par erreur » deux collégiens au Plessis-Robinson plutôt qu’à Colombes » (actu.fr 22 sept. 2024) ; Sylvie Lecherbonnier, « Un prof devant chaque classe, une mission[/promesse] devenue impossible », Le Monde le 3, p. 8 ; Marion Rousset, « Claire Hédon, Défenseure des droits : “Imaginez la violence subie par ces jeunes sans affectation au lycée” », telerama.fr le 18, résumant sa décision 2023-153 du 6 juillet « relative à la situation des élèves sans affectation au lycée lors de la rentrée scolaire 2022 » (accompagnée d’un communiqué intitulé « Des élèves sans affectation au lycée à la rentrée scolaire : une atteinte au droit à l’éducation qui appelle des réponses fortes » ; il y est renvoyé à la page 29 de son Rapport annuel d’activité 2023, 26 mars 2024, 96 p.)..

Après avoir laissé Paul Christophe28« À l’Assemblée nationale, les députés Paul Christophe et Paul Christophle s’amusent de leur quasi-homonymie », huffingtonpost.fr 18 juill. 2024 ; avec l’écologiste Marie Pochon (v. la note 24 de mon précédent billet), le député de la première circonscription de la Drôme Paul Christophle votera la motion de censure (« Pourquoi nous censurerons le gouvernement de Michel Barnier », medium.com 16 sept. 2024). Portant un intérêt aux questions de genre (v. par ex. « Pour un internet féministe 1/2 », medium.com 31 mars 2020 ; « L’inacceptable dédain de Macron pour les droits des personnes trans », 21 août 2024), ce premier secrétaire fédéral du PS s’était engagé pour la sécurité des « valentinois » (22 mars et 22 mai 2023) ; manifestant l’ambition d’être « le député de gauche de la sécurité » (entretien avec, par Amandine Brioude, ledauphine.com 15 sept. 2024), il a réagi par un communiqué à la nomination de Nicolas Daragon (le 23). Lors des dernières élections, ce dernier est resté « le maire qui n’aura pas pris position » (Jimmy Levacher – LFI –, cité le 1er juillet), les élus LR locaux ayant refusé d’appeler à voter « contre le candidat d’un parti xénophobe, raciste, homophobe et ultraconservateur » (Pierre-Jean Veyret – Réinventons Valence –, cité les 4-8 ; ils étaient en cela à l’unisson de leurs dirigeants : v. Romain Brunet, « “Inouï et inespéré” : comment Les Républicains ont réussi à revenir au pouvoir avec Michel Barnier », france24.com le 23 sept.) ; retenue comme titre d’un article de Thibaut Chevillard (20minutes.fr le 25), la question est posée : « Mais à quoi va servir Nicolas Daragon, le ministre [délégué] “chargé de la sécurité du quotidien” ? ». répondre à la colère des associations29« J’ai toujours eu à cœur de défendre les droits fondamentaux des personnes handicapées et une société plus inclusive [et j]e m’y engage comme désormais ministre », déclarait-il sur X le 21 septembre (cité par J. C., « Colère et déception dans les secteurs de l’Éducation et du handicap », estrepublicain.fr le 22)., le premier ministre s’est résolu à lui adjoindre une ministre déléguée30Ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes, il avait déjà sous tutelle, pour cette dernière mission, Salima Saa : en 2012, elle trouvait « ridicule » un tel ministère (v. Marlène Thomas, « Gouvernement Barnier : les droits des femmes mis à mal et les réacs en majesté », liberation.fr 23 sept. 2024) ; « “Il est temps” que l’éducation à la vie sexuelle soit “effective”, affirme la nouvelle secrétaire d’État chargée de l’Égalité femmes-hommes [lors d’une conférence de presse du Planning familial à Paris] » (francetvinfo.fr (avec AFP) le 26). chargée des Personnes en situation de handicap31« Deux ministres délégués complètent le gouvernement Barnier : Charlotte Parmentier-Lecocq au Handicap et Jean-Louis Thiériot aux Armées et aux Anciens Combattants », francetvinfo.fr 27 sept. 2024. Si cette cause peut sembler plus consensuelle que la problématique laïque, elle implique des dépenses publiques dans un contexte où l’orientation politique est, encore plus qu’hier, de les restreindre ; il est à cet égard révélateur qu’il ait été tenté, lors de l’annonce de ce gouvernement, d’en masquer la dérive droitière à travers la nomination d’une personnalité qui reste avant tout un éminent partisan de l’austérité budgétaire32Solina Prak note ainsi que le nouveau ministère de la Justice « est connu pour sa rigueur budgétaire, comme le souligne le journal Le Monde [24 sept. 2024, p. 13] » (capital.fr le 23, à partir de la version en ligne) ; le quotidien s’abstenant de développer, il convient de rappeler pour terminer que Didier Migaud « troqua (…) sa carte du PS contre un premier rôle politique [d’envergure nationale en 2010, à l’initiative de Nicolas Sarkozy]. Il anticipait le social-libéralisme » du président Hollande (François Delapierre, « Didier Migaud, super-héros de l’oligarchie », reporterre.net 21 févr. 2013 ; v. aussi Maxence Kagni, « La Cour des comptes demande plus d’austérité », politis.fr le 27 juin) ; consultée les 22 et 29 septembre 2024, sa page Wikipédia revient sur ses mandats locaux antérieurs (depuis 1995), en précisant qu’en « 2006 et sous sa présidence, [Grenoble-Alpes Métropole] procède, comme l’avait fait Seyssins, à la souscription d’emprunts structurés (…) qui se révéleront très défavorables pour les collectivités concernées » (en renvoyant à l’article de Michel Albouy, « Emprunts toxiques : les élus savaient très bien ce qu’ils faisaient », contrepoints.org 20 avr. 2016) ; sont aussi reproduits des extraits selon lesquels l’action du magistrat financier a provoqué une « forte chute de l’investissement public local et des conséquences désastreuses pour des secteurs comme le bâtiment et les équipements publics », en faisant « reposer sur les plus pauvres et les classes moyennes les efforts budgétaires demandés à la population » (Franck Dedieu, Jack Dion, Emmanuel Lévy et Mathias Thépot, « Pascal Lamy, Pierre Moscovici, Jacques Attali… Les cerveaux du naufrage », marianne.net 17 avr. 2020).

Notes

1 V. en particulier celui mis en ligne le 30 juillet : « Dans un intertitre, le journal [Le Monde] souligne que “Lucie Castets s’accroche (…). L’Élysée s’agace de la posture jugée vindicative de la trentenaire qui entend appliquer le programme du [Nouveau Front Populaire], comprenant le rétablissement de l’impôt sur la fortune ou l’abrogation de la réforme des retraites [v. mes précédents billets]”. (…) Pourquoi ne pas titrer : “Macron fera tout pour bloquer le programme du NFP” ? » (Daniel Schneidermann, « Matignon : l’aimable série d’été du Monde », 26 août 2024).
2 Sandrine Cassini et Nathalie Segaunes, « Cazeneuve reçu par Macron, sans certitudes », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7 ; le même jour, Charlotte Belaïch et Jean-Baptiste Daoulas, « Casting pour Matignon. Au suivant ! », Libération, p. 8 : « Puisque Macron ne voit aucun profil politique capable d’éviter une censure immédiate à l’Assemblée, place donc à l’option de la société civile avec Thierry Beaudet » (elle sera de courte durée).
3 Au passage, « Emmanuel Macron a-t-il déclaré que “le Président ne devrait pas pouvoir rester s’il avait un désaveu en termes de majorité” ? », liberation.fr 30 août 2024, rappelant le contexte de cette affirmation, « dans la nuit du 18 au 19 mars 2019 », après que la parole a été « donnée à Olivier Beaud, professeur de droit public à l’Université Paris-Panthéon-Assas ».
4 John Timsit, « Gouvernement : Marine Le Pen fait planer la menace d’une censure si Éric Dupond-Moretti ou Xavier Bertrand étaient nommés », lefigaro.fr 18 sept. 2024
5 V. le long article de Romain Imbach, Maxime Vaudano et Stéphanie Pierre, « La loi “immigration”, dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945 », lemonde.fr 25-26 févr. 2024
6 Clément Guillou et Corentin Lesueur, « La stratégie du RN pour mettre le gouvernement au service de ses idées », Le Monde 24 sept. 2024, p. 8, après la chronique de Solenn de Royer, « Le grand retournement » (avant de ne pouvoir s’empêcher d’écrire que « les chances de la coalition de gauche de se voir proposer Matignon » aurait été « torpillé[es] » par… Jean-Luc Mélenchon le 7 juillet à 20h, ce qui constitue là aussi un joli retournement) ; v. aussi l’éditorial intitulé « Gouvernement : une alliance [de perdants] à rebours du Front républicain », p. 29 (en ligne).
7 « “Quand on mélange serviettes et torchons, au bout du compte cela (…) sclérose la France et la conduit dans le mur”, scandait-il encore durant l’été face aux appels à une coalition. “Celui qui pourra me faire retourner ma veste n’est pas encore né” » (« Figure d’une droite conservatrice, irritant de la macronie… Qui est Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l’Intérieur ? », lamontagne.fr (avec AFP) 21 sept. 2024 ; pour d’autres déclarations, aussi tonitruantes qu’elles auront été rapidement remisées, v. Célestine Gentilhomme, « Le rétropédalage express du député RN Jean-Philippe Tanguy après avoir qualifié Michel Barnier de “stupide” », lefigaro.fr le 8).
8 CC, 25 janv. 2024, Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, n° 2023-863 DC : sur un total de 35, « 32 des déclarations de non-conformité à la Constitution l’ont été au motif que ces articles constituaient des “cavaliers législatifs”. Autrement dit, ils ont été considérés comme ayant été intégrés par des amendements n’ayant pas de lien, même indirect, avec le projet de loi initial, et le Conseil constitutionnel n’a cessé de le préciser, ces censures ne présagent rien de leur conformité ou non à la Constitution sur le fond » (Nicolas Klausser, Véronique Champeil-Desplats et Marie-Laure Basilien-Gainche, « Petit à petit, l’illibéralisme fait son nid : quand la loi immigration annonce d’autres atteintes à l’État de droit. », La Revue des Droits de l’Homme 2024, n° 25, mis en ligne le 6 févr., soulignant que ces censures remarquées ne doivent pas faire oublier que « ce ne sont pas moins de 52 dispositions de restrictions ou de fragilisation des droits des étrangers qui sont entrées en vigueur dans notre ordre juridique vendredi 26 janvier 2024 ») ; il en va ainsi des articles censurés aux cons. 47 à 55 (à comparer avec l’appel de note 12 de mon billet du 31 décembre).
9 Cité par Jacques Paugam, « Gouvernement Barnier : à l’Intérieur, Bruno Retailleau prêt à relancer l’offensive sur l’immigration », lesechos.fr 21-22 sept. 2024 ; v. aussi ce tweet de Daniel Schneidermann, relayant l’édito de Patrick Cohen le 20 – juste avant sa nomination – et les réactions recensées par Robin Serradeil (« Une “régression vers les origines ethniques” : le dérapage de Bruno Retailleau, sénateur LR, au sujet des émeutes en France », ladepeche.fr 5 juill. 2023). Ajout des propos tenus par l’ancien premier ministre sur France Inter (« Nouvelle loi immigration : “pas une priorité” pour Gabriel Attal, Jordan Bardella “attend” le texte “avec impatience” », liberation.fr (avec AFP) 14 oct. 2024), avec la réaction du ministre de l’Intérieur le lendemain sur France 2 : « Moi, je ne propose rien de plus que ce qui a déjà été voté par la majorité de Gabriel Attal il y a, encore une fois, quelques mois » (« Vers une nouvelle loi immigration en 2025 : à quoi faut-il s’attendre ? », sudouest.fr (avec AFP) le 15)…
10 Nejma Brahim et Marie Turcan, « Immigration, racisme, islamophobie : le “grand danger” du nouveau gouvernement Barnier », Mediapart 23 sept. 2024, renvoyant sur ce dernier point au « premier débat entre les candidats au Congrès des Républicains » (LCI et lefigaro.fr 8 nov. 2021). Cet article s’ouvre sur ce tweet du 20 avril 2013, dans lequel Othman Nasrou déclarait « que le racisme et l’homophobie [seraient] l’apanage d’une infime minorité » ; il est désormais secrétaire d’État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations… Il est rappelé plus loin que « le nouveau ministre de l’enseignement supérieur, Patrick Hetzel, [s’est signalé par la co-signature avec Michèle Tabarot, en avril 2024, d’]une proposition de résolution en faveur de la création de ce qu’ils appellent une “commission d’enquête relative à l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes dans l’enseignement supérieur” » ; « L’interdiction de l’abaya à l’école, mesure phare portée par Gabriel Attal à son arrivée à l’Éducation nationale, a [enfin] rencontré un fort succès, à l’époque, chez (…) Astrid Panosyan-Bouvet, nouvelle ministre du Travail » (v. CE, 27 sept. 2024, Syndicat Sud Éducation et associations La voix lycéenne, Le poing levé et Action droits des musulmans, n° 487944, dans le prolongement des ordonnances des 7 et 25 septembre 2023, citées dans mon billet du 15 janv. et l’article de Stéphanie Hennette-Vauchez, « École publique, école privée : la laïcité à hue et à dia ? », Revue du droit des religions 2024, n° 17, mis en ligne le 17 mai, §§ 6-7).
11 Pierre Jova, « Michel Barnier, “l’ancien monde” à Matignon », lavie.fr 11 sept. 2024 : « Pour comprendre le Premier ministre, il faut partir des faubourgs de Grenoble, où il est né en 1951, et arpenter sa chère Savoie – la vallée de la Tarentaise, précisément – dont il a l’accent » ; « Outre Jean-Pierre Raffarin, l’autre figure de Dialogue et Initiative était Jacques Barrot, héraut de la démocratie-chrétienne en France ».
12 Je renvoie sur ce point à la note de bas de page 435 (n° 2767) de ma thèse, à laquelle il est possible d’accéder directement en tapant le mot-clé « Barnier » ; j’enchaîne page suivante en citant la Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République (à propos de laquelle v. FNLP, Rapport Stasi versus Loi Stasi, n° 29 de la collection Arguments de la Libre Pensée, sept. 2024, 119 p. Surpris par la dénonciation de la loi Jospin – v. spéc. pp. 34-35, 54 et 75 –, je renvoie à mes pp. 497 et s.).
13 V. la réaction de Pablo Pillaud-Vivien, « Un ministère de la Laïcité ? “C’est une provocation à l’égard de la gauche (…), ça va devenir un ministère de l’islamophobie” » (RTL 19 sept. 2024).
14 Pour une autre (moins heureuse), v. la chronique de Stéphane Foucart, « Pour saisir la disparition de l’écologie à droite, il suffit de comparer le Michel Barnier de 1990 et celui de 2024 », lemonde.fr 22 sept. 2024 (extrait) ; « questionner les “conflits de besoins” qui émergent, notamment autour de la question écologique », tel est l’un des thèmes du rapport annuel du collectif Nos services publics (NSP) selon Frantz Durupt (liberation.fr le 24, introduisant un entretien avec Marie Pla, sa co-coordinatrice).
15 V. ma thèse préc., Le droit à l’éducation. L’émergence d’un discours dans le contexte des laïcités françaises, UGA, 2017, pp. 21 et 556-557
16 V. la tribune ironique de Jean Baubérot-Vincent, « Enfin une bonne nouvelle : la création d’un ministère de la Laïcité ! », nouvelobs.com 20 sept. 2024 : l’idée selon laquelle le Secrétariat général de l’Enseignement catholique s’apparenterait à un « ministère bis » de l’Éducation nationale revient à Bernard Toulemonde, l’un des acteurs du dialogue avec cette « administration » (v. ma thèse préc., 2017, pp. 562-563 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, L’École et la République. La nouvelle laïcité scolaire, Dalloz, 2023, pp. 46-47) : il s’exprimait dans le cadre d’un dossier dirigé par André Legrand : décédé le 2 juillet 2024, ce dernier a reçu un hommage du ministère, France Universités saluant aussi sa « mémoire » ; en 2017, je le citais vingt-huit fois, notamment pp. 51, 106-107, 163, 627, 1002 – pour s’en tenir à des mises en perspectives juridiques générales (il fait lui aussi partie des « Témoins et acteurs des politiques de l’éducation depuis la Libération », INRP 2008, tome 5, pp. 100-102 ; à propos de cette « grande enquête (…) lancée au début des années 1990 », v. Bénédicte Girault, « Dans les archives orales de l’Éducation nationale, les énarques à la conquête de l’État », theconversation.com 12 sept. 2024).
17 Marion Mourgue (avec Olivier Beaumont et Pauline Theveniaud), « Nouveau gouvernement : la surprise Anne Genetet à l’Éducation nationale », leparisien.fr 20 sept. 2024, pour qui sa nomination serait « directement lié à l’intervention de Gabriel Attal » (v. la réaction assassine de Sophie Vénétitay, x.com) ; v. Sylvie Lecherbonnier et Éléa Pommiers, « Avec Anne Genetet, l’éducation nationale aux mains d’une macroniste novice sur le sujet », lemonde.fr les 21-23 (extrait), rappelant que son intérêt manifeste pour les questions d’éducation se limite à « un rapport sur la proposition de loi visant à faire évoluer la gouvernance de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ». Sa page Wikipédia – au 23 septembre – atteste en effet de l’importance accordée aux questions scolaires lors de la composition gouvernementale : outre les réactions syndicales recensées le même jour par Maeva-Simone Tjang (« “Une erreur de casting” (…) ? », diplomeo.com), v. les articles de Djéhanne Gani (cafepedagogique.net) et de Marie-Estelle Pech (marianne.net) : « En fait d’éducation, elle n’aura guère connu que le lycée français de Singapour, fréquenté par ses quatre enfants. Ticket d’entrée annuel : 5 000 à 10 000 dollars »… Linh-Lan Dao rappelle qu’elle y aura passé plus de temps à délivrer des « conseils essentialisants et dénigrants, relevant parfois du mépris de classe », à l’égard des employées de maison (francetvinfo.fr le 27).
18 « Alexandre Portier nommé à la réussite scolaire, un ministre délégué défenseur de l’enseignement privé », liberation.fr 21 sept. 2024
19 Quelques références : CC, « Revue doctrinale », avr. 2024, n° 12 ; Stéphanie Hennette-Vauchez, art. préc., mis en ligne le 17 mai ; Solenne de Royer, « L’inventaire amer de Jean-Michel Blanquer », Le Monde 3 sept. 2024, p. 7, recensant son livre La Citadelle (Albin Michel), avec notamment cette citation : « Quelle sera l’anthropologie du macronisme ? De sémillants trentenaires, technocrates ou intrigants, les yeux rivés sur les sondages et les écrans pour piloter à vue sans culture, sans vision et sans valeurs »… (extrait, reprenant notamment la version selon laquelle la « saisine du Conseil constitutionnel » ayant conduit à la décision du 21 mai 2021 serait de son initiative [le texte imprimé par le quotidien ne reprend pas ce paragraphe] : dans l’article avec AFP en rendant compte, il est rappelé qu’a été validée « la création d’un forfait scolaire pour les écoles privées dispensant une scolarisation en langues régionales, une mesure potentiellement coûteuse pour certaines communes » ; ce dernier point m’amène à renvoyer à mon article intitulé « Focus sur… l’extension des obligations des communes en matière scolaire. Loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance », AJCT 2020, p. 28, avec un court extrait à la deuxième illustration de ce billet) ; pour une décision admettant, en sens contraire, que « la prime de fidélisation territoriale instituée par le décret du 24 octobre 2020 » en Seine-Saint-Denis ne bénéficie pas aux « maîtres contractuels exerçant leurs fonctions dans les établissements d’enseignement privés sous contrat du second degré » (CE, 13 oct. 2023, Syndicat professionnel de l’enseignement libre catholique (SPELC) Créteil et a., n° 464416, cons. 11 et 5 ; LIJMEN janv. 2024, n° 228) ; Julien Grenet (entretien avec, par Mathilde Goanec), « L’école privée sera majoritaire à Paris dans dix ans », Mediapart 7 févr. 2024 : pour l’économiste, cette tendance s’explique par « la baisse démographique très forte, amorcée depuis 2010, que connaît la capitale », et qui « se répercute quasi intégralement sur l’enseignement public » ; « la part du privé en élémentaire, c’est 27 %, au collège, 37 % et dans les lycées, 40 %. On est très loin de la répartition d’usage [20/80] » ; au niveau national aussi, rapporte une autre étude, « les effectifs des établissements d’enseignement supérieur privés sont en hausse : ils ont augmenté de 60 % depuis 2011 (contre une hausse de 16 % dans le secteur public) » (Juliana Lima et Delphine Dorsi, « Le droit à l’enseignement supérieur à l’épreuve des inégalités socio-économiques et de la privatisation du secteur : une étude sur la France », L’éducation en débats : analyse comparée 2023, vol. 13, n° 2, p. 141, spéc. p. 152, en conclusion ; v. aussi Stéphane Le Bouler, « Dans l’enseignement supérieur, le poids croissant du privé pose de redoutables problèmes de régulation », lemonde.fr 29 janv. 2024) ; v. enfin Brice Le Borgne, « Rentrée scolaire : des données internes à l’Éducation nationale révèlent les inégalités d’enseignement entre public et privé », francetvinfo.fr 3 sept., avec en écho l’appel international du RÉseau de Recherche Francophone sur la Privatisation de l’Éducation (refpe.org) : « Pour l’accès à des données de qualité », relayé par l’organisation Right to Education Initiative (RTE) dans son e-Bulletin du mois.
20 Max Brisson, Alexandre Portier et François-Xavier Bellamy, « Peut-on reprocher à l’enseignement privé de ne pas avoir abandonné tout ce qui a fait les beaux jours du public ? », lefigaro.fr 29 mai 2024, mis à jour le 3 juin (cette tribune commence par une citation de Victor Hugo, à propos de laquelle v. la dernière illustration de mon billet intitulé « En attendant l’avis du Conseil d’État : recourir à l’IEF ou l’empêcher, de quel droit ? », 29 nov. 2020 ; v. aussi le début de celui du 28 juin dernier, en particulier les références des notes 2 et 3).
21 « Scolarisation des enfants handicapés : la députée de l’Isère Servane Hugues veut “repenser l’école inclusive” », francebleu.fr 16 nov. 2023
22 Délégation [x] droit[s] des enfants, Rapport d’information sur l’instruction des enfants en situation de handicap, n° 1856, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 nov. 2023 (66 p.), spéc. pp. 30 à 32
23 V. aussi « Handicap : “Sur les questions de scolarisation, d’insertion professionnelle, d’accessibilité, on est en retard”, regrette la Défenseure des droits », francetvinfo.fr 30 août 2024 : « Claire Hédon réclame donc “des statistiques précises” notamment sur le nombre d’heures durant lesquelles les “440 000 jeunes en situation de handicap sont scolarisés” ». Ajout au 15 octobre d’un article de Camille Allain, « Budget 2025 : L’Éducation nationale va recruter 2.000 AESH pour les élèves en situation de handicap », 20minutes.fr (avec AFP) le 11, à relier avec la note suivante et la fin de ce billet ; à la fin se trouve évoqué un rapport de la Cour des comptes qui m’avait échappé, L’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, 16 sept. 2024, 159 p. (v. spéc. la page 110 et, plus généralement, le résumé de Djéhanne Gani, cafepedagogique.net le 17).
24 Rapport préc., 2023, p. 13 ; « Préciser les conditions et la qualité de la scolarisation (volume horaire en particulier) dans les statistiques officielles recensant le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en classe ordinaire », telle est la première des trente-cinq recommandations listées page 55, en attirant aussi l’attention sur la septième : « Prendre en compte le temps périscolaire dans les notifications des [commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH)] et les projets personnalisés de scolarisation (PPS) » ; après un encadré page 19 sur les accompagnants d’enfants en situation de handicap (AESH) et au terme de deux pages sur ce « pilier fragile de la scolarisation inclusive » (pp. 27 à 29 ; v. ma note 11 le 29 déc. 2019), l’évocation d’un arrêt précède cette recommandation 7 (CE, 20 nov. 2020, Ministre de l’Éducation nationale, de la jeunesse et des sports, n° 422248, décelant une « erreur de droit » dans CAA Nantes, 15 mai 2018, n° 16NT02951 ; v. mon billet du 30 sept., il y a six ans).
25 Alexandre Pedro, « Alexandre Portier, un proche de Laurent Wauquiez nommé ministre délégué à l’éducation », lemonde.fr 23 sept. 2024 (extrait).
26 V. la tribune de Stéphane Decubber et alii, relayée par lemediasocial.fr 28 août 2024, et celle de Vanessa Bernard, « Les para-athlètes sont célébrés, mais nos enfants handicapés sont délaissés », Libération le 3 sept., p. 20 (extrait, renvoyant à « une récente décision du Conseil de l’Europe, dont le comité des droits sociaux a jugé à l’unanimité que la France violait certaines de ses obligations en la matière » : v. la note 6 de mon billet du 31 décembre 2023) ; membre du collectif Vacances Handicap Familles et « mère d’Elorian, un enfant handicapé de 20 ans », l’autrice prend « pour exemple le domaine de la Porte neuve, à Riec-sur-Belon (Finistère) » et « l’arrêt de la subvention du ministère de l’Éducation nationale pour les séjours adaptés organisés par la MGEN à partir du 31 juillet 2025 ».
27 « Rentrée scolaire : des “milliers d’enfants” handicapés sans solution, alerte l’Unapei », lemonde.fr (avec AFP) 26 août 2024 ; au passage, plus largement et en commençant par une ordonnance anecdotique rendue six jours plus tôt, par laquelle la « juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a suspendu les deux décisions du Directeur académique des services départementaux de l’Éducation nationale (DASEN) des Hauts-de-Seine qui avaient affecté « par erreur » deux collégiens au Plessis-Robinson plutôt qu’à Colombes » (actu.fr 22 sept. 2024) ; Sylvie Lecherbonnier, « Un prof devant chaque classe, une mission[/promesse] devenue impossible », Le Monde le 3, p. 8 ; Marion Rousset, « Claire Hédon, Défenseure des droits : “Imaginez la violence subie par ces jeunes sans affectation au lycée” », telerama.fr le 18, résumant sa décision 2023-153 du 6 juillet « relative à la situation des élèves sans affectation au lycée lors de la rentrée scolaire 2022 » (accompagnée d’un communiqué intitulé « Des élèves sans affectation au lycée à la rentrée scolaire : une atteinte au droit à l’éducation qui appelle des réponses fortes » ; il y est renvoyé à la page 29 de son Rapport annuel d’activité 2023, 26 mars 2024, 96 p.).
28 « À l’Assemblée nationale, les députés Paul Christophe et Paul Christophle s’amusent de leur quasi-homonymie », huffingtonpost.fr 18 juill. 2024 ; avec l’écologiste Marie Pochon (v. la note 24 de mon précédent billet), le député de la première circonscription de la Drôme Paul Christophle votera la motion de censure (« Pourquoi nous censurerons le gouvernement de Michel Barnier », medium.com 16 sept. 2024). Portant un intérêt aux questions de genre (v. par ex. « Pour un internet féministe 1/2 », medium.com 31 mars 2020 ; « L’inacceptable dédain de Macron pour les droits des personnes trans », 21 août 2024), ce premier secrétaire fédéral du PS s’était engagé pour la sécurité des « valentinois » (22 mars et 22 mai 2023) ; manifestant l’ambition d’être « le député de gauche de la sécurité » (entretien avec, par Amandine Brioude, ledauphine.com 15 sept. 2024), il a réagi par un communiqué à la nomination de Nicolas Daragon (le 23). Lors des dernières élections, ce dernier est resté « le maire qui n’aura pas pris position » (Jimmy Levacher – LFI –, cité le 1er juillet), les élus LR locaux ayant refusé d’appeler à voter « contre le candidat d’un parti xénophobe, raciste, homophobe et ultraconservateur » (Pierre-Jean Veyret – Réinventons Valence –, cité les 4-8 ; ils étaient en cela à l’unisson de leurs dirigeants : v. Romain Brunet, « “Inouï et inespéré” : comment Les Républicains ont réussi à revenir au pouvoir avec Michel Barnier », france24.com le 23 sept.) ; retenue comme titre d’un article de Thibaut Chevillard (20minutes.fr le 25), la question est posée : « Mais à quoi va servir Nicolas Daragon, le ministre [délégué] “chargé de la sécurité du quotidien” ? ».
29 « J’ai toujours eu à cœur de défendre les droits fondamentaux des personnes handicapées et une société plus inclusive [et j]e m’y engage comme désormais ministre », déclarait-il sur X le 21 septembre (cité par J. C., « Colère et déception dans les secteurs de l’Éducation et du handicap », estrepublicain.fr le 22).
30 Ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes, il avait déjà sous tutelle, pour cette dernière mission, Salima Saa : en 2012, elle trouvait « ridicule » un tel ministère (v. Marlène Thomas, « Gouvernement Barnier : les droits des femmes mis à mal et les réacs en majesté », liberation.fr 23 sept. 2024) ; « “Il est temps” que l’éducation à la vie sexuelle soit “effective”, affirme la nouvelle secrétaire d’État chargée de l’Égalité femmes-hommes [lors d’une conférence de presse du Planning familial à Paris] » (francetvinfo.fr (avec AFP) le 26).
31 « Deux ministres délégués complètent le gouvernement Barnier : Charlotte Parmentier-Lecocq au Handicap et Jean-Louis Thiériot aux Armées et aux Anciens Combattants », francetvinfo.fr 27 sept. 2024
32 Solina Prak note ainsi que le nouveau ministère de la Justice « est connu pour sa rigueur budgétaire, comme le souligne le journal Le Monde [24 sept. 2024, p. 13] » (capital.fr le 23, à partir de la version en ligne) ; le quotidien s’abstenant de développer, il convient de rappeler pour terminer que Didier Migaud « troqua (…) sa carte du PS contre un premier rôle politique [d’envergure nationale en 2010, à l’initiative de Nicolas Sarkozy]. Il anticipait le social-libéralisme » du président Hollande (François Delapierre, « Didier Migaud, super-héros de l’oligarchie », reporterre.net 21 févr. 2013 ; v. aussi Maxence Kagni, « La Cour des comptes demande plus d’austérité », politis.fr le 27 juin) ; consultée les 22 et 29 septembre 2024, sa page Wikipédia revient sur ses mandats locaux antérieurs (depuis 1995), en précisant qu’en « 2006 et sous sa présidence, [Grenoble-Alpes Métropole] procède, comme l’avait fait Seyssins, à la souscription d’emprunts structurés (…) qui se révéleront très défavorables pour les collectivités concernées » (en renvoyant à l’article de Michel Albouy, « Emprunts toxiques : les élus savaient très bien ce qu’ils faisaient », contrepoints.org 20 avr. 2016) ; sont aussi reproduits des extraits selon lesquels l’action du magistrat financier a provoqué une « forte chute de l’investissement public local et des conséquences désastreuses pour des secteurs comme le bâtiment et les équipements publics », en faisant « reposer sur les plus pauvres et les classes moyennes les efforts budgétaires demandés à la population » (Franck Dedieu, Jack Dion, Emmanuel Lévy et Mathias Thépot, « Pascal Lamy, Pierre Moscovici, Jacques Attali… Les cerveaux du naufrage », marianne.net 17 avr. 2020).

