In memoriam Linda Brown, écolière particulière (20 févr. 1942-25 mars 2018)

« Linda Brown en mai 1964 devant la Sumner School de Topeka, qui l’avait refusée en 1951 » (nouvelobs.com, AP/SIPA)

« Linda Brown est morte à 76 ans, a rapporté lundi 26 mars le Topeka Capital-Journal », indique Le Monde.fr, le 27 ; elle est connue pour avoir donné son nom à un important arrêt de la Cour suprême des Etats-Unis, le 17 mai 1954, ainsi que le rappelle aussi cette brève vidéo de Brut1V. plus largement cet article de Chloé Leprince, « Rosa Parks ou Linda Brown : des victoires et pourtant, la ségrégation raciale… », franceculture.fr 27 mars 2018. Fréquemment cité par les juristes français2V. par exemple la thèse de Stéphane Caporal, L’affirmation du principe d’égalité dans le droit public de la Révolution française (1789-1799), Economica, 1995, p. 285 (en conclusion)., cet arrêt est qualifié de « célébrissime » par Stéphanie Hennette-Vauchez et Vincent Valentin3L’affaire Baby Loup et la nouvelle laïcité, LGDJ Lextenso, 2014, p. 63, avant de citer page suivante l’article d’Hourya Bentouhami, « Le cas de Little Rock. Hannah Arendt et Ralph Ellison sur la question noire », Tumultes 2008/1, n° 30, p. 161 ; pour un billet décalé par rapport à l’« historiographie traditionnelle », v. Olivier Esteves, « Babylon By Bus ? Combattre la ségrégation scolaire aux États-Unis », 22 avr. 2014 (le 23, il rappelait que « contrairement aux États-Unis, le busing anglais était unidirectionnel »). Ajout au 23 décembre 2018 : au moment de la publication de son ouvrage The ‘desegregation’ of English schools. Bussing, race and urban space, 1960s–80s (Manchester University Press), l’auteur recense celui de Matthew Delmont (v. sur le site de Laurent Mucchielli, « Genèse de la révolution conservatrice américaine : les mobilisations blanches contre le busing », 7 déc. 2018)..

Le décès de Linda Brown intervient quelques jours seulement après la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale, le 21 mars – en mémoire du massacre de Sharpeville –, depuis une proclamation de l’Assemblée générale des Nations Unies le 26 octobre 1966.

Près d’un an plus tôt, elle avait adopté une Convention qui affirme le « droit à l’éducation et à la formation professionnelle » (v. ma thèse pp. 784-785 ; l’expression discrimination raciale peut servir d’entrée pour d’autres développements) ; présentant la « Semaine d’éducation et d’actions contre le racisme et l’antisémitisme », le site du ministère choisit d’indiquer « que la loi du 8 juillet 2013 a réaffirmé avec force la mission de l’école de faire acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité » (souligné dans le texte ; à propos de cette loi dite Peillon, v. pp. 1055 et s. La liberté évoquée constitue l’une des références alternatives au droit à l’éducation ; elle fait donc l’objet d’un des chapitres de la première partie, pp. 299 et s.).

L’écrivain James Baldwin, chez lui à New York, en 1972. JACK MANNING / THE NEW YORK TIMES-REDUX-REA ; Virginie Despentes, « James Baldwin, le cœur grand ouvert », lemonde.fr25 déc. 2019 (Le Monde des Livres du 27, à la Une)

Ajout le 10 septembre 2018, pour signaler un dossier sur une « figure du combat pour les droits civiques (…) qui par ses essais, par ses romans, ses multiples interventions, conférences, interviews, témoigna avec une vibrante intensité de l’oppression vécue dans les corps et les esprits, dans les quartiers et les écoles »4« James Baldwin : le feu, le sexe, la race », Le Matricule des Anges. Le mensuel de la littérature contemporaine juill.-août 2018, n° 195, pp. 14 à 25 ; Valérie Nigdélian écrit aussi que c’est alors que « les premiers enfants noirs entraient dans l’école blanche – sous solide escorte policière » que James Baldwin retourna aux États-Unis, « avant de retrouver définitivement le sol français en 1970, à Saint-Paul-de-Vence, où il vécut jusqu’à sa mort, le 1er décembre 1987 »5Dossier préc., p. 18 ; v. aussi à son propos le dernier entretien avec Virginie Bloch-Lainé de Raoul Peck, dans l’émission A voix nue le 31 août 2018.