Front populaire et Blum : quelques références

Capture d’écran du Contrat de législature du NFP, juin 2024

Après les élections européennes1Il y a un peu plus de cinq ans, le 13 mai 2019, j’avais publié un billet à l’approche du scrutin, à propos des revendications de la liberté de circulation – qui se font parfois au détriment du droit à l’éducation. et l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale, la référence au « Front populaire » est rapidement redevenue sur le devant de la scène : dès cette soirée du dimanche 9 juin, l’expression avait été employée par François Ruffin qui, trois jours plus tard, proposait comme « première mesure (…) l’école vraiment gratuite »2« Législatives : François Ruffin souhaite “la véritable gratuité de l’école” », bfmtv.com 12 juin 2024 ; ajout le 9 juillet de cet extrait de Marine Tondelier, au soir du second tour, x.com le 7 ; « Faire les premiers pas pour la gratuité intégrale à l’école : cantine scolaire, fournitures, transports, activités périscolaires », telle est l’une des formules du Contrat de législature du Nouveau Front Populaire (NFP)3NFP, Contrat de législature préc., juin 2024, p. 5 ; v. Olivier Chartrain, « Nouveau Front Populaire : fin du “choc des savoirs” et l’ambition de rebâtir l’école publique », humanite.fr le 14, Philippe Watrelot, « La gauche et l’école : un programme prometteur à développer », alternatives-economiques.fr le 26 et, mis en ligne entretemps, comparateur.nosservicespublics.fr/education.

Depuis trois semaines, de nombreux éclairages ont été publiés sur les limites et l’intérêt4V. par ex. Frédéric Monier (entretien avec, par Olivier Doubre), « La référence au Front populaire permet de lier conscience du danger et victoire possible », politis.fr le 18 de cette « réactivation politique d’une référence mémorielle »5Fabien Escalona, « Front populaire : les gauches réveillent le mythe de 1936 », Mediapart le 11 ; v. aussi les textes rassemblés sur le blog du journal, sous le titre « Léon Blum, Front populaire et référence mémorielle ». ; elle me donne l’occasion de renvoyer à quelques textes6V. tout d’abord mes billets des 31 janvier 2020 (au cinquième paragraphe) et 29 février 2020 (en note 9), ainsi que ma note de jurisprudence liée (Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai, au point 2)., en particulier à mon billet (portrait) consacré à Jean Zay (1904-1944)7Texte publié le 28 juillet 2018.

Le 4 juin 1936, il avait été nommé ministre de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts par Léon Blum (1872-1950). Sauf erreur, alors que je mentionnais plusieurs fois ce dernier en 20178V. ma thèse, aux (notes de bas de) pages (202, 247,) 550, (717,) 718, 760 (et 1006)., je ne l’ai fait sur ce site qu’une seule fois9Le 23 septembre 2018, lors de l’actualisation de mon billet intitulé « De Marie Curie à Paul Langevin », 4 févr. 2018 ; il l’a été beaucoup plus ces dernières semaines, jusqu’au sommet de l’État10Pour reprendre une jolie formule, Blum est quant à lui « parvenu au sommet en empruntant le chemin des crêtes » (Jacques Julliard, Les gauches françaises. 1762-2012 : Histoire, politique et imaginaire, Flammarion, 2012, p. 556). : les 10 et 12 juin, un député du Rassemblement National, une essayiste et le président de la République tenaient, dans des termes très proches, à lui adresser « une pensée »11« Duhamel (BFM) recadre sèchement Odoul (RN) sur Léon Blum », entrevue.fr 11 juin 2024 : si l’heure mentionnée est la bonne, la formule a été employée deux minutes avant le tweet de l’essayiste plagiaire Rachel Khan (reproduit par Ronan Tésorière, « Législatives : Bernard Cazeneuve et Julien Dray tirent à boulets rouges sur « le Front Populaire », leparisien.fr le 11) ; Mathilde Serra, « “Il doit se retourner dans sa tombe” : Emmanuel Macron adresse une pensée à Léon Blum après la formation d’un “Front populaire” », lefigaro.fr les 12-13.

La stratégie d’Emmanuel Macron reposant notamment sur la division des forces de gauche, il n’a nullement répugné à diffamer l’une d’entre elles en l’accusant d’antisémitisme12V. la tribune intitulée « Réponse collective à une infamie : Sur l’accusation d’antisémitisme portée contre la France insoumise », auposte.fr 17 juin 2024, ainsi que celle co-signée, notamment, par Danièle Lochak, « Nous, citoyens juifs, notre devoir est de refuser l’instrumentalisation de l’antisémitisme et de faire barrage au RN », Libération le 20, blogs.mediapart.fr le 26, déplorant notamment l’enrôlement de Blum dans des « accusations diffamantes » (v. encore Denis Sieffert, « À propos d’un antisémitisme à gauche réel ou supposé », politis.fr le 25). Sur ce site, v. mes billets des 25 mars 2019 – en note 30 – et 30 mai 2020 – à partir de la troisième illustration, où je revenais sur les mises en cause d’Edgar Morin et d’Achille Mbembe ; j’ajoute ici quelques mots à propos de celles liées au terme « rescapé », repris avec insistance par Rachel Khan dans son tweet du 10 juin dernier (v. la note 11 supra), suite à celui qu’elle avait adressé à Mathilde Panot à l’encontre du rappeur Médine : la réaction de l’intéressé avait provoqué les initiatives de 47 députés Renaissance « demand[ant] à EELV et LFI de ne pas l’inviter », leberry.fr 11 août 2023, François Cormier-Bouligeon allant jusqu’à saisir « la justice en adressant un courrier à la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, au titre de l’article 40 du Code pénal » (selon Thomas Lorentz, midilibre.fr le 24), des défections aux universités d’été des écologistes (ibid.), un article dans la presse locale drômoise à l’approche de celles du parti LFI (ledauphine.com le 22) et des propos très clairs de Médine à Châteauneuf-sur-Isère (bfmtv.com le 28 ; revenant quant à lui sur « cette polémique sous l’angle du droit pénal », Thomas Besse, « Controverse sur le tweet de Médine visant Rachel Khan : quid juris ? », le leclubdesjuristes.com le 8 sept.). Durant l’une des manifestations contre l’extrême droite, après sa victoire aux élections européennes, j’ai pu constater à Valence (v. la dernière photo illustrant l’article d’Alexandra Marie Ertiani, francetvinfo.fr 15 juin 2024) que certains slogans visaient explicitement l’antisémitisme et contrastaient, donc, avec le « silence » qui demeure encore souvent au sein des « organisations de la gauche radicale et de l’antiracisme français » (v. Camilla Brenni, Memphis Krickeberg, Léa Nicolas-Teboul & Zacharias Zoubir, « Le non-sujet de l’antisémitisme à gauche », Vacarme févr. 2019, n° 86).. Au début de son premier mandat, il appelait à ne « pas occulter la figure de (Charles) Maurras » (1868-1952)13« Macron (plutôt) contre une réédition des pamphlets antisémites de Céline », nouvelobs.com (avec AFP) 8 mars 2018 ; c’était après l’indignation qu’avait suscité le fait qu’on ait pu envisager, « dans une commémoration officielle, oublier l’antisémitisme de l’insulteur quotidien du “Juif Blum” »14Daniel Schneidermann, « Maurras, une amnésie d’État ? », liberation.fr 4 févr. 2018. Plus tard, il s’y référait encore15V. son entretien publié dans L’Express du 22 décembre 2020, provoquant notamment ce communiqué des Juives et juifs révolutionnaires, « Macron, Maurras, Pétain et l’antisémitisme », dijoncter.info 27 déc. 2020-1er févr. 2022 et cette tribune du directeur du Musée d’art et d’histoire du judaïsme Paul Salmona, « A quoi sert la mise au ban de Maurras par la justice si l’amnésie vient la recouvrir ? », lemonde.fr 7 janv. 2021 ; v. encore Rémi Noyon, « “Un tout organique”  : Macron entre Durkheim et Maurras », nouvelobs.com 18 juill. 2022 ; Sébastien Fontenelle, « Les trous de mémoire de M. Macron », politis.fr le 20, comme s’il lui importait peu que le directeur du journal L’Action française ait écrit : « C’est en tant que juif qu’il faut voir, concevoir, entendre et abattre le Blum »16Nicolas Truong, « Front populaire », Le Monde 27 juin 2024, p. 31, en datant cette phrase du fondateur de l’action française au 15 mai 1936, après avoir cité les historiens Antoine Prost et Jean Vigreux, auteurs respectivement d’Autour du Front populaire. Aspects du mouvement social au XXème siècle (Seuil, 2006) et d’Histoire du Front populaire. 1936, l’échappée belle ([Tallandier, 2016,] Texto, 2022). ; « “Voilà un homme à fusiller, mais dans le dos”, qu’il ait inscrit Blum en bonne place sur la liste des personnages à tuer [égorger] “avec un couteau de cuisine” »17Jean Lacouture, Léon Blum, Seuil, 1977 (édition abrégée), p. 205 [249]. V. par ailleurs page 95, pour revenir aux questions pédagogiques : « L’enfant unique de Lise et Léon Blum est né en 1902, Robert, à l’éducation duquel son père voue une attention passionnée » ; ces lignes sont extraites du chapitre intitulé « Le sillage de Jaurès », pp. 72 à 120 : le biographe rappelle que l’affaire Dreyfus « a noué à jamais [leurs] deux vies » et termine sur l’assassinat de Jaurès, le 31 juillet 1914 (pour une nouvelle récente dans laquelle ce dernier ne meurt pas, v. Camille Leboulanger, « La Générale », in Dévorer le futur, Goater, 2023, p. 23 ; s’agissant de sa contribution à l’affirmation du droit à l’éducation, v. mon portrait). Ajout au 9 juillet de plusieurs lignes en réaction à un échange entre Raphaël Kempf et Aleksandar Nikolic ; L’Équipe du dimanche 7 juillet a consacré ultérieurement à ce dernier un portrait, titré « L’inconnu national », permettant de présenter brièvement celui qui s’est trouvé, quatre ans après avoir adhéré au Front National, « bombardé “conseiller sport” » de la patronne » en 2017 : « Mère portugaise, père serbe (décédé), binational, enfant métisse et parcours idéologique entamé, à 15 ans, dans la foulée de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) avant une brève adhésion au PC », il justifie aujourd’hui son évolution politique par des formules antisémite et pro-palestinienne entendues lors d’une projection du film La vie est belle dans son lycée des Yvelines (Alban Traquet avec A.D., page 15) ; député européen élu en 2024, il était 19ème sur la liste du RN, qui a obtenu 30 sièges (sur les 81 français et 720 européens) le 9 juin – soit la majorité des plus ou moins quatre-vingt « “Patriotes pour l’Europe”, imaginé[s] par le Premier ministre hongrois Viktor Orban » (Romain Herreros, « Le groupe présidé par Jordan Bardella au Parlement européen torpille la “normalisation” du RN », huffingtonpost.fr 8 juill. ; v. aussi cet article avec AFP, le situant « derrière la droite pro-européenne (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D), surpassant les libéraux de Renew (76 sièges), groupe auquel appartient le parti du président français Emmanuel Macron, et le groupe de droite radicale ECR associé à la Première ministre italienne Giorgia Meloni (78 sièges). »). Le 1er juillet, l’avocat revenait sur la genèse de sa candidature NFP dans la 1ère circonscription de Paris en évoquant son livre « sur Léon Blum » (Ennemis d’État. Les lois scélérates, des anarchistes aux terroristes, La Fabrique, 2019, spéc. pp. 32 et s. à partir de son article à La Revue blanche 1er juill. 1898, reproduit pp. 125 et s., signé « Un [jeune] juriste » et repris dans « une brochure de 62 pages » en 1899 ; je la citais dans ma thèse en note de bas de page 247, n° 1484, tout comme l’un des deux autres auteurs – Francis de Pressensé, pour son parcours ultérieur, spéc. pp. 314, 547 et s.). L’eurodéputé RN de rétorquer avec aplomb que celui-ci « était pour la préférence nationale » ; le Front populaire l’aurait « mis[e] en vigueur » et le nier relèverait d’une « inculture historique » (LCP, à partir de 35 min. 30). Gérard Noiriel vient justement de publier, en mars dans la collection « Tracts » (n° 55), Préférence nationale. Leçon d’histoire à l’usage des contemporains, Gallimard, 2024, 58 p., avec page suivante ces notes 10 et 9 : « La plupart de mes références sur les années 1930 sont extraites de l’étude de Jean-Charles Bonnet, Les Pouvoirs publics et l’immigration dans l’entre-deux-guerres, Centre d’histoire économique et sociale de la région lyonnaise, 1976 [v. la recension de de cette thèse de 3ème cycle par Martine Charlot, Migrants Formation 1980, n° 40, pp. 2-3] ; Imre Ferenczi, « La statistique des étrangers notamment au point de vue français », Journal de la société statistique de Paris 1937, n° 78, pp. 288-310 : en s’appuyant sur cet article, l’historien écrit : « En 1930, d’après les chiffres du Bureau international du Travail, la proportion d’étrangers immigrés en France était de 8,6 %, soit un chiffre supérieur à celui d’aujourd’hui (7,8 %) » ; elle baissait dès l’année suivante, lorsque « l’effondrement de la bourse de Wall Street (octobre 1929) avait déjà produit ses effets. (…) Alors que l’immigration avait été invisible (…) – parce qu’il fallait combler les déficits du marché du travail – elle redevint un “problème” dès le début des années 1930 » (pp. 16-17). Après un « quasi-consensus sur la “préférence nationale” [qui] aboutit au vote de la loi du 10 août 1932, adoptée à l’unanimité malgré 128 abstentions de gauche et d’extrême-gauche », les « décrets-lois adoptés entre mai et novembre 1938 poussèrent au paroxysme la stratégie, née au cours des années 1880, visant à intégrer le discours de l’extrême-droite [la] concernant ». Entretemps, la « victoire du Front populaire marqua un coup d’arrêt dans cette fuite en avant (…). Certes, la proposition du PCF en faveur d’un statut juridique des immigrés ne fut pas adoptée et la politique antérieure du contingentement des flux migratoires fut prolongée. Néanmoins, les nouveaux gouvernants firent preuve d’une attitude plus souple et plus humaine, surtout pour les réfugiés. Les décrets-lois imposés par [Édouard Daladier, successeur de Léon Blum] plongèrent donc la gauche dans une consternation bien illustrée par ces propos du communiste Georges Lévy : « qui aurait pu croire que deux ans après la victoire du Front populaire, les immigrés, au lieu du statut juridique escompté, se verraient octroyer un ensemble de mesures policières propres à faire passer la France pour une marâtre » (pp. 18, 24 et 26-27, avant d’ouvrir ses « Réflexions sur la loi Asile et immigration du 19 décembre 2023 » par ce titre : « Emmanuel Macron, le Daladier du XXIe siècle ? », pp. 30 et s.)..

« Paris, le 14 juillet 1936. Sur la tribune officielle, Thérèse (à gauche) est la seule femme au premier rang de l’estrade. Aux côtés de son époux Léon Blum, de Maurice Thorez et de Roger Salengro (de gauche à droite), elle lève son poing ganté pour célébrer la victoire du Front populaire » (Charles De Saint Sauveur, « Le sacrifice de la “citoyenne Blum” », leparisien.fr 7 mai 2016, recensant la biographie de Dominique Missika, Thérèse : le Grand Amour caché de Léon Blum, Alma ; v. auparavant le livre que l’historienne avait consacré, en 2009, à sa relation avec sa troisième épouse, Jeanne Reichenbach)

Au lendemain de la formation du gouvernement du Front populaire, Maurras commentait : « Le cabinet juif est fait »18Figurant en Une de L’Action française 5 juin 1936 (titré « La France sous le juif »), cette phrase est citée par Edwy Plenel, « Front populaire : Blum contre Macron », Mediapart 16 juin 2024 ; outre le rappel par le fondateur du journal en ligne de ce que Gérald Darmanin avait fait référence, le 6 décembre 2022, à Jacques Bainville (Hugues Maillot, lefigaro.fr le 7), l’avoir entendu ce vendredi 28 juin sur franceinfo m’incite à modifier cette note le 9 juillet pour revenir sur le retrait d’investiture évoqué et, surtout, à « un fait incontestable » plus récent que ces « tweets à caractère antisémite » (Jacques Pezet, liberation.fr le 27 ; lanouvellerepublique.fr le 28). Dans son livre intitulé Le séparatisme islamiste : manifeste pour la laïcité (L’Observatoire, 2021), Gérald Darmanin développait une idée exprimée dans Libération dès 2015 : « Il faut que l’État impose aux musulmans ce que Napoléon a imposé aux juifs » (23 nov. ; v. déjà sa tribune du 14 janv., citée dans ma thèse en bas de page 566, n° 3651) ; il le faisait toutefois en ressassant des clichés antisémites, dans une indifférence quasi-générale (v. Sébastien Fontenelle, « Darmanin, écrivain », politis.fr 31 mars 2021, renvoyant aux « timides articles » parus dans L’Huma et L’Obs, ainsi qu’au « passionnant entretien avec l’historien Pierre Birnbaum, qui remet quelques points sur quelques i : « Napoléon et les Juifs : politique “scandaleuse” », sur www.arretsurimages.net [v. respectivement les 25, 23-24 et à nouveau 25] ». ; ainsi accueillait-il un évènement dont il convient de rappeler, au présent, la genèse : après la manifestation antiparlementaire du 6 février 1934, organisée par les ligues d’extrême-droite, les partis communistes et socialistes s’unissent et, en juillet, « signent un “pacte d’unité d’action antifasciste”. En juin 1935, le parti radical [les rejoint avant un défilé marquant, à la date symbolique du 14 juillet et grâce à d’autres formations politiques, syndicales et associatives, la naissance du] Front populaire (…). Il remporte une nette victoire aux élections législatives de 1936, envoyant 386 députés sur 608 sièges à la Chambre des députés, dont 147 pour la SFIO [Section française de l’Internationale ouvrière19V. l’étude de Ji-Hyun Jeon, « Quelques jalons pour une histoire des juristes au sein du Parti socialiste-SFIO (1905-1939) », in Carlos Miguel Herrera, Les juristes face au politique. Le droit, la gauche, la doctrine sous la Troisième République, t. II, Kimé, 2005, p. 45, spéc. pp. 46 et 48 : « du moment de sa création en 1905 jusqu’à la veille de la Deuxième Guerre mondiale », l’alors doctorante en histoire à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), en recense 251.]. Le socialiste Léon Blum forme un gouvernement de coalition. En moins de deux mois sont votés la semaine de quarante heures, les congés payés et les conventions collectives »20Stéphanie Trouillard, « Après l’appel à un nouveau “Front populaire”, retour sur “l’immense espoir” suscité en 1936 », france24.com 11 juin 2024.

AFP, illustration reprise depuis l’article de Marion Pignot, « En images : Suffragettes, Hubertine Auclert et IVG… Il y a 80 ans, les Françaises votaient », 20minutes.fr 21 avr. 2024 (à l’occasion du 170ème anniversaire de la naissance de cette dernière, v. mon billet du 10 avril 2018 ; récemment, v. la tribune de Camille Froidevaux-Metterie, « Voter RN pour les femmes, c’est braquer une arme contre soi », lemonde.fr 13 juin 2024)

« Ce train de réformes marque durablement la société française et le modèle républicain, comme le souligne Jean Vigreux (…)[, pour qui] il ne faut pas non plus perdre de vue “les désillusions suscitées” par le Front populaire : “Il y a eu trois secrétaires d’État, femmes21Plus précisément sous-secrétaires d’État (note modifiée le 3 août, complétée le 12 en renvoyant au premier épisode de la série de Mediapart, « Ministres pionnières du Front Populaire », signé ce jour par Antoine Perraud) : Suzanne Lacore à la Protection de l’enfance, Cécile Brunschvicg à l’Éducation nationale et Irène Joliot-Curie à la Recherche scientifique ; à propos de cette dernière et outre mon billet signalé en note 9, v. le texte de Jean-Christophe Féraud, « Irène Curie et Frédéric Joliot, atomes très crochus », Libération 1er août 2024, pp. II-III des feuilles « été » ; à la page 22 liée, lire Alexandra Schwartzbrod, « Blum, itinéraire d’un lettré », p. 22, à propos de l’adaptation en livre, en 2023, du podcast de Philippe Collin cité ci-après. J’ajoute aussi la localisation des rues Léon Blum les plus proches pour moi – auxquelles j’ai prêté attention à la faveur de mes dernières courses à pied : au nord, à Bourg-lès-Valence, elle se situe juste avant la rue Édith Piaf (au passage, quelques réactions dans la presse étrangère à « la cérémonie d’ouverture des JO de Paris », courrierinternational.com 27 juill.) ; à Valence sud, dans le quartier de Valensolles, c’est depuis la rue Jules Ferry (où se trouvait une école réhabilitée en MPT, inaugurée le 12 avril) que l’on accède à la rue Léon Blum (pour une photo prise en 1984 – l’année de ma naissance – entre ces deux rues, v. le site memoire-drome.com ; elles peuvent être aussi reliées, à pied, par l’allée René Cassin – à qui j’ai consacré, en 2018, l’un de mes portraits). ; mais cela n’a pas permis d’accorder le droit de vote aux femmes. D’un point de vue colonial, il faut aussi souligner l’inégalité des droits entre ceux qui étaient sous le code de l’indigénat et le reste des colons européens. La non-intervention lors de la guerre civile en Espagne a aussi créé des blessures” »22Stéphanie Trouillard (citant Jean Vigreux), art. préc..

Livrant « une contribution majeure à l’histoire du droit politique français »23Éric Desmons, « Préface », in Vincent Le Grand, Léon Blum (1872-1950) : gouverner la République, LGDJ, 2008, p. VI, Vincent Le Grand écrivait en 2008 : « Si la vie lui en avait laissé le temps, le vieil homme aurait [certainement approuvé] l’arrêt Dehaene24Relatif au droit de grève et figurant parmi les « grands arrêts de la jurisprudence administrative » (GAJA), l’arrêt Dehaene se trouve évoqué à la page 19 du Livret de méthodologie, ainsi qu’aux notes 16 et 22 de mon billet du 23 octobre 2019, dont le titre fait écho à la proposition mise en exergue au seuil de ce billet : Services publics de l’enseignement laïque (gratuité) et de la restauration scolaire (« lois »). Dès le premier épisode du podcast intitulé Léon Blum, une vie héroïque, produit par Philippe Collin pour France Inter, Pierre Birnbaum rappelle que « tout étudiant – de nos jours – de deuxième année de droit administratif sera amené à étudier les conclusions de Léon Blum sur l’arrêt Lemonnier » (« Juif alsacien, dandy parisien », radiofrance.fr 5 déc. 2022, dans le dernier quart d’heure). L’association française pour la recherche en droit administratif (AFDA) a consacré l’un de ses « printemps de la jeune recherche juridique », en 2012, à Léon Blum (v. ce lien, les articles ayant été publiés à la RFDA 2013) ; dix ans plus tard, à l’occasion du 150ème anniversaire de sa naissance, la direction de la bibliothèque et des archives du Conseil d’État a réuni pour un colloque des « Ressources documentaires » (nov. 2022, 30 p.). rendu par le Conseil d’État trois mois après sa mort », en 1950 ; plus en phase avec l’actualité, un autre extrait mérite d’être cité pour conclure : « “Dans une démocratie, même aussi imparfaite que la nôtre, proclamait Léon Blum, nulle autorité n’est concevable sans responsabilité correspondante”. Irresponsable devant le Parlement comme devant le suffrage universel, le président de la République ne pouvait pas posséder de pouvoirs propres. Blum souhaitait en conséquence que le bicéphalisme de l’exécutif français puisse connaître la même évolution qu’en Angleterre, où l’effacement royal avait été compensé par la promotion du Premier ministre. Ce transfert d’autorité répondant au principe des vases communicants n’est pas sans faire penser à celui qui devait s’opérer plus près de nous lors des périodes de cohabitation qu’a connues la Cinquième République. L’effacement imposé alors au président de la République constitue de fait une issue dont Blum se serait sans doute félicité parce qu’elle a pour conséquence de rapprocher la France du parlementarisme à l’anglaise qu’il tenait comme référence »25Vincent Le Grand, thèse préc., 2008, pp. 500 et 325, citant Léon Blum, « La question est posée », Le Populaire 16 oct. 1923 – en invitant à « approfondir cette question du lien particulier entre autorité et responsabilité en régime parlementaire », en lisant Pierre Pactet, « L’évolution contemporaine de la responsabilité gouvernementale dans les démocraties pluralistes », in Le Pouvoir. Mélanges offerts à Georges Burdeau, LGDJ, 1977, p. 208.

« Revitaliser le Parlement [et a]broger le 49.3 », telles sont précisément deux des propositions du NFP dans le cadre d’une VIème République, instaurée « par la convocation d’une assemblée constituante citoyenne élue »26Contrat de législature préc., juin 2024, p. 15, après le paragraphe consacré au « nouveau droit à la retraite »..

Notes

1 Il y a un peu plus de cinq ans, le 13 mai 2019, j’avais publié un billet à l’approche du scrutin, à propos des revendications de la liberté de circulation – qui se font parfois au détriment du droit à l’éducation.
2 « Législatives : François Ruffin souhaite “la véritable gratuité de l’école” », bfmtv.com 12 juin 2024 ; ajout le 9 juillet de cet extrait de Marine Tondelier, au soir du second tour, x.com le 7
3 NFP, Contrat de législature préc., juin 2024, p. 5 ; v. Olivier Chartrain, « Nouveau Front Populaire : fin du “choc des savoirs” et l’ambition de rebâtir l’école publique », humanite.fr le 14, Philippe Watrelot, « La gauche et l’école : un programme prometteur à développer », alternatives-economiques.fr le 26 et, mis en ligne entretemps, comparateur.nosservicespublics.fr/education
4 V. par ex. Frédéric Monier (entretien avec, par Olivier Doubre), « La référence au Front populaire permet de lier conscience du danger et victoire possible », politis.fr le 18
5 Fabien Escalona, « Front populaire : les gauches réveillent le mythe de 1936 », Mediapart le 11 ; v. aussi les textes rassemblés sur le blog du journal, sous le titre « Léon Blum, Front populaire et référence mémorielle ».
6 V. tout d’abord mes billets des 31 janvier 2020 (au cinquième paragraphe) et 29 février 2020 (en note 9), ainsi que ma note de jurisprudence liée (Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1, janv.-mai, au point 2).
7 Texte publié le 28 juillet 2018
8 V. ma thèse, aux (notes de bas de) pages (202, 247,) 550, (717,) 718, 760 (et 1006).
9 Le 23 septembre 2018, lors de l’actualisation de mon billet intitulé « De Marie Curie à Paul Langevin », 4 févr. 2018
10 Pour reprendre une jolie formule, Blum est quant à lui « parvenu au sommet en empruntant le chemin des crêtes » (Jacques Julliard, Les gauches françaises. 1762-2012 : Histoire, politique et imaginaire, Flammarion, 2012, p. 556).
11 « Duhamel (BFM) recadre sèchement Odoul (RN) sur Léon Blum », entrevue.fr 11 juin 2024 : si l’heure mentionnée est la bonne, la formule a été employée deux minutes avant le tweet de l’essayiste plagiaire Rachel Khan (reproduit par Ronan Tésorière, « Législatives : Bernard Cazeneuve et Julien Dray tirent à boulets rouges sur « le Front Populaire », leparisien.fr le 11) ; Mathilde Serra, « “Il doit se retourner dans sa tombe” : Emmanuel Macron adresse une pensée à Léon Blum après la formation d’un “Front populaire” », lefigaro.fr les 12-13
12 V. la tribune intitulée « Réponse collective à une infamie : Sur l’accusation d’antisémitisme portée contre la France insoumise », auposte.fr 17 juin 2024, ainsi que celle co-signée, notamment, par Danièle Lochak, « Nous, citoyens juifs, notre devoir est de refuser l’instrumentalisation de l’antisémitisme et de faire barrage au RN », Libération le 20, blogs.mediapart.fr le 26, déplorant notamment l’enrôlement de Blum dans des « accusations diffamantes » (v. encore Denis Sieffert, « À propos d’un antisémitisme à gauche réel ou supposé », politis.fr le 25). Sur ce site, v. mes billets des 25 mars 2019 – en note 30 – et 30 mai 2020 – à partir de la troisième illustration, où je revenais sur les mises en cause d’Edgar Morin et d’Achille Mbembe ; j’ajoute ici quelques mots à propos de celles liées au terme « rescapé », repris avec insistance par Rachel Khan dans son tweet du 10 juin dernier (v. la note 11 supra), suite à celui qu’elle avait adressé à Mathilde Panot à l’encontre du rappeur Médine : la réaction de l’intéressé avait provoqué les initiatives de 47 députés Renaissance « demand[ant] à EELV et LFI de ne pas l’inviter », leberry.fr 11 août 2023, François Cormier-Bouligeon allant jusqu’à saisir « la justice en adressant un courrier à la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, au titre de l’article 40 du Code pénal » (selon Thomas Lorentz, midilibre.fr le 24), des défections aux universités d’été des écologistes (ibid.), un article dans la presse locale drômoise à l’approche de celles du parti LFI (ledauphine.com le 22) et des propos très clairs de Médine à Châteauneuf-sur-Isère (bfmtv.com le 28 ; revenant quant à lui sur « cette polémique sous l’angle du droit pénal », Thomas Besse, « Controverse sur le tweet de Médine visant Rachel Khan : quid juris ? », le leclubdesjuristes.com le 8 sept.). Durant l’une des manifestations contre l’extrême droite, après sa victoire aux élections européennes, j’ai pu constater à Valence (v. la dernière photo illustrant l’article d’Alexandra Marie Ertiani, francetvinfo.fr 15 juin 2024) que certains slogans visaient explicitement l’antisémitisme et contrastaient, donc, avec le « silence » qui demeure encore souvent au sein des « organisations de la gauche radicale et de l’antiracisme français » (v. Camilla Brenni, Memphis Krickeberg, Léa Nicolas-Teboul & Zacharias Zoubir, « Le non-sujet de l’antisémitisme à gauche », Vacarme févr. 2019, n° 86).
13 « Macron (plutôt) contre une réédition des pamphlets antisémites de Céline », nouvelobs.com (avec AFP) 8 mars 2018
14 Daniel Schneidermann, « Maurras, une amnésie d’État ? », liberation.fr 4 févr. 2018
15 V. son entretien publié dans L’Express du 22 décembre 2020, provoquant notamment ce communiqué des Juives et juifs révolutionnaires, « Macron, Maurras, Pétain et l’antisémitisme », dijoncter.info 27 déc. 2020-1er févr. 2022 et cette tribune du directeur du Musée d’art et d’histoire du judaïsme Paul Salmona, « A quoi sert la mise au ban de Maurras par la justice si l’amnésie vient la recouvrir ? », lemonde.fr 7 janv. 2021 ; v. encore Rémi Noyon, « “Un tout organique”  : Macron entre Durkheim et Maurras », nouvelobs.com 18 juill. 2022 ; Sébastien Fontenelle, « Les trous de mémoire de M. Macron », politis.fr le 20
16 Nicolas Truong, « Front populaire », Le Monde 27 juin 2024, p. 31, en datant cette phrase du fondateur de l’action française au 15 mai 1936, après avoir cité les historiens Antoine Prost et Jean Vigreux, auteurs respectivement d’Autour du Front populaire. Aspects du mouvement social au XXème siècle (Seuil, 2006) et d’Histoire du Front populaire. 1936, l’échappée belle ([Tallandier, 2016,] Texto, 2022).
17 Jean Lacouture, Léon Blum, Seuil, 1977 (édition abrégée), p. 205 [249]. V. par ailleurs page 95, pour revenir aux questions pédagogiques : « L’enfant unique de Lise et Léon Blum est né en 1902, Robert, à l’éducation duquel son père voue une attention passionnée » ; ces lignes sont extraites du chapitre intitulé « Le sillage de Jaurès », pp. 72 à 120 : le biographe rappelle que l’affaire Dreyfus « a noué à jamais [leurs] deux vies » et termine sur l’assassinat de Jaurès, le 31 juillet 1914 (pour une nouvelle récente dans laquelle ce dernier ne meurt pas, v. Camille Leboulanger, « La Générale », in Dévorer le futur, Goater, 2023, p. 23 ; s’agissant de sa contribution à l’affirmation du droit à l’éducation, v. mon portrait). Ajout au 9 juillet de plusieurs lignes en réaction à un échange entre Raphaël Kempf et Aleksandar Nikolic ; L’Équipe du dimanche 7 juillet a consacré ultérieurement à ce dernier un portrait, titré « L’inconnu national », permettant de présenter brièvement celui qui s’est trouvé, quatre ans après avoir adhéré au Front National, « bombardé “conseiller sport” » de la patronne » en 2017 : « Mère portugaise, père serbe (décédé), binational, enfant métisse et parcours idéologique entamé, à 15 ans, dans la foulée de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) avant une brève adhésion au PC », il justifie aujourd’hui son évolution politique par des formules antisémite et pro-palestinienne entendues lors d’une projection du film La vie est belle dans son lycée des Yvelines (Alban Traquet avec A.D., page 15) ; député européen élu en 2024, il était 19ème sur la liste du RN, qui a obtenu 30 sièges (sur les 81 français et 720 européens) le 9 juin – soit la majorité des plus ou moins quatre-vingt « “Patriotes pour l’Europe”, imaginé[s] par le Premier ministre hongrois Viktor Orban » (Romain Herreros, « Le groupe présidé par Jordan Bardella au Parlement européen torpille la “normalisation” du RN », huffingtonpost.fr 8 juill. ; v. aussi cet article avec AFP, le situant « derrière la droite pro-européenne (PPE) et les sociaux-démocrates (S&D), surpassant les libéraux de Renew (76 sièges), groupe auquel appartient le parti du président français Emmanuel Macron, et le groupe de droite radicale ECR associé à la Première ministre italienne Giorgia Meloni (78 sièges). »). Le 1er juillet, l’avocat revenait sur la genèse de sa candidature NFP dans la 1ère circonscription de Paris en évoquant son livre « sur Léon Blum » (Ennemis d’État. Les lois scélérates, des anarchistes aux terroristes, La Fabrique, 2019, spéc. pp. 32 et s. à partir de son article à La Revue blanche 1er juill. 1898, reproduit pp. 125 et s., signé « Un [jeune] juriste » et repris dans « une brochure de 62 pages » en 1899 ; je la citais dans ma thèse en note de bas de page 247, n° 1484, tout comme l’un des deux autres auteurs – Francis de Pressensé, pour son parcours ultérieur, spéc. pp. 314, 547 et s.). L’eurodéputé RN de rétorquer avec aplomb que celui-ci « était pour la préférence nationale » ; le Front populaire l’aurait « mis[e] en vigueur » et le nier relèverait d’une « inculture historique » (LCP, à partir de 35 min. 30). Gérard Noiriel vient justement de publier, en mars dans la collection « Tracts » (n° 55), Préférence nationale. Leçon d’histoire à l’usage des contemporains, Gallimard, 2024, 58 p., avec page suivante ces notes 10 et 9 : « La plupart de mes références sur les années 1930 sont extraites de l’étude de Jean-Charles Bonnet, Les Pouvoirs publics et l’immigration dans l’entre-deux-guerres, Centre d’histoire économique et sociale de la région lyonnaise, 1976 [v. la recension de de cette thèse de 3ème cycle par Martine Charlot, Migrants Formation 1980, n° 40, pp. 2-3] ; Imre Ferenczi, « La statistique des étrangers notamment au point de vue français », Journal de la société statistique de Paris 1937, n° 78, pp. 288-310 : en s’appuyant sur cet article, l’historien écrit : « En 1930, d’après les chiffres du Bureau international du Travail, la proportion d’étrangers immigrés en France était de 8,6 %, soit un chiffre supérieur à celui d’aujourd’hui (7,8 %) » ; elle baissait dès l’année suivante, lorsque « l’effondrement de la bourse de Wall Street (octobre 1929) avait déjà produit ses effets. (…) Alors que l’immigration avait été invisible (…) – parce qu’il fallait combler les déficits du marché du travail – elle redevint un “problème” dès le début des années 1930 » (pp. 16-17). Après un « quasi-consensus sur la “préférence nationale” [qui] aboutit au vote de la loi du 10 août 1932, adoptée à l’unanimité malgré 128 abstentions de gauche et d’extrême-gauche », les « décrets-lois adoptés entre mai et novembre 1938 poussèrent au paroxysme la stratégie, née au cours des années 1880, visant à intégrer le discours de l’extrême-droite [la] concernant ». Entretemps, la « victoire du Front populaire marqua un coup d’arrêt dans cette fuite en avant (…). Certes, la proposition du PCF en faveur d’un statut juridique des immigrés ne fut pas adoptée et la politique antérieure du contingentement des flux migratoires fut prolongée. Néanmoins, les nouveaux gouvernants firent preuve d’une attitude plus souple et plus humaine, surtout pour les réfugiés. Les décrets-lois imposés par [Édouard Daladier, successeur de Léon Blum] plongèrent donc la gauche dans une consternation bien illustrée par ces propos du communiste Georges Lévy : « qui aurait pu croire que deux ans après la victoire du Front populaire, les immigrés, au lieu du statut juridique escompté, se verraient octroyer un ensemble de mesures policières propres à faire passer la France pour une marâtre » (pp. 18, 24 et 26-27, avant d’ouvrir ses « Réflexions sur la loi Asile et immigration du 19 décembre 2023 » par ce titre : « Emmanuel Macron, le Daladier du XXIe siècle ? », pp. 30 et s.).
18 Figurant en Une de L’Action française 5 juin 1936 (titré « La France sous le juif »), cette phrase est citée par Edwy Plenel, « Front populaire : Blum contre Macron », Mediapart 16 juin 2024 ; outre le rappel par le fondateur du journal en ligne de ce que Gérald Darmanin avait fait référence, le 6 décembre 2022, à Jacques Bainville (Hugues Maillot, lefigaro.fr le 7), l’avoir entendu ce vendredi 28 juin sur franceinfo m’incite à modifier cette note le 9 juillet pour revenir sur le retrait d’investiture évoqué et, surtout, à « un fait incontestable » plus récent que ces « tweets à caractère antisémite » (Jacques Pezet, liberation.fr le 27 ; lanouvellerepublique.fr le 28). Dans son livre intitulé Le séparatisme islamiste : manifeste pour la laïcité (L’Observatoire, 2021), Gérald Darmanin développait une idée exprimée dans Libération dès 2015 : « Il faut que l’État impose aux musulmans ce que Napoléon a imposé aux juifs » (23 nov. ; v. déjà sa tribune du 14 janv., citée dans ma thèse en bas de page 566, n° 3651) ; il le faisait toutefois en ressassant des clichés antisémites, dans une indifférence quasi-générale (v. Sébastien Fontenelle, « Darmanin, écrivain », politis.fr 31 mars 2021, renvoyant aux « timides articles » parus dans L’Huma et L’Obs, ainsi qu’au « passionnant entretien avec l’historien Pierre Birnbaum, qui remet quelques points sur quelques i : « Napoléon et les Juifs : politique “scandaleuse” », sur www.arretsurimages.net [v. respectivement les 25, 23-24 et à nouveau 25] ».
19 V. l’étude de Ji-Hyun Jeon, « Quelques jalons pour une histoire des juristes au sein du Parti socialiste-SFIO (1905-1939) », in Carlos Miguel Herrera, Les juristes face au politique. Le droit, la gauche, la doctrine sous la Troisième République, t. II, Kimé, 2005, p. 45, spéc. pp. 46 et 48 : « du moment de sa création en 1905 jusqu’à la veille de la Deuxième Guerre mondiale », l’alors doctorante en histoire à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), en recense 251.
20 Stéphanie Trouillard, « Après l’appel à un nouveau “Front populaire”, retour sur “l’immense espoir” suscité en 1936 », france24.com 11 juin 2024
21 Plus précisément sous-secrétaires d’État (note modifiée le 3 août, complétée le 12 en renvoyant au premier épisode de la série de Mediapart, « Ministres pionnières du Front Populaire », signé ce jour par Antoine Perraud) : Suzanne Lacore à la Protection de l’enfance, Cécile Brunschvicg à l’Éducation nationale et Irène Joliot-Curie à la Recherche scientifique ; à propos de cette dernière et outre mon billet signalé en note 9, v. le texte de Jean-Christophe Féraud, « Irène Curie et Frédéric Joliot, atomes très crochus », Libération 1er août 2024, pp. II-III des feuilles « été » ; à la page 22 liée, lire Alexandra Schwartzbrod, « Blum, itinéraire d’un lettré », p. 22, à propos de l’adaptation en livre, en 2023, du podcast de Philippe Collin cité ci-après. J’ajoute aussi la localisation des rues Léon Blum les plus proches pour moi – auxquelles j’ai prêté attention à la faveur de mes dernières courses à pied : au nord, à Bourg-lès-Valence, elle se situe juste avant la rue Édith Piaf (au passage, quelques réactions dans la presse étrangère à « la cérémonie d’ouverture des JO de Paris », courrierinternational.com 27 juill.) ; à Valence sud, dans le quartier de Valensolles, c’est depuis la rue Jules Ferry (où se trouvait une école réhabilitée en MPT, inaugurée le 12 avril) que l’on accède à la rue Léon Blum (pour une photo prise en 1984 – l’année de ma naissance – entre ces deux rues, v. le site memoire-drome.com ; elles peuvent être aussi reliées, à pied, par l’allée René Cassin – à qui j’ai consacré, en 2018, l’un de mes portraits).
22 Stéphanie Trouillard (citant Jean Vigreux), art. préc.
23 Éric Desmons, « Préface », in Vincent Le Grand, Léon Blum (1872-1950) : gouverner la République, LGDJ, 2008, p. VI
24 Relatif au droit de grève et figurant parmi les « grands arrêts de la jurisprudence administrative » (GAJA), l’arrêt Dehaene se trouve évoqué à la page 19 du Livret de méthodologie, ainsi qu’aux notes 16 et 22 de mon billet du 23 octobre 2019, dont le titre fait écho à la proposition mise en exergue au seuil de ce billet : Services publics de l’enseignement laïque (gratuité) et de la restauration scolaire (« lois »). Dès le premier épisode du podcast intitulé Léon Blum, une vie héroïque, produit par Philippe Collin pour France Inter, Pierre Birnbaum rappelle que « tout étudiant – de nos jours – de deuxième année de droit administratif sera amené à étudier les conclusions de Léon Blum sur l’arrêt Lemonnier » (« Juif alsacien, dandy parisien », radiofrance.fr 5 déc. 2022, dans le dernier quart d’heure). L’association française pour la recherche en droit administratif (AFDA) a consacré l’un de ses « printemps de la jeune recherche juridique », en 2012, à Léon Blum (v. ce lien, les articles ayant été publiés à la RFDA 2013) ; dix ans plus tard, à l’occasion du 150ème anniversaire de sa naissance, la direction de la bibliothèque et des archives du Conseil d’État a réuni pour un colloque des « Ressources documentaires » (nov. 2022, 30 p.).
25 Vincent Le Grand, thèse préc., 2008, pp. 500 et 325, citant Léon Blum, « La question est posée », Le Populaire 16 oct. 1923 – en invitant à « approfondir cette question du lien particulier entre autorité et responsabilité en régime parlementaire », en lisant Pierre Pactet, « L’évolution contemporaine de la responsabilité gouvernementale dans les démocraties pluralistes », in Le Pouvoir. Mélanges offerts à Georges Burdeau, LGDJ, 1977, p. 208
26 Contrat de législature préc., juin 2024, p. 15, après le paragraphe consacré au « nouveau droit à la retraite ».