Ajout le 5 octobre 2018, avec cet article signalant que Mary McLeod Bethune (1875-1955), « connue pour son rôle d’éducatrice auprès des jeunes filles noires au temps de la ségrégation, aura bientôt sa sculpture au Capitole, à Washington »6Stéphanie Le Bars, « Statue sociale », Le Monde 5 oct. 2018, p. 14.

Ajouts au 5 novembre 2018 : dans un livre publié il y a un an sous sa co-direction, Hourya Bentouhami introduisait à la traduction d’un commentaire publié dans la Harvard Law Review 1980 par le « premier noir américain » doyen d’Université7« Le droit : une question de principes ? Vers une approche matérialiste des décisions juridiques », in H. Bentouhami et M. Möschel (dir.), Critical Race Theory. Une introduction aux grands textes fondateurs, Dalloz, 2017, p. 45. Derrick A. Bell jr. faisait observer que « la décision [rendue en 1954] aida à revêtir d’une crédibilité immédiate la lutte américaine contre les pays communistes pour gagner les cœurs et les esprits des peuples émergents des pays du Tiers-monde. Du moins cet argument fut-il avancé par les avocats à l’attention à la fois du NAACP et du gouvernement fédéral »8« Brown c/ Board of Education et le dilemme de la convergence d’intérêts », p. 56, spéc. p. ; v. aussi le texte préc., p. 47 (évoquant l’amicus curiae de l’administration Eisenhower, v. plus récemment Guillaume Tusseau, RFDA 2013, p. 679)..

Quelques années plus tôt, lors de l’élaboration de la DUDH, M. Pavlov remarquait « que, dans un très grand nombre de pays, le droit à l’éducation est, en fait, très limité. La population de couleur des États-Unis et la population autochtone des pays orientaux sont en majeure partie illettrées » ; cela contraignait Mme Roosevelt à réagir à la séance suivante, pour contredire le « représentant de l’URSS [qui] a soutenu que l’amendement proposé par la délégation des États-Unis tendait à refuser aux personnes de couleur l’égalité en matière de droit à l’éducation »9Assemblée générale, Troisième Commission, Comptes rendus analytiques de la 3ème session (du 30 sept. au 7 déc. 1948, Paris), 147e séance (vendredi 19 nov. 1948), A/C.3/SR.147, p. 586, spéc. p. 588 et 148e séance (vendredi 19 nov. 1948), A/C.3/SR.148, p. 600 ; Eleanor Roosevelt est cité dans ma thèse à plusieurs reprises – à partir de la page 727 – et M. Pavlov pp. 738 et 1033.

Kimberlé Crenshaw, « L’urgence de l’intersectionnalité », ted.com 14 nov. 2016

Le même ouvrage comprend un article plus récent, introduit par Stéphanie Hennette Vauchez10« La régulation juridique du fait religieux : comment lire l’interdiction du voile au prisme du Critical Race Feminism ? », p. 343, notant que « l’appellation (…) est revendiquée »., laquelle rappelle notamment la « forte opinion dissidente » de la juge Françoise Tulkens11Stéphanie Hennette Vauchez, art. préc., p. 348 ; v. ma thèse pp. 385, 447, 481, 491, 837 et s., et 959-960. Sa conclusion est « que l’intérêt du texte ici traduit tient dans le renouvellement du regard qu’il permet sur des questions comme celles de la laïcité – renouvellement qui reste largement à faire, ou à venir, dans l’analyse juridique française », pour peu qu’elle se veuille « contextualisée »12Art. préc., pp. 355 et 352. En 2005-2006, Adrien Katherine Wing et Monica Nigh Smith réagissaient à l’adoption de la loi n° 2004-22 du 15 mars 200413« Le Critical Race Feminism lève le voile : femmes musulmanes, France et l’interdiction du port du voile », p. 356. En renvoyant à un « article célèbre » de Kimberlé Crenshaw, la professeure et l’avocate avançaient que l’interdiction qu’elle prévoit « illustre la nature intersectionnelle et multiplicative des discriminations qu’elle implique potentiellement »14Art. préc., p. 359 (à ce propos, v. la première actualisation de ce billet).. Leur propre « article concentre l’essentiel de son attention au regard que portent les femmes musulmanes sur le foulard »15Art. préc., p. 375.

Ajout des illustrations le 29 décembre 2019, en basculant en notes certaines formules (initialement entre parenthèses) le samedi 22 mars 2025.