Un « Manuel » publié par l’Organisation des Nations Unies ; et à l’écran, la « destruction » de l’une d’entre elles : l’Irak

« The French version of the Right to Education Handbook1« To mark the first ever International Day of Education, [RTE] in collaboration with UNESCO, have published the Right to education handbook » (right-to-education.org 24 janv. 2019).(…) is now available » ; dans son e-Bulletin de janvier, l’organisation Right to Education Initiative (RTE) signale ainsi cette version française, également publiée avec et par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) : Manuel sur le droit à l’éducation, 2020, 284 p.

L’« Avant-propos », page 4, est co-signé par Stefania Giannini (v. ci-contre) et David Archer – en tant que président du bureau exécutif de RTE (dont il relaye régulièrement les tweets ; v. ainsi le 24 janvier, à l’occasion du troisième #EducationDay2Quant à elle directrice générale de l’organisation onusienne, Audrey Azoulay a alors adressé un message se terminant par ce chiasme : « En cette Journée internationale, l’UNESCO vous invite à promouvoir l’éducation comme droit fondamental, et plus puissant instrument de développement qui soit. Car défendre l’avenir de ce droit, c’est défendre le droit à l’avenir » (unesco.org 24 janv. 2021). David Archer est par ailleurs responsable des services publics à ActionAid, et c’est à ce titre qu’il est remercié à la page 5 du Manuel préc. (v. aussi p. 212, s’agissant de Promoting Rights in Schools (PRS), « fruit d’une collaboration » entre cette ONG et celle dont il préside le bureau exécutif, RTE) ; v. son retweet de ce jour, concernant les Principes directeurs relatifs aux obligations des États…, dits Principes d’Abidjan ; célébrant leur première année, abidjanprinciples.org 13 févr. 2020).

Il est rappelé que RTE « est une organisation internationale de défense des droits humains (…), établie en 2000 par la première Rapporteuse spéciale des Nations unies sur le droit à l’éducation » ; les travaux de Katarina Tomaševski (1953-2006) ont inspiré les miens : ils constituent un point d’entrée dans ma thèse (2017), à partir du dernier de mes portraits (last but not least)3À partir du pdf de ma thèse, l’expression « Nations Unies » se retrouve 155 fois ; il est possible d’avoir un aperçu plus rapide en utilisant le mot-clé « onus » (67 résultats)..

Le Manuel précité comprend huit chapitres. Il s’agit de décliner l’idée du tout premier, rappelant que l’éducation est « un droit humain » (p. 21, avec une présentation synthétique des critiques formulées à l’encontre des droits – « humains » –, en général, pp. 39 et s.). Les intitulés des deuxième et quatrième peuvent être discutés : à la « reconnaissance » du droit à l’éducation, pour en faire la présentation en/« dans le droit international » (pp. 45 à 72), je maintiens ma préférence pour les termes affirmation et consécration (v. mes pp. 627 et s., puis 725 et s.) ; page 135, les obligations des États sont qualifiées de « légales » et, si elles « émanent d’une grande variété de sources » (p. 157), elles sont bien encore ici supra-législatives. Entretemps, page 76, le modèle des « 4A » est par contre représenté en commençant par une traduction habile : « Available » devient « À disposition » (plutôt que « Dotations » ; v. mes pp. 1188 et s.).

Couverture du Manuel préc., UNESCO (avec RTE, 2019-2020)

Le cinquième chapitre s’efforce de relier l’un des dix-sept objectifs de développement durable, « l’ODD 4-Éducation 2030 », au droit à l’éducation (pp. 159 à 168).

Assurer sa « [m]ise en œuvre nationale » et son « suivi » sont l’objet des chapitres 6 et 7, avec notamment un tableau et une présentation des comités onusiens (pp. 215 et s.), mais aussi – auparavant – un renvoi au huitième et dernier au moment de rappeler que sa protection nationale peut relever d’« un statut constitutionnel ou inférieur » (p. 178).

« Reddition des comptes et droit à l’éducation », tel est le titre du chapitre 8, page 240 : « Le droit international des droits humains (DIDH), s’il est correctement mis en œuvre, fournit un moyen clé pour [l’]accroître » ; ils « désignent et délimitent les responsabilités de fond (…)[,] identifient les garants et les titulaires de droits », ainsi que leurs relations au « contenu normatif » du droit à l’éducation. Il s’agit d’en faire un « droit justiciable » ; au plan constitutionnel, ce n’est « formellement » le cas que pour un peu plus d’une centaine d’États (pp. 243, 245 et 249, à partir des « recherches de RTE, basées sur les données de l’Initiative de Toronto sur les droits économiques et sociaux (…) et le Comparative Constitutions Project, en 2014 », publiées en anglais en 2017 ; v. aussi les pp. 46 à 49 de mon introduction, mon avant-dernier chapitre – pp. 1145 à 1185 – et, pour un renvoi à ceux dirigés par Diane Roman, ma page travaux).

Page 250, un tableau les classe selon cette « justiciabilité » (constitutionnelle) : avec 36 pays dont l’Australie, l’Allemagne et les États-Unis, la France est rangée dans la colonne « Aucun droit à l’éducation » ; les 107 les mieux placés vont de l’Albanie au Yémen, en comprenant l’Italie, l’Espagne ou la Turquie (v. déjà mon approche comparative, non contredite par CC, 11 oct. 2019, Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politiques et sociales et autres [Droits d’inscription pour l’accès aux établissements publics d’enseignement supérieur], n° 2019-809 QPC ; v. l’ajout du jour, à la fin de ce billet du 25 juillet ; comparer la note 757, page suivante du Manuel préc., avec cette proposition de correction en contentieux constitutionnel, le 26 mars 2020).

Parmi les 53 pays de la colonne intermédiaire, « Principe directeur/droit ambitieux à l’éducation », figurent l’Arabie Saoudite, le Mali4Sauf oubli, je ne l’ai pas encore directement évoqué, dans mes écrits ; j’y ai passé un mois en 2005, en me rendant dans la région de Mopti – un an après Yves Faucoup ; une quinzaine d’années plus tard, j’avais remarqué son billet intitulé « Massacre au pays des Dogons », blogs.mediapart.fr 11 juin 2019 ; dans la continuité du mien du 29 décembre, j’avais mis de côté plusieurs articles, dont celui de Nathalie Guibert, « Au Sahel, le nouveau visage de « Barkhane » », Le Monde.fr 13 janv. 2020 (extrait, avec une carte), rappelant qu’« un ennemi principal est désigné : l’organisation État islamique dans le grand Sahara (EIGS) » ; « Dans le centre du Mali, (…) place à la mission de l’ONU, la Minusma, jusqu’ici présente uniquement dans le nord du pays, et récemment réorientée ». Il y a deux jours était annoncée cette « enquête sur les lieux d’une frappe aérienne française à Bounti », france24.com avec AFP 29 janv. 2021 et l’Irak.

Un documentaire (v. ci-contre, ainsi que la présentation de Catherine Pacary, lemonde.fr 31 janv. 2021) revient notamment sur « la destruction de ses infrastructures et de ses systèmes sociaux, éducatifs et de santé », lors de la première guerre du Golfe il y a trente ans ; « Réputé jusqu’à la fin des années 1980 comme étant le pays ou les femmes sont les plus éduquées, doté du système éducatif et universitaire le plus développé et performant dans la région, l’Irak des années 2000 est sur la liste des pays avec le plus haut taux d’illettrisme et de mortalité infantile »5Pour le dire en citant Zahra Ali, « La fragmentation du genre dans l’Irak post-invasion », NQF 2018/1, Vol. 37, pp. 86 et s. (traduction de sa contribution à l’ouvrage dirigé par Amal Ghazal et Jens Hanssen, The Oxford Handbook of Contemporary Middle-Eastern and North African History, 2017), qui montre plus loin qu’avec la « retribalisation sociale » alors enclenchée, la « violence confessionnelle est clairement genrée »..

Notes

1 « To mark the first ever International Day of Education, [RTE] in collaboration with UNESCO, have published the Right to education handbook » (right-to-education.org 24 janv. 2019).
2 Quant à elle directrice générale de l’organisation onusienne, Audrey Azoulay a alors adressé un message se terminant par ce chiasme : « En cette Journée internationale, l’UNESCO vous invite à promouvoir l’éducation comme droit fondamental, et plus puissant instrument de développement qui soit. Car défendre l’avenir de ce droit, c’est défendre le droit à l’avenir » (unesco.org 24 janv. 2021). David Archer est par ailleurs responsable des services publics à ActionAid, et c’est à ce titre qu’il est remercié à la page 5 du Manuel préc. (v. aussi p. 212, s’agissant de Promoting Rights in Schools (PRS), « fruit d’une collaboration » entre cette ONG et celle dont il préside le bureau exécutif, RTE) ; v. son retweet de ce jour, concernant les Principes directeurs relatifs aux obligations des États…, dits Principes d’Abidjan ; célébrant leur première année, abidjanprinciples.org 13 févr. 2020
3 À partir du pdf de ma thèse, l’expression « Nations Unies » se retrouve 155 fois ; il est possible d’avoir un aperçu plus rapide en utilisant le mot-clé « onus » (67 résultats).
4 Sauf oubli, je ne l’ai pas encore directement évoqué, dans mes écrits ; j’y ai passé un mois en 2005, en me rendant dans la région de Mopti – un an après Yves Faucoup ; une quinzaine d’années plus tard, j’avais remarqué son billet intitulé « Massacre au pays des Dogons », blogs.mediapart.fr 11 juin 2019 ; dans la continuité du mien du 29 décembre, j’avais mis de côté plusieurs articles, dont celui de Nathalie Guibert, « Au Sahel, le nouveau visage de « Barkhane » », Le Monde.fr 13 janv. 2020 (extrait, avec une carte), rappelant qu’« un ennemi principal est désigné : l’organisation État islamique dans le grand Sahara (EIGS) » ; « Dans le centre du Mali, (…) place à la mission de l’ONU, la Minusma, jusqu’ici présente uniquement dans le nord du pays, et récemment réorientée ». Il y a deux jours était annoncée cette « enquête sur les lieux d’une frappe aérienne française à Bounti », france24.com avec AFP 29 janv. 2021
5 Pour le dire en citant Zahra Ali, « La fragmentation du genre dans l’Irak post-invasion », NQF 2018/1, Vol. 37, pp. 86 et s. (traduction de sa contribution à l’ouvrage dirigé par Amal Ghazal et Jens Hanssen, The Oxford Handbook of Contemporary Middle-Eastern and North African History, 2017), qui montre plus loin qu’avec la « retribalisation sociale » alors enclenchée, la « violence confessionnelle est clairement genrée ».

En marche vers les municipales (2). Effronterie et islamophobie, des « Valeurs actuelles »

Lors de la Marche contre l’islamophobie, le 10 novembre à Paris, l’une des pancartes portait le message suivant : « Oui à la critique de la religion, non à la haine du croyant » (lapresse.tn) ; oui à la critique des interprétations religieuses, non à la provocation à la haine des pratiquant·e·s, l’« affaire Mila[1] » a donné l’occasion de ce rappel nécessaire[2] : v. ainsi ce tweet de Gilles Clavreul, le 6 février, relayant une brève vidéo de Rokhaya Diallo[3] ; et parce que l’esprit critique peut se déployer partout, par exemple dans les mosquées, v. aussi ces quelques minutes postées sur YouTube par Abdelmonaïm Boussenna, le 31 janvier[4] (v. encore celles d’Usul et Rémi Liechti, Mediapart le 17 février, à qui j’emprunte l’illustration ci-contre).

La note n° 26 de mon précédent billet contient une brève réaction du point de vue du droit à l’éducation de l’adolescente ; le cadrage dominant s’est opéré en termes de liberté d’expression (v. infra), là où Nicole Belloubet avait cru devoir se référer à la liberté de conscience (religieuse)[5]. Croyance, tel est le terme que j’avais retenu pour caractériser l’une des raisons qui ont conduit les juges de la Cour administrative d’appel de Lyon (CAA) à admettre une nouvelle exclusion sur le fondement du principe de laïcité, l’été dernier. Accompagnant cette note[6], mon précédent billet comprend plusieurs informations concernant Michel Charasse ; à 78 ans, il est mort vendredi 21 février.

« Des morts on ne dit que du bien », selon la formule antique prêtée à Chilon le Lacédémonien[7] ; pour lors, je me limiterai à noter que le sénateur avait pu rappeler, au terme des débats préparatoires à la loi du 15 mars 2004, que la circulaire de Jean Zay, du 1er juillet 1936, « contrairement à ce qu’on lui a fait dire, visait non pas les signes religieux, mais les signes politiques[8] » (extraits des débats de la séance du 3 mars 2004, publiés au Journal officiel du Sénat ; je souligne). Michel Charasse ne visait personne nommément, mais le ministre interrogé, Luc Ferry, avait ainsi tronqué ce texte moins d’un mois plus tôt (education.gouv.fr)[9]. Quelques instants plus tard, après une métaphore aéronautique, le parlementaire complétait son propos en envisageant l’hypothèse d’avoir un jour « le courage de reconnaître » qu’ils ont été « de piètres législateurs par rapport à ceux de 1882 et de 1905 » (v. in fine, en faisant observer qu’une seule sénatrice avait pris la parole durant cette séance – celle de l’Isère, membre du Groupe communiste républicain et citoyen ; la position de sa présidente était quant à elle évoquée au début par le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin : « Selon Mme Nicole Borvo, ces mesures sont dirigées contre les jeunes filles. Je ne le crois [sic] pas »)…

Lucie Cayer, avec l’illustratrice Sabine Hautefeuille, Vic et Lou… ça suffit maintenant !, Grrr… Art éd. (v. « L’Éducation nationale communique “plus sur les poux” que sur le harcèlement, regrette une mère d’enfant victime », francetvinfo.fr 21 févr. 2020).

Au même moment, une jeune maman et autrice réagissait à une « vidéo poignante », qui nous ramène au harcèlement scolaire[10] (v. ci-contre). En France, il n’est toutefois pas certain qu’une telle initiative obtienne ne serait-ce qu’une petite part de l’audience accaparée par l’« affaire Mila » ; en effet, il semblerait qu’il manque un ingrédient pour cela : « l’islam ».

Le « grand chef » Macron n’entend pas s’en passer : en changeant l’emballage, et pour « à nouveau se servir de « ses deux jambes » (…), il a expliqué aux députés de sa majorité que ses « futures priorités » seront « le régalien et l’écologie ». Puis il a enchaîné avec un déplacement au chevet des glaciers du Mont-Blanc, avant d’aller à Mulhouse proposer ses solutions pour lutter contre le « séparatisme islamiste » »[11]. Dans des conditions d’organisation discutées[12], la première visite a été l’occasion de renouveler l’effronterie dont il avait déjà fait preuve fin octobre, en toute tranquillité : « D’ici le mois de juin, une réserve naturelle nationale sera créée dans les îles Glorieuses, j’y étais avec quelques-uns d’entre vous il y a plusieurs mois »[13] ; un avocat au barreau de Madagascar avait alors réagi : « dire « cela est à moi », en dépit de la géographie, de l’histoire et du droit international, est bel et bien une « idée creuse », voire une provocation, comme cela est perçu par les Malgaches »[14].

Si je mobilise le terme effronterie dans ce billet, en dépit de sa connotation morale[15], c’est parce qu’il me semble assez bien caractériser une attitude qui se combine avec l’islamophobie[16], au point de parvenir à l’occulter. La seconde visite s’inscrit ainsi dans le prolongement de plusieurs évènements que je voudrais ici rappeler, avant de dire encore quelques mots de l’« affaire Mila » (et des propositions qu’elle suscite… ou pas, depuis qu’elle a été classée « sans suite »[17]).

« L’islamophobie entre déni et reconnaissance »

Tel était le titre de la cinquième et dernière partie du livre des sociologues Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed : ils y distinguent « les marqueurs de [rejet de] nature ascriptive, hérités et extérieurs au sujet, et les marqueurs de nature acquisitive, qui relèvent d’une démarche personnelle. (…) Cette tension entre l’hérité et l’acquis se retrouve très clairement dans les résistances à la reconnaissance de l’islamophobie comme une forme spécifique de rejet d’une importance équivalente à celle du racisme[18], du sexisme[19] ou du handicap[20] » ; « Certains juristes » sont alors évoqué·e·s, par le truchement d’une citation de Gwénaële Calvès (v. également infra), pour concéder « un argument juridique de poids pour nier la pertinence de l’islamophobie comme réalité spécifique » ; « l’articulation du racial et du religieux » n’en demeure pas moins fréquente[21], comme l’illustre une actualité (locale) assez récente : si des permanences de parlementaires LREM ont effectivement fait l’objet de dégradations durant l’année[22], celles du local de campagne d’Amin Ben Ali se sont inscrites dans un « autre registre » : raciste… et islamophobe.

Dans le même esprit, Rachida Dati a été accusée – via Twitter – de vouloir « islamiser la capitale de la France », comme à Marseille et Lyon : « Le roman #Soumission de Houellebecq est-il prémonitoire ? »[23]. Dans cette dernière ville, le bien-nommé « city-guide » Le Petit Paumé avait été épinglé en octobre pour s’être enthousiasmé d’un bar à chicha en ces termes (je n’en retiens qu’une partie) : « Enfin un Émirat où la Sharia[24] n’est pas appliquée »[25].

Illustrant qu’il est possible d’être victime d’islamophobie, puis de tenir des propos d’extrême-droite, l’élue précitée a par ailleurs cru électoralement bon de se faire remarquer[26] en commentant les « fusillades perpétrées dans deux bars à chicha de la ville de Hanau (Hesse), près de Francfort », le 19 février ; le lendemain et à l’exception de l’AfD, toutes les formations politiques allemandes (le CDU, le SPD, les Verts, le FDP et Die Linke) avaient quant à elles « dénoncé le caractère « profondément raciste » de l’attentat ». Pour le chercheur Ozan Zakariya Keskinkilic, il est toutefois « trop simple de désigner l’extrême droite comme seule responsable de ce qui s’est passé » et « le racisme antimusulman existe en dehors de l’extrême droite[27] » : et d’évoquer « les propos controversés du ministre de l’intérieur, Horst Seehofer, qui avait déclaré en mars 2018, lors de sa prise de fonctions, que « l’islam n’appartient pas à l’Allemagne ». « Or M. Seehofer est membre de l’Union chrétienne-sociale [CSU, le parti allié de la CDU en Bavière], et pas de l’AfD », rappelle M. Keskinkilic »[28].

Recueillement du président allemand Frank-Walter Steinmeier et de son épouse, la magistrate Elke Büdenbender (lesoir.be 20 févr. 2020)

Le Monde rapporte plus loin, sous la plume de l’envoyé spécial à Hanau Jean-Michel Hauteville, cette phrase du président allemand, Frank-Walter Steinmeier : « Nous devons aussi faire attention aux mots que nous employons, en politique, dans les médias, partout dans la société ». L’éditorial s’ouvre par le rappel des attentats de Christchurch[29], « [i]l y a à peine moins d’un an » : après avoir noté que l’auteur « se réclamait des thèses conspirationnistes et islamophobes d’extrême droite », une « même logique de haine raciste » est évoquée.

Selon Agnès Gautheron, la « première fois que « Le Monde » a écrit « islamophobie » », c’était le 10 décembre 1994, « dans les pages « Point de vue » » et, depuis 2001, « le mot s’installe durablement dans les colonnes du journal ». Parce que les hésitations persistent, cet article mis en ligne le 15 novembre dernier mérite d’être à nouveau cité : « Le 13 mai 2002, Xavier Ternisien énumère les crimes et délits commis en France à l’encontre des musulmans [et] pointe déjà la responsabilité des médias qui ont ouvert leurs micros à « d’étranges “spécialistes de l’islam” surgis de nulle part » ».

Quelques jours avant cette publication, un mois après des exemples de reconnaissance (associative) de l’islamophobie[30], Emmanuel Macron choisissait d’inviter dans « son » avion[31] des journalistes de Valeurs Actuelles, où il se gardera bien de faire de même[32] : tout au contraire, il y rendra hommage[33] à un polémiste récemment condamné pour incitation à la haine religieuse[34] ; également parmi la « trentaine » de formules finalement modifiées[35], il en est une qui associait injure et sexualité (ce qui est devenu banal depuis assez longtemps, j’aimerais d’ailleurs bien savoir précisément quand).

« Il s’est fait [Béziers[36]] » (adapation d’une formule d’Emmanuel Macron)

Peu de temps avant de se faire avoir par un avocat d’extrême-droite, et invité à commenter ce que d’aucuns persisteront à appeler « la remarque faite par un élu RN à une mère portant le hidjab dans une enceinte publique »[37], il n’aurait pas prononcé le mot finalement employé dans la retranscription (v. la réf. ci-contre) : « Il s’est fait coincer [sic] ! Apparemment cette femme est plus proche des milieux de l’islam politique qu’on ne le croyait »[38].

Emmanuel Macron (entretien avec, par Louis de Raguenel, Tugdual Denis et Geoffroy Lejeune), « L’échec de notre modèle se conjugue avec la crise que vit l’islam », Valeurs Actuelles 31 oct. 2019, n° 4327, pp. 18 et s. (annoncé à la Une, sous le titre « Tête à tête avec Macron. Immigration, identité… Les confidences explosives du président » ; v. ci-contre)

« Sur quoi se fonde le chef de l’État pour reprendre cette thèse de l’extrême droite (…) ? [L]’idée d’une action préméditée n’est étayée par aucun élément »[39]. Effronterie, islamophobie, ou les deux ? L’intéressée venait pour aider, elle s’est trouvée mise en cause puis diffamée par le président de la République[40]. Il confiait aussi avoir « beaucoup utilisé la carte Jean-Michel Blanquer », avant d’assurer ne pas vouloir « tomber dans le piège communautarisme = islam » car, le « communautarisme, c’est le projet politique »[41] (v. infra).

Avant cet entretien, le journal Le Monde avait pu évoquer « Valeurs actuelles, [cet] hebdomadaire où Sylvain Fort [un proche du président] compte des amis, comme Louis de Raguenel, ancien du cabinet de Claude Guéant au ministère de l’intérieur et désormais rédacteur en chef »[42]. Ariane Chemin et François Krug sont revenus depuis sur « cette liaison périlleuse [qui] a débuté peu après la création d’En marche !, à la mi-août 2016 »[43], ce dernier brossant enfin un portrait d’Iskandar Safa[44], qui a pris le contrôle du magazine (grâce à Etienne Mougeotte et Charles Villeneuve). Entretemps, sa reprise d’un article paru dans Causeur lui a valu une nouvelle plainte pour « diffamation et diffamation raciale »,[45] selon le quotidien Le Monde.

Ce dernier, qui aurait difficilement pu sortir l’affaire Benalla-Macron sans les images de Taha Bouhafs[46], consacrait fin janvier un « portrait » à l’ancien échirollois (le 27, p. 8). Raphaëlle Bacqué cite une phrase qu’il aurait prononcée le 10 novembre 2019 : « C’est pas les musulmans qui posent problème, c’est Emmanuel Macron ! C’est Jean-Michel Blanquer ! C’est Valeurs actuelles ! ». La rechercher conduit sur le site de l’hebdomadaire, avec notamment ce texte du 12 où il est renommé « Rachid Taha[47] Bouhafs » ; parce qu’il vaut mieux en rire, plus drôle encore est la brève vidéo à laquelle il est renvoyé – via un tweet de Valentine Arama, du journal Le Point –, qui est effectivement d’une violence inouïe : il est question d’amour, et de laïcité…

Séparatisme (islamiste) : une blague belge (et islamophobe)

En choisissant la deuxième ville d’Alsace pour discourir – sans le dire – sur « la laïcité », Emmanuel Macron s’est inscrit dans les pas de Manuel Valls[48], en montrant l’étendue de sa culture laïque (v. mon billet du 9 juillet 2018, actualisé ce jour[49]) ; commentant ce déplacement à Mulhouse (Haut-Rhin), le « quotidien de référence » fait encore mieux : dans un éditorial se voulant sans doute critique, mis en ligne le 20 février (2020), il est écrit que les « annonces (…) ne suffisent pas à définir une politique. Celle-ci doit s’accommoder [sic] de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, qui interdit à la puissance publique de financer un culte et de s’ingérer dans son organisation. Or, il est urgent de faire émerger un système efficace [re-sic] de formation de cadres religieux musulmans en France ». Emmanuel Macron ayant fait disparaître le mot « laïcité » de sa communication, le journal réussit la prouesse de présenter la loi de séparation comme un obstace à la lutte contre le… séparatisme.

C’est qu’en effet, « après plusieurs mois de tractations et de débats », il en est ressorti qu’il y aurait là, « selon l’entourage du chef de l’État, [un moyen] d’agréger sous un même terme ces « notions entremêlées » que seraient la radicalisation, l’islam politique et le communautarisme[50]. Et de cibler plus clairement « l’hydre islamiste »[51] dénoncée par Emmanuel Macron au lendemain de l’attentat contre la Préfecture de police, à Paris, en octobre 2019 »[52].

Il semble n’avoir pas été saisi que ce n’était pas que le mot que je souligne qui gênait, mais – et avant tout – les présupposés qui conduisent à le répéter à tort et à travers ; au lieu d’arrêter de le faire, un nouvel élément de langage politique est proposé : une bonne blague belge (en ce sens, Marie Peltier, franceculture.fr le 18), si ses effets n’étaient pas graves… Il faut sans doute en être à un stade avancé de séparatisme social pour accepter une telle reformulation ; dans la troisième saison de la série Baron noir, la présidente sait, elle, à un moment faire preuve de lucidité pour remettre les communicant·e·s à leur place (et la politique à la sienne[53]).

Directeur d’un ouvrage intitulé Territoires conquis de l’islamisme – « une référence dans les années à venir pour ceux qui cherchent un vernis sociologique à leurs bas instincts islamophobes »[54] -, Bernard Rougier pense, lui, « que le terme n’est pas mal choisi »[55]. Les critères du « séparatisme islamiste », selon Jean-Michel Blanquer ? « Ça se voit, il suffit d’y aller ». Une habitante du quartier de l’Épinette (Maubeuge, visée par le ministre) de réagir : « Emmanuel Macron, s’il fait des débats comme ça, je pense que c’est par rapport aux prochaines élections municipales »[56]. « La présidentielle de 2022 [l’]inquiète »[57] ; la peur[58] est mauvaise conseillère…

Le 19 novembre, au Congrès de l’AMF, il « avait déjà annoncé « des actions nouvelles concrètes » visant « l’islamisme politique » de ceux qui ont « un projet de séparation d’avec la République » » ; présentée en présence du ministre de l’éducation nationale, notamment, une circulaire Castaner[59] était « envoyée à l’ensemble du corps préfectoral, [le 28,] dans laquelle il est ouvertement demandé de faire du « combat » contre « l’islamisme » et le « communautarisme » un « nouvel [sic] axe » fort de l’action de l’État[60]. « Les élus locaux – et particulièrement les maires – ont, eux aussi, un rôle à jouer »[61].

En février 2020, quelques jours avant ces nouvelles… annonces[62], le président se référait sciemment à un « penseur nationaliste et dirigeant de l’Action française »[63], connu pour son « opposition radicale à la modernité des Lumières »[64]. Auparavant, elles étaient invoquées contre les études de genre[65]. Le jeudi 24 octobre, recensant pour Le Figaro Littéraire le livre d’Antoine Lilti (L’Héritage des Lumières. Ambivalences[66] de la modernité, EHESS/Gallimard/Seuil), Paul-François Paoli assurait quant à lui : « L’esprit des Lumières, si on le définit en son sens le plus large, autrement dit par le primat de l’argumentation rationnelle sur l’argument d’autorité, n’est pratiquement contesté par personne en France, excepté les islamistes » (« Que sont devenues les Lumières ? »). En prenant la même édition n° 23387, on tombait dans la principale – là aussi à la page 6 – sur cette affirmation : « La sénatrice LR porte le texte sur l’accompagnement scolaire avec l’interdiction de tous signes religieux « parce que c’est l’école ! » clame-elle considérant que l’école est le socle de la République »[67] (je souligne l’« argument », repris en intertitre par le journal. Parce que c’est « logique », ainsi peut être résumé l’exposé des motifs de sa PPL, déposée le 9 juillet – et adoptée par le Sénat – seulement – le 29 octobre).

Deux jours plus tard, la présidente du Conseil supérieur des programmes de l’Éducation nationale va jusqu’à considérer la position du ministre, « juriste de surcroît », comme étant « d’une certaine manière, irréfutable ». Une telle affirmation est « inquiétant[e] pour la raison », dont elle se revendique, avant d’ajouter : « Le voile n’appartient pas tout à fait au régime des droits acquis »[68] ; on avait compris… 

Je n’en crois pas Meyzieu

Telle est l’une des expressions que l’on imagine chez Marlène Schiappa, lorsqu’il lui est apparu que « certaines familles interdisent à des petits garçons et à des petites filles, au nom de la religion, de se tenir la main à l’école (salafistes, au Mans) »[69]. Sans qu’il ne soit davantage apporté de preuve ni de ce fait[70], ni – surtout – de sa motivation religieuse[71], Jean-Michel Blanquer a étendu le propos, le 13 octobre, sur BFM TV. C’était juste avant sa sortie sur le foulard, « évidemment » (v. l’analyse de Clément Viktorovitch le 15, sur Canal +)[72].

Que des personnes se donnent en réalité pour mission de décourager telle ou telle pratique, c’est bien leur droit (et elles ne s’en privent pas : pour une illustration parmi bien d’autres, écouter Catherine Kintzler sur France Culture, le 17 ; cela fait trente ans qu’elle exerce sa liberté d’expression sur cette question) ; lorsqu’elles représentent l’État laïque, elles devraient s’abstenir de le faire et respecter les attributions de leur ministère[73] (v. mon précédent billet et contra l’intéressée, compte tenu de ses présupposés sur « l’islam politique », qui la conduisent – avec bien d’autres – à en voir des manifestations innombrables).

Quelques semaines auparavant – il avait sûrement lu trop vite sa collègue secrétaire d’État[74] –, le ministre évoquait ces « petites filles qui ne vont pas à l’école maternelle ». L’erreur a été relevée[75], ce qui n’a pas empêché qu’elle soit reprise par une députée de l’Isère, chargée de « forme[r] les candidats LREM à éviter les pièges du communautarisme » : sans s’appuyer là aussi sur aucune étude, puisque nous le savons (déjà), « des dizaines et des dizaines d’enfants », le plus souvent des filles, seraient chaque année « soi-disant » inscrites à domicile, alors qu’elles se retrouveraient dans des « écoles très sauvages »…[76]

« Nadia, 41 ans et sa fille Aïcha, 8 ans pendant la fête de Noël, avec Patricia, la directrice de l’école et Emilie, 38 ans, enseignante du CE2 » à Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines. Photo © Anne Paq, reprise de Zaouia Meriem-Benziane, « « Là-haut, ils créent des problèmes que nous n’avons pas » : enseignants et parents portant le voile témoignent », bastamag.net 5 févr. 2020 (pour Patricia Lartot, « la laïcité s’enseigne. Il revient aux enseignants d’expliquer le sens de ce mot et de nouer le dialogue sur le sujet avec les enfants et avec leurs parents »).

Illustrant avec éclat l’un des effets d’éviction de la lutte contre le « communautarisme », une rectrice nommée dans des conditions pour le moins controversées[77] a quant à elle fait très fort, le 8 novembre dernier. Exerçant dans l’académie de Versailles, elle s’est rendue « avec le maire de Clamart dans une école maternelle de cette ville à l’occasion de la « Journée contre le harcèlement à l’école ». La directrice et l’ensemble des personnels avaient préparé avec application cette visite, et avaient sollicité des parents d’élèves comme il est souvent d’usage, afin d’aider les enseignants à mieux encadrer les enfants. La visite a tourné court. Dès son arrivée, et à la seule vue des mamans présentes, dont certaines portaient un foulard, le maire et l’ensemble de la délégation ont tourné les talons. Un appel au cabinet du ministre aurait définitivement convaincu la rectrice », ce qui accrédite l’hypothèse d’une stratégie « orchestrée en haut lieu »[78] ; elle est manifestement appuyée sur l’arrêt de la CAA de Lyon que j’ai annoté, concernant la ville de Meyzieu[79].

Dans leur ouvrage précité, Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed notent qu’il est « extrêmement difficile d’évaluer précisément à quel point l’islamophobie affecte celles et ceux qui, en France ou ailleurs, se considérent ou sont considérés comme musulmans »[80], et c’est sans doute encore plus délicat lorsqu’il est question des enfants. Une « protection à l’école » leur est due, pour reprendre l’une des formules du président concernant Mila, tout en y voyant lui aussi l’occasion de se montrer attaché à la liberté d’expression[81].

Pour une « authentique » réaction opportune à l’« affaire Mila »

En 1958, Charles de Gaulle avait eu une question rhétorique restée célèbre, presque paraphrasée par Emmanuel Macron, le 13 février : à propos de Benjamin Griveaux, sa « première réaction » aurait été de dire qu’il n’était plus temps pour lui « de commencer une improbable carrière de cinéaste »[82]. « Qui imagine le général [en train de marchander une restriction à la liberté d’expression, pour s’attirer des voix catholiques lors d’une élection ?] ». Rappelant qu’il reste fréquent d’invoquer son « vétilleux respect envers les formes de la laïcité de l’État », et que « l’histoire savante soutient qu’à [son] époque[83], l’Église catholique avait pleinement accepté la loi de laïcité de 1905 », l’anthropologue Jeanne Favret-Saada saisissait en 2018 l’occasion de (re)mobiliser « les archives catholiques du cinéma » ; elle avait pu les consulter en 1994 et son article[84] permet « une autre interprétation de [l’action] gaullienne » (pour paraphraser le titre d’un texte publié en 1997)[85].

Le 12 février 2020, c’est à partir de commentaires publiés sur Instagram – et par elle sous un billet[86] – qu’elle traite des « droits importuns de la citoyenne Mila » : même en employant le conditionnel, l’envisager comme une « authentique affaire de la liberté d’expression »[87], « une nouvelle étape dans la longue histoire du « blasphème » », c’est prendre le risque d’un coup de projecteur laissant d’autres questions dans l’ombre[88]. Dans le pays de la « Déclaration des droits », une fois encore, une focalisation sur « la liberté » vient les occulter[89], au lieu de considérer qu’elle se construit précisément en les rendant effectifs.

L’autrice commence pourtant son texte en mentionnant « son droit d’aller et de venir, son droit à l’éducation, son droit à l’intégrité corporelle, et son droit à la vie ». D’une façon aussi peu laïque que prudente, elle affirme toutefois qu’« aucun dirigeant religieux n’a mis en cause » ces « jeunes hommes [qui] en viennent à invoquer une religion qui assure leurs droits sur la sexualité de filles — fussent-elles lesbiennes ». Et de mettre l’« islamophobie » entre guillemets – serait-il interdit de prononcer ce mot ? –, avant de refuser en la matière tout recours « à l’autorité publique ». Dès lors et au terme de la lecture, il est difficile de discerner d’autres propositions qu’un appel à la responsabilité individuelle.

Mathilde Blézat, Naïké Desquesnes, Mounia El Kotni, Nina Faure, Nathy Fofana, Hélène de Gunzbourg, Marie Hermann, Nana Kinski et Yéléna Perret, Notre corps, nous-mêmes, éd. Hors d’atteinte, 2020

Pour ma part, je vois dans le cas de Mila[90], qu’il a fallu changer d’établissement[91] – au contraire des élèves qui l’ont mise en danger –, une occasion de méditer cet extrait d’un livre écrit « par des femmes, pour les femmes » et qui vient d’être réédité : « En France, de manière générale, il n’existe pas, ou peu, de prévention primaire des agressions sexistes et sexuelles, contrairement à d’autres pays comme le Canada, la Belgique, les Pays-Bas ou la Suède. L’action publique se concentre sur l’après-agression, quand il est déjà trop tard »[92].

Un animateur de prévention a quant à lui été confronté à cette affaire de Vienne[93]-là[94], dès le lendemain, dans l’un des « lycées et centre d’apprentissage d’Île-de-France » où il intervient (« depuis une vingtaine d’années ») : « Les raccourcis religieux à la sauce ado », explique-t-il, c’est son « quotidien » durant les séances d’éducation à la sexualité, là où la loi qui en prescrit trois par an (seulement) est respectée ; dans un État de droit, plutôt que seulement s’indigner de cet état de fait, il suggère de s’en servir de « base pour déconstruire les stéréotypes »[95], ce qui participe de l’éducation aux droits.


[1] Dans mon précédent billet – qui ouvre cette série –, je tenais à préciser qu’elle est iséroise, même si Villefontaine est plus proche de Lyon que de Grenoble ; je ne résiste pas à non plus à une confidence plus personnelle : comme Rokhaya Diallo, je préfère retenir la construction intellectuelle de Mila, à son âge ; s’ajoutent d’autres ressemblances avec une jeune kirghize avec qui j’ai discuté cet été, au bord du lac Song Kol ! Au passage, un article signale qu’un parlementaire a appelé récemment « les autorités à “prendre des mesures” dans les grands bazars de Bichkek où travaillent des négociants chinois » (nouvelobs.com avec AFP 3 févr. 2020) ; et de citer l’immunologue Norbert Gualde, revenant sur « des comportements ancestraux qui persistent. On désigne un groupe humain coupable : juifs, lépreux, mais aussi bossus, prostitués, gens qui ne vont pas à la messe, homosexuels… C’est une permanence des épidémies »… En France, environ « 2 000 élèves qui sont rentrés d’une zone touchée par le coronavirus n’ont pas repris l’école » (Le Monde le 29, p. 13 : « Interrogé sur la nécessité de fermer des écoles, le ministre a indiqué [sur Europe 1, le 28] : « Nous en sommes à un stade où la bonne mesure est de demander aux gens de rester chez eux » ». Au moins trois écoles sont actuellement fermées en Haute-Savoie).

[2] L’orientation sexuelle de Mila ayant été ciblée par une partie des injures initiales – qui ont provoqué de sa part ce qui peut (donc) être qualifié de contre-violence –, v. par ex. cette rencontre filmée organisée par l’association Coexister, « Les religions condamnent-elles l’homosexualité ? », IEP de Paris, avr. 2014

« Extrait de « Comment parler de la laïcité aux enfants » écrit en 2014 avec Jean Baubérot, paru en 2015 » (twittée par la co-autrice, Rokhaya Diallo, le 6 févr. 2020)

[3] V. aussi leur encore plus bref échange, conduisant à l’extrait ci-contre.

[4] Autrement dit, la colère est « une étincelle, mais il faut en faire quelque chose – la transformer en revendications, comme le font les collectifs féministes, en une pensée de l’émancipation, comme le proposent les intellectuels, hommes ou femmes, en une écriture littéraire, comme le fait Virginie Despentes. Il faut tenter d’atteindre l’au-delà de la colère » (Christine Bard, citée par Anne Chemin, « Les saines colères des femmes », Le Monde 2 mars 2019, p. 24 ; dans l’édition parue le 24 février 2020, Cécile Chambraud signale page 10 le « [p]remier prêche pour la femme imame Kahina Bahloul », réunissant une vingtaine de personnes, en contexte mixte et quasiment paritaire à Paris : « Trouver à louer une salle a été particulièrement difficile. « Dès que l’on prononçait le mot “islam”, les propriétaires se rétractaient », témoigne [la doctorante en islamologie] avec une pointe d’amertume »…).

[5] Nicole Belloubet a été contrainte de se rallier à ce cadre (« Le crime de lèse-Dieu n’existe pas », Le Monde 10 févr. 2020, p. 28 : en se déclarant « viscéralement attachée à l’idée de laïcité », avec laquelle « il n’y a pas d’accommodements possibles », paraît-il ; de façon plus habile, après avoir convoqué la mémoire du chevalier de La Barre, elle écrit s’être « replongée dans un petit texte de Jaurès, paru en 1904 dans L’Humanité, puis dans Le Populaire, en 1930, et heureusement republié récemment, muni d’une belle préface. Il s’intitule : « Le martyre d’un libre-penseur, Étienne Dolet ». Cet humaniste fut brûlé en 1546 pour crime d’impiété et Jaurès rend hommage à ce « blasphémateur », en rappelant les devoirs qui s’imposent à chacun et en fustigeant « l’ineptie des inquisiteurs » et « la niaiserie des bourreaux » »).

[6] Et mon commentaire des dispositions essentielles de la loi n° 2019-791 « pour une école de la confiance », également publié en janvier ; après avoir montré la considération manifestée par l’État (laïque) envers les écoles pré-élémentaires privées (catholiques), je développe plus largement l’idée selon laquelle cette loi sollicite davantage les budgets des communes qu’elle ne leur fait confiance (AJCT 2020, p. 28) ; renvoyant plus récemment le ministre au terme qu’il a choisi de mettre en avant, Nathalie Bajos et alii, « La sociologie, c’est l’inverse du fatalisme », Le Monde 20 févr. 2020, p. 28, en réaction à une petite phrase de Jean-Michel Blanquer dans Quelle école voulons-nous ? La passion du savoir (Odile Jacob), un livre d’entretiens avec Edgar Morin : « comme le dit une phrase de Pierre Bourdieu que nous sommes nombreuses et nombreux à utiliser en cours, « ce que l’histoire a fait, l’histoire peut le défaire », le déterminisme social n’est pas un fatalisme. (…) Mais pour que nous puissions poursuivre les travaux qui nous permettront d’améliorer encore notre réponse aux questions du ministre de l’éducation nationale, il faut nous faire « confiance » »…

[7] Est-ce dire du mal du mort, que de critiquer sa nécrologie ? Dans le « quotidien de référence » se trouve évoqué « un Républicain et un laïc [sic] grand teint » ; le seul élément prétendument en ce sens est cette « façon de rester ostensiblement [re-sic] à la porte des églises même lors des enterrements, comme seuls les vrais « bouffeurs de curés » peuvent oser le faire. (…) Le jour des obsèques de François Mitterrand, le 11 janvier 1996, la France entière peut voir l’anticlérical Charasse, resté à la porte de l’église de Jarnac tenant en laisse la chienne du défunt ». Parmi les évènements choisis, et en guise de coup de grâce, si j’ose dire, il est ajouté qu’il sera désormais, « comme vice-président de l’Institut François-Mitterrand, une sorte de gardien du temple »… (Raphaëlle Bacqué, « Michel Charasse. Ancien ministre et membre du Conseil constitutionnel », Le Monde 22 févr. 2020, p. 24 ; comparer le communiqué posthume de l’Élysée, le 21, avant de se limiter à évoquer « la République et ses grands principes » : « Fidèle parmi les fidèles (…) »). V. aussi Solenn de Royer, le 28, p. 9, le présentant comme un « grand défenseur de la laïcité » (le lendemain, page 11, la journaliste revient sur « la fabrique élyséenne des « nécros » », proposées à Emmanuel Macron par Jonathan Guémas et Sophie Wallon). S’il s’agissait de vouloir illustrer l’une des 7 laïcités françaises identifiées par Jean Baubérot – celle « antireligieuse » –, c’est réussi : v. à partir de mon portrait de Jean Jaurès). Dans la liste des « hommages de la classe politique » répertoriés la veille par Paris Match, seuls Manuel Valls et Gérard Larcher font référence à « la laïcité » ; avec François Hollande, ils n’ont pourtant pas répugné à se rendre officiellement dans les églises, eux (v. ainsi le 27 juillet 2016 à la catédrale Notre-Dame de Paris, avant une audience dite « privée » du président au Vatican : cnews.fr avec AFP le 17 ; pour une autre « prière » en l’honneur du père Jacques Hamel, v. celle remise à Saint-Étienne du Rouvray par Omar Moubine, peintre amateur tourangeau : lanouvellerepublique.fr le 29, mis à jour le 2 juin 2017). Plus récemment, v. « Préfets à genoux », Le Canard enchaîné 4 déc. 2019, p. 8 : « en l’honneur de sainte Geneviève, patronne des gendarme (…), le préfet du Tarn, accompagné du substitut du procureur, prenait place sur les prie-Dieu de l’église de Cagnac-les-Mines. Même ferveur observée, dans leurs départements respectifs, par les préfets de la Marne et de la Sarthe, par les sous-préfets de Douai (Nord), de Brest, de La Flèche (Sarthe), de Thiers (Puy-de-Dôme). Et on en oublie… ».

Préfecture du Puy-de-Dôme, ©Francis Campagnoni (lamontagne.fr 6 déc. 2019) ; Stéphane Barnoin, « Tweets polémiques du mari de la préfète du Puy-de-Dôme : un époux décidément très encombrant », lamontagne.fr 9 déc. 2019

[8] Il est vrai qu’il est parfois affirmé que le voile aurait une signification davantage politique que religieuse, ce qui permettrait de restituer une cohérence à ce qui resterait une instrumentalisation de la pensée de Jean Zay (qui, lui non plus, n’est plus là pour s’en défendre), en 1936-1937 ; toutefois, lorsque d’aucuns vont au bout de cette logique, il apparaît alors qu’il est un peu ardu de s’en prévaloir : v. Cédric Mathiot, « Le journaliste de LCI Olivier Galzi a-t-il comparé le voile islamique à un uniforme SS ? », liberation.fr 17 oct. 2019

[9] V. aussi ultérieurement (JO Sénat du 2 déc. 2004, p. 2753) – en réponse à une question écrite n° 13740 de… « M. Michel Charasse (Puy-de-Dôme – SOC) » –, et les citations de Thibault Scohier (« La légende laïcarde des circulaires Jean Zay, ou comment justifier l’islamophobie en agitant le cadavre du Front Populaire », 20 févr. 2016), en précisant que celles les plus souvent mobilisées dans ce débat sont datées des 31 décembre 1936 et 15 mai 1937 (v. évent. ma thèse, 2017, pp. 500 et s.). Une citation de la première a par exemple été placée par Samuel Deliancourt, rapporteur public, en exergue de ses conclusions sur l’arrêt rendu cet été par la CAA de Lyon, pour interdire à des mères de participer à des activités scolaires au sein de l’école primaire Condorcet de Meyzieu (v. ma note et infra, pour une autre école ainsi nommée).

[10] « Depuis la diffusion de cette vidéo le mercredi 19 février dernier, devenue virale depuis, plusieurs internautes ont remis en cause la véracité des faits » ; « Yarraka Bayles, mère de l’enfant, n’a de cesse de démentir ces rumeurs » (Jean-Régis Ramsamy, « Quaden Bayles : un sociologue réunionnais revient sur l’impact sociétal de la vidéo qui fait le buzz », la1ere.francetvinfo.fr 23 févr. 2020 ; Raoul Lucas est l’auteur d’une thèse de sciences de l’éducation, soutenue en 1994 à Paris 8 et intitulée La mise en place de l’école dans une société esclavagiste puis coloniale : La Réunion 1815-1946).

[11] Matthieu Goar, « Pour Emmanuel Macron, la bataille du premier tour a déjà commencé », Le Monde 22 févr. 2020, p. 29

[12] V. ainsi Jean-Luc Porquet, « Un séminaire à Chamonix, ça vous dit ? », Le Canard enchaîné 12 févr. 2020, à la Une, citant un haut cadre : « Faire venir tous frais payés tous les galonnés de l’OFB à Chamonix, dans l’une des vallées les plus polluées de France, en pleine période de vacances scolaires, simplement pour faire la claque à Macron… En termes de crédibilité, on envoie d’emblée un message très fort ».

[13] « Discours du Président de la République lors du lancement de l’Office français de la biodiversité », elysee.fr 13 févr. 2020 : « 60 % des animaux sauvages ont disparu ces 50 dernières années », a-t-il par ailleurs déploré ; comparer Isabelle Michallet, « Regarder passer les oies sauvages… et tirer ! », AJDA 2020, p. 73 : au mépris de la directive européenne sur la conservation des oiseaux sauvages (1979), les ministres français « chargés de l’écologie ont, depuis des années, cédé aux demandes du lobby des chasseurs. Les associations de protection de la nature, à l’origine de l’ensemble des recours contentieux, défendent l’intérêt général et le respect du droit à la place de l’État ».