Notes

1 V. plus largement cet article de Chloé Leprince, « Rosa Parks ou Linda Brown : des victoires et pourtant, la ségrégation raciale… », franceculture.fr 27 mars 2018
2 V. par exemple la thèse de Stéphane Caporal, L’affirmation du principe d’égalité dans le droit public de la Révolution française (1789-1799), Economica, 1995, p. 285 (en conclusion).
3 L’affaire Baby Loup et la nouvelle laïcité, LGDJ Lextenso, 2014, p. 63, avant de citer page suivante l’article d’Hourya Bentouhami, « Le cas de Little Rock. Hannah Arendt et Ralph Ellison sur la question noire », Tumultes 2008/1, n° 30, p. 161 ; pour un billet décalé par rapport à l’« historiographie traditionnelle », v. Olivier Esteves, « Babylon By Bus ? Combattre la ségrégation scolaire aux États-Unis », 22 avr. 2014 (le 23, il rappelait que « contrairement aux États-Unis, le busing anglais était unidirectionnel »). Ajout au 23 décembre 2018 : au moment de la publication de son ouvrage The ‘desegregation’ of English schools. Bussing, race and urban space, 1960s–80s (Manchester University Press), l’auteur recense celui de Matthew Delmont (v. sur le site de Laurent Mucchielli, « Genèse de la révolution conservatrice américaine : les mobilisations blanches contre le busing », 7 déc. 2018).
4 « James Baldwin : le feu, le sexe, la race », Le Matricule des Anges. Le mensuel de la littérature contemporaine juill.-août 2018, n° 195, pp. 14 à 25
5 Dossier préc., p. 18 ; v. aussi à son propos le dernier entretien avec Virginie Bloch-Lainé de Raoul Peck, dans l’émission A voix nue le 31 août 2018
6 Stéphanie Le Bars, « Statue sociale », Le Monde 5 oct. 2018, p. 14
7 « Le droit : une question de principes ? Vers une approche matérialiste des décisions juridiques », in H. Bentouhami et M. Möschel (dir.), Critical Race Theory. Une introduction aux grands textes fondateurs, Dalloz, 2017, p. 45
8 « Brown c/ Board of Education et le dilemme de la convergence d’intérêts », p. 56, spéc. p. ; v. aussi le texte préc., p. 47 (évoquant l’amicus curiae de l’administration Eisenhower, v. plus récemment Guillaume Tusseau, RFDA 2013, p. 679).
9 Assemblée générale, Troisième Commission, Comptes rendus analytiques de la 3ème session (du 30 sept. au 7 déc. 1948, Paris), 147e séance (vendredi 19 nov. 1948), A/C.3/SR.147, p. 586, spéc. p. 588 et 148e séance (vendredi 19 nov. 1948), A/C.3/SR.148, p. 600 ; Eleanor Roosevelt est cité dans ma thèse à plusieurs reprises – à partir de la page 727 – et M. Pavlov pp. 738 et 1033
10 « La régulation juridique du fait religieux : comment lire l’interdiction du voile au prisme du Critical Race Feminism ? », p. 343, notant que « l’appellation (…) est revendiquée ».
11 Stéphanie Hennette Vauchez, art. préc., p. 348 ; v. ma thèse pp. 385, 447, 481, 491, 837 et s., et 959-960
12 Art. préc., pp. 355 et 352
13 « Le Critical Race Feminism lève le voile : femmes musulmanes, France et l’interdiction du port du voile », p. 356
14 Art. préc., p. 359 (à ce propos, v. la première actualisation de ce billet).
15 Art. préc., p. 375

Une laïcité vendéenne ?

Illustration empruntée à ©JPY, « La Roche sur Yon : La crèche de Noël de l’Hôtel du Département définitivement validée par la Justice », actu.fr 6 oct. 2017 (article réagissant à l’arrêt d’appel)

Dans une décision récente (CE, 14 févr. 2018, Fédération de la libre pensée de Vendée, n° 416348), le Conseil d’État a refusé l’admission d’un pourvoi en cassation formé contre un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes. Cette dernière a en effet admis l’« installation temporaire, qui résulte d’un usage culturel local et d’une tradition festive » – une tradition assez relative, « depuis plus de 20 ans »… – d’une crèche de Noël dans les locaux ouverts au public de l’hôtel du département de la Vendée (CAA Nantes, 6 oct. 2017, n° 16NT03735, cons. 4 ; AJDA 2017, p. 1918, obs. de Marie-Christine de Montecler, intitulées « Crèches : à Nantes, c’est oui, à Lyon, c’est non »).

Tout comme il aurait été peu probable – mais non moins discutable – qu’il renvoie la question prioritaire de constitutionnalité que le tribunal administratif de Lyon a refusé de lui soumettre la veille de cet arrêt (v. la note de Paul-Maxence Murgue-Varoclier, publiée sur le site de l’Association LYOnnaise de Droit Administratif : Alyoda 2018, n° 1), le Conseil d’État se retranche derrière la « [p]rocédure d’admission des pourvois en cassation », mise en exergue dans un encadré (> Lire le communiqué). Le même jour, il procède à l’identique en rejetant le pourvoi de la Ligue des droits de l’Homme (> Lire le communiqué). L’association laïque reprochait à la Cour administrative d’appel de Marseille une « dénaturation des pièces du dossier » avec son arrêt n° 17MA01337 du 3 juillet 2017 (comparer le considérant 4 et, à l’époque, cet article de Guillaume Gendron, « Au tribunal, “l’affaire lamentable” de Sisco ramenée aux faits », Libération.fr 18 août 2016).

L’actualité juridique. Droit administratif rend brièvement compte de ces deux décisions dans son numéro 6 du 19 février, avant de résumer l’arrêt n° 17DA00054 du 16 novembre 2017, rendu par la Cour administrative d’appel de Douai (v. respectivement AJDA 2018, pp. 304, 308 et 312). En définitive, ce qui méconnaît l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 dans la commune d’Hénin-Beaumont reste permis par l’interprétation du Conseil d’État dans le département de la Vendée.

Capture d’écran depuis l’article de Joël Bigorgne, « Il y a quinze ans, le logo vendéen faisait polémique », ouest-france.fr 19 déc. 2014

Il est intéressant de rapprocher cette (non-)décision d’un autre arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Nantes, le 11 mars 1999 à propos de la laïcité scolaire (pp. 331-332). L’accumulation des décisions conduit à se demander s’il ne faudra pas à terme ajouter un nouvel idéaltype aux « laïcités françaises » identifiées par Jean Baubérot (éd. MSH, 2015).

Ajout au 15 mai 2018, pour cet extrait d’un entretien avec Jean-Éric Schoettl – commenté sur d’autres points et ce jour, dans ce (long) billet –, « La laïcité en questions », Constitutions 2017 p. 19 : « Il est depuis longtemps admis en France, ce qui la distingue là encore des pays voisins, qu’aucun crucifix ne doit être accroché aux murs des écoles publiques »…

Ajouts au 3 juin 2018, avec d’abord un entretien avec Jean-Baptiste Jacquin de Jean-Marc Sauvé (« La société est divisée, voire fracturée », Le Monde 30 avr. 2018, p. 6) : à l’heure de quitter ses fonctions, le vice-président du Conseil d’État attribue en toute tranquillité le « retour des tensions sur les manifestations des cultes historiques, notamment du culte catholique », à l’« émergence de l’islam ».

Capture d’écran depuis l’émission de Cotentin et Usul, « 5G : un débit en débat », Mediapart 5 oct. 2020 ; « Quand [Macron] désigne » des religieux (aux États-Unis ? v. Louis Fraysse, « Qui sont les amish ? », reforme.net 31 déc. 2019-15 sept. 2020), les défenseurs de la laïcité française (historique) regardent Fourvière ; tout ça pour renvoyer à mon billet du 31 janv., à la note n° 33

Quelques jours plus tard, ensuite, le « Ministre des cultes (…) oppose le voile à la “société française” » (Lénaïg Bredoux et Faïza Zerouala, Mediapart 18 mai 2018, actualisé le 20 : « “C’est du prosélytisme”, a-t-il encore affirmé, parlant également de “provocation”. (…) Sur la laïcité, Gérard Collomb, longtemps élu à Lyon où l’empreinte catholique est forte, avait plutôt la réputation d’être en phase avec la ligne d’Emmanuel Macron, celle d’une « “conception apaisée”. “Je ne suis pas de ceux qui veulent reléguer les religions dans la sphère de l’intime, expliquait-il en 2013 devant le premier synode de l’Église protestante unie de France. Je crois au contraire qu’elles ont toute leur place dans la vie de la cité”. Une conception qui ne vaut manifestement plus, à ses yeux, pour l’islam »). V. à ce sujet cet article de Frantz Durupt (« Voile, “islamisme”… de Mennel à Maryam Pougetoux, des polémiques et des méthodes qui se répètent », Libération.fr 14 mai 2018) et ce thread Twitter d’Anaïs Leleux ; v. encore le texte du président d’honneur de la LDH Michel Tubiana, cité dans mon billet sur les sorties scolaires in fine.