[14] Philippe Disaine Rakotondramboahova, « Sur les îles Éparses, la France ne respecte ni l’histoire ni le droit international », Le Monde 25 nov. 2019, p. 29 : « mercredi 23 octobre, Emmanuel Macron a fait escale sur l’île de Grande Glorieuse, au large de Madagascar, et a cru bon de rappeler : « Ici, c’est la France, c’est notre fierté, notre richesse », ajoutant ces mots sibyllins : « Ce n’est pas une idée creuse » ». L’information m’avait échappé ; je me rendais alors justement sur la grande île, où j’ai pu ressentir l’émotion suscitée par cette déclaration.

[15] Et en suggérant de lire les effronté·e·s.

[16] Pour un article – découvert dans un contexte tragique – comprenant le mot dans le titre, « Islamophobie et malaise dans l’anthropologie. Être ou ne pas être voilée en Iran », Politix 2007/4, nº 80, p. 179 : Fariba Adelkhah commence en rappelant la réaction d’un « éminent professeur parisien » à la publication de son livre La Révolution sous le voile. Femmes islamiques d’Iran (Karthala, 1991), § 1 ; au détour de sa conclusion, § 38, elle rappelle que Shirine Ebadi « a vivement protesté contre l’interdiction du voile en France » ; v. Marc Semo, « Fariba Adelkhah. Chercheuse emprisonnée », Le Monde 14 janv. 2020, p. 29 ; « À propos de Fariba Adelkhah et Roland Marchal : ce que l’on sait », sciencespo.fr le 26 févr.

[17] Si l’enquête ouverte « pour notamment « menaces de mort » » est en cours, « le procureur de la République de Vienne a décidé, jeudi 30 janvier, de classer sans suite » celle pour « provocation à la haine raciale » (Mattea Battaglia et Charlotte Herzog, « L’« affaire Mila » repose la question du droit au blasphème en France », Le Monde 31 janv. 2020, p. 14 ; v. infra). Il en a été de même de « la plainte de Blanquer contre le stage « en non-mixité » chez les profs » (Hélène Haus, leparisien.fr le 6 févr.), évoquée dans mon précédent billet. Sud Education 93 a indiqué n’avoir eu connaissance de ce classement sans suite que le 30 janvier, alors que cette décision a été rendue le « 13 mai dernier par le tribunal de Bobigny ». Bizarrement, le ministre n’avait alors pas communiqué (sans doute par égard pour l’autorité judiciaire – très respectée par la macronie… –, et une fois n’est pas coutume !).

[18] La « race » peut être mobilisée alternativement avec « les adjectifs « ethnique », « racial » ou « ethnoracial » » (Rachida Brahim in Juliette Galonnier & Jules Naudet, « Race et intersectionnalité. Entretiens croisés, 1e partie » du « Dossier : Polémiques et controverses autour de la question raciale », laviedesidees.fr 11 juin 2019). D’un point de vue juridique, v. par ex. DDD, décision n° MDE-MLD-2015-174 du 23 juin 2015, 12 p., page 4, avec le choix fait en soulignant ; le dernier cas n’aurait-il pas pu être combiné ? (c’est ce qui est fait plus loin, p. 9, au § 69 ; v. aussi Crim., 23 janv. 2018, n° 17-81369 ; CA Versailles, 19 juin 2019, n° 18/01049, 15 p. (il manque cependant la page 14) ; La Revue des Droits de l’Homme ADL 9 févr. 2020 (v. spéc. le § 12), note Sarah Akkari, Manon Allassan et Océane Llorca (étudiantes du Master 2 Droits de l’homme, Université Paris Nanterre), « Refus de scolarisation des enfants itinérants : de la responsabilité de l’État à la responsabilisation des maires »). Entretemps se trouve mentionné le handicap (page 4 préc.), à propos duquel v. la deuxième note ci-après.

[19] Pour ne prendre là aussi qu’un exemple, ou plutôt deux : « Les Salopettes : Sexisme et féminisme dans l’entre-soi d’une « grande école » française élitiste », Nouvelles Questions Féministes 2019, vol. 38, n° 2, p. 166 (article rédigé pour NQF par cette association de l’École normale supérieure (ENS) de Lyon, « à partir d’un entretien collectif entre quatre personnes du bureau de 2019, unx ex-membre fondateurice et une adhérente active ») ; Iban Rais, « Humiliations sexuelles, homophobie, sexisme : voyage au sein des grandes écoles de commerce françaises », Mediapart6 janv. 2020 : « Lorsqu’en 2013, l’actuel ministre de l’éducation nationale Jean-Michel Blanquer arrive à la tête de l’institution [de Cergy (l’Essec, pour École supérieure des sciences économiques et commerciales)], il remercie sur Twitter [le magazine étudiant] L’Impertinent pour son accueil, malgré une réputation plus que sulfureuse qu’il pouvait difficilement ignorer : les photos de L’Impertinent ornent les murs du couloir des associations, à la vue de tous donc, et notamment de la direction » ; « dans le numéro de novembre 2014, L’Impertinent [évoque] notamment l’homosexualité d’un étudiant d’origine maghrébine (…). Interrogé par Mediapart, Jean-Michel Blanquer nous a fait savoir qu’il « connaissait L’Impertinent de réputation mais pas dans son contenu » ». Renvoyant à « l’enquête de Mediapart, peu reprise par des médias courageux mais peu téméraires ! », avant d’esquisser « une analyse plus globale », Jean Baubérot, « L’égalité femme-homme, le « commun », la laïcité : les leçons de « Metoo » », 31 janv. 2020

[20] Encore faut-il rappeler que le « handicap » se définit lui aussi par rapport à l’environnement social ; outre la note n° 11 de l’un de mes billets du 29 décembre 2019, actualisé début février, v. Théo Maneval, « Handicap à l’école : « Fatiha, c’est une camarade comme une autre » », europe1.fr le 11 ; Béatrice Jérôme, « Handicap : une ambition et des promesses », Le Monde le 12, p. 7 : la « batterie de mesures » annoncées pour renforcer le droit à l’éducation inclusive auraient pu comprendre un rappel aux rectorats d’assumer leurs obligations, en cessant une autre effronterie (plusieurs fois observée) : celle consistant à tenter de se défausser sur les établissements privés.

[21] Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed, Islamophobie. Comment les élites françaises fabriquent le « problème musulman », La Découverte, 2013 et 2016, pp. 203-204, citant Gwenaëlle Calvès, « Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », in Élisabeth Lambert-Abdelgawad et Thierry Rambaud (dir.), Analyse comparée des discriminations religieuses en Europe, Société de législation comparée, 2011, p. 9, spéc. p. 12, pour qui « la discrimination « religieuse » pose deux séries de difficultés : difficultés d’appréhension du motif de la différence de traitement ; difficultés dans la construction d’un cadre comparatif pertinent » ; « les discriminations dites « religieuses » sont généralement fondées sur tout autre chose que la religion ». Cet article est également cité page 201, et par l’un des co-auteurs, Marwan Mohammed, « La transversalité politique de l’islamophobie : analyse de quelques ressorts historiques et idéologiques », in Robert Bistolfi et Haoues Seniguer (dir.), « dossier : L’islam de France : nouveaux acteurs, nouveaux enjeux », Confluences méditerranée automne 2015, n° 95, p. 131, spéc. au § 15, juste après ce rappel : « Jusqu’à la seconde guerre mondiale, c’est essentiellement la survivance d’un antijudaïsme chrétien qui implique de considérer le motif religieux comme marqueur de racisme (même si cette dimension est présente dans l’antisémitisme nazi). Motif dont la pertinence est par la suite sérieusement questionnée lors de la préparation de la loi contre le racisme du 1er juillet 1972 ».

[22] V. ainsi la chronique de Frédéric Potet, « Le mandat agité du député Moreau », Le Monde 24 févr. 2020, p. 28, non sans rappeler la forte pensée de l’éleveur – de vaches limousines, pas du débat politique – « après l’envahissement du siège de la CFDT par des grévistes CGT et SUD-Rail, mi-janvier : « Islamistes et syndicalistes radicaux, même combat contre la République et la démocratie. » En 2018, un précédent message avait également enflammé les réseaux sociaux, après sa rencontre avec un dignitaire saoudien de passage à Paris : « Nous portons le même idéal de paix, de tolérance et d’ouverture entre les religions et les peuples. » Du « second degré », nuance aujourd’hui celui qui préside le groupe d’amitié France-Arabie saoudite à l’Assemblée nationale – fonction embarrassante s’il en est, dont il a hérité, faute de candidats ». Les deux informations sont à lire en même temps… Pour deux actualités récentes qui donneront peut-être à l’élu de la Creuse une nouvelle occasion de faire de l’humour : « Une rappeuse salue le courage des femmes, les autorités de La Mecque réclament son arrestation » (ouest-france.fr avec AFP le 24) ; au Proche-Orient, v. les « « éléments de langage » (…) fournis, voire imposés au Quai d’Orsay par l’Élysée (…)[,] étonnamment compréhensifs vis-à-vis de l’initiative trumpienne. La France « salue » en effet « les efforts » du président américain » (Isabelle Lasserre, « La France a-t-elle lâché les Palestiniens ? », Le Figaro 30 janv. 2020, n° 23469, p. 8). « Un peu comme le prince héritier d’Arabie saoudite, « MBS », qui a « apprécié » lesdits « efforts ». La France est en bonne compagnie » (Jérôme Canard, Le Canard enchaîné 5 févr. 2020, p. 8 ; v. aussi Claude Angeli, « La grande timidité de Macron face à Trump », p. 3 : « Moralité : il n’y en a pas »). Le communiqué du Quai d’Orsay « est contradictoire : comment, dans un même mouvement, saluer les « efforts » du président Trump et réaffirmer la « solution » des deux États, alors que les premiers cherchent à détruire la seconde ? (Jean-Paul Chagnollaud et alii, « Le plan de paix « Nétanyahou-Trump » est un coup de force contre le droit international », Le Monde 13 févr. 2020, p. 26 ; Alain Gresh, « Israël-Palestine, un plan de guerre. Persistance de la vision coloniale », Le Monde diplomatique mars 2020, p. 6) ; émanant cette fois du bureau de la haut-commissaire aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, le 12 février, un autre communiqué, « a rendu publics les noms des entreprises épinglées par l’ONU [parce qu’elles « continuent de commercer illégalement avec les colonies israéliennes en Cisjordanie »]. Parmi elles, des sociétés de transports comme la firme française Alstom – qui avait répondu à un appel d’offres pour le tramway de Jérusalem avant d’y renoncer – ou encore de célèbres sites de location ou de tourisme installés aux États-Unis, au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas tels que Airbnb, Opodo, Expedia ou encore Booking.com. Mais la majorité de ces entreprises (94 [sur 112]) sont israéliennes » (Louis Imbert et Marie Bourreau, « L’ONU liste les sociétés commerçant avec les colonies israéliennes », Le Monde 14 févr. 2020, p. 3). Pour revenir aux relations franco-saoudiennes, une juge a reconnu « qu’un lien existe entre [certaines autorisations douanières françaises] et les souffrances de la population [yéménite] » (TA Paris Ord., 7 févr. 2020, cité par Ouest-France Cherbourg avec AFP le 11).

[23] Le parquet de Versailles a été saisi, comme il l’avait été après que cette conseillère municipale d’opposition (ex-LaREM, à Saint-Germain-en-Laye) a visé « des milliers d’agents arabo-musulmans qui méprisent Noël » (en décembre, lors de la grève à la RATP) ; elle a depuis été condamnée pour « injure publique en raison de l’orientation sexuelle » (« Agnès Cerighelli a enfin été condamnée par la justice », tetu.com 17 févr. 2020).

[24] Alors qu’elle était doctorante, Lauren Bakir avait écrit plusieurs textes sur le site « communautarismes dé/construits », dont deux recensions, le 18 avr. 2016 : l’une d’Asma Lamrabet, Femmes et hommes dans le Coran : quelle égalité ? (éd. La croisée des chemins, 2012), l’autre de Baudouin Dupret, La charia. Des sources à la pratique, un concept pluriel (La Découverte, 2014) ; elle indique alors que « l’auteur se livre à une explication très précise de la diversité à laquelle renvoie cette notion ». L’introduction est disponible en ligne (il avait dirigé auparavant La Charia aujourd’hui. Usages de la référence au droit islamique, même éd., 2012). Page 8, il présente son livre de 2014 comme « une sorte de carte permettant de naviguer en évitant autant que possible (…) les voies rapides ». « Des mots qui (…) insinuent plus qu’ils ne décrivent (…) [, qui] suscitent un écho », écrit-il page suivante, alors qu’il serait de bonne méthode d’« être circonspect vis-à-vis des mots importés de la langue arabe ». Pour un bref échange mémorable entre une journaliste et Mohamed Bajrafil ; pour l’écouter plus longuement sur France 2, en avril 2015 : Abderrahim Hafidi l’invitait avec le sociologue Omero Marongiu-Perria : « Qu’est-ce que la charia ? » (YouTube 1/2 et 2/2).

[25] v. Florent Deligia, « Lyon : Petit Paumé 2020, de nouvelles critiques font polémiques », lyoncapitale.fr 14 oct. 2019 ; Usul et Rémi Liechti, « Zemmour et autres « paumés », ou la fin du racisme complexé », Mediapart le 21

[26] « Les propos de Rachida Dati après les fusillades en Allemagne créent la polémique », Le Monde.fr avec AFP 21 févr. 2020

[27] Mutatis mutandis, Jacques Rancière (entretien avec, par Nicolas Truong), « Entre esthétique et politique, les frontières deviennent poreuses », Le Monde 6 juill. 2018, p. 20 : « Pensez au rôle du prétendu « républicanisme », qui a transformé la critique du monde marchand en critique de la démocratie, et fait des valeurs de liberté et d’égalité un patrimoine national menacé par la population musulmane et par les migrants. L’arc médiatique qui va de Marianne à Valeurs actuelles est, de ce point de vue, significatif ».

[28] Thomas Wieder, « L’Allemagne ébranlée par le terrorisme d’extrême droite », Le Monde 22 févr. 2020, p. 2 : est rapportée plus loin une citation de Nicolas Tauber, étudiant en biologie (« il y a un vrai problème de racisme dans la police »).

[29] J’évoquais les attentats de Christchurch au terme de ce billet ; depuis, j’ai encore souvent lu qu’une différence entre l’antisémitisme et l’islamophobie viendrait de ce que cette dernière n’aurait pas d’effets ensanglantés…

[30] « Non, la laïcité ne justifiera jamais l’islamophobie », solidarite-laique.org 14 oct. 2019, citant l’extrait pertinent du communiqué de la LDH, « Aucune complaisance avec la haine islamophobe », le 13 (« elle dénonce l’insistance de Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, à considérer que les mères voilées ne seraient pas les bienvenues dans les sorties scolaires, en contradiction avec la loi en vigueur et stigmatisant une partie des parents d’élèves en raison de leur religion »).

[31] Quelques semaines plus tard, cette information peu surprenante sur la ré-augmentation du coût des déplacements présidentiels s’accompagnait d’une nouvelle effronterie : v. Patrick Roger, « Budget 2020 : le Sénat épingle le train de vie de l’Élysée », Le Monde 30 nov. 2019, p. 9, citant le sénateur (PS) du Loiret, Jean-Pierre Sueur : « « Les services de l’Élysée ont refusé de recevoir le rapporteur que je suis », déplore-t-il. Le ton est policé, mais il ne peut que regretter « ce comportement peu républicain » ; dans son rapport, il « ne peut s’empêcher de noter que « la réduction du train de vie de l’Élysée mise en avant dans le bleu budgétaire [le document établi par Bercy pour chaque mission du PLF] pour 2020 est donc très relative ». « [J]e ne reçois que les personnes respectables et/ou celles qui ne me font pas perdre mon temps », a pris le… temps de répondre Patrick Strzoda, le directeur du cabinet du président (« Interpellé sur son « train de vie », l’Élysée répond au Sénat », Le Monde 6 déc. 2019, p. 11).

[32] Sous la plume d’un directeur de recherche au CNRS, procureur à ses heures perdues – car soucieux de participer à la dénonciation de ses « escrocs » –, il est possible d’y lire que l’islamophobie ne serait qu’une « fake news » (Philippe d’Iribarne (entretien avec, par Anne-Laure Debaecker), Valeurs Actuelles 9 mai 2019, n° 4302, p. 32).

[33] « C’est un mec génial, proche du génie », a aussi dit Emmanuel Macron de Joachim Son-Forget, en septembre 2018 (franceinter.fr le 26 déc.) ; « Valeur absolue », tel est le nom de son « mouvement », selon valeursactuelles.com les 15 et 17 févr. 2020

[34] v. « Zemmour saisit la CEDH après sa condamnation pour provocation à la haine religieuse », L’Obs avec AFP 18 oct. 2019 (dans ma thèse, en note de bas de page 1005, n° 2328, je renvoie à l’article « Marianne voilée : le directeur de « Valeurs actuelles » condamné », Le Monde.fr avec AFP 3 févr. 2015, avant d’énumérer d’autres usages de l’expression – notamment par Bruno Le Maire, devenu depuis ministre ; l’information m’avait alors échappé, mais cet arrêt a été remis en cause : liberation.fr 7 juin 2017). Depuis, « un “plaidoyer pour Zemmour” » a resurgi, celui de Gabriel Matzneff, établissant « un parallèle entre le polémiste d’extrême droite et sa propre situation » (Juliette Gramaglia, « Le Point, Le Figaro, Causeur, etc : à droite, on aime encore Matzneff », ASI 27 déc. 2019).

[35] Ivanne Trippenbach, « Macron dans « Valeurs actuelles » : l’interview qui a tétanisé l’Élysée », lopinion.fr 1er nov. 2019 ; pour une autre phrase retirée suite à l’intervention de ses conseillers : « Le RN vit des peurs, c’est son intrant à lui, et, pour ça, il n’a pas besoin de pesticides » (v. Le Canard enchaîné 26 févr. 2020, p. 2 ; à la Une, il est fait écho à une « enquête accablante » de deux ONG concernant les pratiques des « cinq géants de l’agrochimie, Bayer, BASF, Syngenta, Corteva et FMC », lesquels « inondent les pays » du Sud). Dans une décision récente, le Conseil constitutionnel affirme que « le législateur est fondé à tenir compte des effets que les activités exercées en France peuvent porter à l’environnement à l’étranger » (cons. 6 de CC, 31 janv. 2020, Union des industries de la protection des plantes [Interdiction de la production, du stockage et de la circulation de certains produits phytopharmaceutiques], n° 2019-823 QPC ; La Revue des Droits de l’Homme ADL 24 févr., note Véronique Champeil-Desplats). Le Conseil d’État, lui, a refusé de suspendre les textes réglementaires relatifs aux distances d’épandages en France (Le Monde.fr avec AFP le 14).

[36] Pour reprendre un « bon » mot des « Laurel et Hardy » du centre de recherches et de diffusion juridiques du Conseil d’État ; v. le billet d’humeur, « Hot Assemblée », RDLF 2019, chron. n° 54 : « délicieux. Quelle fulgurance ! ». Sous le pseudonyme de Pr Duthout de Montcru, l’auteur commente auparavant un autre intitulé : « « À l’école du vice » (l’ENA rencontrant l’X ? Les Mines de Paris ?) ». Humour à apprécier à la lumière d’un « retour d’expérience » adressé à la direction de l’École nationale d’administration par « une vingtaine d’élèves » (sur 81) de la promotion Molière (2018-2019) : « L’un des éléments les plus spectaculaires concerne le traitement qui est réservé aux cas de harcèlement moral et sexuel durant la scolarité » (Benoît Floc’h, « L’ENA dans le viseur de ses élèves » – pour qui elle « récompense des qualités attribuées aux hommes » ; titres des deux articles dans Le Monde 22 févr. 2020, p. 8, annoncé à la Une). Pour un bilan du maire de « Buzziers » (« son surnom local »), v. Éric Allermoz, « Bons Béziers de Ménard », Causette mars 2020, n° 109, p. 42, spéc. p. 46, renvoyant à la série de billets écrits par Françoise, « L’école pour les nuls », envieabeziers.info 10 déc. 2019

[37] Ivan Rioufol, « Islamisme : naufrage de la gauche collabo », le blog.lefigaro.fr 4 nov. 2019 ; l’objet du courroux du « résistant » (avec le repris de justice Éric Zemmour…), cet appel de Madjid Messaoudene et alii, « Le 10 novembre, à Paris, nous dirons STOP à l’islamophobie ! », liberation.fr 1er nov. 2019 : « L’attentat contre la mosquée de Bayonne le 28 octobre, en est la manifestation la plus récente ». Il « a changé beaucoup de choses, vraiment, car ça arrive après l’altercation au conseil régional de Bourgogne et une longue séquence médiatique à charge contre les musulmans » (un « politique signataire de l’appel », cité par Rachid Laïreche, « La marche contre l’islamophobie révèle les fractures à gauche », Ibid. le 3). Comme il n’est pas certain que le directeur adjoint du figaro prenne souvent le bus, qu’il descende s’il est dérangé par la vue du voile paraît une très bonne solution. Ivan Rioufol « n’est pas un pigiste de la Gazette de Juvisy », selon une formule que j’emprunte à l’humoriste Djamil le Shlag ; ce pourrait être seulement drôle – et il vaut en effet mieux en rire –, si ce n’était pas si grave.

[38] Le « en même temps » permettant de se soustraire à l’exigence de non-contradiction, il évoque à deux reprises de cet entretien « toutes les femmes voilées qui n’embêtent personne, qui veulent mettre leurs enfants à l’école de la République » ; à la question de savoir « comment faire la différence entre une femme voilée communautarisée et celle qui ne l’est pas ? « Je n’en fais aucune », répond-il » toutefois.

[39] Pauline Moullot et Anaïs Condomines, « L’élu RN Julien Odoul a-t-il été piégé par Fatima E., comme l’a affirmé Macron  dans « Valeurs actuelles » ? », liberation.fr 5 nov. 2019, sourcant les deux versions ; et de citer la présidente de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) du territoire de Belfort : « S’il fallait refuser les mères voilées, on n’aurait plus d’accompagnateurs et on ne ferait plus de sorties scolaires ». Autre grossier positionnement d’extrême-droite de l’entretien : « Mon objectif, c’est de sortir tous les gens qui n’ont rien à faire là » ; v. Michel Feher, « La gauche et les siens : enjeux (3/3) », AOC 11 déc. 2019) : « Proclamant, à la suite de ses prédécesseurs immédiats, que l’imitation du RN est la seule manière courageuse de le combattre, le président de la République s’avance en effet sur une voie qui, en raison de l’évolution démographique, alimente bien moins l’imaginaire de la startup nation que le « rêve hongrois » d’une société d’autochtones aux tempes grisonnantes ».

[40] Le 19 octobre 2018 avait lieu à l’Université Paris I Panthéon Sorbonne une Journée d’étude intitulée « La diffamation saisie par les juges en Europe ». Ou pas…

[41] Emmanuel Macron (entretien avec, par Louis de Raguenel, Tugdual Denis et Geoffroy Lejeune), « L’échec de notre modèle se conjugue avec la crise que vit l’islam », Valeurs Actuelles 31 oct. 2019, n° 4327, pp. 18 et s. ; Geoffroy Lejeune, « Audiard, Houellebecq et l’Airbus A330 : dans les coulisses de notre entretien avec Emmanuel Macron », valeursactuelles.com 30 oct. 2019

[42] Ariane Chemin, et François Krug, « Sylvain Fort, le retour d’un fidèle pour “démilitariser” les relations avec la presse », Le Monde 12 sept. 2018, p. 9 ; à propos de Louis de Raguenel, v. «  Le fabuleux destin d’un membre de la police nationale devenu journaliste », blog lemonde.fr 26 juin 2013

[43] Ariane Chemin et François Krug, « Macron et « Valeurs actuelles », une attraction durable », Le Monde 2 nov. 2019, p. 11

[44] François Krug, « Iskandar Safa, un magnat très discret », Le Monde 31 déc. 2019, p. 17 : « L’origine exacte de [la fortune de cet homme d’affaires franco-libanais de 64 ans], évaluée à 1,1 milliard d’euros par le magazine économique Challenges, demeure un mystère ». (…) « C’est un esthète et un ascète », résume son ami Charles Villeneuve, ex-présentateur de l’émission « Le Droit de savoir », sur TF1 [, lequel] raconte l’avoir rencontré en 1976, en couvrant pour Europe 1 l’attaque d’un camp de réfugiés palestiniens par des milices chrétiennes. Le jeune homme combattait dans l’une d’elles, les Gardiens des Cèdres. Safa affirme pour sa part que leur rencontre a eu lieu plus tard et à Paris. (…) Il se trouve que Charles Villeneuve, de son vrai nom Leroy, a un frère, et que celui-ci, Henri Leroy, [est] maire de la commune [où Safa s’est installé]. (…) Depuis son arrivée, Safa a offert des gyropodes aux policiers municipaux, versé 600 000 euros à un club de basket et donné 1 million pour la construction d’une église ». Iskandar Safa a réagi dans une « lettre », terminée comme suit : « Je rajouterai que c’est à la famille Ricard et non à l’ancien maire de Mandelieu Henri Leroy, que je ne connaissais pas au moment de cette acquisition, que j’ai acheté en 2000 le domaine de Barbossi » (le 17 janv., p. 8, avant de décrire son activité principale comme « bien éloignée de celle de “marchand d’armes” »).

[45] Laurent Carpentier, « Ladj Ly porte plainte contre « Causeur » et « Valeurs actuelles » », Le Monde 20 déc. 2019, p. 13 ; à propos de son film percutant, v. la belle tribune d’Éric Vuillard, « « Les Misérables » est un film universel sur une société de la ségrégation », le 4 janv., p. 26

©LaMeute – Mel : Me Arié Alimi brandissant « l’outil de travail du jeune journaliste » Taha Bouhafs (Naje, « Fin du game, poursuite de la lutte pour une presse libre », lameute.info 28 févr. 2020)

[46] « Je crois aux gens, qui d’une main souvent tremblante, lèvent leur smartphone face aux violences policières » (David Dufresne, Dernière sommation, Grasset, 2019, cité par Xavier de La Porte, Le code a changé, premier épisode : « David Dufresne raconte Allo@Place_Beauvau », 10 févr. 2020, un peu avant la 19ème min.).

[47] À propos de Rachid Taha (1958-2018) et son groupe Carte de Séjour, v. par ex. les écrits de Philippe Hanus.

[48] V. la page 366 de ma thèse et Cécile Chambraud, « La formation des imams de nouveau sur la table », Le Monde 19 févr. 2020, p. 11 : « à la rentrée de septembre, six candidats pourraient démarrer leur formation au sein de cette nouvelle École nationale de l’aumônerie militaire » ; l’ENAM « est une association de droit local créée à Strasbourg, où la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État n’est pas en vigueur ». Dans cette même ville, v. Camille Polloni, « Islamophobie : un homme poursuivi pour avoir crevé les pneus de femmes voilées », Mediapart 21 févr. 2020 : « Jean-Pierre E., 73 ans, est finalement attendu le 2 juin prochain au tribunal correctionnel de Strasbourg, où il doit être jugé pour « dégradation de biens commise en raison de l’appartenance à une religion » ».

[49] Avec un arrêt du 12 février, et une note de service de la préfecture de police de Paris du 22 janvier ; v. encore Nicolas Chapuis et Ariane Chemin, « Le préfet du président », Le Monde 25 févr. 2020, pp. 20-21 (annoncé à la Une) : suggéré à ce dernier le 16 mars 2019 par Dominique Perben (ancien ministre de la justice RPR), Didier Lallement « fait partie de ces grandes gueules volontiers impolies, irrespectueuses ou « provos » que la Macronie dit « disruptives », dont Emmanuel Macron raffole, et qui peuplent déjà le quinquennat » ; « Pourquoi donc n’avoir pas « fait » l’armée, plutôt qu’une école de commerce ? Faute de guerre »…

[50] V. mon billet du 29 septembre, « Laïcités françaises et « communautarisme » ».

[51] V. celui de François Burgat le 28 octobre, « « L’hydre islamiste » et le virage sécuritaire (et électoraliste ?) d’Emmanuel Macron ».

[52] Olivier Faye et Cédric Pietralunga, « Le plan de lutte de Macron contre le « séparatisme » », Le Monde 18 févr. 2020 (annoncé à la Une).

[53] Dans cette série « du scénariste Éric Benzekri et de son équipe », il est vrai que s’y trouve incarnée aussi la conception de « la laïcité » de « Manuel Valls par exemple », ainsi qu’a pu le remarquer un membre du bureau national du Parti socialiste, ayant « été chef de cabinet du secrétaire d’État chargé de la mémoire auprès du ministre de la défense de 2014 à 2017 » (Yoan Hadadi, Le Monde 25 févr. 2020, p. 27) ; elle vient de trouver à s’exprimer à Montpellier (où le PS « refuse une candidate communiste car elle est voilée », lengadoc-info.com le 20, selon Jordi Vives), et par la bouche d’un député EELV bien en vue (« Port du voile dans l’exercice d’un mandat : “Ce n’est pas approprié”, estime Yannick Jadot », rtl.fr le 9). Je renvoie à mes ajouts au 12 juillet 2018 de ce billet, ainsi qu’à Annie Fitte-Duval, « Neutralité religieuse des élus locaux : une construction largement prétorienne », in « Dossier : Laïcité et collectivités : le cas des agents et élus », AJCT 2019, pp. 489 et s. ; Observatoire de la laïcité, Laïcité et collectivités locales, nov. 2019, 16 p., spéc. p. 5

[54] Laurent Bonnefoy, « Idées toutes faites sur « les territoires conquis de l’islamisme ». À propos d’un livre dirigé par Bernard Rougier », orientxxi.info 10 févr. 2020 : « par son titre même et par l’angle choisi pour promouvoir l’ouvrage, le mal est fait, venant offrir une caution scientifique à un discours xénophobe. (…) Le militantisme pour les droits et contre les discriminations, en particulier racistes, n’a jamais constitué une porte d’entrée vers la violence islamiste ou le salafisme, sans doute pas de façon plus probante que la pratique du tennis de table, de la philatélie ou le goût pour les kébabs ! ».

[55] Daniel Schneidermann, « France 5, territoire conquis de Macron », ASI 19 févr. 2020 ; durant l’émission Le Temps du débat, comme premiers éléments de réponse à la question : « La compréhension de la radicalisation islamiste a-t-elle progressé ? », franceculture.fr 17 févr. 2020, Hugo Micheron relève qu’il s’agit [avec le mot « séparatisme »] de « sémantique et de communication politique » ; pour Corinne Torrekens, « ce terme obscurcit le débat plus qu’il ne l’éclaircit » ; invitée également d’Emmanuel Laurentin – avec Bernard Godard –, Leyla Dakhli avait rédigé un article intitulé « L’islamologie est un sport de combat. De Gilles Kepel à Olivier Roy, l’univers impitoyable des experts de l’islam » (Revue du Crieur 2016/1, n° 3, pp. 4 et s.), les deux autres « figures principales » étant alors Jean-Pierre Filiu et François Burgat. « Que veut dire « islamiste » ? » À cette question, en juin 2015, ce dernier répondait : « Je m’empresserais d’abord de rappeler qu’il s’agit là d’un mot dangereux, qui fait plus de bruit qu’il apporte de lumière, et dont il faudrait sans doute apprendre à se passer si l’on veut apercevoir la matrice réelle – politique et non religieuse – des turbulences de ce monde » (Sciences humaines nov.-déc 2015-janv. 2016, « Grands Dossiers », Hors-série n° 4)…

[56] Jean-Michel Blanquer puis Oria, cité·e via franceinfo par Inès Rossi, « Surenchère islamophobe pour venir à bout des contradictions en macronie », revolutionpermanente.fr 21 févr. 2020, avant cette précision : « Le général de Gaulle parlait déjà de “séparatistes” pour parler des communistes. À chaque époque son ennemi intérieur » ; selon Laurent de Boissieu, c’était « à Vincennes, le 5 octobre 1947 » (« Pourquoi Emmanuel Macron parle désormais de « séparatisme » islamiste », la-croix.com le 18 ; article instructif sur la genèse politico-religieuse du terme).

[57] Olivier Faye, « La présidentielle de 2022 inquiète Macron », Le Monde 25 févr. 2020, p. 9 (annoncé à la Une).

[58] Il n’empêche, il n’est guère rassurant qu’un décret autorise dans ce contexte, même sous conditions, la « collecte et le traitement des données (…) relatives à la prétendue origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, philosophiques ou religieuses, à l’appartenance syndicale, à la santé ou à la vie sexuelle ou l’orientation sexuelle » : art. 2 du décret n° 2020-151 du 20 février 2020 portant autorisation d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « application mobile de prise de notes » (GendNotes).

[59] À ne pas confondre avec celle qui, selon « 44 chercheurs en sciences politiques », consistait à « « dépolitiser » artificiellement le scrutin municipal et reléguer les communes de moins de 9 000 habitants et leurs administrés à une catégorie d’invisibles ou d’oubliés de la République, qui n’ont pourtant pas manqué de se rappeler aux pouvoirs publics lors du mouvement des « gilets jaunes » » (« Christophe Castaner doit réviser sa circulaire sur les municipales », Le Monde 27 janv. 2020, p. 29). Par une ordonnance du 31 janvier, le Conseil d’État a suspendu l’exécution de cette circulaire en identifiant plusieurs doutes sérieux quant à sa légalité, le premier en ce que le « seuil retenu (…) [a] pour effet potentiel de ne pas prendre en considération l’expression politique manifestée par plus de 40 % du corps électoral » (Mme Laroche et a., n° 437675, 437795, 437805, 437824, 437910, 437933, cons. 9) ; pour reprendre l’excellente punchline de Jean-Pierre Camby, « le nuançage doit être une photographie, il ne peut pas être un selfie » (franceculture.fr 3 févr.). Il a été « abaissé à 3 500 habitants » (v. Patrick Roger, Le Monde le 6, p. 8).

[60] Louise Couvelaire et Élise Vincent, « Castaner : « Mon adversaire, c’est l’islamisme » », Le Monde 3 déc. 2019, p. 8, citant un entretien téléphonique organisé samedi 30 novembre ; ce n’est donc pas « la finance »… V. aussi Jérôme Sainte-Marie (entretien avec, par Louise Couvelaire), « Répondre à une inquiétude de l’électorat de droite » : « Il est maladroit d’attirer l’attention sur un sujet sur lequel votre propre camp est divisé alors que l’adversaire, lui, est unifié » ; renforcer la menace Marine Le Pen, qui a conduit Emmanuel Macron à l’Élysée, est-ce vraiment de la maladresse ? « A l’occasion des européennes, les macronistes ont vérifié que leur marge de progression est à droite, ou plus précisément dans un électorat à la fois favorable aux réformes libérales mais redoutant une société multiculturelle ».

[61] Ludovic Galtier, maire-info.com 29 nov. 2019, notamment en termes de lutte contre la fraude fiscale, alors que Le Monde révélait à la Une qu’à cet égard, « la Cour des comptes tance l’État », avec des articles d’Anne Michel, Benoît Floc’h et Audrey Tonnelier, pp. 10-11, ce dernier avec cette introduction : « L’exécutif affirme que la lutte contre la fraude fiscale est devenue l’une de ses priorités » ; gageons qu’il ne s’agira pas de cibler seulement les « fraudeurs salafistes » (cela doit exister)…

[62] Pour ce qui concerne l’école, il s’agit de recycler la proposition de « transformation en sections internationales des ELCO », faite en 2016 par Najat Vallaud-Belkacem : v. Mattea Battaglia et Cécile Chambraud, « Des mesures pour lutter contre les « influences étrangères » », Le Monde 20 févr. 2020, p. 6 : « À compter de la rentrée 2020, c’en sera donc fini des ELCO, ces « enseignements de langue et de culture d’origine » assurés par des maîtres étrangers dans les écoles primaires essentiellement, et que fréquentent, en dehors du temps scolaire, quelque 80 000 enfants ». Sans pouvoir ici développer, je saisis l’occasion d’actualiser ma recherche doctorale avec CAA Marseille, 19 mars 2018, Commune de Six-Fours-les-Plages, n° 17MA04537, cons. 5 : autrement dit, le juge administratif ne saurait sanctionner une « simple déclaration (…) d’intention »… islamophobe (v. ma thèse p. 296) ; quelques mois plus tard, le président de l’Institut du monde arabe (IMA) indiquait que « seul un enfant sur mille étudie l’arabe à l’école primaire, deux sur mille au collège » (Jack Lang, « Développons les cours d’arabe dans nos écoles », Le Monde 20 sept. 2018, p. 24) ; « dans un pays qui compte 3 millions d’arabophones tous dialectes confondus, l'” arabe standard “, comme on dit dans le jargon de l’école, n’est appris que par un millier de collégiens et de lycéens à Paris ; quelque 11 000 dans tout le pays. Des effectifs inférieurs à ceux des autres langues dites “rares” que sont le chinois ou le russe » (Mattea Battaglia, « ” L’arabe nous servira plus que l’allemand ” », Le Monde le 9 oct., p. 14, avant de citer l’historien Alain Messaoudi – auteur du livre Les Arabisants et la France coloniale (ENS Lyon, 2015) –, et d’ajouter : « jusque dans l’entre-deux-guerres, l’arabe est la cinquième langue enseignée dans le secondaire »).

[63] Olivier Faye, Cédric Pietralunga et Manon Rescan, « Le chef de l’État invoque Maurras pour parler du régalien », Le Monde 13 févr. 2020, p. 6

[64] Loris Boichot, « « Pays réel » contre « pays légal » : quand Macron reprend le nationaliste Maurras », lefigaro.fr 12 févr. 2020

[65] Était plus précisément dénoncé un « minutieux piétinement des Lumières » : v. Solange Bied-Charreton, « Sciences Po Paris, l’école devenue laboratoire des théories progressistes », Valeurs Actuelles (site web) 4 janv. 2020 (présenté comme une « [e]nquête sur la dérive d’une fabrique des élites », l’article apparaît aussi – à partir de la base Europress – sous le titre : « la fabrique des théories divagantes »).

[66] Dans sa recension pour Le Monde des Livres du 4 oct. 2019, p. 4, Roger Chartier écrit qu’Antoine Lilti vient « revisiter l’immense bibliothèque des écrits consacrés aux Lumières. Les mots qui reviennent le plus souvent dans son livre sont « ambivalence », « ambiguïté », « contradiction » [et il récuse à la fois] « l’adhésion à un héritage dont l’universalisme n’est même pas interrogé » et « le rejet en bloc des Lumières au nom d’une vision caricaturale de leurs liens avec le colonialisme » ». « Philosophie des Lumières et orientalisme », tel est l’un des intertitres du livre d’Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed, Islamophobie…, ouvr. préc., 2016, pp. 167 à 171, en terminant sur la « période coloniale » (remarqué par l’un des co-auteurs, v. cet extrait de Danièle Sallenave (entretien avec, par Nicolas Truong), « L’identitarisme est la maladie du XXIe siècle », Le Monde 25 juin 2018, p. 24 ; s’ouvrant par une citation de Tocqueville, Olivier Le Cour Grandmaison, « Ennemis mortels ». Représentations de l’islam et politiques musulmanes en France à l’époque coloniale, La Découverte, 2019, p. 5).

[67] Jacqueline Eustache-Brinio (entretien avec, par Virginie Le Trionnaire), « On n’a pas la capacité d’intégrer », lefigaro.fr 22-23 oct. 2019

[68] Souâd Ayada, « Le visible de l’islam aujourd’hui en France est saturé par le voile et le djihad », Le Monde 26 oct. 2019, p. 28

[69] Cette affirmation figure parmi les extraits du livre qu’elle a co-écrit, Laïcité, point !, reproduits dans Marianne 5 janv. 2018, n° 1085, pp. 23 à 25, et elle se retrouve dans l’entretien qu’elle a accordé à Gérard Biard… juste avant de « salue[r] le travail qui est mené par Jean-Michel Blanquer, parce qu’il a décidé de prendre ce sujet à bras-le-corps » (« Je veux exercer mon droit à ne pas connaître les croyances des gens », charliehebdo.fr 7 févr.) ; v. ufal.org : regrettant « que la déplorable loi Debré soit mentionnée [par Jérémie Peltier, page 37] de façon neutre, au nom de « la liberté d’enseignement » », Charles Arambourou se félicitait de l’avoir entendue reconnaître « s’être rapprochée de son co-auteur [concernant les] accompagnateurs [sic] de sorties scolaires ».

[70] Faïza Zerouala remarque son recours à des « anecdotes invérifiables » (« Voile et école : cette obsession française », Mediapart 14 oct. 2019 ; v. aussi Valentine Zuber, citée ci-après), une formule que j’employais fin 2017 à propos d’Alain Seksig (p. 475).

[71] Julien Suaudeau a titré « La laïcité kafkaïenne du professeur Blanquer », slate.fr 14 oct. 2019

[72] Ce 13 octobre, Jean-Michel Blanquer reprend aussi le procédé selon lequel ne pas interdire le foulard, ce pourrait être l’« encourage[r] » (Le Monde le 16, p. 8). Mutatis mutandis, à propos du « burkini », Frédéric Dieu, « Des questions que les femmes posent au juge », JCP A 2018, 2216, § 5 de ce texte, présenté en introduction comme posant surtout des questions ; maître des requêtes au Conseil d’État, l’auteur écrit auparavant : « Les restrictions relatives à l’accompagnement parental des sorties scolaires ne sont que des prolongements de la redéfinition du principe de laïcité dans la plupart des établissements publics d’enseignement, consacrée par la loi du 15 mars 2004 » ; dans le même sens, v. l’introduction de ma thèse, fin 2017, page 21 et « Oise : une sortie scolaire annulée à cause du voile d’une accompagnatrice », Le Figaro.fr avec AFP 15 oct. 2019 ; plutôt à cause d’une « erreur d’interprétation » d’un officier (« qui a présenté ses excuses » à cette dame, selon le vice-président LR du Conseil départemental).

[73] Dans le même sens, Jean Baubérot, « La laïcité n’a pas pour fin la neutralisation du religieux dans la sphère publique », Le Monde 6 nov. 2019, p. 29, réagissant au « débat imaginaire que Mme Ayada instaure entre M. Blanquer et un contradicteur hypothétique qui proclamerait que « le voile est souhaitable dans notre société ».

[74] Marlène Schiappa ayant pris l’habitude, depuis 2017, de revenir sur ce qu’elle a dit ou écrit auparavant, et d’abord trois ans plus tôt (v. elle.fr), il est difficile de suivre cette croyante revendiquée en l’« école publique laïque » qui, comme bien d’autres, n’a pas toujours été pratiquante (v. Claire Digiacomi, Le HuffPost 13 avr. 2018) ; en 2019, elle s’est opposé à l’humiliation des « mères publiquement devant leurs enfants » (v. Jean-Pierre Tenoux, estrepublicain.fr les 12-13 oct.), avant d’être missionnée par Stanislas Guérini, avec le député Laurent Saint-Martin, pour « pour « définir la ligne politique du parti » [en vue de r]endre compte, avant les municipales, de la philosophie laïque de LRM dans le premier numéro d’une revue éditée par le mouvement. Elle devrait pompeusement s’appeler « La Collection ». (…) « Elle ne veut surtout pas que ce soit la position très à l’anglo-saxonne du député Aurélien Taché qui l’emporte, décrypte un responsable macroniste, alors elle verrouille tout ». Comment ? En court-circuitant soigneusement le groupe d’action politique (GAP) d’une trentaine de députés censés ordonner le débat (…) » (« Laïcité : bientôt la fin d’un silence religieux », Le Canard enchaîné 22 janv. 2020, p. 2).

[75] v. Adrien Sénécat, « L’erreur de Jean-Michel Blanquer sur les « petites filles qui ne vont pas à l’école maternelle » », lemonde.fr 1er sept. 2019

[76] v. Nicolas Crozel et Zoé Ruffy, « Municipales 2020 : Caroline Abadie forme les candidats LREM à éviter les pièges du communautarisme », francebleu.fr 29 nov. 2019 : « Le risque de communautarisme, il a déjà fallu le définir » est-il écrit ; « aussi » et « un petit peu », a-t-elle a plus précisément déclaré… L’originalité du propos qui suit ne saute pas aux yeux : sans « amalgames » bien sûr, une opposition de « l’islam politique » – quant à lui même pas défini « un petit peu » – à « nos valeurs », puis la reprise d’un exemple donné le Premier ministre à l’Assemblée nationale le 15 octobre (v. Cédric Pietralunga, « Laïcité : l’exécutif en quête d’une position d’équilibre sur le voile », Le Monde le 17, p. 9) et enfin celui cité supra.

[77] v. Cédric Pietralunga, « ” Nouveau ” monde, anciennes pratiques », Le Monde 15 févr. 2019, p. 9 : « La décision, annoncée le 24 octobre [2018], de nommer Charline Avenel, une ancienne camarade de promo de l’ENA du chef de l’État, à la tête de l’académie de Versailles, la plus importante de France, a aussi beaucoup fait parler : trois semaines auparavant, le gouvernement avait fort opportunément assoupli les conditions de nomination des recteurs, en élargissant le quota réservé aux personnes non titulaires d’un doctorat, ce qui est le cas de Mme Avenel ».

[78] Valentine Zuber, « Laïcité : un vent mauvais souffle sur l’école », AOC 19 déc. 2019 (je souligne) ; « Voile à l’école : cherche-t-on à diviser pour mieux régner ? », laurent-mucchielli.org le 5 nov. : dans ce billet, l’historienne reprenait des éléments rappelés sur France culture le 25 septembre ; Guillaume Erner opposait significativement ses « rêves nostalgiques »… Le 17 octobre, le journaliste « lève le voile » ; se pourrait-il, en effet, qu’il ne soit pas la première préoccupation des personnes qui donnent de leur temps pour les enfants ? Le 31 octobre, il avait la bonne idée de se demander ce qu’en pensent « les profs » ; il aurait pu se référer à l’enquête réalisée en janvier 2018 par le Comité national d’action laïque, ou citer Catherine Da Silva : « Prétendre que les mères voilées sont un problème pour l’école me met hors de moi » (citée par Mattea Battaglia, Le Monde le 24, p. 10, en la présentant comme « l’une des rares professeures à évoquer le sujet sans réclamer l’anonymat », avant de résumer les résultats du CNAL). Il aurait pu se référer aussi à l’une des deux tribunes publiées par le même quotidien le 9, page 27 : une ancienne directrice d’école (à Bobigny) estime que « merci » est « la seule chose » que cette dernière peut dire aux bénévoles qui lui viennent en aide (Véronique Decker, « Les musulmans ont droit au même respect que les autres parents »).

[79] Avant ce nouveau développement, v. en ce sens Bernard Toulemonde, cité par Denis Peiron, La Croix 15 oct. 2019, n° 41533, p. 8 ; ici et ailleurs (v. Mattea Battaglia et Camille Stromboni, « Foulard islamique : à quoi joue Jean-Michel Blanquer ? », Le Monde le 23, p. 30), cet ancien conseiller technique du ministère – qui a été « l’un des artisans des accords » Lang-Cloupet (1992-1993) (v. Yves Verneuil, Histoire de l’éducation 2011, n° 131, mis en ligne le 1er janv. 2014, spéc. §§ 2, 28 et 35) –, évoque la position « des chefs d’établissement », comme avant 2004 : v. plutôt Françoise Lorcerie, « Les professionnels de l’école et l’affaire du voile. Des personnes très partagés sur l’incrimination du voile », in F. Lorcerie (dir.), La politisation du voile. L’affaire en France, en Europe et dans le monde arabe, L’Harmattan, 2005, p. 73, spéc. p. 90 : « Si le SNPDEN a d’emblée rejoint le camp de l’incrimination du voile ainsi que le SIEN, ce fut sans unanimité en leur sein et sans obtenir d’être suivis par leur propre fédération, l’UNSA-Education, laquelle demeura en retrait durant tout l’épisode. À l’inverse, la mouvance associative proche de l’école fut un des poumons de la contre-coalition anti-prohibitionniste, Ligue de l’enseignement et FCPE en tête ».

[80] Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed, Islamophobie…, ouvr. préc., 2016, p. 35

[81] « Macron sur l’affaire Mila : « La loi est claire : nous avons droit au blasphème, à critiquer, à caricaturer les religions » », Le Monde.fr avec AFP 12 févr. 2020 : « « L’État a pris ses responsabilités », a-t-il ajouté en référence à la solution de rescolarisation annoncée le 6 février par le ministre de l’éducation nationale ».