Cette information enfin de Bruno Bouvet, « Des crucifix imposés dans les établissements publics de Bavière », La Croix.com avec AFP 3 juin 2018, avec ce rappel : « Des crucifix prennent déjà place dans les salles de classe des écoles primaires et les salles d’audience des tribunaux bavarois » (à propos de la situation allemande, v. ma thèse, pp. 373 et s. ; suivent pp. 380 et s. des développements sur les arrêts Lautsi contre Italie ; rendus en 2009 et 2011 par la Cour européenne des droits de l’Homme, ils sont aussi abordés pp. 849 et s. du point de vue de celui à l’instruction, garanti par l’article 2 du premier protocole à la Convention).

Ajout au 9 décembre 2018 (au détour de mon billet sur les laïcités-séparation), avec un jugement montrant comment l’interdit posé par l’article 28 de la loi de 1905 est, depuis les arrêts d’Assemblée du 9 nov. 2016 (n° 395122 et 395223), facilement tourné : TA Lyon, 22 nov. 2018, LDH, n° 1709278 ; dalloz-actualite.fr du 30 (extrait), obs. Emmanuelle Maupin, « Les crèches installées en région Auvergne-Rhône-Alpes sont culturelles » (reprises à l’AJDA du 3 déc., p. 2322). . Peu de temps après avoir renouvelé sa décision, fin 2017, Laurent Wauquiez allait présider Les Républicains ; en 2003, il avait participé, en tant qu’auditeur au Conseil d’État, aux travaux de la Commission Stasi : elle avait d’autres propositions que d’installer des crèches de Noël.

Ajout fin avril 2025 de mon billet du 11 novembre 2024 (Jours fériés : l’approche laïque chassée par l’appel à la « solidarité »), près d’un an après avoir remplacé les premiers liens par d’autres actifs (ce à quoi oblige régulièrement les sites des juridictions…), à l’occasion d’une relecture en parcourant la thèse d’Hugo Avvenire, durant le dernier week-end de juillet 2024 (v. aussi l’actualisation de mon billet du 15 mai ; dans ses développements sur « les crèches de Noël dans les espaces publics », aux §§ 550 et s., il signale en note de bas de page 242 [n° 1091] un arrêt sanctionnant la présence d’« une statue de Saint Michel implantée sur une place publique, érigée auparavant pour une école confessionnelle » : CAA Nantes, 16 septembre 2022, Fédération de Vendée de la libre pensée, n° 22NT00333, points 9 et suivants). C’est également à cette date que j’ai ajouté les illustrations ci-dessus et je termine en attirant l’attention sur le point 5° d’un communiqué publié une semaine avant (fnlp.fr/2024/07).

Foulard et accompagnatrices de sorties scolaires

Capture d’écran de cette vidéo disponible sur YouTube depuis le 16 janvier 2018 (réalisée le 11 janvier 2025)

Le Cercle des enseignant·es laïques, en partenariat avec le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), a réalisé un bref support pédagogique intitulé « Laïcité et sorties scolaires » (v. ci-contre). Les étapes qui y sont rappelées sont analysées dans ma thèse pp. 404-405 et 516 à 520 ; la page suivante permet de situer le propos (conclusion du chapitre 2 du titre consacré aux libertés publiques comme alternatives au droit à l’éducation).

Interdire le foulard aux accompagnatrices de sorties scolaires ne sert pas la réalisation du droit à l’éducation, dont l’affirmation fait l’objet de ma seconde partie (pp. 627 et s.) ; comme d’autres restrictions, celles que s’autorisent encore certains établissements – publics comme privés (v. l’ordonnance signalée en note de bas de page 609) – pourraient être considérées comme portant atteinte à l’obligation internationale de faciliter l’exercice de ce droit (pp. 1180 et s.).

Photo issue du site newsestlyonnais.fr ; « Meyzieu a gagné plus de 5000 habitants en une dizaine d’années, Saint-Priest près de 7000 et Vaulx-en-Velin presque 10 000 » ; Annemasse et Montélimar complètent ce « top 5 des villes d’Auvergne-Rhône-Alpes où la population augmente le plus vite » (Julien Verchère, mesinfos.fr 8 janv. 2025) ; cette illustration me permet d’ajouter aussi cet article de Dolores Mazzola, france3-regions.francetvinfo.fr 26 juin 2019 (mis à jour près d’un an après, il rappelle la mobilisation des parents contre l’« amendement adopté le 15 mai par le Sénat (…) visant à interdire le port de signes religieux pour les accompagnants de sorties scolaires. Ainsi, début juin dernier, un collectif avait manifesté devant (…) l’école Brossolette [Valence]. En Isère, des parents s’étaient mobilisés devant l’école Auguste-Delaune, à Echirolles »)

Ajouts au 30 mai 2018, avec d’une part ces textes du président d’honneur de la LDH Michel Tubiana, le 20 avril et du chargé de mission à la LDE Charles Conte, le 28 ; d’autre part, le 17 mai, la revue de l’association lyonnaise de droit administratif rendait compte d’un jugement ambigu (TA Lyon, 19 oct. 2017, Mmes B. et C., n° 1505363 ; Rev.jurisp. ALYODA 2018, n° 2, concl. J. Arnould et note N. Charrol). Il l’a été aux conclusions timidement contraires du rapporteur public et se trouve frappé d’appel devant la CAA de Lyon (n° 17LY04351) ; était en cause l’école primaire Condorcet (et Marcel Pagnol) de Meyzieu : dans une lettre en date du 2 avril 2015, la rectrice d’académie interprétait l’étude du Conseil d’État de décembre 2013 dans le sens de l’interdiction (v. les pages préc., spéc. 519).

Ajout au 30 septembre 2018 : Dominique Schnapper, dans un entretien avec Joan Scott (propos recueillis par Anne Chemin, sous le titre « Laïcité, de la théorie à la pratique ») publié hier dans Le Monde Idées, réagit à son évocation de la circulaire Chatel : l’ancienne membre du Conseil constitutionnel ne prend aucune distance avec ce texte de… 2012 ; s’il « interdit aux femmes voilées d’accompagner les sorties scolaires, ce n’est pas parce que les signes religieux sont interdits dans la rue, mais parce que les accompagnatrices sont considérées comme des « auxiliaires » du service public ». La sociologue préside le « Conseil des sages de la laïcité » de l’Éducation nationale…

Ajout au 29 septembre 2019 (avec les dernières parenthèses le 9 octobre) : dans un arrêt du 23 juillet, la CAA de Lyon a rejeté l’appel susmentionné ; la situation litigieuse ne visant pas, à proprement parler, les sorties scolaires, la Cour s’autorise à ajouter une nouvelle implication au « principe de laïcité de l’enseignement public », remontée – par rapport au jugement précité – dans le considérant de principe (n° 17LY04351, cons. 3). Compte tenu de la position « personnelle » du ministre, il fait peu de doute que ses services défendront celle de la rectrice devant le Conseil d’État (sous réserve qu’il ait bien été saisi) : que des mères portant un foulard « participent à des activités qui se déroulent à l’intérieur des classes » (cons. 4), quel affreux « communautarisme » (Dominique Schnapper) !

Ajout au 7 janvier 2020 pour signaler ma note sous cet arrêt ; Rev.jurisp. ALYODA 2020, n° 1 : « Interdiction des mères voilées dans les locaux scolaires : quand la laïcité repose sur une croyance ».

Illustration reprise depuis l’un des épisodes des podcasts.lemonde.fr (publié le 21 novembre 2024)