[82] Le Canard enchaîné 19 févr. 2020, p. 2, après s’être amusé comme suit à la Une : « Vous imaginez le général de Gaulle faire des sextapes ? » ; dans l’éditorial (« Problème d’images »), Erik Emptaz commente : « Saint Piotr est parmi nous pour moraliser la vie publique en jetant au caniveau la vie privée des politiques » ; « paradoxalement cette épreuve [, pour Benjamin Griveaux], en le rendant humain, trop humain, lui a apporté cette humanité qu’il prétendait démontrer » ces derniers temps. Après avoir évoqué les « lycéens et (surtout) les lycéennes qui vivent dans la terreur des réseaux sociaux », Michaël Foessel conclut aussi que cette séquence « l’humanise plus qu’elle ne le discrédite » (« Griveaux-Pavlenski : la morale de la transgression », liberation.fr le 20 ; v. encore la chronique de Bruno Donnet, « L’affaire Benjamin Griveaux : une semaine difficile », France inter le 21). Dénonçant « une obsession française pour l’américanisation », James McAuley, le correspondant du Washington Post à Paris, se montre au passage envieux du système de protection sociale de ce côté-ci de l’Atlantique (franceculture.fr le 18) ; aux États-Unis, « sur une chaîne “de gauche”, CNBC », un éditorialiste « compare étrangement l’éventuelle nomination de Sanders à l’effondrement de la France en 1940 (avec un scoop historique au passage, quand il affuble le président du Conseil Paul Reynaud du grade de “général”) » (Daniel Schneidermann, « La panoplie anti-Sanders », ASI le 24). La boucle est bouclée.

[83] La Constitution de 1946 est parfois citée comme repère ; deux ans plus tard avait lieu un évènement qui interpelle, d’un point de vue laïque : v. Francis Gouge, « Et si l’Europe était née dans un village de Haute-Saône ? », Le Monde.fr 23 mai 2019 (publié dans M le mag du 18, p. 78, sous le titre « Le secret de Luxeuil ») : « cette réunion [a probablement] contribué à influencer la construction européenne ».

[84] Jeanne Favret-Saada, « Une censure très politique : l’affaire de La Religieuse », AOC 20 juin 2018, signalant qu’il « ressortira en salles en version restaurée le 19 septembre » ; v. aussi son entretien avec et par Arnaud Esquerre, « Le retour de l’accusation de blasphème est une révolution dans notre vie publique », AOC 12 oct. 2019 : « Cette affaire de censure filmique constitue la violation la plus grave de la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905 jamais survenue en France : seule la haute stature du Général permet qu’aujourd’hui encore on sous-estime la portée de l’événement ». Il a conduit début 1975 à un arrêt d’Assemblée, cité dans les obs. sous CE Sect., 18 déc. 1959, Société « Les Films Lutetia » et syndicat français des producteurs et exportateurs de films, n° 71, « Police municipale – Cinéma », in Marceau Long, Prosper Weil, Guy Braibant, Pierre Delvolvé et Bruno Genevois, Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 22ème éd., 2019, p. 481, spéc. p. 487, § 7

[85] Philippe Portier, « Le général de Gaulle et le catholicisme. Pour une autre interprétation de la pensée gaullienne », Revue historique avr.-juin 1997, n° 602, p. 533, disponible sur gallica.bnf.fr, spéc. p. 561 : « Correspondance des thématiques, analogie des arguments, communauté même des lexiques. Tout nous ramène, pour la confirmer, à notre hypothèse d’origine : c’est bien dans les catégories du catholicisme romain que de Gaulle puise l’essentiel de son inspiration. Lui-même d’ailleurs n’en faisait pas mystère ».

Président du Groupe Sociétés, Religions, Laïcités (GSRL), de 2008 à 2018, le même auteur concluait alors l’un de ses textes comme suit : « Les gouvernements, de droite mais aussi de gauche (en tout cas, jusqu’à la présidence d’Emmanuel Macron, qui semble s’inscrire dans une ligne plus inclusive), en ont fait un instrument de reconfiguration de l’esprit public : elle s’agence désormais en un dispositif de diffusion de la valeur, en essayant de ramener les citoyens au bien que l’État définit » (« L’inclination identitaire de la laïcité française. Retour sur une controverse (1988-2018) », Vie sociale 2018, vol. 21, n° 1 (« Laïcité et travail social. Du principe aux pratiques »), p. 35, spéc. p. 44, en conclusion ; italiques de l’auteur, je souligne).

Photo prise personnellement il y a quelques mois ; concernant son époux, que j’évoque au troisième paragraphe de mon portrait de Flora Tristan, j’ai assisté le 13 février à une présentation de Gérard Bouchet, organisée par l’Université populaire de Romans (également dans la Drôme, 26) ; j’ai apprécié que les remarques d’actualité parsemant le propos ne fassent à aucun moment référence à Mila, ou au foulard. Et puisque j’évoque plusieurs fois dans ce billet la loi du 15 mars 2004, je renvoie à mes pp. 488-489

[86] Catherine Kintzler, « “It hurts my feelings” : l’affaire Mila et le nouveau délit de blasphème. Du respect érigé en principe, derechef », mezetulle.fr 28 janv. 2020 ; sur le site de la philosophe, l’on trouve aussi reproduite la réaction du conseiller d’État Jean-Éric Schoettl (« L’affaire Mila et la réintroduction du délit de blasphème en droit français », apparemment d’abord publiée sur egale.eu 3 févr., 5 p.) et un « Dossier Condorcet », composé à l’occasion de la publication d’un article de Charles Coutel, le 25 janvier 2020 (dans ma thèse, je le cite un peu moins qu’elle, et toujours pour m’en séparer).

[87] Intertitre souligné dans le texte de Jeanne Favret-Saada, « Les droits importuns de la citoyenne Mila », AOC 12 févr. 2020

[88] V. ainsi cette séquence instructive, relatée par Philippe Bernard, « Les Irlandais votent l’abrogation du délit de blasphème », Le Monde.fr 27 oct. 2018 : « Une autre disposition très datée de la Constitution, dont l’abrogation devait être mise aux voix le même jour, ne l’a finalement pas été. Elle dispose que « l’État reconnaît que la femme, par son travail domestique, apporte son soutien à l’État indispensable au bien commun »…

[89] Il est vrai que la mise en cause de « l’Islam politique » peut conduire à d’autres résultats : affirmer que les « droits de l’Homme » sont le problème, en même temps qu’ils seraient menacés… par une « conception quasi religieuse » qui en feraient « un outil du totalitarisme » (Bertrand Mathieu (entretien avec, par Olivia Dufour), La Gazette du palais 12 sept. 2017, n° 30, pp. 11-12).

[90] Après avoir évoqué « l’affaire Mila », le philosophe Jean-Claude Monod rappelle que le « libéralisme politique s’est originellement construit contre la prétention des Églises à se servir des moyens de coercition physique, et d’abord de ceux de l’État, pour imposer aux consciences ce qu’elles devaient penser ou la façon dont les individus devaient vivre ; cette prétention est encore vivace dans nombre de pays musulmans, comme l’Iran, aujourd’hui traversé par une profonde crise de gouvernementalité – elle ne l’est d’ailleurs pas exclusivement en faveur de l’islam [sic], mais parfois contre lui [re-sic], dans le cas des ouïghours en Chine ou des musulmans en Inde aujourd’hui, légalement discriminés pour leur foi. En Russie depuis 2013 et l’affaire des Pussy Riots il est « interdit de porter atteinte au sentiment religieux » sous peine de poursuites, etc. » (« Combattre le néolibéralisme autoritaire sans nourrir l’antilibéralisme politique », AOC 10 févr. 2020).

[91] « Mila, la lycéenne menacée, a pu reprendre les cours », huffingtonpost.fr 10 févr. 2020

[92] Mathilde Blézat, Naïké Desquesnes, Mounia El Kotni, Nina Faure, Nathy Fofana, Hélène de Gunzbourg, Marie Hermann, Nana Kinski et Yéléna Perret, Notre corps, nous-mêmes, éd. Hors d’atteinte, 2020, p. 352, avant de détailler les « outils concrets de prévention et d’autodéfense » mis en place et financés dans les pays cités (ces phrases font partie de l’extrait retenu par La rédaction de Mediapart le 19 février, à l’occasion de la publication de ce « classique féministe revisité »).

[93] Pour reprendre un bon mot à propos de la première réaction de Nicole Belloubet : « Aurait-elle confondu Vienne en Isère et Vienne en Autriche ? » (Gwénaële Calvès, « Avec l’affaire Mila, un vent mauvais s’abat sur la liberté d’expression », Le Monde 5 févr. 2020, p. 28). Dans cette tribune, la professeure s’indigne de « l’ouverture d’une enquête préliminaire, le 23 janvier, (…) clôturée le 30 » – sept jours plus tard, donc –, au motif que « le procureur ne pouvait pas ignorer qu’elles le mèneraient tout droit dans un cul-de-sac », « la « provocation à la haine » devant se présenter sous la forme d’une exhortation, et non de l’expression d’une opinion personnelle ». Et d’écrire, dans le prolongement de ses précédents travaux : « Un « effet Strasbourg » nous semble plus plausible ». Parmi les arrêts de la Cour qui sont critiqués – au conditionnel – figure celui rendu « contre une formation de militants politiques dénonçant les « tendances pédophiles » de Mahomet (E.S. c. Autriche, 25 octobre 2018) ». Beaucoup commenté (v. Mustapha Afroukh, « Non, la Cour européenne des droits de l’homme n’a pas reconnu l’existence d’un délit de blasphème ! », RDLF 2018, chron. n° 23), il est anonymisé mais « le Gatestone institute révèle qu’il s’agit d’Elisabeth Sabaditsch-Wolff, une conférencière critique de l’Islam et proche du parti d’extrême-droite autrichien FPÖ », qui « avait été condamnée en février 2011 » par un tribunal autrichien (Jacques Pezet, « La CEDH a-t-elle validé la condamnation d’une femme autrichienne pour blasphème contre Mahomet ? »,Libération.fr 2 nov. 2018). Depuis lors, il n’y « fait pas bon être musulman »·e (Blaise Gauquelin, lemonde.fr 17 mai 2019) et il n’est pas sûr qu’elle aurait été poursuivie ; je ne suis pas certain qu’il faille s’en retrouver rassuré·e…

[94] Pour qui voudrait bien en voir une autre, dans cette même agglomération de Vienne, v. Yann Gonon, « Bus caillassés à Pont-Évêque (Isère), la desserte du quartier du Plan des Aures modifiée pour raison de sécurité », francetvinfo.fr 5 nov. 2019 : cela avait déjà été décidé fin 2017, et j’ai trouvé ce lien en en recherchant un autre, à propos de la ville où j’ai grandi, et de l’une dans lesquelles j’enseigne – de nouveau – cette année : sur son site, toute une page est consacrée au « processus de transformation urbaine » des « quartiers du Plan et de Fontbarlettes (Hauts de Valence) », avant de vanter ces « grands axes de communication de la Ville » ; le maire et le président de la communauté d’agglomération Valence Agglo – Sud Rhône-Alpes – en la même personne de Nicolas Daragon, candidat à sa réélection – sont manifestement moins diserts, voire observent un total silence (religieux ?), pour justifier qu’une décision qui peut se comprendre pour quelques jours, soit prise à intervalles réguliers dans certains quartiers (Willy Moreau, « Des bus du réseau Citéa déviés à cause d’incivilités répétées », francebleu.fr 16 oct. 2019 ; « Valence – Le quartier de Fontbarlettes privé de bus à partir de 17h30 », peuple-libre.fr 28 févr. 2020). Je remercie les étudiantes et autres personnes qui m’ont donné des informations sur cette situation, les premières – qui y habitent – peu de temps après que nous avons traité des « lois » du service public ; il s’agit d’une atteinte à deux d’entre elles – les principes de continuité et d’égalité – comme à certains droits : à la liberté d’aller et de venir, à l’emploi, à l’éducation, à la culture, aux loisirs, etc.

[95] Dr Kpote, « Mila gate, une question de doigté », Causette mars 2020, n° 109, pp. 58-59 : « Le petit pas de côté, l’humour, permet souvent de dépassionner les échanges avec les ados », donc aussi peut-être avec les adultes : « Un doigt fourré dans le cul comme ça, à l’arrache, et « merci au revoir », ça ne se fait pas, Mila. (…) Le lendemain de cette affaire, un jeune novice de l’Islam » a posé à l’auteur « une question révélatrice de cette génération pour qui il faut en être. L’« agnostiphobie » gagne chaque jour du terrain sans que personne ne s’émeuve de cette discrimination. Sheitan en diable, j’ai eu une illumination : « Je ne suis pas chrétien, mais Stéphanois ! ». Devant l’air dubitatif de la classe, j’ai développé : « Le Stéphanois n’a qu’une religion, le foot. Et un seul Dieu, Dominique Rocheteau » ».

Nicole Fontaine (16 janv. 1942-17 mai 2018), l’enseignement catholique et la Charte des droits fondamentaux

Photo ajoutée le 9 nov. 2019 (fondationscelles.org 24 mai 2018)

Jean-Pierre Stroobants signale le décès de « Nicole Fontaine. Ancienne présidente du Parlement européen » (Le Monde 22 mai 2018, p. 15) ; il note qu’elle « connut trois vies. Une de responsable de l’enseignement catholique, une autre de ministre et une troisième, la plus importante sans doute à ses yeux, d’élue européenne. (…) Licenciée à 20 ans, diplômée ensuite de Sciences Po Paris, elle décroche en 1969 un doctorat d’Etat en droit public pour une thèse sur l’application de la loi Debré, qui avait institué le régime de ­contrats entre l’Etat et les établissements privés d’enseignement. Pendant vingt ans, elle sera la responsable des relations entre ces derniers et les pouvoirs publics. Son combat pour l’école catholique allait se poursuivre après l’élection de M. Mitterrand et la mobilisation contre le projet de loi Savary sur l’école privée, finalement retiré et jamais réintroduit. (…) Emmanuel Macron a salué, vendredi 18 mai, une femme « qui, pendant trente-cinq ans de sa vie, aura mené le combat de la construction européenne », dans la « grande tradition de la démocratie chrétienne » ».

Entrer son nom conduit à un certain nombre de résultats dans ma thèse ; en l’indiquant avec son prénom, à une dizaine : ils sont répartis entre les première et seconde partie, à propos de la liberté de l’enseignement et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (qui affirme le droit à l’éducation).

In memoriam Linda Brown, écolière particulière (20 févr. 1942-25 mars 2018)

« Linda Brown en mai 1964 devant la Sumner School de Topeka, qui l’avait refusée en 1951 » (nouvelobs.com, AP/SIPA)

« Linda Brown est morte à 76 ans, a rapporté lundi 26 mars le Topeka Capital-Journal », indique Le Monde.fr, le 27 ; elle est connue pour avoir donné son nom à un important arrêt de la Cour suprême des Etats-Unis, le 17 mai 1954, ainsi que le rappelle aussi cette brève vidéo de Brut (v. plus largement cet article de Chloé Leprince, « Rosa Parks ou Linda Brown : des victoires et pourtant, la ségrégation raciale… », franceculture.fr).

Fréquemment cité par les juristes français (v. par exemple la thèse de Stéphane Caporal, L’affirmation du principe d’égalité dans le droit public de la Révolution française (1789-1799), Economica, 1995, p. 285, en conclusion), cet arrêt est qualifié de « célébrissime » par Stéphanie Hennette-Vauchez et Vincent Valentin (L’affaire Baby Loup et la nouvelle laïcité, LGDJ Lextenso, 2014, p. 63, avant de citer page suivante l’article d’Hourya Bentouhami, « « Le cas de Little Rock. Hannah Arendt et Ralph Ellison sur la question noire », Tumultes 2008/1, n° 30, p. 161) ; pour un billet décalé par rapport à l’« historiographie traditionnelle », v. Olivier Esteves, « Babylon By Bus ? Combattre la ségrégation scolaire aux États-Unis », 22 avr. 2014 (le 23, il rappelait que « contrairement aux États-Unis, le busing anglais était unidirectionnel »).

Le décès de Linda Brown intervient quelques jours seulement après la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, le 21 mars – en mémoire du massacre de Sharpeville –, depuis une proclamation de l’Assemblée générale des Nations Unies le 26 octobre 1966. Près d’un an plus tôt, elle avait adopté une Convention qui affirme le « droit à l’éducation et à la formation professionnelle » (v. ma thèse pp. 784-785 ; l’expression soulignée peut servir d’entrée pour d’autres développements) ; présentant la « Semaine d’éducation et d’actions contre le racisme et l’antisémitisme », le site du ministère choisit d’indiquer « que la loi du 8 juillet 2013 a réaffirmé avec force la mission de l’école de faire acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité » (souligné dans le texte ; à propos de cette loi dite Peillon, v. pp. 1055 et s. La liberté évoquée constitue l’une des références alternatives au droit à l’éducation ; elle fait donc l’objet d’un des chapitres de la première partie, pp. 299 et s.).

L’écrivain James Baldwin, chez lui à New York, en 1972. JACK MANNING / THE NEW YORK TIMES-REDUX-REA ; Virginie Despentes, « James Baldwin, le cœur grand ouvert », lemonde.fr25 déc. 2019 (Le Monde des Livres du 27, à la Une)

Ajout le 10 septembre 2018, pour signaler un dossier sur une « figure du combat pour les droits civiques (…) qui par ses essais, par ses romans, ses multiples interventions, conférences, interviews, témoigna avec une vibrante intensité de l’oppression vécue dans les corps et les esprits, dans les quartiers et les écoles » (« James Baldwin : le feu, le sexe, la race », Le Matricule des Anges. Le mensuel de la littérature contemporaine juill.-août 2018, n° 195, pp. 14 à 25) ; Valérie Nigdélian écrit aussi que c’est alors que « les premiers enfants noirs entraient dans l’école blanche – sous solide escorte policière » qu’il retourna aux Etats-Unis, « avant de retrouver définitivement le sol français en 1970, à Saint-Paul-de-Vence, où il vécut jusqu’à sa mort, le 1er décembre 1987 » (p. 18 ; v. aussi à son propos le dernier entretien avec Virginie Bloch-Lainé de Raoul Peck, dans l’émission A voix nue le 31 août 2018).

Ajout le 5 octobre 2018, avec cet article signalant que Mary McLeod Bethune (1875-1955), « connue pour son rôle d’éducatrice auprès des jeunes filles noires au temps de la ségrégation, aura bientôt sa sculpture au Capitole, à Washington » (Stéphanie Le Bars, « Statue sociale », Le Monde p. 14).

Ajouts au 5 novembre 2018 : dans un livre publié il y a un an sous sa co-direction, Hourya Bentouhami introduisait à la traduction d’un commentaire publié dans la Harvard Law Review 1980 par le « premier noir américain » doyen d’Université (« Le droit : une question de principes ? Vers une approche matérialiste des décisions juridiques », in H. Bentouhami et M. Möschel (dir.), Critical Race Theory. Une introduction aux grands textes fondateurs, Dalloz, 2017, p. 45). Derrick A. Bell jr. faisait observer que « la décision [rendue en 1954] aida à revêtir d’une crédibilité immédiate la lutte américaine contre les pays communistes pour gagner les cœurs et les esprits des peuples émergents des pays du Tiers-monde. Du moins cet argument fut-il avancé par les avocats à l’attention à la fois du NAACP et du gouvernement fédéral » (« Brown c/ Board of Education et le dilemme de la convergence d’intérêts », p. 56, spéc. p. ; v. aussi le texte préc., p. 47 ; évoquant l’amicus curiae de l’administration Eisenhower, v. plus récemment Guillaume Tusseau, RFDA 2013, p. 679).

Quelques années plus tôt, lors de l’élaboration de la DUDH, M. Pavlov remarquait « que, dans un très grand nombre de pays, le droit à l’éducation est, en fait, très limité. La population de couleur des Etats-Unis et la population autochtone des pays orientaux sont en majeure partie illettrées » ; cela contraignait Mme Roosevelt à réagir à la séance suivante, pour contredire le « représentant de l’URSS [qui] a soutenu que l’amendement proposé par la délégation des Etats-Unis tendait à refuser aux personnes de couleur l’égalité en matière de droit à l’éducation » (Assemblée générale, Troisième Commission, Comptes rendus analytiques de la 3ème session (du 30 sept. au 7 déc. 1948, Paris), 147e séance (vendredi 19 nov. 1948), A/C.3/SR.147, p. 586, spéc. p. 588 et 148e séance (vendredi 19 nov. 1948), A/C.3/SR.148, p. 600 ; Eleanor Roosevelt est cité dans ma thèse à plusieurs reprises – à partir de la page 727 – et M. Pavlov pp. 738 et 1033).

Kimberlé Crenshaw, « L’urgence de l’intersectionnalité », ted.com 14 nov. 2016

Le même ouvrage comprend un article plus récent, introduit par Stéphanie Hennette Vauchez (« La régulation juridique du fait religieux : comment lire l’interdiction du voile au prisme du Critical Race Feminism ? », p. 343, notant que « l’appellation (…) est revendiquée »), laquelle rappelle notamment la « forte opinion dissidente » de la juge Françoise Tulkens (p. 348 ; v. ma thèse pp. 385, 447, 481, 491, 837 et s., et 959-960). Sa conclusion est « que l’intérêt du texte ici traduit tient dans le renouvellement du regard qu’il permet sur des questions comme celles de la laïcité – renouvellement qui reste largement à faire, ou à venir, dans l’analyse juridique française », pour peu qu’elle se veuille « contextualisée » (pp. 355 et 352). En 2005-2006, Adrien Katherine Wing et Monica Nigh Smith réagissaient à l’adoption de la loi n° 2004-22 du 15 mars 2004 (« Le Critical Race Feminism lève le voile : femmes musulmanes, France et l’interdiction du port du voile », p. 356). En renvoyant à un « article célèbre » de Kimberlé Crenshaw, la professeure et l’avocate avançaient que l’interdiction qu’elle prévoit « illustre la nature intersectionnelle et multiplicative des discriminations qu’elle implique potentiellement » (p. 359 ; à ce propos, v. la première actualisation de ce billet). Leur propre « article concentre l’essentiel de son attention au regard que portent les femmes musulmanes sur le foulard » (p. 375).

Ajout au 23 décembre 2018 : au moment de la publication de son ouvrage The ‘desegregation’ of English schools. Bussing, race and urban space, 1960s–80s (Manchester University Press), Olivier Esteves recense celui de Matthew Delmont (v. sur le site de Laurent Mucchielli, « Genèse de la révolution conservatrice américaine : les mobilisations blanches contre le busing », 7 déc. 2018).

Ajout des illustrations au 29 décembre 2019.

In memoriam Asma Jahangir, rapporteure onusienne (27 janv. 1952-11 févr. 2018)

Isabelle Mourgere, « Asma Jahangir : mort d’une défenseure acharnée des droits humains », tv5monde.com 13 févr. 2018

Julien Bouissou signale le décès d’Asma Jahangir, qui fût rapporteure « spéciale des Nations unies sur les exécutions sommaires de 1998 à 2004, et sur la liberté de religion de 2004 à 2010 » (Le Monde 17 févr. 2018, p. 19).

Dans ma thèse, en note de bas de page 961, je m’appuyais sur son Rapport présenté suite à sa mission en France (18-29 sept. 2005, Soixante-deuxième session de la Commission des droits de l’Homme, E/CN.4/2006/5/Add.4), 8 mars 2006, §§ 63 et 66 ; il est intéressant de remarquer que la notice nécrologique précitée ne revient pas sur cette mise en cause de l’application de la loi française du 15 mars 2004.

A l’approche des élections générales pakistanaises (fin juillet), Julien Bouissou rappelle ce qu’elle déclarait au magazine New Yorker en 2007 : « Je demande toujours aux islamistes : “Quelle justice voulez-vous ?” (…) Regardez comment la charia est appliquée de manière sélective. Quand Zia Ul-Haq a commencé sa politique d’islamisation, celle-ci ciblait d’abord les femmes, les non-musulmans et les pauvres. (…) Elle n’a jamais été utilisée contre les élites (…)” ».

Le journaliste d’ajouter plus loin : « ” Ce qui est tragique, c’est que Jahangir est morte au moment où le Pakistan a peut-être le plus besoin d’elle, regrette Omar Waraich, directeur adjoint d’Amnesty International en Asie du Sud. Les défenseurs des droits de l’homme ne sont plus battus en pleine rue, comme ce fut le cas au temps de Musharraf. Ils sont soumis à une surveillance accrue sur Internet, et si nécessaire, “enlevés”.” Mardi 13 février, une foule immense s’est réunie pour assister à ses funérailles. ” Qui parlera désormais en notre nom ? “, s’est inquiétée Mukhtar Mai, une militante pakistanaise des droits des femmes qui survécut à un viol collectif en 2002 ».

Ajout de l’illustration au 29 décembre 2019.