Ajouts d’un lien actif (janv.-mai 2020) et des illustrations à l’occasion d’une… sortie de « Bruno Retailleau, l’idéologue du ministère de l’intérieur », début 2025 : « Pour Bruno Retailleau, les accompagnatrices de sorties scolaires “n’ont pas à être voilées” », lemonde.fr (avec AFP) 7 janv. 2025 : « Ce qui est en jeu, dit-il [dans une interview au Parisien mise en ligne lundi 6 au soir], ce sont les conquêtes de l’Occident, comme l’égalité hommes-femmes, la liberté de conscience ou notre laïcité française » ; outre le fait de les présenter comme telles, qu’il puisse oser se revendiquer de ces exemples témoigne surtout des conquêtes des droites françaises ces dernières décennies (en ce sens, Lauriane Clément, « L’offensive de Bruno Retailleau sur le port du voile, signe d’une “droitisation de la laïcité” », la-croix.com le 8, extrait ; v. déjà mon billet du 29 septembre 2024 – en ajoutant qu’elles n’ont pu avoir lieu que parce qu’une partie des mouvements de gauche les a accompagnées), le parcours de l’intéressé illustrant à lui-seul la porosité avec l’extrême-droite (écouter l’épisode ci-contre). Concernant les propos du ministre, v. encore Hanane Karimi (entretien avec, par Marie Turcan), « En France, le musulman est associé au danger », Mediapart 10 janv. 2025 : autrice du livre Les femmes musulmanes ne sont-elles pas des femmes ? (éd. Hors d’atteinte, 2023), la sociologue termine par cette remarque (notamment) : « On nous demande de répondre “en réaction”. Or, ce n’est pas comme ça qu’on fait connaissance et savoir »…

Ajout au 31 mars 2025 de son article intitulé « De l’application à l’extension de la nouvelle laïcité : le cas des mères accompagnatrices », Mouvements 2021/3, n° 107, pp. 104 à 112 (sa « contribution s’intéresse à la mise à l’agenda politique de cette interdiction, alors qu’elle est déjà effective dans certains établissements », en renvoyant en note 20 aux travaux d’Houda Asal, qui « a mené une enquête ethnographique d’une durée de deux ans auprès d’un collectif de mères accompagnatrices », Mamans Toutes Égales [MTE, 2017], ainsi qu’à la recherche sur ce collectif et celui dénommé Sorties Scolaires : Avec Nous ! [SSAN], par Alexandra Kassir et Jeffrey G. Reitz [2016, et qu’elle étudiera elle-même avec  Samir Hadj Belgacem, Sociétés contemporaines 2022/3, n° 127, pp. 95 à 119] ; en 2021, elle concluait sur la crainte « que des pressions pour interdire la visibilité religieuse des femmes musulmanes s’exercent à présent de façon accrue dans d’autres espaces, comme les compétitions sportives internationales », soit exactement ce qui s’est passé en 2023 et 2025).

Le droit à l’éducation des personnes en situation de handicap

Peu après la rentrée 2017, une importante ordonnance de référé a été rendue à propos des personnes en situation de handicap : TA Melun Ord., 28 sept. 2017, D. ; avec un résumé intitulé « Pas de place en ULIS : l’Académie de Créteil condamnée », cette ordonnance a été mise en ligne le lendemain par l’association à l’origine du recours, « Toupi » (« Tous Pour l’Inclusion ! » ; v. aussi J. Olagnol, « Seine-et-Marne : l’État condamné à trouver une classe à un collégien autiste », Le Parisien.fr 8-9 oct., ainsi que ce tweet de l’Unapei).

Le mode « Rechercher » – bouton droit de la souris, dans le pdf de ma thèse – permet, en entrant le numéro de requête (n° 1707537), de repérer les développements où elle est citée, soit ceux relatifs à la procédure de référé-liberté, rangée parmi les nouveaux vecteurs de l’affirmation du droit à l’éducation dans le contexte français (pp. 1106 et s., spéc. p. 1117), et ceux consacrés à la considération recherchée des besoins particuliers en matière éducative (pp. 1200 et s., spéc. p. 1203). Comme je l’explique dans la rubrique travaux de recherche, j’ai commencé mon parcours par cette question, en commentant l’arrêt Laruelle rendu par le Conseil d’État le 8 avril 2009 : l’approche renouvelée qui s’y trouve évoquée figure pp. 1043 et s. ; s’inscrivant dans le prolongement d’une étude dirigée par Diane Roman, l’argument relatif au « corset doctrinal » des « droits-créances » est développé pp. 1168 et s.

Il y a là une question d’actualité, comme en témoigne la chronique sous un arrêt rendu exactement un mois avant la soutenance de cette thèse (publiée dans la semaine qui la suivait : v. AJDA 2017, p. 2408). Page 2412, Sophie Roussel et Charline Nicolas emploient l’expression « droits-créances » dont il est proposé l’abandon dans la thèse (pp. 1174 et s.). Dans cet arrêt du 8 novembre 2017, le Conseil d’État aurait pu affirmer le droit à l’éducation des personnes mineures non accompagnées.